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Accueil du site > Tribune Libre > L’indispensable restauration du langage

L’indispensable restauration du langage

Quand des journalistes corroborent la version de "l'assassinat" de Clément Méric ils se rendent odieux.

Mais ils n'est pas certain que tous en soient conscients. Les plus jeunes ont peut-être très réellement cru qu'il leur fallait simplement répéter, dans ce cas-là, ce que des profs de la génération précédente leur avaient enseigné.

Ils ont peut-être même reçu cet enseignement dans la prestigieuse école supérieure où l'on apprend "la science politique".

Le langage médiatique est presqu'officiellement devenu le langage politique militant, fut-il délibérément mensonger, et je crains que ce soit la "Gauche" qui, dans la France de ces dernières décennies, a fait le plus pour qu'il en soit ainsi.

Elle a même pris des initiatives (prononcé des discours, édité des livres, créé des sites Internet) pour expliquer que les mots ont un sens et que… c'est désormais le sens déformé qu'il faut utiliser dans le monde présent et à venir.

Bien souvent les étudiants de la dernière génération, futurs journalistes ou eux-mêmes futurs enseignants, ou futurs sociologues, ou futurs magistrats… ne savent plus ce que parler veut dire, ou pensent en toute bonne conscience que c'est la même chose que mentir quand c'est profitable.

C'est même le langage décrivant les réalités faisant obstacle aux nouveaux domaines de militance de "la Gauche" qui est devenu le langage à enseigner dès le plus jeune âge. Et c'est ainsi que le Ministre de l'Education Nationale croit utile de "déconstruire" dès l'école primaire les "stéréotypes" qui font obstacle à la très moderniste théorie des genres, promue par des intellectuels commençant à s'ennuyer dans les vieux concepts de la Gauche et du Féminisme d'hier (1)

J'ai récemment donné, à la suite d'un article de rosemar (2) deux exemples de déformation du sens des mots pour les rendre "performatifs", en l'occurrence pour les faire servir une mauvaise cause :

- la destruction du mariage et son remplacement par un "mariage" au sens presque contraire, à partir de l'utilisation devenue courante d'un oxymore employé comme un mot décrivant une réalité, le mot homoparentalité.

- la déformation délibérée et manifeste, par Caroline Fourest, du mot agression.

 

Cette intellectuelle d'un nouveau genre a joué un très grand rôle dans la déformation du sens des mots - et dans l'adoption par ses collègues du sens déformé - mais il est fort possible que, dans le pire des cas, c'est avec une réelle bonne intention qu'elle a contribué à imposer un énorme mensonge, celui qui fait maintenant le plus de mal en France depuis des années.

C'était en effet à une époque où, encore peu connue, elle avait fait preuve d'un réel courage non-conformiste en dénonçant, après la première réunion de l'ONU sur les Droits de l'homme à Durban, l'odieuse tentative qui y avait été faite de faire passer Israël pour le pays le plus responsable de violations des Droits humains.

Elle avait ensuite - pour compenser et se faire accepter malgré tout des islamistes pacifiques ? - demandé qu'on évite d'utiliser le mot islamophobie, pourtant parfaitement clair en langue française … parce que l'ayatollah Khomeini l'avait promu avec de très mauvaises intentions !

Elle ne semble toujours pas s'être rendu compte qu'elle avait ainsi contribué à banaliser en France l'une des formes les plus pernicieuses de la paresse intellectuelle et de la lâcheté politique : le mot islamophobie est désormais systématiquement interprété comme étant porteur de haine, de racisme, de xénophobie, et c'est ignoble. (3)

Il est désormais interdit, tout simplement, de chercher à savoir si, et comprendre pourquoi, l'islam fait des ravages en France, en Europe et partout dans le monde.

 

 

La Gauche, cependant, n'a pas tous les torts

Etant moi-même de gauche depuis toujours je mets le plus souvent des guillemets quand je parle de la Gauche depuis longtemps dominante, et selon moi en pleine dérive, qu'elle soit extrême ou pas. Je vais cesser de le faire, d'une part parce que ça me fatigue et d'autre part parce que mon ordinateur n'arrête pas de m'embêter quand je frappe des guillemets.

