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Accueil du site > Tribune Libre > L’unité du mental et du physique : le cognitif

L’unité du mental et du physique : le cognitif

Nous avons vu ici que le domaine du mental comporte trois volets correspondant à ce qui est de l’ordre de la connaissance, des affects et de la volition sous toutes ses formes (conscientes et inconscientes). Mais encore faudrait-il savoir qu’est-ce que la pensée ou la représentation ? Qu’est-ce que l’émotion ou le sentiment ? Qu’est-ce que le désir, l’intention ou la volonté ? Comment tout cela s’articule-t-il pour former l’unité du mental ? Et surtout, comment cela vient-il s’incarner dans notre corps physique ? Une réponse claire et intelligible sera proposée pour chacune de ces questions à partir du modèle cyclique de l’habitude sur lequel est basée l’approche synthétique de la psychologie présentée ici.

Introduction

Quand un homme tente de séduire une femme, est-ce sa biologie (gènes, hormones, neurones, etc.) qui détermine son comportement, le mental n’étant alors qu’une fiction, un simple reflet, un « fantôme dans la machine » corporelle ? Ou, ne serait-ce pas, au contraire, le mental (représentations, sentiments, désirs, etc.) qui anime le corps ? Mais dans ce cas, par quel mécanisme l’esprit exercerait-il son emprise sur le corps ?

Ce vieux et fameux questionnement sur la relation corps / esprit découle de la position dualiste, tout aussi ancienne, qui distingue d’un côté le monde de la matière et de l’autre, le monde de l’esprit.

Dans ce qui suit, il devrait apparaître que cette interrogation est vaine. Il s’agit d’un faux-problème né du geste fondateur de la pensée philosophique qui consiste à tailler à volonté dans l’unité du monde pour ensuite se demander comment il se fait que les différentes parties artificiellement distinguées et séparées se trouvent malgré tout reliées ou réunies.

Par exemple, lorsque des philosophes se demandent le plus sérieusement du monde comment il se fait qu’en apercevant une mule un individu puisse penser qu’il s’agit d’un cheval, ils mobilisent le double présupposé qu’en tant que sujet pensant, cet individu est tout à la fois (a) complètement à part ou détaché de sa réalité environnante et (b) complètement soumis à cette même réalité qui vient s’imprimer dans son esprit via une perception (supposément directe mais dorénavant incompréhensible) des choses. [1]

Nous ne procéderons pas ainsi. Nous considérerons que le mental n’est pas distinct et radicalement opposé à la matière mais qu’au contraire, les deux forment une unité indissociable, exactement comme il n’est pas de matière qui n’ait une forme quelle qu’elle soit.

Autrement dit, la psychologie synthétique proposée ici n’est pas dualiste. Elle est moniste (du latin et du grec mono qui veut dire un, unique, seul etc.) au sens où ce qui est postulé est un univers où les seules « choses » qui « existent » sont des processus cycliques dont la dynamique naturelle (logique) de reproduction est non seulement la source du biologique mais est aussi, par hypothèse, toujours-déjà porteuse des dimensions caractéristiques du psychologique.

Tout l’enjeu de cet article sera de dégager et cerner suffisamment les dimensions en question pour aider à comprendre comment elles peuvent se trouver instanciées (réalisées) dans des processus physiques.

Nous avons vu précédemment qu’une lecture psychologique des cycles de nature physique est déjà possible à partir du simple fait de leur reproduction puisqu’ ils peuvent être perçus comme autant d’habitudes qui, par leur propension à se répéter, permettent à toute chose de « persévérer dans son être » comme disait Spinoza.

Ce qu’il nous faut voir à présent, c’est… :

  1. en quoi une habitude, quelle que soit l’activité à laquelle elle correspond, est inévitablement porteuse des trois dimensions du mental…
  2. de sorte que nous devrions pouvoir repérer ces dernières dans le cycle physique au travers duquel ladite habitude se manifeste ou s’incarne.

Pour ce faire, prenons un exemple concret et considérons un naturaliste, disons un chasseur de papillons, qui s’adonne à son activité favorite (une habitude) et qui « aperçoit un spécimen, le reconnaît, le chasse, l’attrape puis se réjouit de sa capture » [2]. Comment le mental se manifeste-t-il au cours de cette activité ?

De la triunité du mental

Constatons d’abord que dès que nous nous mettons dans la disposition de les rechercher, nous percevons très aisément les différents aspects du mental qui apparaissent ici dans une succession parfaitement logique. Le mental du chasseur est, en effet, tour à tour occupé par… :

  1. d’une part, la représentation en mémoire du spécimen comme la connaissance de sa présence dans le territoire de chasse, ce qui lui permet d’anticiper sa perception et de se préparer à sa reconnaissance. Tout ceci (en italique) relève du cognitif.
  2. D’autre part, la valeur du spécimen, c’est-à-dire, ce qui le rend désirable et incite à se lancer à sa poursuite en produisant des efforts soutenus jusqu’à la réalisation de l’objectif : sa capture. Tout ceci, qui contribue à l’orientation et la canalisation de l’action, appartient au domaine du conatif[3]
  3.  Enfin, la satisfaction (le plaisir) suscitée par la capture du spécimen. Il s’agit d’une émotion positive (une réjouissance) qui appartient tout naturellement au domaine affectif. On peut imaginer que s’il en était venu à échouer, notre naturaliste aurait éprouvé une émotion négative, une frustration, une peine donc.

