Economie : des logiques suicidaires

Et voilà donc que l’on se préoccupe d’un ratio irrationnel entre les banques (trop riches) et leurs pays d’origine (trop démunis pour les aider en cas de pépin). Comme si ces banques étaient réellement ancrées dans un seul pays, et comme si la fortune cumulée des 0,2% de la population la plus riche (Plus de 40.000 milliards) se devait de tout épargner aux USA, en Allemagne ou à la City de Londres. Comme si ces sommes faramineuses dormaient tranquillement dans des coffres, tandis qu’en réalité, comme un cyclone, elles augmentent par leur seul mouvement.
La pensée totalitaire était jusque-là campée au sein d’idéologies et de religions qui n’avaient en commun qu’une seule certitude : lorsque les hérétiques, les agnostiques, les mécréants et tous les autres vivraient, croiraient, penseraient, produiraient et consommeraient comme elles, l’humanité accèderait au paradis, qu’il soit terrestre ou aux cieux. Voilà donc que, faute d’efficacité, les économistes et leurs gouvernements se mettent à croire et ne plus à chercher, adeptes d’une religion totalitaire ; qu’ils croient ad hoc à la supériorité de leur modèle économique comme le dernier koulak transcendé par le matérialisme scientifique du marxisme-léninisme. Pas de doute chez eux, pas de critique historique, pas de rappels insistants de la réalité, aussi complexe qu’est simpliste leur vision du monde. Ils répètent depuis bientôt cinq ans que les cochons réformés sont sur la bonne voie et on croit entendre Staline discourant sur l’édification du socialisme. Comme les certitudes n’ont jamais rien donné de bon, nous atteignons, toutes voiles levées, le pire, qu’ils baptisent sortie de la crise. Comme Godot, elle ne viendra jamais. Car, comme pendant la longue chute des empires Romain, Ottoman ou Perse, comme avec la coquille vide de l’empire Byzantin, fiction nostalgique et certitudes prométhéennes étaient suffisantes pour que les discours continuent (à l’adresse de la plèbe) et les fortunes s’amoncellent (pour les profiteurs du déclin). Faute de s’attaquer à l’essentiel, la corruption systémique d’un modèle, on s’attaque à la corruption des uns et des autres, on cherche des coupables - qui ne font que maximaliser les opportunités de ce système vicié - pour les donner en pâture aux citoyens exaspérés qui, eux, vivent la crise. On schématise (bons et mauvais élèves, bons et mauvais citoyens, bons et mauvais capitalistes, bons et mauvais exemples, etc., etc.).
A entendre José Manuel Durao Barroso, Wolfgang Schäuble, Pierre Moscovici et tant d’autres le mot clé d’une politique consiste à ce qu’elle soit sérieuse. Suffisamment pour que l’Etat puisse perpétuellement emprunter sans jamais mettre en cause un système politique qui subventionne le marché pour qu’il puisse, à son tour, prêter au « subventionneur ». Qu’avec ce système les Etats finissent par devoir au marché autour de 100/100 de leur PIB (c’est à dire, rappelons-le, ce qu’un peuple entier produit en une année), n’a pas l’air d’entamer leur sérieux. Par contre, une famille qui se trouve dans cette situation est considérée par les mêmes comme totalement irresponsable, à la limite de la démence et qu’il lui faut d’urgence consulter un spécialiste.
De nouveau, à part être des bouffons, nos élites se croyant sérieuses, semblent être tombés avec la dernière pluie. Pourquoi donc les rois de France, les princes allemands et italiens, les empereurs romains, les tzars de Russie - et on en passe -, ont fait, à maintes reprises, faillite ? Par ce que ils n’imposaient (et très durement) que les plus pauvres de leurs royaumes, laissant les autres faire tranquillement fortune. Pourquoi ont-ils sombré ? Par ce que les exemptés d’impôt sont devenus plus riches que les royaumes et les empires, au point de dicter leurs désirs à l’exécutif et à imposer leurs propres lois, profitant, jusqu’à la dernière minute, jusqu’aux révolutions et l’arrivée des « barbares », de la déliquescence des royaumes dont ils faisaient pourtant partie ; jusqu’à qu’ils sombrent eux mêmes, passant des délices égoïstes de l’opulence à la guillotine.
PS : Le ratio entre les avoirs bancaires et leurs Etats, n’est pas particulièrement différent en ce qui concerne Malte, La Grande Bretagne, Luxembourg, et même l’Allemagne. Que fait-on pour jouer aux sérieux ? On y emploie la solution chypriote ?
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