Du gender à l’eugénisme, ou l’humanité qui se déteste
Trois sujets (gender au lycée, mariage homosexuel et révision de la loi de bioéthique) ont mérité l’attention des grands médias qui, bien entendu, se sont rigoureusement abstenus de toute analyse de fond, préférant opposer comme d’habitude un progressisme sympathique à la limite parfois un peu brouillon à l’expression habituelle du conservatisme le plus primaire. Les trois sujets étant absolument liés, je crois utile ou plutôt dramatiquement nécessaire de les relier ici.
1/ Le gender ou la théorie du genre devenue science
Le “gender” désigne un débat initialement anglo-saxon dans les milieux féministes lesbiens, en particulier aux Etats-Unis, lancé à partir des années 1970. Par opposition aux féministes mainstream qui revendiquent en même temps leur identité de femme et leur droit à diriger leur vie comme elles l’entendent en se délivrant des préjugés machistes, les tenant(e)s du gender considèrent qu’il faut aller plus loin et libérer l’espèce humaine de l’aliénation que constituerait l’attribution naturelle des organes génitaux en déconnectant ceux-ci de toute conséquence sur l’identité de l’humain. Pour faire simple, il s’agit d’expliquer à un garҫon qu’il n’a pas à se considérer comme tel parce qu’il a un phallus ou à une fille que ses seins et son vagin n’ont absolument aucune raison de l’empêcher d’être un garҫon.
L’éducation nationale vient d’imposer un enseignement du gender au lycée en sciences et vie de la terre, une matière ayant vocation à expliquer le fonctionnement de la nature. Cette introduction a suscité un certain débat, présenté par l’essentiel de la presse comme la conséquence du conservatisme habituel de quelques catholiques. Je me refuse pour ma part à penser que le sujet n’intéresserait que quelques “fous de Dieu”. Je pense au contraire que c’est un sujet d’intérêt général et que l’on n’a pas besoin d’être “endoctriné” par qui que ce soit pour ne pas vouloir que l’on inocule à nos enfants, en” sciences dures” tout du moins, ce qui génère a minima une grande confusion dans la personnalité en devenir qui est celle d’un enfant.
De fait, indépendamment de toute posture morale, le gender va très loin : un homosexuel n’est plus homosexuel puisque son partenaire n’est pas forcément du même sexe choisi ou genre que lui. A l’inverse, un hétérosexuel peut-être homosexuel si lui ou son partenaire décrète qu’il ne se sent pas lié, en termes d’identité sexuelle, par ses attributs génitaux. La finalité du gender est explicitement de supprimer la différenciation sexuelle du genre humain, ce qui emporte de nombreuses questions liées à la condition humaine, à la reproduction et à l’organisation de la société.
Pour creuser un peu, je vous recommande l’article suivant, remarquablement bien fait : http://anfe.eu/index.php/99-identite-sexuelle-identite-du-genre-categories/theorie-du-gender/identite-sexuelle-identite-du-genre/74-la-theorie-du-gender-origines-et-consequences
Petite conclusion intermédiaire : j’ai un peu le sentiment que les 68ards nous disent en fait en nous mettant dans les pattes cette théorie tellement en vogue qu’elle va être enseignée en sciences en non pas en philosophie que, certes, nous n’aurons pas la même prospérité que la leur, que le monde qu’ils nous laissent est difficile mais qu’au moins, si nous n’aurons pas leur opulence ni leur liberté, nous serons affranchis de la terrible contrainte avec laquelle ils ont été condamnés à vivre, leur sexe ! Merci qui ?
2/ Le mariage gay, sympathique conquête démocratique
Mme Jospin, la philosophe Sylviane Agacinski (c’est bon, elle n’est pas une catho intégriste-conservatrice-médiévale-réactionnaire ?) éclaire un peu le débat qui serait devenu urgentissime :
« On ne semble pas remarquer que la revendication du « mariage homosexuel » ou de l’ « homoparentalité » n’a pu se formuler qu’à partir de la construction ou de la fiction de sujets de droit qui n’ont jamais existé : les « hétérosexuels ». C’est en posant comme une donnée réelle cette classe illusoire de sujets que la question de l’égalité des droits entre « homosexuels » et « hétérosexuels » a pu se poser. Il s’agit cependant d’une fiction, car ce n’est pas la sexualité des individus qui a jamais fondé le mariage, ni la parenté, mais d’abord le sexe, c’est-à-dire la distinction anthropologique des hommes et des femmes.
D’abord, même si cela semble beaucoup agacer certains, le mariage est ouvert depuis toujours aux hommes et aux femmes, quelle que soit leur orientation sexuelle. Jean, homosexuel, peut parfaitement prendre femme, comme Jeanne, homosexuelle, peut « prendre homme » si leurs conjoints en sont d’accord. De la même manière, Jean, qui vit à Biarritz, a parfaitement le droit de se promener chaque jour au jardin du Luxembourg à Paris même si ce droit lui est absolument inutile puisqu’il vit à 900 km.
A quoi sert le mariage civil et pourquoi le droit l’assortit de privilèges fiscaux et patrimoniaux (ainsi que de devoirs) ? Il n’y a aucune option morale là-dedans, l’Etat considère à juste titre que le mariage entre un homme et une femme, dans son essence, est la formule idéale pour la reproduction, l’éducation des enfants et l’apprentissage de l’altérité entre les deux composantes naturelles de l’humanité que sont les hommes et les femmes, que dame Nature fait naître à parts à peu près égales (la légère différence en faveur des hommes à la naissance étant compensée par leur plus grande mortalité précoce).