Avec beaucoup de clairvoyance, McDougall [4], à qui je dois cet exemple, a su pointer le fait que, bien qu’ils semblent se manifester tour à tour, ces différents aspects sont tous continûment présents au cours de l’activité. Ainsi écrivait-il : « quand nous appliquons l’un de ces trois adjectifs [cognitif, conatif, affectif] à n’importe quel phase d’un processus mental, nous signifions simplement que l’aspect évoqué est le plus proéminent des trois à ce moment précis. » [5]

Il est peu contestable qu’un chasseur qui se trouve dans la phase cognitive correspondant au moment où il repère le spécimen est d’ores et déjà engagé dans l’effort : il est aux aguets, complètement mobilisé, prêt pour l’action. Le registre conatif est donc pleinement présent. Ce chasseur est aussi probablement excité à la vue du spécimen, il « salive » en anticipant la satisfaction que lui apportera sa capture. Le registre affectif est donc lui aussi activé. Toutefois, il est clair que ce qui saute aux yeux de l’observateur et caractérise ce moment, c’est l’acte clé que constitue la reconnaissance du spécimen. C’est pourquoi (a) nous jugeons volontiers que cette phase relève du cognitif mais (b) force est d’admettre que McDougall a vu juste : les trois aspects du mental sont bel et bien présents alors même que nous prêtons seulement attention à celui qui domine.

Notre premier objectif étant atteint puisque nous pouvons à présent toucher du doigt l’unité fonctionelle du mental, passons à la question bien plus délicate de savoir comment faire tenir tout cela dans un cycle de nature physique [6].

A priori, on pourrait se sentir démuni face à un tel objectif. Mais nous savons qu’il est réalisable, au moins en partie, car nous disposons déjà d’un très sérieux élément de réponse concernant le cognitif, sous le rapport du concept de forme.

Le cognitif comme reconnaissance de forme

Nous allons défendre ici l’idée que le cognitif vient à s’incarner ou s’ « inscrire corporellement » [7] (cf. auss la notion d’embodiment) au travers des processus de reconnaissance de forme instanciés au niveau physique.

Il est en effet apparu dans l’article Théorie de la mimesis générale II que des processus de reconnaissance de forme — l’essence même du cognitif — étaient à l’œuvre dans la dynamique d’accrochage (purement mécanique) de ces cycles physiquement réalisés que l’on nomme aussi oscillateurs et qui sont absolument omniprésents dans l’Univers étant donné qu’on les retrouve partout, dans tous les domaines et les champs divers et variés de la physique, de la chimie, de la biologie, etc.

Lorsque ces cycles ou ces oscillateurs sont « semblables » sous quelque rapport, ils interagissent d’une manière qui les porte à s’accrocher, c’est-à-dire, à entrer dans une résonance qui les amènera à se solidariser et donc à se stabiliser l’un l’autre. C’est ce que font par exemple les cordes d’une guitare lorsqu’il se trouve qu’elles produisent la même note : en faire vibrer une amène l’autre à faire de même : elle entre en résonance. Tout se passe comme si elles réalisaient cet acte cognitif par excellence qu’est le fait de se reconnaître comme semblables, c’est-à-dire ici le fait pour ces deux cordes de se « reconnaître » l’une l’autre comme ayant la même fréquence fondamentale. Cette « reconnaissance » les amène à « marcher de concert », à faire équipe en somme. Comme dit l’adage : « qui se ressemble s’assemble ».

De la même manière, ces oscillateurs particuliers que sont les horloges et les montres mécaniques tendent à s’accrocher [8] mais cela se réalisera d’autant plus facilement qu’elles seront du même modèle.

La chimie, la biochimie ou la physiologie regorgent elles aussi de mécanismes de reconnaissance de forme de type clé-serrure instanciés au niveau moléculaire comme lorsque, par exemple, des composés chimiques se « reconnaissent » et réagissent l’un avec l’autre, lorsqu’une enzyme « reconnaît » sa cible et catalyse sa transformation ou, enfin, lorsqu’une hormone telle que l’acétylcholine vient se « logger » dans la structure réceptrice de la membrane cellulaire d’un neurone pour contribuer à sa dépolarisation et à l’émission d’un potentiel d’action (cf. l’illustration ci-dessous).

Il semble donc très possible que, aussi élémentaires qu’ils soient, des processus physiques (chimiques ou biologiques) soient capables d’opérer une véritable reconnaissance de forme.

La chose pourrait nous paraître assez évidente car c’est précisément ce que réalise le fameux symbolon, cette pierre brisée en deux dont les fragments — lorsqu’ils se trouvent à nouveau réunis et viennent à s’ajuster — permettent à ceux qui en étaient porteurs de se reconnaître comme rassemblés, solidaires, uns. Telle est, en effet, la signification originaire du symbole.

Il existe donc au niveau moléculaire, au niveau du minéral une reconnaissance de forme (une assimilation) que l’on peut considérer comme l’essence même de ce symbolique dont les sciences cognitives ont voulu faire leur alpha et leur oméga [9].

Il n’y a ainsi, au final, rien de surprenant à ce que le grand psychologue suisse Jean Piaget [10] ait adopté un modèle du fonctionnement mental conçu comme un cycle physico-chimique, c’est-à-dire, comme un enchaînement de réactions chimiques entre des composés (A, B, C, etc.) qui « attendent » le réactif correspondant (A’, B’, C’, etc.) pour passer à l’étape suivante, exactement comme la serrure attend sa clé pour se mettre en mouvement (cf. illustration ci-dessous.)

Ce cycle réalise donc à chaque étape de son parcours une assimilation, c’est-à-dire, une « reconnaissance en acte » du réactif correspondant qui est ainsi « perçu » par l’organisation cyclique.

Notons bien qu’il s’agit seulement d’une généralisation abstraite sur le versant physico-chimique de la réaction circulaire baldwinienne qui rend compte des comportements répétifs (comme le cri du bébé) et que nous avons déjà évoquée ici en tant que modèle d’une unité psychologique élémentaire articulant (une) perception et (une) action :

Le lecteur attentif observera que nous avons accompli tout ce chemin pour déboucher au final sur un (bon vieux) modèle du cycle assimilateur qui satisfaisait déjà, au moins partiellement, l’objectif initial car, alors même qu’il s’agit par construction d’un cycle physico-chimique, il sert à incarner l’habitude sur son versant cognitif.

Notre avancée prudente était toutefois nécessaire car il ne s’agit pas seulement de constater que le cycle assimilateur piagétien « inscrit » la cognition dans le plan physique. Il nous faut aussi comprendre que nous ne saurions nous en satisfaire puisque la réalisation physique des deux autres volets du mental reste encore mystérieuse.

Le cycle assimilateur ne pourra être notre modèle du fonctionnement cognitif que si le conatif et l’affectif y trouvent aussi leur place, c’est-à-dire, s’il peut offrir un modèle complet du mental.

Nous allons donc tenter d’avancer de ce côté en commençant non par le conatif, qui est le plus énigmatique des aspects du mental, mais par l’affectif qui est à peine moins obscur mais qui présente tout de même l’avantage d’avoir connu une réflexion sur la nature des émotions quasi permanente depuis la fin du XIXe.

Comment repérer ou situer l’affectif dans un cycle physico-chimique, tel sera le problème que nous tenterons de résoudre dans le prochain article.

La route est longue encore mais une étape clé vient d’être franchie. Nous avons pu, en effet, assigner le mental au domaine physique ce qui n’est quand même pas anodin car l’usage veut qu’ils soient toujours bien distingués voire opposés.

Cette unité du mental et de la matière n’est pas univoque. Il ne s’agit pas nécessairement, il ne s’agit même pas du tout d’une pure naturalisation susceptible de contribuer au désenchantement du monde par réduction du mental au physique.

Tout au contraire, il importe d’observer que soudainement la matière, le monde physique prennent une autre allure : ils se révèlent, par nature, cognitifs grâce aux mille manières au travers desquelles peut s’opérer ce que nous appelons la reconnaissance de forme.

Nous verrons prochainement en quoi on peut aussi les considérer comme affectifs et conatifs de sorte que le mental et le physique seraient au final une seule et même chose.

Il semblerait donc que nous voilà en route vers un réenchantement du monde.

L’idée n’est pas pour me déplaire.

 

*         * 

*

 

PS : Pour ceux qui découvrent ce fil de réflexion, je rappelle que sa visée première (énoncée ici et ) est d’évoquer le fait psychologique de la manière la plus simple possible de manière à mettre chacun en position de se l’approprier et de s’inscrire dans une démarche réflexive et même savante pour contribuer ad libitum à une science citoyenne qui nous fait cruellement défaut et dont l’avènement serait même urgent tant notre technoscience s’est dégagée de tout contrôle citoyen et produit des effets délétères de grande ampleur visibles sur toute la planète.

De cette visée de simplicité vient le caractère direct et plutôt épuré — d’aucuns diront schématique ou simpliste — de mon propos. Tout cela est assumé de sorte que ceux qui pensent que j’aurais dû évoquer tel auteur ou tel aspect de la question seront toujours bienvenus s’ils veulent bien m’en faire part. Les commentaires n’en seront que plus riches !

 



[1] Bien que fondateur de la pensée occidentale, ce présupposé est doublement pathologique car non seulement le sujet est arraché à son milieu mais, de surcroît, il s’y trouve soumis, c’est-à-dire, dépouillé de tout pouvoir d’influence. Il devient ainsi inconcevable pour le philosophe que la perception puisse être construite et donc, mal construite (lorsque je prends une mule pour le cheval qu’elle n’est pas). Il a fallu attendre la psychologie du XIXe puis la neuropsychologie de la fin du XXe siècle pour comprendre que, comme disait Taine « la perception est un hallucination vraie » et certainement pas une « photographie » du réel.

[3] Comme il y a là matière à une définition originale de la conation, notion qui est restée jusqu’à présent extrêmement nébuleuse, je la formule explicitement comme l’idée que : « la conation correspond à l’ensemble des facteurs et processus mentaux qui contribuent à l’orientation et à la canalisation de l’action vers son but. » (© Luc-Laurent Salvador 2013). Je m’empresse de préciser que la canalisation n’est jamais qu’une orientation réalisée de manière continuelle, comme lorsque l’on conduit ou dirige un véhicule, un orchestre ou soi-même.

[4] Cf. McDougall (1923) Outlines of Psychology. Il reste un des très rares psychologues à avoir tenté de penser les phénomènes psychologiques dans leur unité, c’est-à-dire, dans leur triple aspect cognitif, affectif et conatif plutôt que de les réduire à l’un ou l’autre comme le font encore actuellement la plupart des chercheurs.

[6] J’écris « physique » plutôt que « matériel » car je ne veux pas exclure ces phénomènes cycliques par excellence qu’on dit « ondulatoires ».

[7] Pour employer la formulation utilisée par Varela, Rosch et Thompson (1993) dans leur livre « L’Inscription Corporelle de l’Esprit  ». Je la trouve maladroite car le terme « inscription » renvoie à un processus scriptural qui est ici hors de propos. Par conséquent, je ne l’utiliserai pas.

[8] Ce qui est bien « naturel » puisque ces mécanismes sont d’emblée conçus pour « battre » sur le même rythme.

[9] Sans jamais soupçonner à quel point la justesse de cette perspective anéantissait du même coup leur prétention à se situer au-dessus des processus dits sub-symboliques. Le cognitif est enraciné dans le sub-symbolique ou il n’est pas.

[10] Un de mes maîtres à penser et inspirateur direct de la psychologie synthétique que je m’efforce de présenter ici.

