Cocovir, masques et mascarades
Fallait-il avouer dès le début que la France manquait de masques ? Je le pense. Tant pis pour les reproches qui s’en seraient suivis : l’impréparation, la mauvaise gestion, la surdité ministérielle aux alertes, pourrait désormais faire plus de mal au gouvernement qu’un aveu précoce ne l’aurait fait il y a trois mois.
Je n’entre pas dans les détails, largement diffusés dans les médias. Deux chiffres résument la chose : en 2010 il y avait 700 millions de masques disponibles en France. L’OMS citait le pays comme le mieux préparé à une épidémie.
En 2020 il ne restait que 117 millions de masques.
François Hollande a mis au pilon des centaines de millions de masques. Emmanuel Macron a continué leur destruction sans procéder à leur remplacement.
Sans masques, impossible d’assurer une couverture massive de la population dès les premiers jours.
Alors on a dit que tout allait bien en France. Les médecins de référence et les politiques ont déclaré, à plusieurs reprises, sans état d’âme, que le masque n’était pas utile dans les espaces publics.
Deux mois plus tard ils disent le contraire et le masque est le dispositif central du déconfinement. L’évolution des connaissances sur le Cocovir ne suffit pas à justifier ce revirement. Les épidémies virales ont toutes des conditions communes. Ces conditions sont connues.
Pourtant dès le début de la propagation en France les protections manquent. Emmanuel Macron l’avoue implicitement : à chaque intervention il répète que les masques sont commandés. Donc ils ne sont pas là.
Une cellule spéciale est rapidement constituée pour plancher en urgence sur l’approvisionnement du pays en masques (et surblouses, etc). La production nationale est éteinte. Située en Bretagne, la dernière usine française a fermé en 2018 faute de commandes.
Des négociants français installé en Chine ont voulu acheter des masques pour la France. Mais le gouvernement menaçait de saisir tout arrivage. En avril cette menace tombait, mais les importateurs avaient été traités du revers de la main par l’équipe de la cellule, et même déclarés non fiables.
Or au moment du déconfinement plusieurs d’entre eux sont maintenant donnés en référence et leur fiabilité est garantie.
Il semble qu’il y a du temps perdu et de la confusion dans cette gestion de crise. Pourtant, informée de la réalité, la population aurait pu commencer à fabriquer ses propres masques artisanaux.
Je hume dans cette crise politique en cours de développement, un trait marquant de la mentalité française : le centralisme autoritaire.
On le voit par exemple quand l’État saisit des commandes effectuées par des régions laissées à elles-mêmes, et dans le refus de reconnaître l’impréparation. En France, tout va bien. On le sait : à l’époque et selon le gouvernement, le nuage de Tchernobyl avait contourné les frontières…
Rien n’a vraiment changé et Macron rate une occasion de changer radicalement une des attitudes politiques françaises parmi les plus détestables, faite de certitudes fanfaronnes, d’enfumage rhétorique, de Jupitérisme chronique.
Je ne demande pas une contrition humiliante, je ne suis le juge de personne. Mais la simplicité aurait peut-être redonné confiance en la classe politique, confiance très altérée en Hexagonie. Macron garde le vieux réflexe de l’État français central, repaire d’élites diverses, et qui semble si souvent en guerre contre sa propre population.
Maintenant l’Académie de Médecine affirme que le port du masque est indispensable. Elle dit cela quand les masques sont enfin disponibles. Les officiels de la santé disaient le contraire quelques semaines plut tôt, quand les masques ne l’étaient pas. Cela est propice à alimenter une suspicion à l’égard du discours officiel.
Avec l’affaire des masques, la controverse Raoult, l’enfumage du gouvernement, la révélation de son impréparation, entre autres, le débriefing de la crise pourrait être sanglant.
Et en Suisse ? Peut-on savoir pourquoi la Confédération n’a mis des masques à disposition du public que tout récemment ? S’il proviennent des stocks de l’armée, depuis quand celle-ci en disposait-elle ?
Le déconfinement c’est comme la pluie : ça fait pousser les questions.
Également : Cocovir : le coût d'une vie
21 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON