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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > Les jeux font-ils de l’audimat ?

Les jeux font-ils de l’audimat ?

Faute d’outils d’analyse efficaces, la sociologie des joueurs demeure encore très nébuleuse.

Electronic Arts, Take Two et consorts brandiront-ils bientôt fièrement, comme autant d’arguments d’autorité ou de vente, la part d’audience de leurs jeux ? Les éditeurs de jeux ne sont pas - encore - des patrons de chaînes de télévision ; mais leurs préoccupations pourraient aisément être partagées. L’institut de statistiques américain Nielsen vient en effet d’annoncer la création d’une mesure d’audience vidéoludique. Déjà bien établi dans l’analyse des télécommunications et de de l’audiovisuel, l’institut de sondage se fondera sur les 10 000 foyers qui participent déjà à l’étude audiovisuelle.

Le mode d’analyse est déterminé par la détection passive, c’est-à-dire par une appréhension totalement mécanique. Dès qu’un joueur branche sa console de jeu, un signal prévient le central de statistiques. La finesse de l’analyse est telle que les statisticiens sauront quel jeu est utilisé. De fait, il s’agit d’un mode de détection presque parfait, et éminemment plus efficace sur console que sur la télévision traditionnelle. « La télévision est devenue une radio visuelle, un élément d’accompagnement », explique Josiane Jouët, sociologue des médias. Ainsi, l’audience audiovisuelle n’est-elle qu’un simulacre, puisque le temps d’exposition ne coïncide pas avec le temps de visionnage. Pour un jeu, celui qui joue est bel et bien actif, devant son poste de télévision...

Une telle étude est d’autant plus pertinente qu’aucune n’avait pour l’heure recensé la population exacte des joueurs. Aux Etats-Unis, un sondage réalisé par Park Associates, auprès de 2000 joueurs, a permis de dresser une typologie, à mille lieues des idées reçues. Mais il ne s’agissait là que de joueurs en ligne... L’institut français Médiamétrie a également réalisé, il y a peu, une étude sur les pratiques vidéoludiques françaises. Mais le panel n’était sollicité que par voie déclarative, sur foi d’affirmations.

Quelles fins poursuivent nos sociologues américains du multimédia ? Une démarche purement sociologique s’attacherait à analyser comment telle population joue, sans nécessairement examiner ce à quoi elle joue. Cette seconde problématique relève plutôt du marketing. Or, c’est précisément cette option que défend sans ambiguïté Nielsen. « La valeur d’un média de loisir est directement proportionnelle à la qualité avec laquelle elle est mesurée », explique Jeff Hermann, vice président de la division interactive de Nielsen. « Un modèle de mesures fiables et précises pour le jeu vidéo drainera les investissements dans ce média. »

L’institut entend en effet jouir de sa position de monopole pour consacrer l’économie de plate-forme naissante du jeu vidéo. Pour que ses études soient bénéficiaires, Nielsen doit en effet parier sur l’arrivée massive des annonceurs publicitaires sur la plate-forme vidéoludique. Microsoft et Electronic Arts ont déjà investi dans la publicité dynamique, estimant que le marché était porteur. D’après les estimations d’experts, le marché de la publicité en jeu devrait passer de un à trois millions de dollars d’ici à 2010.

Les joueurs, harassés par la publicité sauvage, rejetteront-ils le contenu et le contenant ? Trouveront-ils au contraire leur compte, avec, peut-être, des jeux d’un prix moindre ? S’il est encore trop tôt pour répondre, on peut néanmoins craindre que le jeu, devenu plate-forme médiatique, n’oublie qu’il possède aussi son contenu propre.


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4 réactions à cet article    


  • Anto (---.---.178.10) 7 novembre 2006 13:57

    J’ai un peu de mal à comprendre la démarche de l’audimat videoludique.

    L’industrie du jeux vidéo est « pire » que celle du cinéma dans la mesure où l’avènement d’un succès surprise y est encore plus rare. Les jeux qui se vendent bien sont pour l’immense majorité des blockbusters dont l’édition est précédée de campagne marketing évidemment très poussées. C’est un domaine bien moins aléatoire que la télévision, non ? Comment dans ces conditions, les editeurs de jeux vidéos pourraient-ils ignorer le profil de leur clients ?

    Les jeux en ligne étant souvent des jeux de roles ou des doomlike (où la liberté d’action est le principal argument) , la diversité des profils ne m’étonne pas. Par contre, pour les jeux sur console, j’aurais tendance à penser que la clientèle est plus formatée et que c’est pour cette raison que la diversité des jeux est moindre que sur une plate forme PC.

    Bref,je le trouve intéressant cet article, mais je pense que mesurer l’audience sur une console n’apportera pas bcp d’informations complémentaires.


    • Floruf (---.---.123.101) 7 novembre 2006 16:32

      au contraire lorsque toutes les consoles de salon seront reliées au net ,il sera très facile d’inserer des pubs dynamiquement dans les jeux ,que ce soit lors de chargements ou plus insidieusement sur les panneaux d’affichage d’une ville virtuelle ! Ainsi les annonceurs pourront organiser de véritables campagnes de pubs comme elles se pratiquent aujourd’hui dans nos rues. Et de plus,un annonceur pourra mieux cibler son public contrairement à aujourd’hui où par exemple une pub pour « mountain diew » dans un jeux de jet-ski n’a strictement aucun interêt en France en revanche « Sprite », nous parle beaucoup mieux.


    • Anto (---.---.178.10) 8 novembre 2006 10:13

      Okay. C’est bien ce que je pensais, j’avais pas compris l’aspect dynamique et surtout j’avais pas intégré l’aspect multinational du jeu video. Je pense cependant toujours que ce type d’audimat revient à utiliser un marteau pour écraser une fourmi.

      Mountain dew je connaissais pas. Et j’ai vu sur le net que c’était la boisson de Steven Seagal ! C’est forcément la meilleur soda de l’univers ! et sa présence se justifie sur n’importe quel support ! smiley


    • Stéfan Stéfan 8 novembre 2006 10:19

      Il y a bon nombre d’exemples de jeux vidéo qui se vendent bien et qui ne sont pas des blockbusters accompagnés d’un matraquage publicitaire. En voilà un : le programme d’entraînement cérébral du professeur Kawashima sur Nintendo DS. Un jeu cheap, moche et a priori peu attractif s’il en est. Et pourtant, un des plus gros succès de ces derniers mois, partout dans le monde.

      Concernant la diversité des jeux sur console : effectivement, ces dernières années on assiste à une concentration autour des genres action/FPS/course/sport. Mais ceci devrait évoluer car :
      - le multijoueur en ligne devient un standard, les 3 grands constructeurs (Microsoft, Sony et Nintendo) s’y mettent (ou y sont déjà depuis un moment dans le cas de Microsoft). Ceci permet d’imaginer des genres de jeux qui étaient surtout présents sur PC grâce justement au multijoueur (RTS, MMO...)
      - un des trois acteurs majeurs, en l’occurrence Nintendo, concentre aujourd’hui ses efforts non pas sur le hardcore gamer fan de FPS et autres jeux d’actions, mais sur le monsieur et madame tout le monde. Autrement dit, Nintendo, avec la DS et la Wii qui arrive très bientôt, va élargir le public des joueurs et amener une diversité de profils de joueurs jusqu’alors inégalée. Il est probable que les autres suivront (d’ailleurs certains s’y sont déjà essayés, cf. l’Eye Toy de Sony qui était clairement conçu dans cette logique), car il y a beaucoup plus de marge d’évolution possible en termes de pénétration du marché sur les segments de la population qui ne sont pas déjà saturés

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