La bagnole
Le temps de l'innocence
C'est le début de l'ère de la voiture, de l'auto, de la caisse, du véhicule, de la tire, la poubelle, la berline, le break, le pick-up, le cabriolet, le coupé, la char, la bétaillère, la guimbarde, le fourgon, la limousine, le bahut, la chiotte, le clou, le tacot, le veau... et pour nous les vieux : la doche !
La jeunesse des conducteurs et des passagers... cheveux au vent, capote enroulée, on était bercé ou secoué, selon la route ; on bidouillait une réparation de fortune sur place, avec un bas comme courroie , avec un collier de plomberie comme attelle à un bras de roue, un cardan ...on n'hésitait pas à mettre le chauffage en plein été pour « refroidir » le moteur ! Pas dans la deux-pattes au refroidissement par air ! C' était la différence entre Renault et Citroën !
Trajets festifs, vacances, liberté !
Et dire qu'aujourd'hui, il y a des jeunes qui se sentent niés, rien, s'ils ne roulent pas en BM !
Avant de pouvoir se la payer, notre première doche ( dauphine ou 4L pour d'autres) on faisait du stop. Les filles se faisaient arrêter en rase campagne quand la main du conducteur se mettait par inadvertance sur leur genou.
Premier achat de confort ou de sécurité : une bagnole.
Ce qui ne les empêchait pas, après, de prendre des stoppeurs qui, sournoisement, avaient donné comme destination la prochaine ville, à trente bornes.
J'ai traversé la France ainsi avec des gus avec qui je devais finalement partager mon sandwich, ou à qui je me sentais obligée d'offrir ma dernière cigarette.
En toute honnêteté, j'étais bien contente d'arriver !
Peu à peu et à force d'habitude, la bagnole devint une évidence ; on s'énervait désormais après elle ou on râlait quand elle tombait en panne.
On la poussait dans les descentes, on enclenchait une vitesse à l'arrêt parce que le frein à main ne marchait jamais, on nettoyait la tête de delco à la moindre pluie : on était jamais sûr de partir et jamais sûr d'arriver !
Quand on prenait une prune pour pneus lisses, on nous donnait quelques jours pour les changer et aller les montrer à la gendarmerie la plus proche, qui retirait la prune !
Il nous arrivait de perdre quelques papiers précieux ou quelque outil par les trous du plancher, mais nous ne voyions guère de voitures effondrées sur elles-mêmes par la rouille, sur les bas-côtés de la route !
Le temps de l'innocence dura encore un peu après que Reiser pourtant nous eut prévenus ; on trouvait justes ses dessins mais cela n'influençait pas notre usage.
Quarante ans plus tard, certains en sont encore là !
Ah ! Oui, on a fini par préférer les moteurs qui ronronnent à ceux qui hoquettent, les portes qui s'ouvrent, les clignotants qui clignotent, les freins qui freinent... nous en avons joui sans ambages, de la bagnole, mais :
FINI LE TEMPS DE L'INNOCENCE !
La voiture n'est pas simplement une source de pollution de l'air, son odeur dans les rues d'une ville suffoque le paysan qui s'y rend rarement ; c'est une arme lourde en plus d'être une nuisance sonore, un danger de tous les instants !
Rouler tue : il faudrait l'inscrire sur toutes les voitures, en gros, comme sur les paquets de clopes.
Rouler tue
la faune, sauvage ou domestique, la flore des bas-côtés ; rouler empeste l'air de la ville, ôte toute tranquillité ; ah ! Qu'est devenu ce bel objet d'une belle illusion de liberté ?
C'est une déesse, et pas seulement citroëne, on la craint, on la flatte, on la fait aller toujours plus vite nulle part ; pour elle on s'endette cependant qu'elle tue nos animaux, nos enfants : aucun sacrifice ne la comble ; elle est insatiable.
Et nous sommes pris par son charme maléfique qui domine notre vie, qui dessine nos paysages, nos villes ; elle nous oppresse nous opprime nous stresse !
Tout y passe, les routes sont construites, nos campagnes saccagées, des quartiers entiers de nos villes sont désertés, loqueteux, en ruine comme après une guerre, de subir le passage incessant des bagnoles et des camions.
La terre entière va étouffer mais nous la voulons encore notre petite voiture de sport rouge, pour être quelqu'un.
Nous sommes aussi en sûreté dans les rues de nos villes qu'une biche dans un bois plein de chasseurs !
Une Déesse. Mythologique. Sanguinaire.
On ne peut pas lui échapper, que l'on soit dedans ou que l'on soit dehors.
Une astreinte, une dépendance, une drogue.
Ah, comme c'était bien avant ! Quand on ne voyait pas tout ça !
Et dans le même temps la certitude que la planète nous laissera brûler jusqu'à la dernière goutte de pétrole, prendre jusqu'à sa dernière effluve de gaz, sa dernière poussière de charbon, et, quand toutes ces réserves fossiles seront vidées des poches protectrices du magma, quand l'air sera saturé de gaz carbonique, les conditions que nous aurons provoquées nous tueront.
Mais rien, rien ne pourra empêcher cela !
Tout ce que fait l'Homme est Dieu et Diable. Mais Diable est toujours le plus fort.
Même Dieu a des effets pervers.
AGIR
« Agir pour l'environnement » fait sa trente sixième campagne ; ce qui suit est tiré de sa dernière lettre.
Trente millions de véhicules en circulation ; 2 millions de véhicules neufs vendus chaque année.
