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Accueil du site > Tribune Libre > Auschwitz et le tourisme de la mémoire

Auschwitz et le tourisme de la mémoire

Lors de mon troisième passage en Pologne, je me suis décidé, cette fois, en mai 2007, à m’arrêter au musée de l’ancien camp de concentration d’Auschwitz. Petit récit des impressions d’une visite non sans histoires.

Les précédentes années, une certaine retenue m’avait dissuadé de m’approcher de ce site, comme si tous les documents historiques disponibles par ailleurs suffisaient à se faire une idée assez précise de ce qui s’était passé là-bas pour se dispenser d’aller troubler ce lieu de mémoire. Et puis cette année, j’ai franchi le pas : je me suis dit que je ne pouvais pas nier qu’Auschwitz était dorénavant un musée et qu’au-delà de mes états d’âme, un visiteur de plus ou de moins ne changerait pas grand-chose à son destin.

En arrivant dans la petite ville plutôt déprimée d’Oswiecim, près de l’austère Katowice, on peut remarquer la présence d’un hôtel, puis de parcs de stationnement payants, autant de signes qu’un centre d’intérêt se trouve dans les parages un peu mornes. Un des parkings comporte même un mini-centre commercial avec cafétéria, souvenirs, accès internet... L’autre donne directement sur l’entrée du musée et témoigne d’une agitation soutenue avec bus scolaires et touristes, dont des groupes de Japonais, comme dans tous les endroits « à ne pas manquer ». Dans le hall d’entrée, on découvre un magasin qui propose des livres dans toutes les langues, des DVD, des cartes postales, des dépliants, des boissons...

Une petite photo sous la grille ?

Après le passage devant la caisse, il suffit de quelques pas pour tomber nez à nez avec la fameuse grille d’entrée surplombée de l’inscription en fer forgé « ARBEIT MACHT FREI ». Quelques personnes attendent leur tour pour aller se faire photographier plus ou moins discrètement sous l’un des plus fameux slogan de l’histoire. J’avoue que c’est un peu le genre de scène auquel je craignais d’assister. Mais quel avenir ces visiteurs réservent-ils à la photo de leur trombine devant la porte d’un ancien et terrible camp de concentration ? Trouvera t-elle sa place sur une étagère dédiée à l’Europe, entre la tour Eiffel, le Colisée et Big Ben ?

Une autre devant le mur ?

Les chemins séparants les blocs se parcourent dans une atmosphère plutôt calme, mais, là encore, j’ai du mal à saisir l’intérêt d’aller se faire « immortaliser » devant le mur des exécutions, par exemple. Peut-être les histoires individuelles de ces visiteurs recèlent-t-elles d’explications particulières qui m’échappent. Toutefois, quand je vois une brochette d’ados faire systématiquement la queue pour une telle prise de vue, cela me laisse perplexe et j’ai peine à croire qu’ils ont tous une raison familiale ou personnelle très précise liée à cet endroit.

Un fil d’équilibriste tendu entre tolérance et respect

La visite des blocs est poignante et très bien documentée. Dans le bloc consacré à la Hollande, je suis témoin d’une scène sujette à controverse. Un bébé d’un 1 et demi environ arpente les lieux avec sa maman, très absorbée par les documents exposés. Le garçonnet s’agite un petit peu et lance quelques cris que sa mère a du mal à réprimer. Une autre visiteuse, d’expression polonaise, s’agace et demande extrêmement sèchement à la maman de clouer le bec du marmot qui ne se rend évidemment pas compte de l’atmosphère de recueillement qui est censée régner. Prise au dépourvu par de telles remarques, la femme apparemment russophone prend son bébé sous le bras et met immédiatement fin à sa visite, non sans bredouiller en russe quelque mots à propos de l’armée rouge et la libération du camp à la fin de la guerre.

Que penser de ce petit accrochage ? La femme russe a-t-elle indécemment outrepassé les limites du respect en autorisant les cris de joie d’un bébé dans le musée d’Auschwitz ? La femme polonaise a-t-elle fait preuve d’irascibilité en ne supportant pas qu’un petit enfant puisse déambuler plutôt joyeusement au sein d’un bloc désormais ouvert au public ? On peut imaginer mille scénarii et histoires personnelles qui aboutissent à des sensibilités différentes face à la visite et l’appréhension de ce lieu.