 


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18 réactions à cet article    


  • Jean-Philippe 17 mai 2013 12:45

    Bonjour,

    Une science citoyenne ?
    La science est une méthode. En simplifiant, on peut dire qu’elle consiste à émettre des hypothèses, et à tenter de les valider par tous moyens rationnels.
    Donc, tout citoyen peut mettre en oeuvre une démarche scientifique, oui.
    Mais l’intérêt sera le plus souvent pour lui-même, car d’autres, disposant éventuellement de plus de moyens (connaissances, outils, observables ...) y auront peut-être procédé, exactement sur le même sujet, avant lui.
    Autrement dit, pour le citoyen en question, deux démarches sont possibles :
    - expérimenter,
    - chercher les comptes-rendus de ceux ayant expérimenté antérieurement à ce propos.
    Aujourd’hui, vu les domaines étudiés à ce jour, je crois que procéder à la seconde démarche avant la première est plus simple, et sera souvent très instructif.

    Je vous signale cela car j’ai le sentiment que les questions que vous vous posez ont déjà obtenu des réponses très convaincantes.
    Ainsi, vous semblez vous questionner sur l’unicité du physique et du mental ? Heu, dès que vous mettrez en évidence un mental fonctionnant sans un physique, merci de me prévenir, ça m’intéressera fort !
    Plus sérieusement, quelqu’un comme Konrad Lorenz, il y a plus d’un demi siècle, en théorisant sur l’évolution du vivant à partir de la compréhension du fonctionnement qu’il retirait de l’observation de celui-ci, traitait directement les rapports du mental au physique, et en particulier des fonctions du mental par rapport au physique.
    Ce en quoi faisant, il proposait des réponses à beaucoup de questions que vous vous posez, et vous devriez donc prendre connaissance de ses travaux qui ont participé à lui faire obtenir un prix Nobel, avant de prolonger vos réflexions.

    D’une manière générale, l’éthologie participe beaucoup à éclairer la psychologie.


    • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 17 mai 2013 16:20



      Bonjour et merci pour votre message,
      qui me réjouit car je vois que vous n’hésitez pas à entrer dans la polémique.
      Or, comme disait Héraclite « Polémos est père et roi de tout ».

       

      Vous mettez en avant l’intérêt qu’il y aurait, a priori, pour les citoyens de marcher sagement sur les pas de la science institutionnelle en postulant qu’ils sont les experts et, nous les citoyens, des non compétents en la matière.

       

      Le problème, voyez-vous, c’est que « marcher sur les pas de », ce n’est pas seulement s’informer de la production scientifique, c’est aussi en suivre la direction et il se pourrait qu’elle ne soit pas bonne pour la communauté des hommes. Qui doit décider, les scientifiques ou les citoyens ?

       

      Depuis Kant, nous savons que la connaissance ne peut remplacer les valeurs.

      C’est là où cet homme total qu’est le citoyen (qui a des connaissances, des affects et des valeurs qui orientent ses choix), se distingue du scientifique qui est lui trop souvent un automate cognitif mû avant tout par ses sources de financement.

       

      Si je vous dis qu’en matière de nucléaire, d’ondes électromagnétiques, de vaccins, de pesticides un nombre dramatique d’études sont financées par des lobbies, vous commencez je pense à comprendre l’intérêt d’une science citoyenne.

       

      La science c’est d’abord une affaire de politique, qui doit être mise au service de l’intérêt public. Pensez-vous que nous soyons dans ce cas de figure ?

       

      Ce n’est pas du tout le cas. Les résultats scientifiques sont tous, par définition, réfutables et si vous comptez sur les scientifiques pour le faire, vous risquez d’attendre longtemps.

       

      C’est précisément par rapport à la question de l’autisme que j’ai voulu prendre position en indiquant que si les parents avaient pu intégrer des fonctionnements de type science citoyenne l’archaïsme et l’éclectisme de certaines pratiques de soin n’aurait duré aussi longtemps.

       

      Voyez mon mon second papier sur la question : Sortir de Babel : pour une science citoyenne - AgoraVox le média citoyen

       

      En conclusion sur ce point, il me semble qu’une science citoyenne est non seulement possible, elle est indispensable afin que les politiciens puissent prendre des positions protectrices du bien public dans un maximum de circonstances.

       

      Maintenant concernant la possibilité pour le citoyen d’accéder à l’espace de la réflexion et des controverses scientifiques, votre position ne semble de bon sens que parce que la distribution statistique de ceux qui sont capables de réflexion dans la population lui est favorable.

       

      Mais vous ne pouvez exclure qu’un amateur éclairé puisse faire une contribution remarquable ou même exceptionnelle à la connaissance, scientifique ou pas. C’est le principe du Monde III de Popper. Toutes les idées sont légitimes a priori indépendamment des qualités de la personne (interdiction des critiques ad hominen).

       

      L’histoire est replète de cas de cette nature avec, par exemple, le fameux Wegener, géographe de son état, donc à peu près incompétent en matière géologique, qui est allé contre la science de son temps et a vu sa reconnaissance acquise seulement une quarantaine d’année après.

       

       

      La psychologie est une science jeune d’une grande immaturité et bien des percées sont accessibles aux individus motivés. Encore une fois, j’ai lu des récits de parents d’enfants autistes et ce qu’il décrivaient est une vraie démarche expérimentale qu’ils ont menée souvent avec l’opposition farouche du corps médical qui doit assurer le soin et n’est donc pas prêt à des révolutions conceptuelles à tout bout de champ.

       

      Depuis quelque décennies que je fréquente l’université, je peux vous assurer qu’il n’y a pas, à première vue, plus d’intelligence dans les labos de recherche que, par exemple, dans l’administration postale ou le commerce.

