La coupe de l’iniquité
Le grand cirque est parti !
Les dés du ballon rond sont pipés
C'est parti pour un mois de folie et d'enthousiasme délirant, de coups de klaxon dans les rues quand les téléspectateurs, imbibés de bière, gavés de pizzas, célèbreront la victoire de leurs favoris. Plus stupide que cette euphorie béate, je ne sais pas si c'est possible ! Il faut admettre qu'il y a là adéquation parfaite entre les adorateurs et les pauvres bougres qui leur servent de héros : l'absence de neurones leur tient lieu de point commun !
Je ne peux leur en vouloir, ils sont le fruit d'un matraquage sans commune mesure, d'une manipulation de masse qui va atteindre, cette fois, des sommets jamais égalés. Des radios et des télévisions vont consacrer leurs antennes vingt-quatre heures sur vingt-quatre à commenter, disséquer, analyser, comparer, évaluer, pronostiquer, déblatérer sur les soubresauts de millionnaires en culottes courtes.
Le rêve des empereurs décadents de Rome enfin réalisé par une société qui se croit moderne. La belle affaire que voilà ! L'opium du peuple déversé à haute dose au risque de l'overdose un jour prochain. Car il n'est pas possible de ne pas provoquer lassitude et ras-le-bol quand la mesure est dépassée de la sorte pour le seul profit d'annonceurs qui se moquent du sport comme de leur dernière bonne action !
Souhaitant apporter ma pierre à l'édifice bringuebalant de la farce sportive, je viens éclairer les béotiens de la chose de quelques données essentielles qui ne leur seront sans doute pas transmises par les journalistes sportifs, ces nouveaux grands prêtres de la grande religion planétaire.
La coupe du Monde de football, sport prétendument universel, mettra aux prises 32 nations venant des cinq continents. Sous cette forme, l'illusion est parfaite. En réalité l'examen de la répartition des fauteuils d'orchestre relève, hélas, de la cacophonie. L'Europe se taille la part du lion avec 13 équipes conviées, suivie de peu par le continent Amérique avec 10 nations. Puis arrivent les faire-valoir de la compétition : l'Afrique et ses 5 équipes, l'Asie et ses 3 représentants et l'Océanie perdue avec un seul pays invité au grand festin.
Vous connaissez déjà ces nombres qu'il faut replacer dans différents contextes. Ainsi, les équipes européennes ou américaines disposent de 28 % de chance d'être qualifiées contre 9 % pour une nation africaine, 7% pour un représentant de l'Océanie et 6 % pour les Asiatiques, quantité négligeable du football.
Pire encore, ces pourcentages ne rendent absolument pas compte de la répartition de la population sur la planète. Oublions l'Océanie qui ne représente que moins de 0,5 % de la population mondiale. L'Europe, si présente lors de cette immense compétition loyale et équitable, constitue seulement 8,47 % de la population, l'Amérique 13, 41 %., L'Afrique avec ses 15, 35 % de la population peut s'estimer légitiment mal traitée par les organisateurs puisque 4 fois moins présente que les deux autres géants. Mais que dire de l'Asie et ses 62,24% de la population mondiale qui devront se contenter de trois misérables strapontins ? C'est une insulte à ce continent..
Les grands analystes de ce sport de pied et de si peu de tête, viendront expliquer qu'il est normal que les meilleures nations soient présentes à ce rendez-vous. Ils n'ont pas tort, puisque le spectacle est juste destiné à endormir les foules qui se moquent bien de la morale et de l'équité. Curieusement ces foules, si peu nombreuses à l'échelle de la planète, sont celles des nantis, des gros revenus. Voilà donc le but recherché : il n'est pas sportif mais financier.
Si vous prenez la peine de regarder le PIB des pays en compétition, vous pouvez établir un classement plaçant en tête les USA, pays qui se moque du football comme du reste des autres nations, puis le Japon en deuxième position-ce qui ferait désordre- avant que d'établir un groupe de favoris : Brésil-Espagne-Allemagne-Italie – France – Angleterre. Ce jeu, comme vous pouvez le constater, est d'abord une question de pognon.
Vous pouvez encore établir une étude sur la population et vous comprendrez qu'en-dessous de quarante millions d'habitants, un pays n'a pratiquement aucune chance désormais de se retrouver dans le dernier carré. J'espère néanmoins me tromper et voir nos amis Belges venir faire mentir cette donnée intangible. C'est donc le revenu par habitant qui peut vous permettre d'établir le plus précisément les classements probables de cette compétition si égalitaire.
Voilà l'autre versant de ce qui va occuper vos écrans. Une vaste escroquerie où tout, ou presque, se joue sur d'autres terrains pour conduire à la victoire finale. La géographie, l'économie, la démographie sont des facteurs déterminants pour choisir le futur vainqueur, modulés bien sûr par quelques données historiques qui vous feront éliminer le Japon et les USA au profit de l'Argentine et du Nigéria, ce futur grand.
Extasiez-vous si le cœur vous en dit ; la grande foire à fric et à paillettes ne sera que le presque exact reflet de l'iniquité d'un Monde où les chances ne sont pas équitablement réparties, où l'espérance de vie et l'espérance de gagner la Coupe du Monde ont parfois des liens étroits. C'est encore un rendez-vous qui met de côté plus des trois-quarts de la population mondiale.
Ce n'est malheureusement pas la particularité du seul football ! Bien d'autres domaines fonctionnent sur un modèle qui n'est pas encore sorti du colonialisme et de l'exploitation des richesses de la planète par quelques nations. Mais de grâce, évitez d'appeler Coupe du Monde une gentille réunion d'un G 8 élargi à la CEE et au Concacaf auquel il faut ajouter le Brésil et l'Argentine !
Planétairement vôtre.
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