Pourquoi ne pas dire que c’est une revanche de la vie de pouvoir faire résonner les cris innocents et libres d’un enfant sur ce théâtre qui a connu assez de souffrances ? D’un autre côté, je peux comprendre le silence quasi religieux et le respect total exigés par certains. Et puis, au centre si je puis m’exprimer ainsi, il y a le gros de la troupe des touristes qui dégainent leur appareil photo à tout va, malgré les interdictions en certains lieux, avant même d’avoir pris la peine de regarder et de réfléchir calmement à ce qu’ils avaient devant les yeux, comme devant ces deux tonnes de cheveux de femmes déportées, conservés dans une salle et qui semblent absorbés par la conscience des « photographes » amateurs aussi rapidement que s’ils avaient affaire à une quelconque statue sur une place publique. A moins que ce ne soit un blindage pour passer devant « l’invisible » au sens « d’insoutenable à voir »...

Un tourisme qui ne doit profiter qu’à la conscience

En conclusion et bien qu’il demeure fondamental de préserver la liberté d’exprimer toutes ses opinions et de les argumenter pour leur permettre d’être prises au sérieux ou non, je ne vois pas, par exemple, comment un négationniste pourrait défendre son propos pendant la visite de ce camp. Comment expliquerait-il, par exemple, les traces de zyklon B détectées dans les cheveux que je viens de mentionner ? Rien que cela justifie à mon sens l’ouverture de cet ancien camp de concentration au public. Le fait que la manière d’aborder la visite ne soit pas rigide (liberté d’amener un enfant « inconscient », liberté de prendre des photos dans la plupart des lieux, peu ou pas de restrictions vestimentaires...) laisse chacun libre avec sa sensibilité, ce qui constitue un grand intérêt.

Reste que le musée évolue et qu’entre un recueillement clos, qui s’évanouirait avec les générations, et une ouverture touristique dans l’esprit d’un parc d’attraction, il reste à trouver une voie de développement qui assurera une mémoire en même temps qu’un large accès au musée sans se perdre dans des dérives cyniques ou mercantiles. L’équilibre est éminemment ardu à trouver au vu des valeurs qui régulent notre époque. Pourvu que la grande usine qui fabrique, quelque part en Chine et pour le monde entier, tous les porte-clés et autres cuillères pour touristes à l’effigie des villes ou des grands monuments internationaux ne se mêle jamais de ce tourisme-là...

Nota : le musée possède un site internet (www.auschwitz.org.pl) avec notamment une boutique en ligne vendant, par exemple, livres et posters...


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20 réactions à cet article    


  • LE CHAT LE CHAT 7 septembre 2007 12:02

    Oui c’est sûr qu’il faut laisser ces endroits visitables au public , mais il faut se méfier autant de l’histoire officielle que des thèses révisionnistes , des pages peu glorieuses sont souvent zappées par ceux qui font visiter ces sites .


    • ARMINIUS ARMINIUS 7 septembre 2007 14:21

      Que dire de plus ? la mémoire des victimes s’accommode t-elle plus d’un joyeux babillage enfantin ou de la mine circonstanciée d’une adulte expiant peut-être sa lointaine responsabilité ( ou celle de ses parents ?) à Oswiecim, comme dans l’ensemble des territoires proches des camps ( Allemagne, Autriche, Tchécoslovaquie, Pologne... France, les voisins ne voulaient ni voir ni parler ni entendre. Chasser les marchands du temple.. ? mais qui financera l’entretien ? En conclusion « devoir de mémoire » et « tourisme de mémoire » ne peuvent que cohabiter, c’est ce que traduit si bien votre article.


      • Briseur d’idoles 7 septembre 2007 16:37

        Votre mémoire est bien sélective !

        Remarquez les goûts, ça ne se discute pas !

        Puisque vous aimez les camps, vous pourriez visiter celui de Guantanamo et rapporter une tenue orange ou un « djihadiste » en pièces détachées en souvenir !

        Les Américains sont généreux avec la peau des autres !


      • Briseur d’idoles 7 septembre 2007 17:04

        Je n’arrive plus à faire des devoirs de mémoire ni des voyages de mémoire...

        Je dois avoir des trous de mémoire...


      • docdory docdory 7 septembre 2007 19:14

        @ Briseurs d’idomes

        Votre argument est accablant ! Ce n’est pas parce que les américains commettent des horreurs à Guantanamo que cela annulerait toutes les horreurs commises antérieurement sur cette planète .....


