La chute de l’Occident, un éclairage Schumpéterien
Et une petite égratignure à la thèse de Todd.
Dans un monde à la dérive, il est parfois dur de s’orienter, pourtant la chute de l’occident ne nait pas d’une modification de la météo, mais de puissantes forces sociales à l’œuvre. Il importe donc de les comprendre pour commencer à retirer les mines du champ où erre l’Occident.
Si un médecin prévoit que son patient va mourir, ça ne veut pas dire qu'il le souhaite.
Joseph Schumpeter
Parler de la chute de l’occident est désormais un truisme dans certains cercles. D’autres, éprouvent davantage de difficulté à l’accepter. Il suffit de constater les réactions paniquées de nos médias confrontés au dernier livre d’Emmanuel Todd.
Rendez-vous compte, oser annoncer la défaite de l’occident, voilà LE crime par la pensée caractérisé. Sauf que… Emmanuel Todd avait annoncé en 1979 la chute de l’union soviétique et il est donc difficile de lui faire un procès en incompétence.
Ceci dit, Todd n’est pas le premier, la clavette américaine tient tout le système occidental et les pouvoir locaux seraient-ils capables de se maintenir sans la garantie US ? De ce fait la situation locale a été observée avec soin et depuis 2008 on assiste à la montée des antagonismes politiques et une radicalisation croissante. Depuis des années des auteurs, réduit à la marginalisation par la puissance médiatique pointent un risque de sécession aux Etats-Unis.
Tout cela, signifie que nous allons nous permettre d’ignorer ceux pour lesquels l’occident va bien et autres croyants dans la victoire ukrainienne. Passez votre chemin, cet article n’est pas pour vous, vous reviendrez le jour où vous aurez terminé votre phase d’acceptation du deuil.
Pour les autres, malgré le prestige d’Emmanuel Todd, il convient de se demander si son explication des causes de la chute de l’occident sont les bonnes. Si nous nous mettons dans la peau d’un médecin au chevet de l’occident, il n’est pas forcément souhaitable de laisser le patient mourir. Alors, si un bon diagnostic pouvait permettre d’extirper la maladie, nous pourrions peut-être parvenir à limiter les souffrances qui attendent les peuples occidentaux.
Car l’heure n’est plus à maintenir la prééminence de l’occident, mais à faire la part du feu et pour cela, il convient d’identifier le membre gangrené pour y porter le fer, le couper et le cautériser.
Trois explications principales tiennent la corde et sans s’exclure, elles sont tout de même largement concurrentes. Nous examinerons donc les causes de la crise venues d’un système capitaliste devenu hors de contrôle, celle de Todd, mais comme il est dans les médias, nous nous contenterons d’un examen superficiel de ses déclarations et enfin celle de Joseph Schumpeter donnée dans son livre Capitalisme, socialisme et démocratie, publié en 1942 sur lequel nous nous étendrons davantage.
L’explication anticapitaliste est assez évidente, le capitalisme combat la baisse du taux de profit par la baisse des salaires et davantage de concentration. De facto, jamais les grandes entreprises n’ont été aussi importantes, elles étouffent le tissu de PME. Dans le domaine financier, on parle désormais de banques systémiques et des fonds comme Vanguard ou Blackrock disposent d’une force de frappe supérieure à celle des états. Leurs actifs sous gestion de plusieurs milliers de milliards de dollars représentent l’équivalent de l’ensemble des patrimoines en France (Env 10 000 Milliards).
Autrefois, du temps de Rockfeller et de la Standart Oil, le gouvernement américain avait imposé de briser l’entreprise en plusieurs compagnies : Les fameuses sept sœurs.
Or, avec l’échec du procès contre Microsoft pour abus de position dominante, le gouvernement américain a préféré co-régner avec les GAFAM et les grandes corporations au lieu de les briser. Celles-ci sont ses fers de lance pour soumettre le reste du monde et donc intouchables et d’ailleurs garantie par l’outil militaire US. La Libye et la Syrie ont constaté ce qu’il en coûtait de s’opposer à l’Hégémon.