Mais je voudrais cependant dire ici qu'il faut accorder au moins à la Gauche cette bien réelle "compréhension sinon excuse" à ses tricheries langagières, à ses fuites, à son manque de courage : l'économisme mondialisé (ou le libéralisme capitaliste mondialisé, comme on voudra) a créé une situation planétaire d'une gravité sans précédent.

Pour appuyer cette affirmation je voudrais prendre encore un mot récemment utilisé dans un but performatif. Le Président François Hollande a manifesté, de différentes manières, sa volonté de rendre le pays plus compétitif dans le but de "diminuer le chômage". On a approuvé, ou douté de la volonté réelle, ou estimé que les moyens n'étaient pas appropriés, qu'ils étaient insuffisants, etc… mais on n'a guère relevé ce qui me semble le plus évident : plus de compétitivité ne diminue pas le chômage mais l'augmente.

Bien sûr la compétitivité est en soi une vraie valeur. Il vaut mieux être brillant dans son métier, vif, volontaire, lucide, entreprenant, courageux, productif, "gagneur"… plutôt que maladroit, incompétent, mou, paresseux, démissionnaire, "perdant"… Mais qui ne voit qu'aujourd'hui le plus compétitif, dans une entreprise industrielle comme dans une société de services ou dans une banque, est celui qui sait et ose supprimer les emplois peu productifs, qui sait et ose automatiser et remplacer les hommes par des machines, délocaliser et faire faire le travail par des travailleurs moins payés ?

Les travailleurs et leurs syndicats s'indignent, à juste titre, quand des entreprises licencient et ferment des usines et des bureaux alors qu'elles font des bénéfices, mais c'est parce qu'elles ferment les usines et licencient qu'elles font des bénéfices et survivent, restent compétitives alors que d'autres meurent.

 

Ce qu'il faut voir c'est que, dans le monde tel qu'il fonctionne, c'est-à-dire avec les règles stupides et révoltantes que, en Europe par exemple, il s'est donné à Maastricht (soumission aux lois du marché, interdiction de tout protectionnisme, ouverture des frontières et libre circulation des individus…) ce sont les plus compétitifs (individus, équipes, entreprises, pays, ensembles de pays…) qui s'en sortiront le moins mal, garderont leur emploi, leur entreprise... au moins pour un certain temps, mais en augmentant toujours plus le chômage et en aggravant toujours plus la situation des plus déshérités.

Surtout si, en plus, on prend conscience que, pour que la simple survie sur terre reste possible, la croissance de la production et de la consommation globales ne doit pas être un objectif mais que c'est au contraire leur décroissance qui doit être visée, et rapidement mise en application.

Oui, situation mondiale plus difficile que jamais. Mais à laquelle ce ne peut pas être la Droite qui apportera une solution car, par nature, la situation des plus déshérités, la Droite s'en fout, ça ne l'a jamais empêchée de dormir !

Je ne vois pas comment la Gauche (l'ensemble des Gauches, françaises, européennes et mondiales) va entreprendre les radicales révolutions indispensables à la survie de l'espèce humaine dans la paix, la solidarité, la priorité aux plus démunis mais, ce qui me paraît certain, c'est que ça ne pourra pas se faire sans que l'économisme soit mis à bas, sans que ses actuels serviteurs cessent enfin d'imposer que les hommes restent à son service.

Pour rechercher les moyens de mettre enfin l'économie au service des hommes nous avons au moins, en France, un trésor qu'il faut cesser de négliger, de gaspiller, de saccager. Nous avons une langue qui permet de tout dire avec la plus grande exactitude et la plus grande honnêteté.

Albert Camus disait que "mal nommer les choses c'est ajouter au malheur du monde". Il aurait pu ajouter - peut-être l'a-t-il fait, je ne connais pas le contexte - que les mal nommer volontairement c'est ajouter volontairement du malheur dans le monde.