       

      Si les scientifiques étaient plus intelligents et plus logiques que le commun des mortels, ça se saurait, ça ferait longtemps qu’on en aurait la preuve. A ma connaissance nous ne l’avons pas.


    • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 17 mai 2013 16:22

       

      Je vous remercie d’attirer ainsi l’attention sur les travaux de Konrad Lorenz qui sont vraiment de premier ordre.

       

      Je l’ai lu avec avidité pendant des années et j’en recommande la lecture à tout un chacun. Il offre un éclairage sur le phénomène humain absolument saisissant.

       

      Sans dévoiler le suite, je peux vous dire qu’il fait partie des rares auteurs que je citerai dans l’article suivant, en renvoyant notamment à son modèle hydraulique de la motivation qui est au coeur de son système conceptuel.

       

      Sachez que ce modèle a été fondamentalement invalidé et je n’ai pas voulu insister sur cet aspect car Lorenz vaut mieux qu’une critique facile.

       

      Le modèle que je présenterai la prochaine fois concernant les émotions sera aussi lorenzien que piagétien, sous le rapport de l’énergétique des conduites.

      La question du comportement instinctif avec IRM n’a plus d’actualité mais nombre d’observation de Lorenz gardent encore une grande pertinence.

       

      Le problème est que plus personne n’en parle au plan de la recherche actuelle où Lorenz est surtout présenté comme ayant un intérêt historique.

       

      Pour ma part, je crois qu’il a eu de très bonnes intuitions et je me suis par exemple servi de l’abréaction dans un article scientifique sur la psychose débutante.

       

      Maintenant, concernant les réponses très convaincantes à mes questions que la science aurait déjà donné, je voudrais vraiment que vous me donniez un exemple.

       

      Pour ma part, je constate que la plupart de la science s’accomplit dans le contexte d’une épistémologie dualiste qui la voue d’emblée à l’échec.

       

      Nous ne faisons que di-gérer ce dernier depuis la naissance de la psychologie. C’est pourquoi il importe de se donner une nouvelle ontologie et c’est ce que je propose de faire en considérant que le modèle baldwino-piagétien, parce qu’il est intelligible par tout un chacun, pourrait aider à faire avancer les choses du côté d’une science qui est devenue une vraie tour de Babel (cf. l’article Agoravox donné plus haut) et qui aurait bien besoin d’inspiration citoyenne.

       

      « vous semblez vous questionner sur l’unicité du physique et du mental ? Heu, dès que vous mettrez en évidence un mental fonctionnant sans un physique, merci de me prévenir, ça m’intéressera fort !  »

       

      Je ne comprend pas votre remarque car, précisément, je m’oppose au dualisme qui distingue l’un et l’autre et se demande ensuite comme il se peut qu’ils soient articulés. Que votre pensée puisse être source causale d’une action est pour le moment une question non résolue de la philosophie analytique. Je vous suggère d’aller poser votre question à nos amis philosophes car, sauf erreur de ma part, elle leur est destinée plutôt qu’à moi.


      D’une manière générale, l’éthologie participe beaucoup à éclairer la psychologie.

       

      C’est complètement faux.

      Ce sont deux champs de recherche presque hermétiques et il y a une bonne raison à cela : comme je l’ai expliqué dans l’article intitulé QU’EST-CE QUE LA PSYCHOLOGIE ? , l’éthologie explique le comportement par la biologie alors que la psychologie se définit comme science en tant qu’explication du comportement par le fait mental dont les éthologues n’ont que faire.

       

       

      Les sages philosophes de l’Antiquité l’on toujours dit, le grand danger pour tout un chacun et pour le peuple, c’est de « croire » ce que nous racontent les spécialistes, qu’ils soient politiciens ou scientifiques.

       

      A tort ou a raison, je considère la science citoyenne comme la seule vraie science car, à l’instar d’une organisation politique, il s’agit d’une action collective qui a pour but le bien public et qui, partant, doit pouvoir exercer un véritable contrôle sur les orientations et méthodes de la recherche scientifique sans laisser cela des politiciens à la solde des lobbies.


    • Malika 17 mai 2013 19:04

      Le cognitif ? J’ai en ai entendu parler mais je ne pourrais pas le définir exactement et pourtant cela m’intéresse fortement. En tant qu’enseignante, la lecture des ouvrages pédagogiques réservent inévitablement un passage ou plus à ce « cognitif ». 

      D’après ce que je crois avoir compris, le cognitif serait la reconnaissance de formes et « l’idée que le cognitif vient à s’incarner ou s’ « inscrire corporellement » ».
      Vous voulez dire que deux êtres humains mis côte à côte, qui vont se reconnaître comme semblable, vont se mettre sur la même longueur d’onde, ils vont faire comme l’autre.
      Je devrais donc veiller à me calquer que sur des semblables dont j’apprécie les qualités !
      Comme la cognition c’est l’appariement des formes et bien dans ce cas là c’est quoi la pensée dans le registre cognitif ?

      • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 18 mai 2013 06:36

        Bonjour Malika,

        Merci pour ces questions qui me donnent des pistes pour améliorer l’expression de ma pensée. Le sujet était difficile et je crois que je n’ai pas réussi le challenge de le rendre accessible.

        La question de l’incarnation ou de l’inscription corporelle c’est, dans la perspective dualiste qui a séparé l’esprit et le corps, la question de savoir comment il se fait que de la matière, donc une chose physique, (serait-elle biologique), puisse héberger du mental ET être articulé à lui au point de lui obéir.

        Vu dans l’autre sens, c’est aussi se demander en observant l’activité incessante et incroyablement complexe de la machinerie biochimique du corps où l’esprit pourrait venir se « logger » ici.