      • forum123 8 septembre 2007 09:15

        « Auschwitz et le tourisme de la mémoire », depuis la 2éme destruction du Liban sud par Israel, j’avoue ne plus supporté cette constante instrumentalisation de la shoah par les sionistes dans le but de faire oublier leurs constants crimes de guerres au moyen orient.

        Israel et certains sionistes ont légitimés la guerre en Irak2 à grand renfort médiatique comme en Françe avec M ELIE WEISEL prix nobel paix, M ENRICO Macias... , avec les conséquences que l’on connait.

        Je ne parle même pas du désir de Sarko et des USA-Israel de bombardé l’Iran !

        Alors la Shoah on en reparleras plus tard, pour l’instant les US-Israel déstructurent le moyen-orient pour le dominer, ce sont les innocents qui payent de leur sang cette politique machiavélique,.


      • Halman Halman 9 septembre 2007 11:39

        J’ai toujours été très troublé par le fait qu’en 39/45 des pays comme la Lybie se sont laissés envahir par les troupes nazies de l’Afrika Korps et par celles du gouvernement de Vichy sans le moindre mot de protestation.

        Ces pays « ignoraient » ils ce qu’il se passait dans les camps de concentration ?

        Alors des leçons d’histoire comme les votres, à d’autres.


      • Mélie 7 septembre 2007 19:34

        J’ai visité ce camp à l’âge de 14 ans ,et cela a changé à jamais ma vision de l’humain ....

        Je faisais partie d’une association et on nous avait bien fait comprendre qu’il était impossible de refuser « l’invitation ». Nous avons donc déambulé dans les couloirs dans un silence pesant,la gorge serrait et je n’ai pu retenir mes larmes devant l’amoncellement de chaussures de bébés et d’enfants,côtoyant l’autre « vitrine » dans laquelle se trouvait des nattes sur lesquelles étaient encore noués, aux extrémités, de flamboyants rubans rouges....

        Une fois sortie de ces visions d’horreur, (je réalisais d’ailleurs à cet instant la chance que j’avais de n’être qu’en « visite » ) je n’ai pu retenir mon déjeuner.

        Finalement ,je remercie les autorités Polonaises de l’époque de nous avoir obligé à voir ce dont est capable l’être humain par pur « bêtise » ,même si malheureusement ça ne sert pas de leçon ,en ce qui me concerne ,ça m’a appris la tolérance et la relativité de toutes choses .


        • Halman Halman 9 septembre 2007 11:56

          Personnellement j’ai découvert la Shoah vers l’âge de 13/14 ans en lisant le livre Le Grand Cirque de Pierre Clostermann, pilote de chasse français dans les FAFL, 33 victoires aériennes.

          Le plus monstrueux, ce n’est pas l’horreur, l’état de choc à en faire des cauchemars que cela a provoqué chez moi, mais le pire de tout, le plus monstrueux, traumatisant, ignoble, épouvantable de tout, c’est que déjà à cet âge là cela ne m’a pas étonné du tout. De la part de mes congénères, j’avais déjà compris à 13/14 ans que le pire ne leur poserai aucun problème.

          Et quand je vois qu’aujourd’hui, les ados, et même certains adultes, qu’on ai besoin de leur faire découvrir cette horreur de l’histoire plutôt que de la comprendre par eux mêmes, je ne sais pas si je dois être rassuré de leur naïveté ou bien en être angoissé, déçu, paniqué.

          Les chercheurs en neurobiologie et en sciences cognitives l’ont bien compris quand ils écrivent dans leurs articles que dans le même cerveau humain il y a aussi bien Mozart que Pol Pot.


        • Halman Halman 9 septembre 2007 12:07

          Je connais des gens qui aujourd’hui ne comprennent pas le problème de traverser un cimetière matin et soir avec leur marmaille hurlante et gesticulante, « pour couper au plus court », comme ils me disent.

          J’ai beau leur expliquer qu’un cimetière n’est pas un parc public, ça les laisse froids.

          Quel sera le comportement des gamins plus tard lorsqu’ils se seront habitués à la mort, aux cimetières ?


        • Dr Rached Trimèche Dr Rached Trimèche 7 septembre 2007 19:36

          bien vu bien relaté

          cela me ramène @ ma première visite en 1985 et l’accées était terriblement compliqué et j’ai bcp pleuré ! D’émotion ! J’ai fait un lon papier...

          Bravo pour votre récit !


          • Briseur d’idoles 7 septembre 2007 23:31

            N’oublie-pas non plus de pleurer pour les millions de musulmans persécutés et massacrés un peu partout dans le monde et les Palestiniens génocidés par les gentils « humanistes » israéliens !