Il aurait pu ajouter encore que "bien nommer les choses, c'est se donner les plus grandes chances de pouvoir faire disparaître le malheur du monde".

Il faut arrêter de suivre les tricheurs du langage qui, au gouvernement, dans les partis, les religions, les écoles, les médias (sites Internet de libre expression compris) ne font que conforter égoïstement des positions personnelles ou de groupes en empêchant les peuples de chercher les vraies solutions - forcément révolutionnaires mais au bon sens du terme - à la dramatique situation dans laquelle l'économisme a plongé l'humanité toute entière.

 

(1) http://www.tv5.org/cms/userdata/c_bloc_file/8/8895/8895_fichier_document-telechargeable-2013-05-04-22h40-150dpi.pdf

 

(2) http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/mourir-pour-des-idees-136942 

(les deux exemples sont détaillés dans mes commentaires du 10 juin à 23 h et du 11 à 16 h 58)

 

(3) http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/lettre-ouverte-a-l-ambassadeur-des-82314

 


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27 réactions à cet article    


  • bakerstreet bakerstreet 15 juin 2013 14:36

    Bravo pour cet article.

    Bien sûr, les mots sont souvent abusifs, et tendancieux. 
    Inutile de rappeler 1984 et Orwell, cette paire de lunettes indispensable. 
    Tout est lié, tout se tient, dans ce magasin de tailleur qu’est notre vie. 
    Un éclair de l’hologramme éclaire tout l’ensemble et ses intentions. 
    On vous envoie les mots à la figure pour mieux vous tenir, pendant que l’on coud d’un gros fil, une boutonnière sur votre bouche, vous invitant à l’ouvir pour les messes autorisées

    Y a quelque chose de pourri au royaume du danemark qui a pris de l’ampleur. 
    La survie de l’espèce ne rentre guère en débat au sein des institutions. 
    Laissons ça aux générations futures.
    Reste que la terre se rétrécit à toute vitesse, et ne sera bientot qu’un confetti. 

    • volt volt 15 juin 2013 15:12

      votre présupposé repose sur deux abîmes.

      d’abord présenter l’idéo-langue comme une déformation, c’est correct historiquement, mais par delà la reine victoria, nous irions jusqu’à gorgias...
      ensuite dire qu’il est un langage du mensonge, c’est poser l’existence d’un « langage vrai ou du vrai », rien n’est moins sûr...
      enfin, s’en tenir au radeau d’une langue-mère, d’une richesse certaine de la langue, pourquoi pas... le seul gros problème c’est qu’on ne la croise plus chez les moins de quarante ans.
       
      vous ne semblez pas mesurer une alimentation réciproque :
      - plus la déculutration et le décervelage et l’appauvrissement langagier touche les jeunes, plus le mensonge en « haut-lieu » devient une formalité des plus faciles ; 
      - plus on « ment » facilement dans les hautes sphères (ce qui est tout l’exercice), plus le formattage en bas suit son cours.

      idem pour votre polarisation droite-gauche...
      certes, c’est plus d’un siècle.
      mais la chine n’est-ce pas, la chine partout, 
      vous et moi déjà made in china, sans le savoir, avec tous nos guillemets.
      or l’inculture, encore : 
      à nouveau, allez vers les moins de quarante ou trente ans... 
      qu’ont-ils, en matière de gauche, textes et histoire, de comparable au bagage des générations précédentes ? 
      néant, des miettes, des bribes.
      la culture de gauche telle qu’elle était répandue et comprise a quasiment disparu, 
      ce n’est donc pas en fonction d’elle que se polariserait un combat à venir.

      • bakerstreet bakerstreet 15 juin 2013 15:33

        L’intelligence n’a pas de parti politique.