        [Notez bien qu’à ce stade de la réflexion je ne distingue par l’esprit et le mental bien qu’on puisse (qu’on doive ?) le faire car le « mind » anglais renvoie au mental et c’est ce qu’il y a de plus adapté dans un contexte scientifique.]

        Il ne s’agit donc pas de la problématique mimétique que j’ai évoqué auparavant bien qu’elle soit toujours pertinente lorsqu’on évoque l’assimilation.

        Telle que je me la représente, l’imitation ne pose pas le problème du rapport corps / esprit. Comme nous l’avons vu elle est une conséquence logique du fait que nous soyons des êtres d’habitudes, avec l’habitude comme cycle perception-action qui se ferme sur lui-même au niveau d’une phase assimilatrice (celle ou nous percevons le comportement de l’autre, nous le reconnaissons car il correspond à une de nos habitudes et celle-ci se trouve ainsi activée, s’exécute, d’où l’imitation, qui est donc purement mécanique, automatique).

        Le problème corps-esprit se pose par contre au niveau de cette unité psychologique élémentaire qu’est l’habitude parce que, précisément, nous pouvons la lire comme un cycle purement physique, biologique en même temps que nous savons qu’elle correspond à un fait psychologique fondamental.

        Ma tentative, que je n’ai visiblement pas su expliciter suffisamment consiste à dire qu’il faut renoncer au dualisme et partir de l’unité du mental et du physique qui se réalise dans l’habitude.

        J’ai commencé par évoquer l’aspect cognitif du mental en pointant que ce qui en constitue l’essence, l’assimilation, est une reconnaissance de forme qui se réalise très bien au niveau physique sur divers modes que nous connaissons bien qui sont par exemple l’emboïtement (du symbolon) ou la résonance.

        Cette perspective s’étend à l’ensemble des processus cognitifs dès lors qu’on veut bien considérer qu’ils ont trait aux représentations. Or qu’est-ce qu’une représentation sinon une forme que nous tentons d’élaborer pour lui donner la meilleure correspondance possible avec... la réalité. Nous retrouvons donc ici cette problématique assimilatrice de la correspondance ou reconnaissance de forme. Impossible d’y échapper. Il n’y a que ça dans le cognitif. Nous tentons de faire coller nos représentations du monde avec la réalité afin d’avoir la meilleure efficace possible. C’est logique, c’est implacable. C’est comme ça.

        La pensée n’est que le processus par lequel nous essayons méthodiquement d’agencer les pièces du puzzle pour maximiser la correspondance de nos représentations avec le réel. Nous pensons quand nous n’avons pas atteint cette correspondance. Nous la cherchons. Quand nous l’avons alors nous cessons de penser, nous sommes dans l’action car notre assimilation est à présent fonctionnelle et permet l’action sans aucun besoin de réflexion.

        En tant qu’elle n’est elle-même que recherche d’ajustements entre notions, concepts, connaissances etc. (les pièces du puzzle) elle n’est qu’emboîtement ou reconnaissance de forme. Dès lors la pensée se tient intégralement dans le champ de l’assimilation.

        Et donc, pensée et physique sont uns.


      • yoananda 17 mai 2013 20:53

        la guerre cognitive :



          • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 18 mai 2013 06:52

            J’ai eu plaisir à vous lire car il est clair que vous, au moins, vous avez compris que tout est psychologique. Tout ce que nous vivons et qui a sens pour nous passe par le mental et donc, en dépend.

            Maintenant je pense que tous lles liens que vous faites seraient d’autant plus suggestifs que vous auriez une « ontologie » parcimonieuse.

            Vous parlez de « grappes cognitives (pensées/émotions/mémoires/hypnoïde) ». Franchement, vous diriez habitude, tout le monde comprendrait beaucoup mieux.

            Notez bien que vous qu’un de vos « hypnoïdes » acquis par « influence sociale », c’est d’appeler ça des grappes « cognitives » alors que les affects et le conatif y sont tout aussi présent.

            Nous sommes fait de grappes, oui, ce sont nos habitudes et elles sont mentalement complètes, cad, avec du cognitif, de l’affectif et du conatif. Il n’y a pas de raison de mettre en avant un aspect plutôt que l’autre.


          • lionel 18 mai 2013 07:59

            Bonjour Luc Laurent,


            Merci pour cet article très pertinent en cette période où la rage de ne pas devenir « fou » devrait nous animer et où il n’a jamais été autant question de connaissance de « soi ».



            Continuez votre recherche, partagez la encore !

            Respect

            Bonne journée à toutes et à tous



            • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 18 mai 2013 19:31

              Bonsoir Lionel,

              Merci pour votre message très encourageant.

              J’ai visionné la première vidéo qui est vraiment un must car elle résume excellement la position que je crois la plus rationnelle, celle de la recherche de la réalité non seulement de notre être mais aussi celle de notre monde.

              Bref, c’est toujours le choix pillule bleue ou rouge mais en y incluant le domaine du soi.

              Pour le deuxième lien je n’en ai pas pris connaissance encore. Mais disons que les univers parallèles ça ne me parle pas pour le moment. Mais je vais quand même aller voir si ça offre des pistes pour penser la conscience... A suivre


            • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 18 mai 2013 18:30

              Bonjour,

              Votre message me fait grand plaisir. Il est riche d’un grand nombre d’interprétations, d’hypothèses et de questions  et montre que vous n’hésitez pas à retrousser les manches pour faire fonctionner mes propositions et les mettre ainsi à l’épreuve, ce qui est exactement ce que je souhaite : c’est le débat qui fait la science citoyenne.

              Passons en revue vos différents points.

              La conception dualiste décrivait l’humain comme une machine, un robot (le physique, le matériel, le palpable) qui serait piloté par un esprit (plus difficile à appréhender avec les sens).

