• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > La métamorphose du politique

La métamorphose du politique

Notre époque est travaillée par un paradoxe étrange : la politique est omniprésente, c’est un sujet qui est sur toutes les lèvres, elle occupe une large partie des médias ; et pourtant on ne cesse d’évoquer périodiquement son impuissance voire sa fin prochaine. La politique serait atteinte d’une maladie de langueur : « elle n’en finit pas de finir » dit Myriam Revault d’Allonnes. L’intérêt pour la chose politique est extrêmement vif et s’exprime dans des formes de plus en plus variées, mais la déception ou la défiance sont aussi, et en même temps, au rendez-vous. Jamais on n’a autant évoqué la politique dans les livres, les journaux, les radios et les télévisions. Mais qu’en est-il du politique. Comment penser le politique aujourd’hui ? Quelle en est sa nature ? Cette question prend un tour particulier au moment où nos sociétés en pleine mutation découvrent leurs incertitudes, leur complexité et l’opacité de leur devenir. Et corrélativement, il est vrai que chacun ressent l’impression singulière d’une transformation silencieuse de cette entité mystérieuse qu’est le politique. Une mutation silencieuse mais qui n’en n’est pas moins profonde et prodigieusement lourde de conséquences. À tel point qu’il faudrait plutôt parler de métamorphose pour évoquer cette transformation d’une entité en une autre, à l’œuvre dans un processus organique de destruction et de reconstruction. Le phénomène est en phase d’accom­plissement ; il est partiellement occulté par le charivari de la politique, mais il se produit sous nos yeux et nous ne savons pas encore le déchiffrer. Cette métamorphose vient de très loin ; peut-être depuis que l’homme vivant en société existe. Le politique n’a cessé de se métamorphoser, par étapes, tout au long des siècles. Nous sommes aujourd’hui les témoins - inconscients, aveugles et sourds - d’une des étapes les plus importantes de cette métamorphose. Nous en sommes aussi, à notre insu, les acteurs primordiaux.

Notre époque découvre en effet, et en un même moment, la fragmentation des identités, l’imprévisibilité de toute chose, la fragilité des sociétés, le caprice des hommes et des climats, la mutation fulgurante des technologies qui profilent de nouvelles dimensions de l’espèce. Le paradigme de la complexité révèle désormais l’approfondissement du fossé qui se creuse entre l’art politique traditionnel et la réalité du monde ; tandis que le politique demeure invisible, comme absent. Gouverner a toujours consisté à simplifier, à synthétiser les diversités dans une majorité, à tirer un fil de la pelote des multiples. Chacun sent confusément que le politique doit intégrer le complexe ; que sa métamorphose consiste désormais à abandonner ses certitudes et ses visions monolithiques, à envisager les limites de ce qu’il peut faire et ne pas faire. Face aux sociétés nouvelles qui viennent, celles du savoir et de l’intelligence, mais aussi - et en même temps - celles de la brutalité et de la barbarie, les fondements historiques et sociaux du politique se délitent. Le politique est pris dans le moment crucial de sa métamorphose, la déconstruction, étape dans laquelle il semble prisonnier et mis en échec. Quant à la politique, elle donne l’impression d’arriver au bout de sa course. « La politique apparaît à la fois pour nous comme une sorte de résidu gênant, qu’il faudrait idéalement éliminer, et comme une dimension tragiquement manquante, une grandeur qui fait cruellement défaut. » écrit Pierre Rosanvallon.