            Si tu savais ce que je pense des individus comme toi !


          • Utaupix 8 septembre 2007 19:58

            J’ignore le pourquoi du litige précédent. Ce ne sera pas mon propos.

            Je ne connais pas Auschwitz en dehors de la connaissance historique qui en fut faite.

            J’ai eu l’opportunité de visiter Dachau et Bergen-Belsen. Pour ce dernier, il ne reste, si je puis m’exprimer ainsi, que des emplacements au sol et une plaque commémorative.

            Il est regrettable cependant que tous ces lieux où régna la mort, n’amènent pas plus de réflexion de la part des humains. Ne soient pas porteur de plus d’humanité. Ce monde d’hier qui s’est tant déchiré, qui sema tant de souffrances, aujourd’hui n’a pas changé.

            Tout s’est inversé.

            Ces lieux de mémoire sont nécessaires. Ils sont les témoins de la folie humaine. Sera-ce suffisant ?

            Il me semble que le silence, en ces lieux, est de rigueur, tout comme ce l’est dans tout cimetière. L’éducation des enfants commence par là, également.

            J’ai souvenir, il y a quelques années, maintenant, avoir vu, dans un haut lieu de la guerre de 1870, des enfants jouer à l’élastique en plein cimetière, au milieu des tombes, les utilisant pour cela, sous le regard indifférent de leurs parents.

            Vivre dans un monde privilégié découle t-il autant d’indifférence ?


            • Animir 10 septembre 2007 11:04

              « Pourquoi ne pas dire que c’est une revanche de la vie de pouvoir faire résonner les cris innocents et libres d’un enfant sur ce théâtre qui a connu assez de souffrances ? »

              Tres belle phrase, et bonne question. pour repondre à certains, ou je crois juste à une seule personne, peu importe les comportements d aujourdhui, ce n est pas une raison pour oublier ceux d’hier, voire meme c est en oubliant les comportements d’hier qu on fait des conneries aujorudhui...


              • Gazi BORAT 10 septembre 2007 15:49

                Le problème ici résulte de la confrontation d’un mercantilisme qui vise à tirer profit d’un lieu à forte fréquentation touristique et du rappel de faits atroces que la conservation des lieux permet d’évoquer et qui inciteraient plutôt au recueillement qu’à une ambiance de luna-park..

                Faut-il sacraliser tout ce qui touche à Auschwitz ?

                On avait reproché au cinéaste italien Gillo Pontecorvo, dans son film « Kapo » un travelling jugé par la critique « obscène » d’une camera filmant en noir et blanc le long de l’enceinte électrifiée du camp.

                Il ne pouvait être toléré, à cette époque, une telle esthétisation d’un lieu aussi tragique.

                Quelques décennies plus tard, la reconstitution hollywoodienne et esthétisante de Spielberg ne choquait plus personne.

                Installera-t-on un jour une grande roue à l’entrée du camp ?

                gAZi bORAt


                • Briseur d’idoles 10 septembre 2007 20:36

                  Avec un kiosque de souvenirs ?


                • Icks PEY Icks PEY 12 septembre 2007 10:57

                  @ l’auteur,

                  J’avoue avoir été profondément déçu par votre article. Alors que son titre m’a attiré, sa lecture m’a consterné.

                  Je suis allé, moi aussi, à Auschwitz, en mai 2006 mais, à la lecture de votre article, j’ai l’impression que nous n’avons pas visité le même endroit.

                  Vous focalisez sur des anecodtes et des détails pour alimenter votre réflexion sur ce que vous appelez le tourisme de la mémoire ...

                  En conclusion, vous dérivez sur des propos convenus sur le négationnisme (« quand on voit ce qu’on voit, on a bien raison de penser ce qu’on pense ma p’tite dame !) et achevez sur la crainte d’une »parc d’attractionisation" ...

                  Les photos, l’épisode de l’enfant qui fait du bruit, les parkings payants, le centre commerciale à proximité ... vos propos sont d’une grande médiocrité ... se stationner, se nourrir, acheter des souvenirs et aller pisser me semble inéluctable lorsqu’un site attire plusieurs millions de visiteurs par an. Pourquoi vous focalisez vous là dessus ? Quel intérêt dans votre démonstration ? Faudrait-il que le stationnement soit sauvage dans un champ boueux, que les visiteurs ne puissent ni boire ni manger, ni pisser alors qu’un visite complète prend plusieurs heures ? Faudrait-il que le site soit sale et inaccessible pour avoir grâce à vos yeux et le rendre ainsi insoupçonnable de « parc d’attractionisation » ??