         Les philosophes ne roulent pour personne.
         Sur les murs de la grotte de Platon, les programmes défilent, de plus en plus rapidement, avec des couleurs et des artifices, propres à nous brouiller de plus en plus les sens.
        Certains sortent parfois du bunker pour dénoncer l’aliénation. ( Assange et les quelques autres hommes courageux qui osent défier le systémè américain d’espionnage et de mise en coupe, des nouveaux héros grecs il va s’en dire)

        Les US veulent les faire payer en les attachant au rocher de Guantanamo, Prométhés modernes où cet aigle plutot vautour viendra se rasssasier et faire exemple au monde. 

        Les mythes Grecs sont plus vivants que jamais, à l’heure où l’on tente de mettre leur télé en coupe. 
        Des programmes indestructibles, qui nous permettent toujours de décoder le monde !. 

      • Pierre Régnier Pierre Régnier 17 juin 2013 11:44

        Bonjour volt

         

        En mai 1985 j’étais de l’équipe de la SFP qui réalisait le premier produit en vidéonumérique dans les sous-sols de la société Thomson à Gennevilliers. Les techniciens de cette entreprise nous ont montré des éléments qui composaient les circuits du mélangeur (une grande armoire qui tiendrait aujourd’hui, avec beaucoup d’autres, dans une clé USB). Il y en avait déjà beaucoup qui portaient l’inscription « made in China ». Je sais donc très bien que nous sommes, vous et moi, d’une certaine manière, comme vous dites "made in China".

         

        Je sais très bien aussi que la Chine est désormais parmi les pays capitalistes les plus agressifs au monde, mais ce n’est qu’une illustration de plus de ce que je dis dans mon article : en classant encore aujourd’hui la Chine parmi les pays communistes, les journalistes disent une contre-vérité. Il y a à cela une raison principale : il faut maintenir l’idée reçue selon laquelle le « communisme » est ce système philosophico-politique brutal, totalitaire, qui interdit la libre expression, et plus généralement les libertés qui déplaisent aux pouvoirs en place, c’est-à-dire ce système que je qualifie de "fascisme (avant la lettre) stalinien".

         

        Mais ce que je dis aussi, c’est que ce n’est pas forcément volontairement que des journalistes disent n’importe quoi. Je dis encore que ceux qui le leur font dire ne sont pas seulement les défenseurs du libéralisme capitaliste dominant la planète. Je dis que les adversaires superficiels de cet économisme là mentent aussi, parce qu’ils sont seulement partisans d’un autre économisme tout aussi désastreux. Et, pire que tout, beaucoup de ces adversaires superficiels qui se proclament et se croient « révolutionnaires » ne font que prôner une « bonne haine » et une « bonne violence » à la place de la violence exercée par le « libéralisme » capitaliste.

         

        Je ne crois pas pour autant que les moins de quarante ans qui n’ont, comme vous dites, "pour connaissance de la culture de gauche telle qu’elle était répandue« que  »des miettes, des bribes" soient condamnés à rester des victimes du langage militant déformateur, même si je crois à la réalité de ce que vous appelez « l’alimentation réciproque ». Quand je discute directement avec des filles et des garçons de vingt ans, en étant réellement à leur écoute et en prenant le temps d’échanger vraiment, je les trouve tout aussi capables que moi (75 ans) d’échapper au conditionnement.

         

        La génération la plus égarée me semble être celle qui, entre eux et moi, a installé ses déformateurs en de nombreux endroits de « formation » de la jeunesse. Celle-ci, politiquement consciente ou pas, indignée ou pas, militante ou pas, pourra parfaitement redresser la démarche vers un monde plus juste et plus solidaire.

         

        Sachons multiplier les lieux de véritable échange. 


      • Bobby Bobby 15 juin 2013 15:45

        Bonjour,

        ... Les mots sont-ils des fenêtres ouvertes ou des murs ? le paradoxe n’est pas nouveau, il était déjà connu du temps d’ésope, peut-être avant.

        Notre société a collectionné, on peut espérer, pour un temps seulement, une série impressionante de concepts, probablement à son image, totalement faux ! et le language semble bien y avoir perdu sa cohérence un des signes des temps ! (zeitgest) au profit d’un pouvoir fort nécrophile.