L’inconscience de ses acteurs de la nécessité de se ressaisir contribue à favoriser l’émergence de pratiques qui ne sont rien d’autre que des fuites devant la réalité. La plus courante est celle de l’enfermement dans une caste : celle de l’élite dirigeante. Cette caste protège dans sa forteresse les symboles du pouvoir politique. Elle possède sa langue - de bois -, ses codes de connivence, ses coutumes de cour et ses grands prêtres économico-médiatiques. Dans l’enfermement de son Versailles, elle s’éloigne progressivement du peuple et de ses représentants, et s’offusque de n’être point comprise ; d’être alternativement si mal-aimée. L’autre fuite est celle des populismes de toutes natures, dont le jeu pervers est de traduire la réalité complexe en simplifications abusives ; ils jouent avec le feu des passions, indifférents aux conséquences qui creuseront, à nouveau, dans notre XXIe siècle tout neuf, le lit des vieilles tentations totalitaires. Malgré cette funeste perspective, les hommes politiques admettent difficilement que leurs jours sont comptés. Le philosophe catalan Daniel Innerarity nous alerte pourtant : « La politique et ses institutions accueillent tranquillement les mauvais présages au sujet de leur avenir, comme si elles jouissaient d’une immunité théorique et pratique. Mais leur expulsion d’un tel paradis est imminente. »

Nous en sommes là aujourd’hui. Où est le politique ? Est-il dissimulé dans nos sociétés ? Est-il tapi dans les profondeurs d’un inconscient collectif ? Exerce-t-il toujours sa fonction prééminente, mais de manière implicite ? En réalité, le politique est claquemuré dans un statut équivoque qu’il est difficile de cerner précisément. En rester là, c’est contribuer assurément à la confusion qui porte à incompréhension, déliaison et rejet du politique. C’est rester aveugle au fait que, en ce moment même, le politique se dissout dans sa société-chrysalide et renaît par un processus de métamorphose en force suprême d’agrégation des communautés humaines. Dans cette renaissance, le politique se débarrasse, comme des peaux d’une mue, de ses attributs fonctionnels d’organisation concrète de la société ; c’est là le rôle de la politique. Doté de nouvelles ailes, le politique métamorphosé va construire la cohérence dans la complexité et donner aux acteurs sociaux les moyens d’avoir prise sur eux-mêmes.

Cette métamorphose crée une ligne de fracture entre deux expressions et surtout deux pratiques du politique. Elle met à jour une distinction fondamentale ; c’est elle qui articule la charnière entre ce que nous appellerons homme politique « héroïque » et homme politique « post-héroïque ». Le politique héroïque est celui qui éprouve la nécessité d’arborer le statut prééminent du politique, cette forme ancienne certes symbolique mais héritée en droite ligne du religieux, se plaçant comme opérateur d’une unité surplombante et forcée. Le politique post-héroïque, au contraire, réinvestit le politique en garant de l’être ensemble, en « opérateur d’une unification sous-jacente qui autorise les divisions de la société en surface. Il est le facteur de cohésion grâce auquel la contradiction peut être laissée libre et se manifester. » (Marcel Gauchet). Le politique post-héroïque n’est plus le grand ordonnateur, le pilote suprême ; mais sa fonction n’est pas réduite, bien au contraire ; elle se situe désormais, dans le contexte de nos sociétés complexes, sur un autre registre.

La métamorphose est encore peu visible, en tout cas, elle est inouïe. Car, dans l’esprit de la plupart de nos contemporains, la politique est définie comme un art : celui qui consiste à gouverner une partie significative de la réalité sociale dans l’océan des relations humaines et des imaginaires. Gouverner est alors volontiers conçu comme l’exercice consistant à piloter habilement un mobile doté d’une mécanique sophistiquée et rassurante. Le pilote est le leader, le chef, le guide ; c’est lui qui sait la route, la carte des vents et des marées, qui connaît les secrets des portulans. C’est sur lui que se focalisèrent d’abord les regards des citoyens puis les myriades d’yeux électroniques des caméras de télévision. Auréolé de lumière et de pouvoir, le politique est un héros qui montre la voie et trace la route. Or rien n’est plus faux que cette métaphore qui ne produit aujourd’hui que confusion et amertume. L’image repose, de fait, sur une illusion : celle d’accoler l’idée de gouverner à des processus qui ne se laissent plus gouverner. La naïveté du politique - ou son cynisme - est de laisser croire que son action peut s’appliquer à une réalité aussi peu gouvernable qu’une société d’hommes disparates et à un monde aussi complexe que celui dans lequel nous évoluons désormais tant bien que mal. Dans ces conditions, penser que gouverner une société complexe se réduit au même art que celui de conduire un groupe ou de piloter un véhicule s’analyse alors au mieux comme une ingénuité, au pire comme une imposture.