Mais, ce pouvoir tyrannique, de moins en moins efficace est contraint d’accélérer ses déprédations. Ainsi s’explique la longue liste des provocations de l’Ukraine contre la Russie, alors que le calendrier aurait imposé d’attendre (Poutine aurait bien fini par partir et la transition aurait engendré des troubles). En 1945, les États-unis avaient auparavant une telle supériorité industrielle qu’ils pouvaient fournir aux pays alliés les moyens de s’industrialiser. Aujourd’hui, les délocalisations, solution facile pour diminuer les salaires et préserver les profits, ont privé les États-unis et leurs séides de cette arme.
On l’a vu avec les sanctions contre la Russie, il est aujourd’hui relativement facile de se fournir l’essentiel des moyens sans dépendre de l’occident. Là encore la puissance de l’outil a diminué et la force militaire américaine servait à cacher la misère en contraignant les peuples à accepter, à la pointe du F15 les schémas d’exploitation US. Ainsi, le produit de la vente du pétrole irakien est toujours versé sur un compte à la FED.
Ainsi, placé sur ces flux, nos dirigeants et ceux de la technocratie d’entreprise peuvent prélever une partie de ces fonds à leur profit. Il leur suffit de s’assurer que l’argent passe entre leurs mains et ainsi ils compensaient leur incapacité à produire.
Malheureusement, cette fois-ci le système a calé, l’outil militaire a soudain échoué face à la révolte russe. Dès lors, les pays producteurs de matière première se précipitent sous le nouveau parapluie et les Russes soutiennent, car ainsi ils créent un syndicat capable de priver le pouvoir occidental de ses ressources.
Face à cette perte acquise, le pouvoir occidental cédera-t-il ? Ce n’est pas dans sa nature, mais cette fois-ci il devra se rabattre sur la proie interne et dans ce système préparez-vous à un tour de vis sur les salaires des travailleurs. La réindustrialisation viendra, mais comme dirait Coluche : « Les ouvriers étaient mal payés, mais il y avait du travail ». Bienvenue, on y revient et l’inflation non compensée a pour mission de recréer la bonne pyramide des revenus.
Voilà la vision marxiste et comme vous le voyez, le monde s’explique assez bien : La caste a besoin de maintenir ses revenus et le fait au prix du peuple. Todd, présente une explication différente. Pour lui, la cause du déclin de l’occident serait en partie due à la disparition de l’esprit protestant, remplacé par un nihilisme. Il constate la remontée de la natalité infantile et l’échec industriel qui conduit à l’échec militaire que nous constatons aujourd’hui où l’OTAN échoue à armer l’Ukraine et où même les Houtis peuvent menacer le trafic dans l’un des points de passage clé du commerce mondial.
Permettons-nous de prendre la thèse de Todd un instant pour l’illustrer avec un cas concret : Faute morale, le complexe militaro-industriel au lieu de fournir un véritable travail, s’est contenté de positions acquises. Des marchés garantis ou presque, un ruissellement d’argent sur les politiciens, les hauts gradés et la technostructure du complexe militaro-industriel. L’ensemble était financé par la dette, faite de dollars apportés par ceux qui vendaient leurs produits aux USA et travaillaient donc gratuitement contre des promesses.
Sauf que, cette méthode a trouvé son terme lorsque les houtis ont ciblés les raffineries d’Aramco. On se souvient des performances déplorables des missiles Patriot durant la guerre du Golfe. Les médias ont vendu des succès remarquables contre les Scuds Irakiens. En réalité, une prestation lamentable. Les houtis ont montré la faiblesse de ces armes soi-disant modernisées, même si elles ont été parait-ils améliorées n’étaient pas capables d’arrêter les drones en Arabie Saoudite.
Heureusement, (Pardonnez ma lourde ironie) le Patriot s’est finalement révélé une arme merveilleuse capable d’abattre les missiles hypersoniques russes dans les cieux de Kiev. J’imagine, car les équipages avaient à cœur de protéger les jolies ukrainiennes. Je n’oserais imaginer que l’on ose nous refaire les mensonges de la guerre du Golfe et qu’en réalité les Kinzhal soient en train de hacher menu les cibles en Ukraine. (Enfin, moi, si, mais je suis un vilain complotiste qui se souvient de Colin Powell avec une fiole à L’ONU)
L’un des autres signes que l’on pourrait prendre en soutient de la thèse de Todd est la prégnance de la drogue dans certains milieux. Palmade, tous ces dirigeants avec des problèmes de nez, ce brillant sénateur soucieux d’offrir des soulagements chimiques à sa collègue pour l’aider à apprécier sa soirée avec lui. La drogue détruit les barrières morales et le sentiment d’empathie. Avec tant d’illusions, faut-il s’étonner de voir les erreurs d’analyse et le mépris des peuples qui conduisent à des mécomptes se multiplier.