        La recherce de la vérité me paraît une quète majeure dans le cursus bref d’une vie, voici un lien accessible à une forme de cette recherche.

        Fort heureusement, la prise de conscience populaire semble vouloir déboucher sur un changement radical de la dynamique socio-économique (étienne Chouard et Bernard Friot)...

         j’espère qu’ils se fera sans effusion de sang ! car en face, on n’est généralement pas bien tendres ! (un député belge, isolé, se bat !), les policiers généralement, servent ce pouvoir... et non le peuple !

        Je vois les techniques de manipulation utilisées par le pouvoir et les médias, elles me font bien peur ! je vois aussi les prémices de ces changements et ceci alimente mon espoir.


        • Bobby Bobby 15 juin 2013 16:07

          Le language semble bien être le reflet d’une paupérisation voulue !

          ref Jean Ziegler


        • Antoine Diederick 15 juin 2013 22:41

          à Bobby, ce débuté est vraiment pathétique, franchement.


        • Bobby Bobby 16 juin 2013 00:09

          Bonsoir Antoine,

          Merci bien ! Et toi, ou en es-tu avec ta quête à Dallas ?

          Ne t’es-tu pas étonné de trouver au cœur du fief des pétroliers, les mêmes intérêts qui sous tendent (peut être) ceux masqués par deux 11 septembres, finalement relativement semblables ?

          « a que me sirve de ver los caminos en la tierra si las nubles me escondian las estrellas » Jesus Mũnaris


        • foufouille foufouille 15 juin 2013 16:35

          le langage permet aussi d’arnaquer facilement les gens


          • Bobby Bobby 16 juin 2013 00:18

            Tout-à-fait vrai, ff, le tout est de savoir qui sont les véritables imposteurs ! un certain Roland Gori nous en dit quelque chose...


          • Richard Schneider Richard Schneider 15 juin 2013 17:05

            Bonjour l’auteur,

            Votre pertinente analyse sur la restauration du langage, ou plutôt la restauration de la langue française, devrait ouvrir un large débat sur la place du sens que l’on donne à la vie en société.
            Effectivement, quand Léopold Senghor ou Aimé Césaire revendiquent leur négritude, l’establishment, reprenant une mode anglo-saxonne, parlent de « blacks ». Traiter un black de nègre, c’est être un raciste d’extrême-droite. 
            Il ne faut plus parler d’ouvriers, mais d’OS (ouvriers spécialisés), de femme de ménage, mais de « technicienne de surface » ... Parce que exploiter un OS ou une technicienne de surface est plus noble que d’exploiter un ouvrier ou une bonne ?
            De plus, la paupérisation de la langue masque la faiblesse de la pensée. Or, une pensée mal construite ou déconstruite mène invariablement à la paupérisation des individus (cf.Ziegler cité ci-dessus).
            Aussi faudrait-il rehausser le niveau de langage du peuple : cela rehausserait peut-être sa prise de conscience dans bien des domaines.
            Bonne fin d’après-midi,
            RS

            • Pierre Régnier Pierre Régnier 17 juin 2013 18:14

              @ Bobby et @ Richard

               

              En effet, Richard, de renoncement en renoncement on en est arrivé à fuir dans la langue anglaise pour ne pas parler d’un homme noir en le qualifiant de noir. Et si, sans aucun doute, il y a à l’extrême-droite – en supposant que cette expression elle-même a encore un sens – des gens qui sont racistes envers les noirs, je suis convaincu qu’il y en a aussi beaucoup parmi ceux qui, conformistes croyant employer un langage de gauche, les nomment blacks. Et vous faites bien de faire le rapprochement avec les inventeurs de la « négritude » qui, de manière combative et créative, réapprenaient à nos parents la richesse de leur langue quand ceux-ci apprenaient à en avoir honte. Il y a là un double exemple d’authentique fierté et d’avancée vers « l’antiracisme » déformant, aujourdhui tellement prégnant, comme dans le stupide asservissement volontaire à la langue anglaise.  

