« L’affaire Grégory ! » Merci à Laurence Lacour, honneur d’un journalisme qu’il faut réhabiliter
Oh ! Cette affaire de la Vologne ! Elle n’est pas qu’historique, bien qu’elle soit du passé. Laurence Lacour, qui a pris des cheveux blancs, était hier soir sur France 3. Géniale et courageuse . Laurence, reviens ! Le (bon) journalisme a besoin de toi... Tu es trop belle, et trop honnête, pour que ta vérité s’impose. Tu es l’honneur de ce métier.
Bizarre, cette impression de voir et d’écouter quelqu’un que l’on a connu sous les traits d’une autre, avec la voix d’une autre ! C’est Laurence Lacour, et non l’excellente Constance Dolle, que j’ai vue et entendue en regardant les six épisodes de L’affaire Villemin sur France 3. Comme ce n’est pas François-Régis Marchasson que je voyais dans le rôle du journaliste « au regard en coin », « multi-carte » et avide de scoops, avec lequel il m’est arrivé de travailler aussi...
Cela montre en tout cas que les personnages de cette fiction ont bien compris les personnalités de cette réalité horrible, terrifiante, et... toujours d’actualité, puisque la Justice reste très réformable, et puisque le traitement du faits divers dans les médias demeure un vrai problème. Plus grave peut-être qu’à l’époque de ce sinistre et insensé « feuilleton de la Vologne ». Aujourd’hui, il n’y a pas que Paris-Match « qui paye ». Pour une photo, une interview, une indiscrétion. L’info-spectacle, ou la négation de l’information...
Outreau-sur-Vologne : quel raccourci !
Cette fiction ne dépasse pas la réalité. Dans aucune de ses composantes. Elle l’éclaire. Dans toutes et sous toutes ses coutures. Et elle donne de la police, de la gendarmerie, de la Justice, et de la presse, les images qu’elles méritent. Pauvres enquêteurs ! Pauvres juges ! Pauvres experts ! Pauvres avocats ! Pauvres journalistes ! Pauvres rédacteurs en chefs et responsables d’édition !
Les mots éthique et déontologie deviennent subitement non seulement vides de sens mais riches d’hypocrisies et débordants de viles et bêtes lâchetés. « Dans le pire, on peut toujours faire mieux », lâche un juge...
Je sais : ce téléfilm a déjà nourri bien des polémiques. Et peut encore en susciter. Le genre n’est pas simple. Ses règles ne sont pas tout à fait claires, entre respect des personnes et des faits, devoirs d’informations et liberté de la création.
Raoul Peck, co-scénariste (avec Pascal Bonitzer) et réalisateur, a fait un travail fantastique. Merci à France 3 de lui avoir fait confiance.
Merci à lui, surtout, d’avoir su si bien traduire non seulement les faits, mais cette atmosphère sans laquelle on ne comprend rien ni à l’affaire Grégory, ni à toutes les injustices qui peuvent être commises. Par la police, la justice et la presse... Par les politiques, aussi. Et par ce « mimétisme de masse » que René Girard a si bien décrit, analysé, décortiqué.... Ce sont des corbeaux qui ont entraîné Ponce-Pilate à céder devant la foule qui réclamait la mort d’un juif nommé le Christ...
« C’est l’une des affaires les plus lourdes et les plus médiatisées de ces soixante dernières années », dit Raoul Peck. « Il n’y a qu’à voir la polémique qui entoure la sortie du téléfilm. Mais en ce qui me concerne, mon approche est toute personnelle : je ne me suis pas intéressé à l’affaire en tant que cinéaste, celle-ci est venue à moi. Il y avait urgence pour les époux Villemin : ils étaient terrorisés à l’idée qu’une chaîne de télévision ne s’empare de l’affaire pour réaliser des audiences mirifiques. C’est pourquoi je m’y suis consacré [...] Nous avons travaillé durant plus de trois ans en toute discrétion. Certaines personnes, toujours les mêmes, se sont inquiétées de ce que nous faisions... Elles devaient se sentir menacées par la diffusion du film. S’il doit y avoir des poursuites judiciaires, qu’il y en ait. Mais nous avons travaillé avec une dizaine d’avocats pour adopter le comportement le plus digne possible, sans blesser inutilement les personnes impliquées dans ce drame. On ne peut pas parler de la souffrance des uns et ignorer celle des autres. »
C’est réussi. Bravo et merci. La bonne télévision existe. France 3 en a donné la preuve, avec cette « série » qui sera rediffusée sur Arte l’an prochain. Et qui devrait être diffusée dans les écoles de journalisme, dans les facs de droit et, surtout, dans la très digne Ecole de la magistrature...
Laurence Lacour était, à l’époque, jeune et séduisante, sans ostentation. Intelligente et sérieuse. Consciencieuse. Elle fait partie des « victimes de l’affaire Grégory », puisqu’elle a renoncé au (bon) journalisme après cette expérience (mauvaise).
Merci, Laurence, pour ton témoignage. Et pour ton intégrité. Chez toi, les mots éthique, morale, déontologie ont un vrai sens et une vraie valeur. Les vrais adeptes d’un journalisme « responsable » regrettent ton « absence ». Merci à toi d’être toi. J’ai relu ton livre en regardant France 3 : c’est un vrai manuel pour étudiants en journalisme... et en droit. En sciences politiques et à l’ENA aussi...
On résume : en 1984, jeune journaliste à Europe 1, Laurence Lacour arrive dans la vallée de la Vologne pour couvrir l’assassinat de Grégory
En quelques semaines, ce fait-divers devient un feuilleton national. L’instruction se déroule à ciel ouvert. Partie pour deux jours, Laurence Lacour reste quatre ans dans les Vosges. Traumatisée par ce qu’elle a vu et vécu, elle quitte le journalisme pour écrire ce livre.
Le bûcher des innocents est à la fois une enquête de haut vol et le récit de l’initiation d’une jeune journaliste aux démons des médias. Avec pudeur, humanité et dans un souci extrême de vérité, Laurence Lacour a écrit un livre unique, qui saisit le lecteur dès les premières pages et ne le lâche plus.
Alors que l’affaire reste aujourd’hui encore une énigme, il apporte toutes les pièces du puzzle, de l’assassinat du premier suspect, Bernard Laroche par le père de Grégory poussé à bout par les médias, aux rumeurs contre Christine Villemin, transformée en personnage de fiction, diabolique et manipulateur.
Laurence Lacour démonte l’engrenage de passions, d’intérêts, d’incompétences et de folie qui ont donné sa démesure à l’affaire. D’une plume tendre et humaine, elle retrace la chronique d’une passion française et raconte l’amour inaltérable qui a sauvé les parents de Grégory, tout au long du cauchemar.
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