Toutefois, aussi séduisantes soient ces thèses, elles souffrent à mes yeux d’une faiblesse éclatante : Elles expliquent parfaitement soit par l’appât du lucre soit par l’immoralité, les faiblesses de nos dirigeants. Malheureusement, ceux-ci n’auraient pas du pouvoir réussir ainsi. Il serait complotiste, (Pardonnez-moi d’être en accord un instant avec monsieur Reichstadt, je promets cela ne durera pas) d’imaginer qu’une poignée de privilégiés puissent conduire le monde dans le mur à la force de leurs seuls poignets, même s’ils s’appuient sur de brillants "génies" comme Bruno Le Maire et Stéphane Séjourné. Il y a forcément un puissant groupe social capable de servir de démultiplicateur à cette "élite" corrompue.
Il convient donc de se tourner vers une théorie capable d’expliquer comment une partie significative de la population a pu se muer en support d’une politique opposée aux intérêts des peuples. Nous allons découper cette analyse en deux parties complémentaires.
La première sur la théorie de Schumpeter expliquera l’origine de ce groupe social inconnu autrefois, tandis que la seconde se concentrera sur la manière dont ces gens, si dommageables ont été "solvabilisés".
Commençons par Schumpeter, celui-ci grand défenseur du capitalisme refusait d’imaginer que son ordre économique pourrait s’effondrer sous le poids de ses contradictions. Après avoir passé tant de temps à expliquer que du fait des grappes d’innovations, des entrepreneurs le capitalisme allait assurer le développement économique, l’auteur aurait du mal à brûler ce qu’il a adoré.
Il voit un enchaînement de causes plus complexe, avec l’amélioration du niveau de vie, les familles consacrent davantage de ressources à l’éducation. De ce fait, le capitalisme conduit à une surproduction d’intellectuel ou de demis intellectuels au dela des besoins économiques. Les parents s’orientent là sur des valeurs et non sur des signaux de prix qui réajusteraient le volume et nous sommes en réalité là face à un problème classique de théorie des jeux ou la volonté de chacun de s’en sortir mène à des choix sous optimaux.
On le constate, massification de l’enseignement, 80 % de classe d’âge au baccalauréat, université de masse. Or, les professions libérales et la technostructure sont incapables d’absorber tant de cadres. Il se crée donc une population d’intellectuels, frustrés, paupérisés, déconsidérés. L’outil de formation pour répondre à la demande, au lieu de sélectionner des esprits d’élites difficiles à manier se concentre au contraire sur les plus soumis, les plus idéologisés.
Ces gens favorisent alors des politiques socialistes où les allocations financières sont le fruit de la redistribution et non de la création de valeurs. Les amis du système sont donc récompensés et non les entrepreneurs ce qui provoque l’arrêt de la machine à créer de la richesse.
Force est de constater qu’au-delà du monde des grandes entreprises né de la concentration du capital un second acteur à bénéficier de la formidable expansion de la création de richesse née de la modernité.
L’état autrefois voyait ses ressources limitées par la difficulté à prélever l’impôt. Dans les années trente, Keynes considérait qu’au-delà de trente pourcents nous serions dans une économie socialiste. Aujourd’hui nous avons dépassé cinquante pourcents. Force est de constater que l’état croit plus vite que la création de richesse.
Là, est la seconde partie de notre sujet. Si Schumpeter explique fort bien les mécanismes de la surproduction d’intellectuels, il n’explique pas comment ces gens vivent. Or, sa richesse permet à l’état de constituer des clientèles. Plusieurs centaines de milliers d’entre eux travaillent dans le monde associatif, maintenu a la limite de la survie par une pluie de subventions. Faut-il s’étonner de les voir défendre l’idéologie voulue par un pouvoir dont ils dépendent ? Il en va de même des journalistes. L’état a placé les professions de santé sous son contrôle en se plaçant sur le flux financier entre les travailleurs qui paient les cotisations et les acteurs du monde de la santé. Il en va de même des retraités dont le pouvoir d’achat dépend de décisions gouvernementales et non des syndicats comme le système avait été conçu à l’origine. Faut-il s’étonner de les voir bien voter ?