               

              Il faut lire le très beau livre de Gaston Kelman, Je suis noir et je n’aime pas le manioc, comme Archibald nous le proposait ici sur Agoravox la semaine dernière :

               

              http://www.agoravox.fr/culture-loisirs/extraits-d-ouvrages/article/je-suis-noir-et-je-n-aime-pas-le-137167

               

              Les entretiens d’Aimé Césaire avec Françoise Vergès, publiés chez Albin Michel en 2005 sous le titre Nègre je suis nègre je resterai, proposent par ailleurs une excellente réflexion contemporaine sur l’humanisme et le langage des hommes, l’un et l’autre étant, par le grand écrivain poète, pensés dans l’universalité.

               

              Je ne crois pas que le peuple français soit le principal responsable de l’appauvrissement de sa langue. Je crois que ce sont plutôt les très nombreux intellectuels omniprésents dans les médias qui "militent par la déformation langagière".

               

              Vous renvoyez l’un et l’autre à une vidéo de Jean Ziegler, sans que j’aie bien compris si vous êtes conscients de son ambiguïté (elle est, par volonté ou pas de celui qui l’a déposée, présente dans le titre même inscrit sur la première image). Depuis des années le brillant intellectuel suisse militant est, quelque part dans mon esprit, avec d’autres comme Edgar Morin et Noam Chomsky, parmi ceux que je perçois comme des « beaux gâchis ». J’ai beaucoup espéré d’eux et ils m’ont beaucoup déçu. Combattant pour un bouleversement politique qui ferait avancer vers la justice et l’égalité, ils ont fini par rejoindre le camp des partisans de la « bonne haine » et de la « bonne violence » comme solution de remplacement à celle que, avec eux, je considère comme intolérable, la violence de l’exploitation capitaliste.

               

              Ecoutez, vers la onzième minute de l’entretien, Jean Ziegler affirmer que "Le Coran dit exactement le contraire de ce que pratiquent les terroristes islamiques" ! J’avais rêvé qu’un jour Ziegler et les autres intellectuels précités mettraient fin, enfin, à la monstrueuse théologie criminogène toujours justifiée et enseignée aux croyants à venir par les trois plus grands monothéismes. Et les voici, avec tant d’autres, installés dans le néo-négationnisme appliqué au plus violent des trois.


              Oui, quel beau gâchis !



            • Esprit Critique 15 juin 2013 17:46

              Merci pour cet article, Il attire notre attention sur une perversion rampante qui est la tricherie au niveau du langage et de la communication dans le but d’exercer volontairement la plus parfaite malhonnêteté intellectuelle et politique.

              En effet si certains répètent sans comprendre, et son manipulé, les Fourest et autres parlant « d’assassinat », ou d’homophobie et d’islamophobie sont de parfait escrocs. 


              • Claude Courty Claudec 15 juin 2013 18:34

                Quand les tomates se concassent et que les nuages se désagrègent, plus rien ne doit plus nous surprendre en matière de langage. Nous vivons dans un bordel ambiant ayant plus souvent des allures de tour de Babel que de société civilisée, dont les membres conserveraient quelques chances de se comprendre à défaut de s’entendre.


                • contre exemple le cil anse 15 juin 2013 19:20

                  « Les mots sont-ils des fenêtres ouvertes ou des murs ? »

                  Face à certains maux, mieux vaut fermer la fenêtre quand on voit le feux naitre,
                  s’en murer quand on voile sans murmurer...


                  • Bobby Bobby 16 juin 2013 03:58

                    L’anse du cil... n’est-ce pas la mort du (si) ou (cy)gne re et recommencée ? lorsque l’être, dépouillé, est ravalé au rang de prolétaire par manque drastique de vérité ?

                    cqfd cdb... sauf que rien n’est démontré ! Et Roland Gori, (cf :« La fabrique des imposteurs ») dit bien des vérités, qualité rare de nos temps !

