L’Anglais dans le Français
Beaucoup de Français se sont émus de modifications apportées à l’orthographe. Des mots qu’on écrit tous les jours, comme oignon et nénuphar, pourraient s’écrire ognon et nénufar.
Par contre (je tiens à « par contre » que je préfère beaucoup à « en revanche »), de nombreux mots anglais sont employés à la place exacte de mots français.
![](http://www.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L300xH201/videgrenier-a7686.jpg)
Il me semble que ces mots qui recouvrent exactement le sens de mots français abiment réellement la langue française, alors que l’accent circonflexe de foret non. Quant à ceux qui pensent que si l’on écrit « je me promène dans la foret » on pourrait croire que l’on se promène dans la mèche d’une perceuse, je leur demande d’être sérieux ; s’ils trouvent une phrase avec le mot foret où l’ambiguïté existe, ils ne font que donner la polysémie ordinaire de la langue et même de tout langage ; qu’ils réfléchissent à cette phrase, par exemple : Pierre monte une maquette au grenier, qui peut signifier deux choses : Pierre est au grenier et il construit une maquette, ou Pierre a une maquette dans les mains et la porte au grenier, au départ d’un étage inférieur. On peut trouver cette phrase peu naturelle, peu susceptible d’être dite ou écrite, mais ceux qui ont voulu justifier l’impérieuse nécessité de maintenir l’accent circonflexe n’ont pas hésité à se servir de la phrase : je vais me faire un petit jeûne, versus je vais me faire un petit jeune, nonobstant la différence de prononciation, d’une part, et l'incorrection sémantique de l’expression je vais me faire.
Je propose que l’on écrive : mônter quand il s’agit de bâtir (mônter, démonter, démonter n’a pas besoin d’accent puisque ce mot ne risque pas de confusion et malgré le décalage mônter/démonter) et monter quand il s’agit d’aller plus haut (monter/descendre).
Mince, j’ai failli oublier : quelquefois la mer mônte et elle est démontée. Quelle écriture pour démonter dans ce sens ? Je propose d’écrire mônter/démônter, en respectant la symétrie des mots et démonter pour la mer démontée.
Crowndfunding : chose nouvelle, mot nouveau, quelquefois écrit dans les deux langues : financement participatif en Français.
Bashing : dénigrement, pas d’apport d’un quelconque sens par l’emploi du mot Anglais, les deux mots se recouvrent parfaitement. J’ai une amie qui emploie le verbe basher. Il me bashe, il bashe tout le monde !…
Je lis : Une technique « corporate » de communication. Je ne sais pas ce que c’est. C’est la presse qui fait entrer ce mot anglais dans ma vie et dans une phrase française. Renseignement pris, il s’agit de la communication institutionnelle, dans une entreprise par exemple ! Aucun intérêt. Pas de plaintes !
Follower : chose nouvelle, (liée à la Toile) : suiveur irait très bien (adepte, attentif ?).
Sur France Culture (Esprit public du 14 février 2016) : Jean-Louis Bourlange parle d’un Hollande touch, puis d’une procédure d’impeachment. Touch signifie touche. Bravo ! et impeachment empêchement, destitution.
Sur mon Facebook arrive : Je raconte ma life.
Vous devez être loggé pour poster des commentaires (inscrit irait très bien). Ce mot anglais est conjugué en Français dans le système de premier groupe, le plus simple.
Tout le site Ouibus de la SNCF est en anglais !
Je suis allé aux rencontres internationales new cinema & contemporary art au Théâtre de la Gaité (cinéma & art contemporain ne doit pas être possible), à Paris 3ème, où les débats étaient en Anglais. J’ai demandé une traduction, je me suis fait moquer : « il faut quand même que l’on soit capable de comprendre l’Anglais ».
Jack Lang dit une chose en Français puis la même chose en Anglais : il fait suivre « typiquement Français » de « typical french » puis de « french touch » de nouveau (France-Inter le 15 février 2016)…
Qu’on me comprenne bien, je fais apparaitre le fait qu’une réformette orthographique suscite une réaction engouematique énorme, tandis que personne ne semble voir l’abandon de la langue française à la langue impérialiste, là où la langue française est tout-à-fait performante. Nombre de Français s’y jettent à corps perdu, anticipent cette évolution et l’apportent à ceux qui n’en savaient rien. Je me souviens de quelqu’un, à la radio, qui avait le même regret que moi, déplorant le standing qu’avait l’Anglais, à ceci près que standing est un mot anglais et que prestige, aura seraient largement équivalents. J’ai regretté dans mon article qu’une pièce contemporaine jouée à la Comédie Française ait un titre en Anglais non nécessaire (dancefloor memories) : http://www.agoravox.fr/culture-loisirs/culture/article/ah-que-vivre-longtemps-est-joli-167355
J’ai créé intentionnellement engouematique sur engouement. Parce qu’une langue n’est pas qu’un vocabulaire, c’est une syntaxe et c’est un grand nombre de processus créateurs.
Dans Hollande touch, nous n’avons pas seulement des mots anglais pour dire des choses que nous savons dire en Français, nous avons la syntaxe anglaise qui place l’adjectif (l’ajout qualitatif si vous préférez) avant le nom.
Autre exemple, battle : bataille, conflit, concurrence mais joueur pas sérieux, pas mortel. Effectivement, apparemment, nous n’avons pas de mot pour cette idée sportive de la concurrence. Bataille évoque les rencontres militaires violentes (Waterloo, Alésia…). Nous avons aussi le jeu de cartes de la bataille… bataille sans danger… Nous aurions pu prendre ce sens ludique de la bataille, qui existe déjà et le développer ou inventer un mot selon les règles du Français : course irait très bien.
Nous avons créé les mots télévision, ordinateur… nous devrions continuer.
Les mots étrangers devenant Français devraient s’écrire dans l’orthographe française, puisqu’ils deviennent des mots français. On écrirait foutebaule, Quatar et niquab, rolleur (on peut discuter des deux « l »), un guik, tchatte (on a le mot tchatche depuis 1959, issu de l’espagnol)… etc.
Cela faciliterait la tâche de l’apprentissage. Des lettres se mettent à prendre des sons nouveaux par exemple le « e » ou « ee » (« ee » n’est pas français) se dit parfois « i » depuis quelques années e-learning, qu’on devrait dire formation en ligne, devrait s’écrire en attendant que l’on parle Français en France, ileurning…
Français, encore un effort pour aimer, soigner, nourrir entretenir, bichonner, défendre votre langue, sans vouloir la tuer par des blocages insensés d’un côté, et des faiblesses mortelles devant des intrus plutôt faciles à chasser d’un autre côté.
Documents joints à cet article
![L'Anglais dans le Français](http://www.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L400xH300/e-learning-49c2b.png)
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