                  Se faire prendre en photo à tel et tel endroit ... qu’est-ce que cela peut bien vous faire ? Quelle est donc cette censure comportementale que vous souhaiteriez mettre en place ? Il faudrait que les gens se tiennent bien droit, qu’ils ne sourient pas, qu’ils défilent au pas de l’oie et surtout qu’il ne prenne aucune photo et n’emporte aucun souvenir ?

                  Bien au contraire, ce que j’ai apprécié, c’est que dans un lieu comme celui-là, synonyme de privation de libertés, et bien, la notre soit totale : si je me souviens bien, l’entrée individuelle est gratuite, vous êtes libre de circuler où bon vous semble. Vous pouvez acheter les services d’un guide ou bien faire la visite tout seul : c’est à la carte. La seule chose qu’on demande, c’est le silence et le respect. Que demander de plus ?

                  En outre, vous ne parlez pas de Birkenau, ce qui est regrettable.

                  C’est bizarre votre façon de concevoir la transmission de la mémoire.

                  Bien cordialement,

                  Icks PEY


                  • Anka 12 septembre 2007 14:21

                    @ Icks Pey : Je ne vois pas en quoi l’auteur de l’article donnerait un comportement précis à adopter dans ce genre de visite. Il pose au contraire des questions quant à la réaction d’une femme gênée par le comportement d’un enfant. Une interrogation qui ne me semble pas inintéressante, loin de là.

                    Le fait d’adopter une attitude qui peut sembler détachée s’explique sans doute par l’impossibilité de savoir gérer ce que l’on ressent dans ces lieux. Agir mécaniquement c’est aussi, peut-être, se protéger, exorciser.

                    Que des ados se prennent en photo et « s’amusent » (l’ironie qui consiste à se photographier devant un mur d’exécution est sans doute le plus clair des pieds de nez à la mort ; une façon très claire de se sentir en vie au moment où l’on vous instille le désespoir sans le moyen de s’en protéger) dans ces lieux me semble complètement normal. On peut se demander en quoi des élèves ont leur place dans ce genre de visite. Vous ne trouverez aucun élève pour vous faire l’apologie du génocide, ou de la collaboration. Quand ils absorbent le programme d’histoire en troisième, la plupart des élèves sont consternés et seuls face à plusieurs incompréhensions (Comment cela fut-il possible ? Pourquoi a-t-on laissé faire ? Questions auxquelles aucune réponse n’est apportée.) et un devoir qu’on leur présente comme leur responsabilité : faire en sorte que cela ne se reproduise plus. Ce qui revient à mon avis à leur demander de faire en sorte que cela n’ait jamais eu lieu...

                    Je ne prétends pas qu’il faille éviter d’ammener ses élèves visiter des lieux lourds d’Histoire, parce que l’école peut créer des occasions qui pour certains ne se représenteront peut-être pas, notamment. Mais pour autant, hormis un respect des lieux qui semble naturel à inculquer, il ne faut pas ouvrir la porte à une culpabilisation systématique. Ne serait-ce que parce que c’est dans la liberté de la parole, des attitudes, que peut surgir l’occasion du dialogue le plus intéressant.

                    (NB : je ne sais plus qui regrettait que les cimetières passent pour des jardins publics, mais je ne pousserais pas si loin la critique. Le Père Lachaise est un des plus beaux endroits de promenade de Paris il me semble. De plus, ce n’est pas parce que l’on a sacralisé les cimetières dans notre culture autour du silence - et de l’oubli ?- que c’est une bonne chose. Un enfant qui a traversé un cimetière le soir en rentrant de l’école n’en deviendra pas insensible pour autant, et n’en respecte pas moins les lieux si on lui a appris à le faire. Tout comme un enfant qui a regardé des films d’horreur ne va pas se mettre automatiquement à ’dézinguer’ ses voisins...)


                  • TSS 12 septembre 2007 13:06

                    pourquoi aller aussi loin ,il suffit d’aller au camp du STRUTHOF(c’est en France)pour voir l’horreur et de plus il est en etat de fonctionner !!


                    • Utaupix 14 septembre 2007 20:42

                      Le Struthof a brûlé, il y a quelques années et subi quelques dommages, si on peut exprimer cela, de cette façon !

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