Jusqu’à preuve du contraire (rassurez-vous, les scientifiques aiguillonnés par les adeptes du gender y travaillent), il faut un spermatozoïde et une ovule pour qu’un humain soit conҫu et une union entre deux personnes de même sexe est donc naturellement stérile. Les objections habituelles sont les suivantes :
- la réalité de la faculté reproductive n’est pas vérifiée avant le mariage et certains couples sont de facto stériles, par contrainte ou par choix. C’est exact, l’Etat n’impose pas un examen médical ni une déclaration sur l’honneur relative à la fécondité du mariage. Peut-être le devrait-il si cela peut donner de la clarté à ceux qui font semblant de ne pas comprendre la différence entre la règle et l’exception...
- les nouvelles techniques reproductives permettent déjà aux lesbiennes de profiter de la fécondation in vitro. Discrimination !!! Et les gays, alors ??? Il leur reste les mères porteuses mais il n’y a en France pas grand-monde qui semble être d’accord pour valider cette marchandisation du corps féminin (et c’est tant mieux) ;
- les couples homosexuels pourront enfin adopter les enfants qui attendent la chaleur et l’amour d’une famille. Sauf qu’il y a des années de liste d’attente pour les couples hétérosexuels qui veulent adopter et qu’il n’y a donc pas un problème de carence d’adoptants. L’adoption a d’ailleurs pour finalité la compensation en faveur de l’enfant abandonné et non la satisfaction d’un droit à l’enfant qui n’existe pas et qui n’est qu’un terrible égoïsme d’adulte.
Une synthèse et une proposition : le mariage n’est pas une institution destinée à encourager et subventionner l’amour de deux adultes, par ailleurs parfaitement respectable. Il a pour finalité l’offre d’un cadre stable pour la procréation, dont on estime qu’elle a une utilité sociale d’autant plus grande que les parents assument en grande partie l’éducation des enfants, futurs citoyens et contribuables. Dans un pays dont le système social est fondé sur un dynamisme démographique minimal, c’est sage…
Quant à la proposition, si nos élus ne peuvent résister à la tentation de satisfaire la revendication d’un petit lobby de peur d’être traités de réactionnaires, je serais prêt à me résoudre à la suppression du mariage civil. Il restera le mariage religieux ou le concubinage et les privilèges de feu le mariage ne seront plus attachés qu’aux enfants résultants de ces deux types d’union.
Dernier élément : beaucoup se sont indignés d’une comparaison qui a été faite entre le mariage homosexuel et la polygamie. Je ne comprends pas. Si la morale, éminemment relative en nos temps modernes, ne doit pas déterminer les choix politiques et législatifs, au nom de quoi fermerait-on un droit à trois, cinq ou trente adultes consentants qui s’aiment et veulent disposer d’une même reconnaissance de leur engagement ? Ou à deux frères ou à une mère et son fils ? Des restes de l’ordre ancien chez nos libérateurs ?
3/ La reproduction libérée des contraintes de la sexualité
Bon, maintenant que, gender oblige, nos sexes sont indifférenciés et nos organes génitaux réduits à l’expression résiduelle de l’infâme conservatisme de la Nature et que le mariage cesse d’être l’idiot utile de la réaction procréationniste, reste à gérer l’envie d’enfants de l’androgyne moderne qui, être supérieur qu’il est enfin devenu, ne saurait accessoirement accepter que son acquisition soit imparfaite.
Youpi, de gentils scientifiques uniquement désireux de mettre leur savoir à la disposition de l’humain libéré (et pas du tout, mais alors pas du tout poussés par l’appât du gain) nous proposent fécondation in vitro, diagnostic pré-implantatoire, demain clonage et/ou gamètes synthétiques et après-demain utérus artificiels. L’enfant sera choisi sur catalogue et peut-être parviendra-t-on à lui ôter les gênes pleureurs, pisseurs ou chieurs. Et surtout sexuels. Alleluia, la Nature ne sera plus qu’un lointain souvenir qui viendra s’ajouter à la longue liste des « heures les plus sombres de notre histoire » (vous savez, celles qui ont vu des êtres humains décider de l’utilité d’autres êtres humains).
La transition aura été rapide. Astucieux, nos amis scientifiques, épaulés par d’influents et bienveillants intellectuels, auront d’abord inventé la fécondation in vitro, destinée à réparer les injustices de la stérilité (et tant pis pour les embryons surnuméraires créés, détruits ou au mieux congelés) puis convaincu les uns et les autres qu’aucune condition ne saurait être posée à leurs clients. Un refus de vente, c’est dégueulasse, non ?
Gageons également que l’égalité restera une valeur phare de notre post-humanité. Il apparaîtra rapidement que l’Etat doit prendre à sa charge et garantir le droit à l’enfant parfait. Dans de nouveaux pôles de compétitivité en biotechnologie, nous aurons des matrices publiques qui garantiront une qualité de production exceptionnelle
Alors, l’Homme sera enfin libre. Le Meilleur des Mondes sera retiré de la vente et rejoindra dans la prohibition les manuels de la barbarie comme Mein Kampf, à moins que celui-ci soit réhabilité en hommage à son auteur, brillant opérateur de l’eugénisme d’Etat.
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