                    Sous la tonnelle, un petit verre de vin blanc, pris en bonne compagnie, qui sait, demain, fera peut être rêver de la réalité d’un billet chanceux en échange d’un battement... de cil à l’anse de l’atoll ?


                  • Abou Antoun Abou Antoun 15 juin 2013 21:56

                    Certains se battent avec leurs moyens pour défendre la langue.
                    Voir ce site.


                    • Antoine Diederick 15 juin 2013 22:34

                      très bon site,


                      mais je n’ai pas lu :« a-t-il martelé », ni :« il a tapé du poing sur la table » , pour dire :« Il a affirmé vigoureusement » smiley

                      Belgique, pendant la crise « il faut tout mettre sur la table », sous-entendu, tout doit être abordé, tous les dossiers traités. Ou encore :« Ils sont tous , les partis autour de la table ». Pauvre table, à sa place je me serais taillé vite fait.

                      Non, la table, elle s’est écroulée depuis, il a fallu s’en fournir une nouvelle. Dur, dur, le métier de table.

                    • Antoine Diederick 15 juin 2013 22:36

                      c’était la table des négociations....pauvre table.


                    • Antoine Diederick 15 juin 2013 22:39

                      Merci Pierre, pour votre article, cherchons le Vrai.


                      • Bobby Bobby 16 juin 2013 14:04

                        @ Antoine, @ Cil méandre (méprendre)

                        Une fenêtre se ferme !... comme la plupart d’ailleurs devant les murs.

                        La mort du héros, son chant du cygne, Lao tseu reconverti en fourmi abandonnera fin du mois internet et ses lumières sombres, véritables tontons macoutes de la liberté de penser.

                        D’avoir voulu croire en la vérité, j’ai trouvé beaucoup de ces imposteurs chers à Roland Gori. pourtant, ceux qui se sont passés d’elle, ont tout ignoré. Serviles avec le fort, tyranniques avec l’individu. Ils prétendent imposer leurs vues basses sans voir que leur propre perceptions font plus de tord que les prétendus pathos (qu’ils créent d’ailleurs de toute pièce) qu’ils prétendent orgueilleusement résoudre.

                        L’homme libre, toujours chérira la mer ! bergère d’azur, infinie !

                         


                        • contre exemple le cil anse 16 juin 2013 17:59

                          @ Bobby @ Antoine @ Tous ceux qui peuvent et veulent ce met prendre


                          Mayday mayday,

                          vous voulez mes dés, par toutes les faces partout t’attise.

                          Sais mes days à partir de two dés, par toutes les phases.

                          Par tout l’aide est bi 1 vœu nu. Happe raide, j’ai rien à perdrix.

                          Là sans thé, j’aidais tisane messe et tout et tout.

                          Parc honte, des modes ailleurs et des mots d’ailleurs,

                          y’en a à l’appel messe en sceau, des mots railleurs.

                          J’aurais dis « jeu » mes je manque 2 moyen,

                          sans être mou à rien, je fée heaume yeux,

                          loue un dés mi 1, prés Duc heure.

                          Mama chine aide à vent guère,

                          mai laisse prie est d’âpre et aile.

                          Il faut bravo l’âme au derche,

                          et bras vais lames ode réaction.

                          Ile faux ksa, y’l’fau queue sape ass

                          où keussa pas ceux-là, y scie m’aime

                          meuh suis vœu. Mayday mayday,

                          narrez lac Estion, l’œuf Rik

                          ment tempe On, ça fait pas l’art

                          d’heure, baladeur en modoff.

                          Plus m’en main, kit à murir

                          mou rond sœur 1 et lie breux.

                          MD MD, sue paix riz heure

                          d’Ω&2LOT pour une lettrage

                          là lait re hache, comme

                          hue manne ité.


                          • Bobby Bobby 16 juin 2013 20:56

                            Si l’anse m’était conté(e) ?... difficile, en silence !
                            difficile aussi de comprendre ce dernier texte...