L’homme politique moderne n’a pourtant plus d’autre choix d’une part, que celui d’admettre le lien intime de son destin à sa capacité à penser et comprendre la complexité comme un paradigme de nos sociétés, comme le pivot central émergent de la métamorphose du politique ; et mettre en œuvre, sans délai, un nouvel art de gouverner. Il lui appartient, d’autre part, de reconnaître que le politique, dans sa métamorphose, a changé de nature ; que le politique doit plus que jamais être compris comme un processus réflexif permettant aux collectivités de se repérer entre elles et dans une temporalité, une histoire, afin qu’elles aient la capacité de nourrir l’ambition de maîtriser leur devenir.


Moyenne des avis sur cet article :  3.67/5   (12 votes)




Réagissez à l'article

12 réactions à cet article    


  • Dalziel 19 avril 2007 19:56

    Je vous le dis sans honte, je n’ai à peu près rien compris à ce que vous avez écrit... Rassurez-vous je ne vous demanderai pas m’expliquer l’ensemble de votre texte dont, par ailleurs, je pressens l’intérêt.

    Alors, je vous demanderai de développer votre dernière phrase (...le politique doit plus que jamais être compris comme un processus réflexif permettant aux collectivités de se repérer entre elles et dans une temporalité, une histoire, afin qu’elles aient la capacité de nourrir l’ambition de maîtriser leur devenir) en l’appliquant au monde réel, c’est-à-dire concret...

    Que sont ces collectivités ? Que signifie « se repérer entre elles » ? En quoi est-ce que le fait de « se repérer entre elles et dans une temporalité, une histoire » leur fournit-elle « la capacité de nourrir l’ambition de maîtriser leur devenir » ? En quoi consiste « la capacité de nourrir l’ambition de maîtriser leur devenir » ?

    Des choses comme ça, quoi ! Toutes connes, bien plébéiennes, en mots très simples...

    Signé : un plouc au nom de cent autres..., j’imagine...


    • Christophe Christophe 19 avril 2007 23:42

      Mais n’est-ce pas une autre imposture que de laisser croire que la politique a la capacité de subsumer les diverses réalités des collectivités ? Qui plus est, quand la maîtrise du devenir ne se mesure que dans une perspective dont la portée se réduit irrémédiablement, jusqu’à jouxter le temps présent.

      Sommes nous dans une période qui passerai du politique héroïque au post-héroïque ou tout simplement du politique au post-politique ?


      • Dalziel 20 avril 2007 08:35

        Sommes nous dans une période qui passerai du politique héroïque au post-héroïque ou tout simplement du politique au post-politique ?

        Terrible interrogation soumise au citoyen et à la citoyenne en instance d’isoloir... Doit-on voter Marcel Barbu, ou Louis Ducatel, pour signifier symboliquement au signifiant ce que signifie la signification du signifié ?

        Merci d’éclairer ma lanterne...


      • Gérard Ayache Gérard Ayache 20 avril 2007 09:39

        @ Dalziel

        Si post-politique signifie pour vous fin du politique, je ne crois pas que nous soyons dans cette situation. Au contraire, nous sommes dans un moment de métamorphose qui fait apparaître une autre forme du politique. Cette dimension nouvelle tourne le dos aux pratiques traditionnelles de l’exercice du pouvoir conçu comme nécessairement établi en prééminence presque sacrée par rapport à la société.Les héros politiques détenteurs du savoir et de l’autorité, pleins de certitudes sur la conduite des peuples, ont fait leur temps.

