PPS Désolé de revenir à une matière congolo-congolaise !
En effet je viens de me relire et suis obligé de préciser qu’à propos de Kasa-Vubu PR vs Lumumba j’ai oublié de nuancer qu’à ma connaissance les textes (de la Loi fondamentale) disaient une chose d’ailleurs bien opportunément mais que les uns et les autres en ont interprété une autre… C’est ce qui en partie explique les turpitudes qui ont rapidement déstabilisé l’édifice institutionnel chancelant en place et conduit au mic-mac informe des premiers jours de notre souveraineté (Kasa-Vubu PR démettant Lumumba PM et celui-ci démettant quelques heures plus tard son PR, etc, etc…)…
PS ERRATA : « plus qu’il n’y est « à l’abri » » lire « plus qu’il n’y est pas « à l’abri » » ; « un monarque (à la berge ?) » lire : « un monarque (à la belge ?) »...
Si vous permettez, j’étais déjà là en juin 1960 (kiekiekieee j’ai hélas l’âge que j’ai !) mais pas assez âgé pour que j’y comprenne quelque chose à la désignation de Kasa-Vubu comme premier Président du Congo indépendant…
J’ai eu entre-temps le temps et un peu de science pour en savoir davantage, je crois, notamment qu’au delà des sympathies ponctuelles des colonisateurs pour un Kasa-Vubu Président plutôt que pour Lumumba, la Loi fondamentale qui régissait alors l’ancien Congo belge naissant à la souveraineté prévoyait un régime parlementaire où le Président de la République était davantage un monarque (à la berge ?) et le Premier Ministre le réel chef de l’Exécutif…
Logiquement le PR était alors élu au suffrage indirect par les parlementaires (sénateurs et députés) tandis que le PM l’était au suffrage direct. Lumumba , son parti et ses alliés remportèrent nationalement le scrutin et désigné aussi logiquement comme PM et Kasa-Vubu fut élu PR au Parlement…
Sans doute les « insurrections populaires » débouchent rarement sur des « révolutions » mais peut-être assez souvent qu’on ne le voit pour que l’humanité avance car après tout par quelles révoltes contre l’injustice, l’exploitation et la domination ne doit-elle pas être passée pour qu’aujourd’hui l’homme revendique presque partout des droits…
Trêve de dialectique : vous m’aurez compris, je ne m’accroche d’abord ici qu’au mince espoir que bien sûr comme au Burkina face aux tentatives de tripatouillage constitutionnel se lèvent en masse des Congolais pour réussir à les bloquer… Mais plus que ce mobile évident, qu’il se trouve ce « prétexte miraculeux imprévu et imprévisible » qui les amène à habiter profondément cette revendication au point de faire de cet événement un passage de témoin historique vers une ère démocratique où enfin nos dirigeants auront à cœur de rendre des comptes à leurs populations…
Ah oui pourquoi pas nous cette fois aussi : plus qu’il n’y est « à l’abri », le Congo y aurait droit d’autant qu’objectivement ce peuple en a tant enduré qu’il a bien des motifs d’embrasser éperdument le changement ! C’est le sens de ma remarque : plutôt que de battre en retraite avant d’avoir livré combat d’y croire ! Méthode Coué ? Pas que…
Tout ce que vous nous dites là est frappé au coin du bon sens : le rapport à la violence au Congo, un pays miné par une violence récurrente entretenue et quasi irréductible, les enjeux géopolitiques d’un territoire aux ressources minières immenses convoitées par les puissants, y sont plus pesants qu’au Burkina sans oublier le destin aléatoire de toute révolution…
Néanmoins si tout ce juste constat fait certes du Congo notre pays un cas différent, en fait-il tant que ça implacablement un « cas si à part » ? Dans tous les cas nos compatriotes Congolais gardent mille et une raisons valables de se révolter dont les essentielles sont qu’ils vivent une exploitation à combattre et que malgré tout rien n’interdit que leur contestation leur rapporte quelque gain demain...
Et désolé, je vous vois théoriser quelque part une impuissance organisée pour ces pauvres Congolais sur une issue pour autant pas si planifiable : la ressource académique de la science sur les soulèvements populaires ne serait-elle pas après tout qu’on les comprend mieux a posteriori qu’à leur départ ?
Autrement dit, toute révolte, avant de devenir ou non une révolution gagnante, restera quelque part toujours imprévisible comme d’ailleurs inplanifiable ; c’est là où chaque situation constitue un cas à part, alors ne vaudrait-il pas mieux conclure que de quelques éléments objectifs nous disposerions pour évaluer son possible destin, nous resterons toujours au niveau des hypothèses avant son avènement définitif même en face d’un Congo si mal parti ?
Ainsi, à mon avis si en tant qu’analyste vous avez raison de nous donner votre éclairage sur une comparaison entre la « révolution réussie (?) » du peuple burkinabé et les scénarii possibles au Congo, ne devriez-vous pas aussi reconnaître que ceux-ci souffrent de cette imprévisibilité consubstantielle à chaque révolte populaire à son départ ?
Maintenant qu’en est-il de quelques éléments précis dont vous alimentez votre expertise ? - Les Américains ont toujours compté sur les choix politiques importants au Congo vus les enjeux géostratégiques qui les attirent mais ici n’ont-ils pas aujourd’hui plus des raisons de favoriser un changement et pourraient donc tout autant canaliser en leur sens une révolte populaire ?
Quel est, quel sera à terme l’intérêt de Kobler et de sa Monusco que vous qualifiez de véritables maîtres du pays ?
Et dans ce cas ne vaut-il pas mieux pour le peuple Congolais de repartir sur ce nouveau défi que de ses satisfaire de la situation bloquée actuelle ?
Bon, il y a beaucoup à en penser et en dire mais limitons-nous pour le moment aux simples interrogations ?
- Qui vous dit que l’exemple du Burkina laissera toujours dans la même position pouvoir et forces de l’ordre au Congo face à un soulèvement populaire massif ?
Un pouvoir autocratique et répressif ne dispose-t-il pas en lui même les germes infectés d’être balayé en quelques jours quelles qu’aient été sa puissance et ses capacités d’arbitraire la veille ?
- Et si le véritable blocage du Congo se situait aujourd’hui au niveau de l’impuissance de ses différentes forces politiques et sociales à oser sortir des peurs où les différentes pressions hiérarchiques, régionales et internationales les ont enfermés et qu’ils peuvent faire sauter en quelques heures comme au Burkina, quelques jours à la faveur d’un soulèvement possible allumé par un infime prétexte comme hier en Tunisie ?
Et n’oubliez pas ce qui s’est passé au Sénégal avec la défaite tranquille et légale de Wade malgré ses « magouilles » , le réel début d’un possible automne africain avant le Burkina ?
La suite comme je vous disais nous appartiendrait peu ou prou mais il n’est pas, à ce stade, interdit qu’il puisse être autant prometteur ; je préfère me bercer de cet espoir et ne pas m’interdire de croire une révolution réussie possible en place de voir tout en noir ! C’est possible !!!