                            Il faut dire que j’ai dû vous prendre pour une connaissance...
                            pour le style de l’écriture.
                            Je me suis probablement trompé ! désolé !

                            Mais de toute évidence, l’apparent décousu montre, des dispositions...
                            et comme d’hab, dit plus sur l’émetteur que ce qu’il veut bien en dire.

                            Merci pour la démo !


                          • contre exemple le cil anse 16 juin 2013 21:46

                            @ Bobby

                            Démo et encore, piètre j’en conviens.
                            Juste un égard dans ce style sans style.
                            Bien loin du silence, mais comme tout vient
                            d’un cri, il fallait le pousser avant d’être un cil.


                          • ffi ffi 17 juin 2013 14:34

                            La restauration du langage est flagrante en ce qui concerne tous les mots modernes en *phobie.
                             
                            En grec, « phobia » est la peur...
                            L’État te condamne donc parce que tu as peur...

                            Ce n’est même plus du délit d’opinion, c’est carrément du délit d’émotion...
                             
                            Le mot grec pour désigner la haine, c’est « misos » (que l’on retrouve dans misogynie, par exemple).

                            Mieux vaudrait donc qualifier correctement la haine de l’Islam par « islamomisie », la haine de l’étranger par xénomisie, la haine du juif, judéomisie, la haine du noir « négromisie », la haine du blanc « leucomisie », la haine de soi « egomisie », la haine des chrétiens « christianiomisie »,...etc.

                            Bref, il faudrait qualifier toutes les haines par des mots en « *misie » et toutes les peurs par des mots en « *phobie », ce serait déjà un vocabulaire plus précis.
                             
                            Mais de toute façon, la pénalisation d’un sentiment, cela me semble en fait très délicat en matière de droit. Ne dit-on pas « nul crime sans loi » ? Or, un sentiment n’est pas un crime. Un sentiment pourrait éventuellement porter à prévention, mais il ne saurait porter à pénalisation.
                             
                            Ceci d’autant qu’un sentiment est très difficile à caractériser à coup sûr.


                            • Pierre Régnier Pierre Régnier 17 juin 2013 17:35

                              Très utiles précisions, ffi, merci.

                               

                              Mais je crois que, même dans les mots dont la racine a été, à l’origine, mal choisie, ou dans les mots dont l’extension est incorrecte – dans les dictionnaires on donne aux mots des définitions 2, 3 etc. « par extension » – on sait très bien, dans la langue française, exprimer le juste contenu que l’on a voulu exprimer… sauf quand, intentionnellement, des tricheurs politiques ou journalistes à eux soumis s’entêtent à déformer durablement pour faire passer des idées fausses, et mobiliser malhonnêtement sur les réalités qu’ils prétendent exprimer, mais qui sont des mensonges de leur invention. 


                              L’usage qui est fait du mot « islamophobie » est selon moi le pire exemple d’alimentation, depuis des années et pas seulement en France, d’une telle malhonnête mobilisation. Et ce sont ceux qui la pratiquent qui accusent ceux qui la refusent de cultiver la haine, le racisme, la xénophobie, la violence... Ecoeurant ! Il ne faut pas laisser faire.


                            • contre exemple exemple 17 juin 2013 15:31

                              @ ffi

                              Voilà bien une explication bien exposée de façon exemplaire.
                              Je ne m’attarderais pas sur la question,
                              car j’y vois-là un sujet fort assujetti au propos
                              amené par vous, je ferais donc simple contribution.

                              De quoi pourrions-nous par exemple qualifier les mots en « minie » ?

                              Par extension : L’anomie serait l’anominie.

                              Hors propos, je me vois dans l’obligation de vous témoigner l’assurance d’un regard apposé avec intérêt, quand à vos propres obligeances et par là même en français, de vous remercier pour l’apport de votre commentaire à cet article aux QCM indéfinissables.

                              Peu de gens auraient donner meilleur exemple,
                              bien à vous Monsieur ffi.

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