        Les sociétés complexes dans lesquelles nous vivons exigent que le politique soit capable d’articuler les tensions engendrées par une multitude de mouvements contradictoires.Notre époque n’est plus celle où l’on pouvait simplifier le réel en le forçant dans des concepts d’opposition tranchés.Il n’y a plus de courant dominant qui indique un sens. Le politique post-héroïque doit gouverner en se positionnant différemment par rapport à la société, en abandonnant les promontoires et les positions hiérarchiques ; il doit s’attacher à faire voirles réalités multiples et les écouter et favoriser l’émergence d’une démocratie non pas seulement délibérative ou participative mais aussi et surtout collaborative. Pour cela, la qualité principale qu’on lui demandera c’est le courage de laisser entailler ses propres certitudes.


      • barbouse, KECK Mickaël barbouse 20 avril 2007 01:28

        Bonjour,

        J’ai relu plusieurs fois votre article, et finalement j’en ai déduis que c’est une forme de poésie sur la confusion des esprits et l’indécision en politique.

        Le distinguo primordial et difficile a faire dans votre prose, c’est la définition du mot politique quand a sa nature,

        Il est parfois admis dans une vision naturaliste de la mutation politique

        Qu’elle est strictement consécutive à la mutation de la population.

        La problématique n’est pas de savoir si la politique change, mais si le regard que porte la population sur elle même et sur son environnement change,

        Parce qu’en fonction de là où elle dirige son attention, elle génère une politique.

        C’est dans cette définition là qu’on considère que le pouvoir est de dirigé l’attention de la population pour en diriger l’effort politique.

        L’autre définition qui n’est pas contraire à la première, c’est le constat de fait hors porté de l’emprise humaine, comme la maladie, la tempête, etc.... qui oblige une politique.

        Et le constat de faits humains qui nécessite une politique, comme la guerre, le crime, etc..

        Il va sans dire que les plus importantes études et constats de faits se font sur les tables d’autopsie de toutes les époques.

        Aussi, une communauté de destin qui centralise les constats de faits,

        Génère une recherche, une culture et une méthode appelée us et coutume, pour affronter l’épreuve de la vie collectivement,

        Génère une pédagogie pour apprendre à leurs enfants à mieux éviter ou supporter les mêmes obstacles, et des chercheurs pour affronter ses espaces d’ignorances.

        et génère une politique permettant aux plus grand nombre de bénéficié de son évolution général dans la temporalité pour éloigner, canalisé, pactisé, avec les risques et favorisé son développement.

        L’exemple le plus illustrant est la découverte de pasteur qui en un temps record a changer l’hygiène de vie au quotidien des français de son époque jusqu’a nos jours.

        En plus récent, le portable, permettant d’appelé de n’importe où en cas d’accident, a une fonction régalienne qui a permis son développement et son appropriation par la population en un temps record.

        Vous constaterez que les 2 ont généré des décisions politiques quasi immédiates et une adaptation sociétale fulgurante,

        Mais qu’aucune de ces politique ne pouvais être mis en place avant l’étincelle de mutation sur une population apte culturellement à l’assimilée.

        La 3 eme définition d’une nature politique, toujours non contraire aux précédentes, c’est qu’elle est une création humaine engendrant une perception mentale dans laquelle se projette la vie d’un humain, naissant ignorant du monde qui l’entoure et va empiriquement évolué en son espace géographique et temporelle

        Cette univers mental lui sert de cadre structurant, composé d’une symbole féminin et d’un symbole masculin représentant ses parents, la mère patrie, la France, la république, et de l’autre coté LE président, le roi, le gouvernement, le sénat,

        c’est pour ça qu’on parle d’amour de la France et d’autorité de l’état, entre autre modélisation par le langage de ce cadre mental.

        Ce cadre est par définition imparfait, parce qu’humain, et accueille forcément des vies qui vont se heurter à ses imperfections empiriquement.

        La nature idéale du changement étant que ces vies parviennent à atténuer la faillibilité du cadre politique de manière a favorisé la survie et la qualité de vie de la communauté de destin.