Les petits ajustements qui ont été faits au cours de ces dernières années : filtres, baisse de consommation... ce n'est que peinture verte !
Aujourd'hui, les nouveaux véhicules verts émettent 130 grammes de CO2 par kilomètre parcouru aussi, la Commission Européenne propose-t-elle, pour 2020 d'atteindre 93 grammes, alors qu'il est déjà possible de concevoir des véhicules qui ne consomment que 90 grammes.
Plusieurs propositions sont faites :
réduire la vitesse sur les routes et les autoroutes : l'augmentation de la vitesse de pointe de 10 km/h se traduit par une surconsommation de 0,4 à 0,7 l / 100 en ville et de 0,2 à 0,3 sur route.
La France est le pays qui soutient avec plus de constance le diesel : 58% de véhicules diesel sur l'ensemble du parc automobile dont les ¾ sont des véhicules de sociétés.
Chaque année l'État consent à verser des milliards d'euros d'aide au diesel.
12 millions de français vivent dans des zones où le seuil d'alerte aux microparticules sont dépassés régulièrement ! Donc :
réformer la fiscalité sur les carburants, y compris rattraper le différentiel existant entre le prix du diesel et celui de l'essence.
2,833 milliards d'euros ont été dépensés en 2011 pour la publicité des automobiles, donc :
-
Informer le consommateur : dans cette publicité, peu d'informations sont données en matière de consommation réelle et en coût de fonctionnement.
L'objectif de cette campagne est :
- lancer un grand programme européen visant à concevoir le véhicule efficace de demain, avec une consommation de 2 litres au cent.
-
moduler la taxe sur les sociétés pour les obliger à recourir à des véhicule sobres
-
brider les moteurs
-
réduire les vitesses sur les routes et autoroutes
-
moduler le taux d'emprunt et prime d'assurance en fonction de l'efficacité du véhicule
-
mettre en œuvre un malus annuel sur les véhicules polluants.
Voilà .
Tout ceci est bien joli ; nous avons déjà les contrôles techniques tous les ans pour les véhicules diesel professionnels ; il ne m'apparaît pas évident que la différence de prix entre gas oil et essence puisse inciter quiconque à prendre un diesel.
Dieu ( seul ?) sait si je soutiens « Agir pour l'Environnement », depuis longtemps mais il semble bien que l'on ne puisse rien trouver de mieux que « faire payer ».
On éjecte ceux qui ne peuvent pas, ça fait toujours quelques véhicules en moins !
Y aurait-il une vraie nostalgie du temps bénit où seuls les riches roulaient en quatre roues ?
Et quid des avions ?
Je pense qu'on devrait subventionner, ou à tout le moins détaxer ces nouvelles merveilles à deux roues, que l'on appelle encore vélos mais qui, comparés à mon vélo chinois à cent dix euros, sont ce qu'est un cheval de course comparé à un âne !
Ces merveilles – et je ne parle pas des vélos électriques- avancent toute seules ; légères, un dérailleur top, on change de vitesse à la moindre petite côte qui dure, et on arrive, pas en nage, au bureau !
Seulement, elles coûtent au bas mot 3000 euros !!!
Alors ? À pied, à cheval, à vélo ou en voiture ?
Voici quelques propositions ( qui celles-ci sont de moi !) :
-une amende rédhibitoire pour toute voiture qui n'a pas, au moins, trois passagers à son bord.
Seulement, on ne va pas laisser les gens dans le désarroi, comme ça !
On va s'organiser :
Pour parfaire les sites internet, petites annonces et autres affichettes dans les supermarchés en ce qui concerne le covoiturage, il nous faut le concours des communes, des employeurs, et tout ce qui touche au réseau géographique des déplacements concernés. Établir donc par secteurs toutes les connexions envisageables.
Cela existe déjà, il s'agit juste de le généraliser. Je ne dirai pas imposer : cela nuirait à certains caractères chatouilleux.
On pourrait presque imaginer demander une dizaine de minutes de battement dans les horaires de travail, sans sanction !
Inventer un système de reconnaissance entre auto stoppeurs et conducteurs susceptibles de les prendre : un logo sur le pare-brise par exemple et le même brandi par le stoppeur, une carte à puce et décodeur, ou toute autre trouvaille qui rassurerait aussi bien l'un que l'autre. Chacun aura rempli au préalable, une fiche d'inscription dans la mairie de sa commune ; on s'engagerait à prendre tous les stoppeurs que l'on peut, et en tant que piétons, à rendre visible sa carte ; les rôles étant interchangeables, chacun aurait sa carte et son autocollant.
On peut imaginer des scènes ubuesques au cours de la mise en place de ce système ! Pas une voiture dehors et que des piétons ! Ou l'inverse.
Mais il y a gros à parier qu'en peu de temps les choses se stabiliseraient tant l'organisation spontanée est aussi certaine que fiable.
Diminuer par trois ou quatre le nombre d'automobiles, cela ne serait pas une belle économie ?
Une chose est sûre : il nous faut inventer quoique ce soit d'assez vaste pour qu'on en ressente le bienfait. Et vite.
Certes les sociétés d'autoroutes ne seraient pas contentes et envisageraient de faire payer leurs parkings, ou carrément les fermer. Du reste, elles râlent déjà.
Certes les compagnies pétrolières ne seraient pas contentes et augmenteraient leur prix.
Alors, pour remédier à ces maux prévisibles, il faudra juste nationaliser et les autoroutes et la compagnie pétrolière !
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