Comme le disait Marx, les classes sociales défendent leurs intérêts, l’état a désormais créé deux catégories sociales : Celle des rentiers du système qui sont ses petits zélotes sa technostructure liée à la grande bourgeoisie ultra riche merveilleusement incarnée par cette pauvre madame Oudéa. Admettons-le, sa vie évoque "Les misérables", mais seulement avec beaucoup de talent littéraire.
Talent hors de ma portée, je n’ai pas fréquenté les bons jardins d’enfants.
Reste à conclure. Ces trois explications sont complémentaires, dès lors, la question se pose de comment endiguer le désastre.
La création de richesse, se poursuivra, espérons-le, car elle est l’origine de l’amélioration du sort des humains. Mais si le revenu net croit, il sera plus facile d’augmenter les taux de prélèvements et l’état continuera à croître plus vite que la valeur crée. La quantité de pseudo-intellectuels idéologues (Félicitez-moi, j’ai trouvé ma maison) suivra la même courbe.
Alors, peut-être les robots ramasseront-ils les poubelles, mais comment ferons-nous pour, pardonnez-moi le terme, notre surproduction de déchets humains ? Alors, je vais me permettre de proposer une série de mesures d’urgence.
- Toute personne travaillant à haut niveau dans le personnel politique ou la haute administration doit subir un code pénal bien plus sévère. Il convient que ces gens remettent comme le disait Nassim Nicholas Taleb, leur propre peau dans le jeu. Dans ce cas, j’y reviendrais, ces gens doivent risquer la peine de mort. Ils sont rationnels donc dans leur cas la dissuasion fonctionnera.
- La drogue doit être combattue. Au niveau global, la guerre est perdue au jour d’aujourd’hui, mais l’état doit lui refuser l’accès aux échelons décisionnaires. Ceux qui vivent de l’argent des impôts doivent être irréprochables. Les militaires cumulent bien la peine pénale et souvent une condamnation disciplinaire. Le même système peut bien s’appliquer aux agents publics surtout lorsqu’ils occupent des postes de responsabilité. Tests réguliers et licenciement pour faute immédiates s’imposent en raison des comportement psychopathiques favorisés par de tels produits.
- Des tests psychologiques automatisés, pour éviter toute manipulation, sont nécessaires. Tout élu au pouvoir législatif, les adjoints des grandes villes et les ministres doivent subir des enquêtes de sécurité et de patrimoine fréquentes. En raison des risques auxquels ils exposent leurs concitoyens ces gens doivent être tenu dans la plus haute suspicion.
- La prolifération des petits intellectuels a conduit l’occident à perdre ses nerfs tous les six mois. Alors, j’entends la nécessaire liberté d’expression, mais ceux qui ont appelés à envoyer les Ukrainiens à la mort doivent répondre de leurs appels au meurtre. Ceux qui ont appelés à priver leurs concitoyens de leur liberté doivent aussi rendre des comptes pour soit harcèlement moral soit complicité de séquestration. Les dommages de leurs insultes sont immenses, les condamner est un impératif moral et une nécessité pour éviter le retour de ces comportements. La propagande déversée par nos médias ne saurait leur servir d’excuse. Ils ont insulté, propagé des propos racistes : Qu’ils paient !
- Enfin, toute cette frange de pseudos intellectuels doit se voir refuser tout financement attribué par l’état. La solution existe en Allemagne avec l’argent d’église. Le citoyen déclare dans ses impôts à quelle église est attribué son Kirchensteuer. La même chose peut être faite, pour les associations, les médias et les syndicats. Un pourcentage de l’impôt sur le revenu de chaque citoyen sera attribué et celui-ci choisira une série d’institutions qui recevront ces fonds. Cent mille signatures de citoyens doivent suffire pour entrer sur la liste. Les petits intellectuels pourront alors survivre, mais ils devront se préoccuper de l’avis du peuple.
Voilà une belle abolition des privilèges, qui demandera de comprendre pourquoi nous combattons et comment combattre. Car, rassurez-vous, nos dirigeants ne la mettront pas d’eux-mêmes en route, ce serait ouvrir la voie au "complotisme" et à la "désinformation".
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