        Lorsque le cadre ne parvient plus à endiguer le nombre de vies qui vont se heurter a ses imperfections, l’exemple le plus probant ce sont les résultats scolaires en banlieue,

        la nature humaine engage un rapport de force avec le cadre, rapport qui passe par la bipolarisation des réactions, la féminine, la négociation, et la masculine, la force, les deux tendance cherchant a dominer le cadre pour l’obliger a gérer l’imperfection.

        Si vous prenez la délinquance, vous vous rendrez compte que vous votez en choisissant l’option négociation ou l’option force, mais qu’à l’état naturel les 2 existent,

        Le vote ne sert qu’à faire pencher la balance dans la manière ou le dosage entre force et négociation que vous voulez imposer au cadre pour gérer cette situation.

        La dernière partie c’est l’évolution du cadre politique, parce qu’étant humain, il évolue au même rythme que les humains qui le composent.

        Une population comme la notre vie une « fracture » numérique, entre ceux qui ont assimilé l’apport et les dérives des nouvelles technologies de l’information, et ceux qui jusqu’a leurs tombes ne s’y intéresserons pas. Une partie des politiques mettent leur photo sur un site fait par des militants sans rien y comprendre, d’autre gère leur propre blog.

        Et lorsqu’ils doivent débattre, les uns pensent pour ceux qui ont le net, les autres pour ceux qui doivent ne pas être laissé pour compte parce qu’ils ne l’ont pas.

        Néanmoins, si vous regarder les générations présente et a venir qui ont culturellement assimilée les technologies de l’information,

        Il leur sera impossible de supporter un cadre comportant la même proportion de personnes qui n’y connaissent rien comme aujourd’hui.

        Parce que leur attention, en tant que communauté de destin, sera orientée dans ces directions, et que les dérives qu’apportent toutes nouveautés, comme les déjà ruinent de familles sur le poker en ligne, seront des problèmes pour lesquelles ils exigerons une politique.

        Aussi, en conclusion, dans une période comme celle que nous vivons, où on s’intéresse à la « politique », l’important c’est de voir comment chacun de nous, au travers de ces moments de questionnements, change son regard sur la France, sur ce qui nous ressemblent et le grand groupe des « autres » et sur ce qui empiriquement fait l’expérience de sa propre vie.

        Parce qu’on peut élire qui ont veut, c’est dans chacun de nous que s’annonce la réelle mutation politique. Ce n’est pas sans l’effort et la volonté d’une communauté de destin que seulement quelque uns, quelque soi leur titres et fonctions, peuvent modifier le cadre, qu’ils soient élus, dictateur, etc... N’y change rien,

        Il n’y a pas de droit de grève du citoyen, mais il y a l’abstention, l’arrêt maladie du fonctionnaire, la fraude fiscale, le dénie d’autorité des forces de l’ordre, l’absence de prise de responsabilités, le déménagement a l’étranger, le travail « mal fait » dés que c’est pour un organe de l’état, etc...

        Et l’engagement, l’envie de devenir meilleur, l’envie de sauver des vies, de participer de l’effort commun, même sans emploi, etc...

        Autant de réactions qui changent empiriquement beaucoup plus les choses qu’un bulletin dans l’urne, et qui sont due ou soutenu non pas par le cadre, mais par la manière dont on se voit dedans.

        Amicalement, barbouse, qui croient qu’un homme chevauche le changement a sa naissance pour devenir un vieux réactionnaire :))


        • Blablabla 20 avril 2007 07:11

          « L’autre fuite est celle des populismes de toutes natures, dont le jeu pervers est de traduire la réalité complexe en simplifications abusives ; ils jouent avec le feu des passions, indifférents aux conséquences qui creuseront, à nouveau, dans notre XXIe siècle tout neuf, le lit des vieilles tentations totalitaires ».

          Etrange prélude à l’investiture d’un nouveau président.

          Ne serait-il pas hasard au centre des polémiques ?