               

              Oui, d’où la tentation des philosophes éliminativistes que l’esprit et toute la psychologie populaire sont des illusions et qu’au final, on pourrait considérer que seule reste la machine, (dénuée de tout esprit réel). Un peu fou mais ça existe.

              Concernant l’idée de généraliser le cognitif à tous les processus d’assimilation qui s’opèrent à l’intérieur du corps

               

              Je suis complètement d’accord. Vous dites très bien ce que je n’aurais pas osé dire, considérant qu’il est peut-être trop tôt pour prendre de telle position. Mais si vous la jugez parlante, alors peut-être que c’est bien le moment de la mettre en avant

              Concernant le fait que dès lors la cognition ne s’opère pas dans le seul cerveau.

              Là encore, complètement d’accord. Un jour il m’a été donné, lors d’un moment convivial dans un café en face de l’école polytechnique, d’entendre une philosophe de renom émettre avec enthousiasme l’idée que ce serait génial d’avoir un cerveau qu’on pourrait poser là sur la table pour mieux l’étudier au lieu de s’encombrer à ce corps qui vient tout autour. Je me suis dit qu’elle ne savait pas ce qu’elle disait. Je parie qu’un cerveau coupé de toutes ses afférences et efférences et seulement alimenté en sang de manière à survivre indéfiniment devient instantanément fou ou épileptique mais quoi qu’il en soit dans un dynamique neurale incontrôlable.

              La pensée serait le résultat d’interactions entre les cellules,

              Oui pour le niveau neuronal qui seul dispose d’une complexité suffisante pour engendrer un processus de pensée. Au niveau cellulaire non neural je pense qu’on peut seulement observer des fonctionnements qui, dans la conception que je défends, pourraient être qualifiés de cognitif, affectif et conatif.

              Donc je réponds oui à votre exemple sur le pancréas.

              les processus cognitifs générant la pensée

              Permettez cette précision qui ne vous est peut-être pas nécessaire mais qui pourra être utile à certains lecteurs : dans la conception proposée ici, rien ne genère le cognitif comme rien ne genère la forme d’une matière quelle qu’elle soit. Quand deux formes s’emboitent c’est du cognitif. Pour la pensée, la chose est plus complexe.

              Tel que je le vois, la différence entre des cellules du cerveau et celles du pancréas c’est que les processus « micro-cognitifs » (à base d’assimilation moléculaire genre acétylcholine – récepteurs) des cellules du cerveau s’opèrent au sein d’une population gigantesque de cellules qui sont agencées de manière à coordonner ces microcognitions pour faire émerger la cognition standard à laquelle nous faisons généralement référence et qui est une cognition de relation à l’environnement (le cerveau est une évolution du tissu dermal qui est « au contact » de l’environnement, et c’est vrai en particulier des yeux).

              Le mental se situe aux deux niveaux mais il est clair que jusqu’à présent nous n’avons eu à connaître que le second, celui dans lequel nous vivons, nous êtres pensants.

              Mais également qu’il apparaît possible de modifier la pensée sans l’intervention de chimie (sans obligatoirement l’intervention de chimie, puisqu’elle est utilisée pour modifier certains comportements ) contrairement aux autres processus.

               

              Là je n’ai pas compris. Pouvez-vous préciser ?

               

              Je ne porte aucun jugement, mais essaie juste de comprendre comme si j’avais 5 ans

              Je pense que tout un chacun est en position de porter des jugements. Je ne vois aucun problème à cela. Au contraire. Je crois qu’il importe de dire ce qu’on croit même si ça doit fâcher. Le débat c’est cela non ? Quant à avoir cinq ans, je trouve que c’est une bonne idée car c’est une garantie d’honnêteté. D’ailleurs quand on fait référence à  l’« l’honnête homme »  on ne désigne jamais des scientifiques. Ils ont la mémoire trop chargée et trop de motifs pour rester sourds ou entendre de travers.

              à suivre de suite...


            • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 18 mai 2013 18:50

              Désolé, je pense qu’il y a un gros bug avec l’éditeur html d’AV qui a tout mis en gras italique alors que seul ce qui concerne votre message devait l’être.

              Quoi qu’il en soit, voici la fin de ma réponse à votre premier message :

              e mimétisme

              Il va de soi que nous ne sommes pas dans l’automatisme mimétique à tout moment. Nous pouvons inhiber nos impulsions et ne pas imiter. Concernant l’inverse notez bien que rien ne ressemble plus à une forme donnée que son inverse. Donc généralement, ceux qui font l’inverse d’un modèle donné prennent modèle sur ce modèle mais tentent d’affirmer leur autonomie, leur indépendance en faisant l’inverse. Ça marche quand il y a conflit. Il masque tout, même la similitude. Comme l’a souligné Girard, on parle des rivaux parce qu’ils sont riverains.

              Ou alors réagissons-nous seulement à l’inconnu ?

               

              Nous ne réagissons qu’à ce que nous reconnaissons. Si nous reconnaissons que nous sommes dans l’inconnu nous agissons en conséquence de cette reconnaissance. Si nous ne pouvons reconnaître que nous sommes dans l’inconnu, nous n’y sommes pas, nous n’y réagissons pas (même si d’autres, eux, qui ont des schèmes pour assimiler notre inconnu, le voient et nous crient d’agir. C’est le principe de base de l’assimilation. Notre perception est toujours-déjà une reconnaissance).


            • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 18 mai 2013 18:58

              Je vois que j’ai oublié la question de la perfection des modèles.

              Je pense que Malika a raison car comme Platon, je crois que chacun devrait avoir les meilleurs modèles possibles.
              La notion de « mauvaises fréquentations » fait sens.
              La force d’entraînement du mimétique est terrifiante.

