Agoravoeux : Restez debout, 2013 c’est maintenant et le naufrage aussi !
Tout économiste libéral qui se respecte se doit de reconnaître que le marché ne fonctionne correctement, c’est-à-dire sur le mode gagnant gagnant, que si les acteurs économiques sont rationnels et de surcroît, bien informés. Ces conditions ne sont pas toujours réunies si bien que l’irrationnel s’insère dans les rouages de l’économie, ce qui a fait dire à Keynes que les esprits animaux finissent par gouverner le marché. Les faits ne lui ont pas donné tort. Souvenons-nous de ces entreprises de nouvelles technologies sur lesquels les actionnaires ont misé des fortunes pour des entreprises dont le rendement était très hypothétique. Voilà, c’était juste une petite intro pour évoquer un autre versant qui souvent est associé au marché et qui est la démocratie.
La mécanique démocratique fonctionne avec les mêmes principes que le marché. Le mode gagnant gagnant se traduit en fait par une bonne gouvernance capable d’augmenter le bien public. C’est ainsi que les choses se présentent dans l’idéal. Sauf qu’il y a deux conditions nécessaires. D’abord, la connaissance du bien public et des moyens permettant d’être mobilisés pour réaliser cette fin éthique. Ensuite une volonté qu’on dira majoritaire pour ne pas dire générale et qui se traduit par le souci de l’individu citoyen envers des intérêts qui le dépassent et ne se réduisent pas à son petit univers quotidien composés avec quelques riverains. Ces choses étant établies, on pourra toujours convoquer Habermas et convenir que le débat public permet de servir les fins éthiques démocratiques dans la mesure ou ce débat permet d’informer les citoyens des enjeux, moyens et choix politiques, à l’instar de l’acteur économique qui connaît les perspectives du marché et les prix des biens et services. Dans le principe, la démocratie permet d’accroître le bien-être dans la société mais dans la réalité, les choses se présentent autrement et d’ailleurs, mon voisin de bistrot me susurre qu’il y a la crise. Et d’ailleurs tous les Français ne pensent qu’à la crise et puis au bout du compte, rebelote, les esprits animaux sont de retour et la politique finit par fonctionner comme le marché, avec des comportements irrationnels. Et quelque chose me dit que les médias ne sont pas étrangers à cette mouise intellectuelle où l’on finit par se demander pourquoi les gens ressemblent à des ignorants.
En vérité, ce sont les médias qui racontent des bêtises. Comme ce sondage où Sarkozy apparaît comme plus efficace que Hollande. Comme si la politique devait se traduire par des effets immédiats, alors qu’on sait bien que les décisions nécessitent cinq voire dix ans pour produire leurs effets. Une chose paraît acquise, c’est que toute cette mobilisation de l’Etat depuis 2008 avec cette frénésie activiste, ces fonds publics déployés sur fond de rapport Attali n’ont pas donné de résultats transcendants. En 2012, croissance quasi nulle et plus de 10 points d’augmentation du chômage. Après, on pourra toujours se dire que sans les actions de l’Etat, on aurait eu une récession et 15 points au lieu de 10. Finalement, ça rame, un peu moins qu’en Espagne ou en Italie mais bien plus qu’en Allemagne. Et l’Europe stagne. Alors ce rapport Gallois concocté avec les règles de l’art énarchique ne donnera pas plus de résultats que le rapport Attali et les mesures Sarkozy. On l’aura compris, 2013 ne va pas être une année terrible. Il y a un problème structurel de l’économie que les politiques ne veulent pas prendre en compte et que les citoyens ignorent. Incompétence et ignorance sont les deux obstacles de la France, sans compter les malveillances diverses. Il faut changer de société mais pour l’instant les gens sont ignorants en masse et les classes aisées sont de plus en plus cupides alors que les intellectuels sont inaptes à monter les voies. Bref, les conditions d’une année 2013 pourrie sont réunies.
Loin de moi l’idée d’accabler Hollande pour qui j’ai de l’estime. La lucidité impose de reconnaître qu’un président ne peut rien faire quand l’ensemble de la société n’a pas les qualités requises pour avancer dans la bonne voie, ou la trouver. On sait pourquoi ça ne peut pas s’améliorer et on sait aussi que cette situation profite peu ou prou à un grand nombre. C’est moche mais c’est ainsi. L’homme moderne est « souvent » moralement moche, à l’image de l’art dominant contemporain qui lui aussi est moche. Et bien entendu, les émissions de télé sont moches de variétoches tout comme l’indécence de ces images de boustifaille à l’approche des fêtes. Pour les uns, un dîner presque parfait dans un décor cossu, pour les autres un dîner presque immangeable dans un taudis tordu et ma foi tout est dit sauf qu’il existe encore des solidarités et qu’il faut s’en féliciter.
Bref, le mot d’ordre pour 2013 sera ; restez debout, soyez vertueux, curieux, sages et instruisez-vous ! Inutile de perdre son temps dans de vaines agitations orchestrées par des médias cherchant à exister en traquant les couacs et en commentant des chiffres à la pelle. La seule chose à espérer pour 2013 c’est l’ouverture des consciences mais il ne faut pas rêver, les gens ne vont pas cesser d’écouter les litanies sur la croissance et de croire en cette science qui doit trouver les solutions pour toutes choses. La technologie semble entraîner l’humanité vers un naufrage. A moins qu’elle ne soit qu’un dévoilement (comme aurait dit Heidegger) montrant la face parfois sombre, parfois médiocre et bête, que l’homme peut cultiver. 2013 sera une année difficile pour l’économie mais pour qu’elle ne soit pas une année perdue, c’est dans le domaine de la réflexion, de l’art, de la pensée, de la discussion intelligente, qu’il faut œuvrer. Les agitations économiques et gouvernementales n’y feront rien. Le système étant structurellement vicié, il ne peut pas être redressé et ne peut que se diriger vers une lente et durable décomposition sociale. Il faut inventer une nouvelle société.
Alors chers amis voxiens, recevez mes agoravoeux pour une année intelligente et belle, surtout à l’intérieur de l’âme. En acquérant de la conscience, une dose de raison et du bon sens, on pourrait finir par faire fonctionner cette foutue démocratie la tête dans les étoiles et les actions dans la bonne direction.
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