          Ou bien serait-il celui que l’on ne nomme pas ?

          Ou bien encore celui-là qui les désignent comme non représentatifs ?

          A moins qu’il ne s’agisse de cet autre qui abaisse les barrières en louant un avenir sans crédit ?

          En fait je pense qu’il s’agit tout bonnement de l’Europe tout entière dévouée à sa noble cause de totaliser notre espace de libertés collectives et uniformiser nos valeurs individuelles.

          Seulement, pour celle-là, priez pour elle !


          • Dalziel 20 avril 2007 08:34

            Sommes nous dans une période qui passerai du politique héroïque au post-héroïque ou tout simplement du politique au post-politique ?

            Terrible interrogation soumise au citoyen et à la citoyenne en instance d’isoloir...

            Doit-on voter Marcel Barbu, ou Louis Ducatel, pour signifier symboliquement au signifiant ce que signifie la signification du signifié ?

            Merci d’éclairer ma lanterne...


          • Francis, agnotologue JL 20 avril 2007 08:40

            Tout ça pour aboutir à : «  » le politique doit plus que jamais être compris comme un processus réflexif permettant aux collectivités de se repérer entre elles et dans une temporalité, une histoire, afin qu’elles aient la capacité de nourrir l’ambition de maîtriser leur devenir. «  »

            Mais vous confondez les ordres ! Ce rôle c’est celui des sociologues, des philosophes, des intellectuels !

            Autrement dit vous réduisez le politique à RIEN !

            Pourtant c’est pas compliqué : il y a d’un coté la politique, de l’autre le Marché. D’un coté la démocratie, de l’autre l’affairisme. D’un coté la raison, de l’autre l’imagination (la main invisible, et aveugle).

            « Dans la vie du barbare, la prouesse a deux moyens d’expression, la force et la fraude. De même ces deux moyens se rencontrent à des degrés divers dans la guerre, dans les professions pécuniaires, et dans les sports et jeux. » (p. 179, « Théorie de la classe de loisir »).

            « Les professions pécuniaires » dit Thorstein Veblen !

            De fait, les sociétés post industrielles se caractérisent par le développement vertigineux des professions de finance.

            Si le politique cède devant l’affairisme, si le marché tue la démocratie, alors nous retournons à la barbarie.


            • Gérard Ayache Gérard Ayache 20 avril 2007 09:59

              @ JL

              Vous avez raison. Si on laisse fonctionner les sphères fonctionnelles qui font la société (l’économie, le marché, la culture, ...)de façon autonome, sans le politique, c’est la mort du politique et de la démocratie. Nous le voyons bien dans les perspectives que nous offre un libéralisme porté à l’outrance.

              Cela ne signifie pas pour autant que le politique doive se situer dans un registre interventionniste. Intervenir dans les sphères fonctionnelles de la société, c’est ruiner leur efficacité.

              C’est la raison pour laquelle je parle de politique réflexive. Le politique post-héroïque est celui qui fera fonctionner les différentes sphères fonctionnelles de la société en montrant et en rendant extrèmement visible l’impact qu’elles ont sur leur environnement naturel, humain, social.. et en donnant les moyens aux citoyens d’agir. Pas seulement de s’exprimer, de participer, de délibérer. Mais d’avoir le pouvoir d’initiative, qui doit devenir le nouveau minimum démocratique.

              Cela implique une refonte de notre système représentationnel limité encore aujourd’hui à quelques élus de plus en plus perçus par le peuple comme loins de lui.Le politique post-héroïque aura pour tâche de mettre à la disposition de tous les acteurs de la société les instruments d’organisation, d’expression, de consultation et d’action, situés à différents niveaux et échelles de la société.Cette construction nouvelle ne doit pas venir en concurrence avec les pratiques représentatives traditionnelles, mais en complément, dans une logique d’enrichissement et de vigilance confiante.