              C’est pourquoi il est bon de s’en servir pour aller vers ce qui est difficille et exige beaucoup de discipline comme les apprentissages.

              Il nous faut des bons modèles en tout, sinon nous allons partir à la dérive (j’ai peur que ce soit déjà le cas) ;-(


            • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 18 mai 2013 19:10

              Je n’avais pas vu que vous êtiez déjà revenue sur ce passage. Vous amenez là une sacrée question que je ne vais pas éluder.

              J’ai longtemps pensé, notamment lorsque j’ai rédigé ma thèse que nous étions des populations d’habitudes donc des êtres « mécaniques » puisque l’automatisme mental de notre psychologie est estimé à plus de 99,41 % par le spécialiste du domaine J. Bargh (c’est une boutade de sa part mais ça donne une bonne idée quand même).

              A partir de là, il restait à comprendre comment émerge en nous ce sentiment si vif d’être des êtres doués de libre-arbitre et capables de choix, disposant en somme de ce que l’on peut appeler un « soi-agent », c’est-à-dire, la part de notre soi qui agit, décide, impulse etc., et s’oppose au « soi-objet » qui correspond grosso modo à tout ce qui est vrai de nous (j’ai vécu ça, j’ai senti ça, je possède ça, bref, que du descriptif, de l’image (de soi)).

              J’en ai fait une thèse et je vais venir à cette thématique ici car elle sera indispensable à un moment donné pour comprendre la condition autiste.

              Pour vous donner dès à présent une réponse claire malgré tout je vous dirais que tout bien considéré, je suis convaincu que le soi-agent est une réalité qui, pour socialement construite qu’elle soit, est une réalité comme les autres (qui sont aussi socialement construites d’ailleurs mais souvent nous ne voulons pas le croire). Bref, je pense qu’il n’y a AUCUNE pertinence psychologique à renoncer à l’idée que nous décidons.

              Il me semble important d’y croire pour être le plus conscient possible de nos choix car le moindre d’entre eux a des conséquences sur nous et sur le monde.

              Bref, notre responsabilité est entière. J’espère que cela vous convient pour le moment. Vous me direz…


            • Hermes Hermes 18 mai 2013 21:24

              Bonjour Luc Laurent, avez-vous vu passer un commentaire de ma part ? visiblement il s’est perdu dans les limbes d’Internet....
              Je reviendrai peut-être prendre le temps de le poster... si vous n’y voyez pas d’inconvénient ;=)

              Bon WE.


              • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 19 mai 2013 06:14

                Bonjour Hermes,

                Désolé, je n’ai pas vu passer votre commentaire.
                Ce genre de mésaventure me frustre au plus haut point c’est pourquoi dorénavant j’écris mes réponses ailleurs (Thunderbird plutôt que Word car AV ne digère pas le format word) et je fais un copier-coller.
                Depuis que je fais ça je suis tranquille.

                En espérant que cela ne va pas vous décourager et que vous reviendrez nous donner votre éclairage.

                Bon WE à vous aussi


              • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 19 mai 2013 06:39

                Je confirme le conatus de Spinoza relève bien du conatif.

                Oui, bien sûr, Hubert Reeves nous a donné un bel exemple du fait que la connaissance ou la compréhension n’ôte pas sa richesse au réel. Après avoir compris les équations de Maxwell sur la lumière, il est allé voir, anxieux le lever du soleil et a découvert qu’il était encore plus émerveillé qu’avant.

                A quel forum psy faites-vous référence (que j’aille y faire un tour) ?

                Pour l’imitation enfin, quels auteurs vous fait-on étudier en cours sur ce sujet (ceux qui vont dans le même sens que Malika et moi) ?

                Bien sûr que nous imitons en fonction de nos besoins et que ceux-ci évoluent au cours du temps. Mais on ne sait jamais à l’avance ce qui va se passer. Donc il reste le fait que oui, nous imitons en fonction de nos besoins, cad, ce qui en nous est tout disposé à s’accomplir.

                L’observation d’un modèle sera l’occasion de passer le seuil d’activation et d’enclencher l’action.

                D’où l’importance d’avoir des bons modèles. Car nous sommes tous capables du meilleur comme du pire... smiley


              • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 20 mai 2013 08:10

                Merci pour votre message pas si long que ça, rassurez-vous.

                Merci en particulier pour l’éclairage sur les auteurs de référence. C’est rassurant de voir qu’au niveau enseignement les fondamentaux restent sensiblement les mêmes.

                Je ne connaissais pas Facchin. ça m’a l’air assez intelligent comme approche. Mais je détesterais avoir à me penser comme zèbre. Je pense qu’il faut être en souffrance et en quête idenditaire pour en passer par là. Bref, je ne suis pas sûr qu’on ait besoin de cette catégorie, mais cette réserve ne porte pas la qualité de ce que fait Facchin.

                Une bonne stratégie de procrastination (j’en connais un rayon), c’est la lecture.
                Si cela vous intéresse, je pourrai vous passer ma thèse qui porte notamment sur la question de l’autisme. C’est précisément ce à quoi la série d’article que je produis ici est censée nous amener au final. Il y a encore du chemin !

                Vous pourrez ainsi découvrir que la psychologie sociale a d’abord été un fabuleux effort pour masquer le fait mimétique derrière l’écran de fumée de ses euphémismes. Vous avez tout à fait raison de dire que mon orientation est alignée avec celle de ces travaux, mais c’est juste parce que la réalité est têtue. Fondamentalement l’attitude de Asch est générale et elle a quand même réussie à faire que l’imitation n’est pas reconnue en tant que tendance. C’est ce que j’argumente dans ma thèse.

                Tenez-moi au courant. Vous savez où me trouver.
                Et merci d’avoir contribué à l’animation de ce fil !

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