La loi du marché n’est pas l’avenir
La loi du marché est souvent considérée comme une loi naturelle. C’est bien entendu au nom de ce principe que s’impose l’organisation sociale du système marchand. Qui pourrait, en effet, aller à l’encontre de la « nature » ? L’acceptation de cette « vérité » proclamée clos tout débat… et pourtant !
Le « droit naturel » qui n’est pas celui de
J. Leclerc écrit dans sa « Leçon de droit naturel » : que le droit naturel consiste en « un ensemble de principe régissant les conditions de toute société parce que correspondant à la nature identique en tout homme ».
« A partir du XVII ième siècle Descartes et Grotius, définiront la « loi naturelle » comme une création arbitraire de Dieu, conduisant au constat que la loi dérivant des hommes ne peut donc être définitivement posée, alors que « le droit naturel » est un code écrit applicable à tous les hommes Sorte d’une manière universelle et identique, non pas un principe de raisons susceptible d’applications variables ».
Si donc le droit tient une place de premier plan il devra composer avec les différentes pensées théosophiques et à l’historicité d’usages. « C’est la loi faite par les hommes comme expression du droit qui sera le produit d’une situation historique donné. Mais elle est également aussi le moyen d’un projet, d’une action qui peut anticiper le futur, le prendre pour règle pour changer la société, non seulement dans un projet idéologique, mais comme moyen « d’organicité », de ce à quoi l’on veut s’arracher pour devenir autre chose ».
La dite loi du marché n’est donc qu’un moyen organicité elle n’en garde pas moins le caractère impératif de règle d’ordre public qui confère le pouvoir de domination.
Mais la loi est suffisamment d’un usage polyvalent et ambigu pour que l’on y requière sans cesse pour tous les litiges, si bien que de nos jours aucune loi ne semble plus taillée à la mesure des problèmes qu’elle veut résoudre, au point que certains y confèrent une valeur inaliénable qu’elle tiendrait de la nature comme pour les sanctifier…
Se référé à la nature rend immuable des règles déterministes de comportements indépendamment des êtres vivants qu’elle régit et organise. Tel n’est pas le cas de la loi du marché dont nous trouvons dans notre histoire humaine des relations commerciales bien différentes de celles d’aujourd’hui.
La loi naturelle qu’elle soit création arbitraire de dieu ou de l’ordre du monde, et ce que nous appelons un peu hâtivement « la loi de la jungle » dans toutes ses variations, mangé ou être mangé. Cette loi joue indépendamment de la conscience des êtres qui y sont soumis sans dérogation possible, c’est la programmation génétique.
La loi du marché, elle, est une construction structurelle pour répondre à l’organisation économique qui réorganise l’activité sociale et politique de population essentiellement sédentaire. Or l’on se réfère à la loi du marché comme un élément invariable et inaliénable fonctionnant sur le même modèle que la loi de la jungle, justifiant par là le comportement de prédation irréversible intra espèce, confondant la capacité d’association, comme activité culturelle civilisatrice, de la domination distordu du plus puissant.
La loi du marché n’est pas une loi naturelle, c’est une loi d’organicité qui s’adaptera aux situations que rencontrerons les humains.
Ce qui permet de l’affirmer c’est le caractère conscient du fonctionnement de la société humaine. En effet, l’organisation sociale n’est ni unique dans ses formes, ni constante dans le temps. L’Histoire humaine, contrairement au fonctionnement des collectivités animales, nous montre des formes d’organisations sociales différentes, fondées sur des valeurs morales variables,… et surtout toutes ces organisations sont soumises à l’intelligence politique de la collectivité : chaque individu, individuellement ou en groupe (conscience collective), peut remettre en question la structure et « en penser » une autre. L’Histoire est justement le processus de transformation permanent des relations sociales. C’est ce qui explique que l’espèce humaine a une Histoire… contrairement aux autres espèces animales qui elles n’en ont pas.
Tout cela pour dire que le fonctionnement social humain, s’il est d’essence naturelle, il dispose d’une capacité d’adaptation de l’activité humaine qui « fonde » une autre dimension, le social, le politique qui dépend, non plus d’une vision simpliste et déterministe de la nature et de ses lois, mais de l’intelligence, de la réflexion et de la conscience humaine capable de fonder des émotions morales, liberté égalité fraternité, qui l’emporte vers l’être que nous qualifions de civilisé, par rapport à notre activité prédatrice.
En ce sens, on peut dire que la loi du marché est culturelle, même si cette aptitude adaptative et évolutive, est d’essence naturelle. Si elle est culturelle elle peut donc être modifiée, contrairement à tout fondement déterministe que nous ne pouvons éviter comme la mort.
Vouloir imposer la vision irréductible de la loi du marché, revient à dénier à l’être humain, le droit et la faculté de penser et de changer son existence sociale… Ce qui, entre nous, est parfaitement contradictoire avec la notion de citoyenneté, même si cela est difficile et reste limité par le non conscient de notre libre arbitre.
Nous sommes sortis de l’activité de prédation en organisant les productions et les échanges pour nous soustraire à la loi de la jungle intra espèce. Certes ce n’est pas parfait, mais de là à y faire un retour fracassant en laissant croire que le marché organisera la concentration humaine et une ineptie que démontre empalement l’étude de Calhoun. http://www.agoravox.fr/ecrire/?exec=articles&id_article=67081
Dans cette étude la « loi naturelle » se trouve dans les compartiments 1 et 4, tandis que pour sortir du cloaque 2 et 3 il nous faut des lois d’organicités.
Ainsi une concentration humaine livrée à ses seuls désirs, comme la mythique loi du marché conduirait au cloaque.
La loi du marché que l’on nous a vendu, n’est que la énième représentation de la soumission des uns aux autres, dans laquelle l’on nous explique que cette « loi de la jungle » est inévitable, et que vouloir s’y soustraire en organisant une opposition, politique, syndicale, contestataire doit être réprimé car c’est du déviationnisme à une loi naturelle.
Dans les modèles déterministes animaliers il n’y a pas d’opposition autre que celle qui définit le meilleur géniteur et guide du groupe pour offrir la meilleure chance de survie.
Quand le système marchand à conduit Hitler au gouvernement, l’on ne peut pas dire que ce fut pour cela.
Humaniser la loi du marché, c’est le rêve de celles et ceux qui, sans toucher aux fondements de l’économie de marché, tout en en faisant le mode de fonctionnement des relations sociales, veulent en expurger les aspects les plus conflictuels et anti sociaux.
Toutes les expériences « socialistes », « social démocrates », « interventionnistes », « keynésiennes »,…
L’évolution du 20e siècle, dans le temps et l’espace (la mondialisation), du système marchand, aboutit systématiquement à la remise en question et à l’obsolescence de ces pratiques politiques. Tout ce que l’on nomme aujourd’hui les acquis sociaux sont systématiquement et radicalement remis en question non pas simplement par la volonté politique, quoiqu’elle joue chez certains, mais par la logique même du fonctionnement du système marchand. C’est ainsi que la sociale démocratie en respectant les lois du marché, fini par s’y soumettre.
La prétendue humanisation des lois du marché est donc un leurre qui a l’extraordinaire avantage, pour le système, de donner l’espoir sans pour cela toucher à l’essentiel de son fonctionnement (nous y avons cru durant trente ans). C’est également un extraordinaire instrument de démobilisation puisqu’il permet de dévier la colère en aiguillant la conscience sur de faux débats et de fausses solutions et des boucs émissaires. L’Histoire du 20e siècle n’est que l’illustration de cette impasse, des chimères et des faux espoirs qu’elle a engendré.
Les difficultés à venir né de l’épuisement de certaine ressources et la pollution, pose comme nécessité une réforme de la loi du marché, par les risque qu’en cours l’écosystème planétaire que l’instrumentalisation de l’être humain, a des fins qui lui sont nuisibles.
Critiquer cette loi pour la réformer n’est pas léser la loi naturelle, puisque c’est elle qui autorise cette faculté par notre programmation génétique.
Mais cela devient difficile, car comme nous le constatons, elle est confiscatoire du pouvoir des populations et vue la confiscation des grands moyens de communication de masse,
il devient nécessaire de mettre en place des relations sociales alternatives fondées sur des valeurs différentes que celles du rapport marchand. Relations qui permettent, à la fois, de rendre obsolètes aux yeux du plus grand nombre, le rapport marchand, mais permettront également d’assurer le relais vers une structure sociale nouvelle.
Nous pouvons convenir que lorsqu’un particulier prend l’initiative d’un investissement créatif, il est normal qu’il dispose des revenus et profits de ce dont il est le propriétaire.
Mais lorsque son projet doit utiliser l’aide de tiers, alors c’est lui qui est demandeur ; et c’est une évidence que de comprendre que sans ces aides, il ne parviendrait pas à ses fins.
De fait une collaboration s’impose, et si le propriétaire veut être le maître absolu de ses décisions, s’il veut disposer du fait du prince, alors il doit rester seul. Dans tous les autres cas il y a une collaboration à imaginer pour que le propriétaire conserve les profits de son investissement et atteigne ses buts, sans s’approprier ceux générés par les tiers. L’histoire de l’impuissance collective a conçu des maîtres plutôt que des guides. Le reconnaître ne la rend pas irréductible ; et si le code civil a analysé en 1804 la « marchandisation » de la force de travail comme du « louage de service », donc du marchandisage, je pense que depuis 1804, il est intervenu bien des événements culturels (développement des sciences) qui nous permettent de concevoir notre activité de travail complexes entre adultes culturalisés, comme une relation humaine, et non un conflit d’intérêt.
La loi du marché n’est donc pas une fatalité comme l’on voudrait nous le faire croire. Pas plus que l’autre n’est un gibier et/ou un adversaire potentiel qui mettrait en péril notre existence. La véritable solidarité n’est pas possible dans le seul rapport marchand, elle se heurte à un principe de fonctionnement qui fait de l’homme un loup pour l’homme, le renvoyant vers ses atavismes animaliers naturel distordus qui l’écartent de l’être civilisé, et donc il doit en permanence assurer un contrôle interne.
Clairement la loi du marché ne saurait être un pas vers l’être civilisé, la civilisation ne se meure pas seulement à nos possessions, mais à la manière dont l’on organise notre sociabilité.
Il y a donc un paradoxe à écouter des hommes politiques en venter les vertus, et dénier les incivilités, les heurts, les « vices » qu’elle développe.
La société ne saurait être une jungle, il y va, pour le démontrer, de notre capacité à dépasser l’état dans lequel nous a mis le rapport marchand et de prouver ainsi qu’un autre monde est possible.
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