            • Christophe Christophe 20 avril 2007 14:07

              Si on laisse fonctionner les sphères fonctionnelles qui font la société (l’économie, le marché, la culture, ...)de façon autonome, sans le politique, c’est la mort du politique et de la démocratie. Nous le voyons bien dans les perspectives que nous offre un libéralisme porté à l’outrance.

              N’est-ce pas le chemin qui a été emprunté et que dénoncent Otto-Apel, Habermas, Sfez, ... ? L’autonomie des sphères de la science et de la technique sont là pour nous le rappeler chaque jour.

              Le politique s’est fondu dans les sphères fonctionnelles pour survivre ; n’est-ce pas la raison du détachement constaté entre les citoyens et leurs représentants ?

              D’autre part, il existe une science dominante (l’économie) qui a totalement absorbé le politique en ne lui laissant qu’une marge de manoeuvre très limitée. En suivant son dogme qui la pousse vers des principes à courte vue, n’influence-t-elle pas la relation entre l’Homme et sa temporalité ? Pouvons-nous encore parler de perspective dans un monde dominé par une science qui défend le principe de symétrie temporelle, une science non évolutive ?


            • Francis, agnotologue JL 21 avril 2007 08:49

              « Qui veut noyer son chien prétend qu’il a la rage ».

              Les libéraux s’emploient par tous les moyens à discréditer la politique.

              Les machines à voter : plus elles seront suspectes, et plus les électeurs seront dégoûtés. Excellent moyen pour ruiner la démocratie.

              La ’lutte’ contre le chômage : plus elles sera inefficace, plus les politiques seront discrédités. En plus, les travailleurs seront ’à genoux’.

              La redistribution : plus elle sera à l’envers, et plus on voudra faire baisser les impôts, à terme, ne restera que la TVA.

              Etc.

              A l’auteur : je maintiens mon précédent post.


            • Pierre-Alexandre Xavier Pierre-Alexandre 8 juillet 2007 17:28

              La métamorphose du politique, jeu de mots

              La rhétorique est un art subtil qui ne cesse d’émerveiller le monde de l’information. Car comment ne pas s’émerveiller devant l’incroyable aptitude de certains à capturer les mots, les notions, les symboles et à les réorganiser dans un discours apparemment entier, sans failles, lisse et prêt à l’emploi. C’est le sentiment que je garde de votre article.

              La politique est l’art de conduire les affaires de l’état, et donc de gouverner. Dans une certaine mesure elle peut être érigée comme une science dans le sens où elle se préoccupe de cristalliser des types de conduites universelles. Enfin de nos jours, la politique voit son champs d’application s’étendre à l’ensemble des activités humaines dans le cadre des sociétés de quelques natures qu’elles soient. Le politique donc, au sens du fait politique, n’est autre que la manifestation concrète de l’action politique. Depuis l’Antiquité grecque, la politique est au cœur des sociétés humaines et se présente comme une discipline transversale qui imprègne l’ensemble des champs sociaux. En ce sens, la politique ne peut être comprise comme notion mutable, ni non plus comme ensemble intellectuel dogmatique. La politique n’est pas le pouvoir. Elle n’est pas la religion.

              Or le paradoxe que vous soulevez, à l’instar de l’Histoire que l’on prétend arrivée à son terme, voudrait que la politique soit considérée comme un ensemble historique. Ainsi la politique aurait subie de nombreuses métamorphoses à travers l’Histoire, et soumise à cette dernière, elle se finirait maintenant.

              La politique se poursuit au delà des cycles historiques. C’est le pouvoir et les formes de gouvernements qui cèdent devant les révolutions des sociétés et les progrès technologiques. La politique continue d’exister, car elle est fonction et non événement ou système. Malheureusement, elle est noyée dans une soupe d’informations contradictoires et dans des guerres idéologiques d’un type nouveau. Ce bombardement rhétorique permanent que nous subissons, en tant que simples citoyens dans l’espace public, occulte radicalement les caractéristiques fonctionnelles de notre perception et de notre discernement pour ne laisser place qu’à des produits prêts à penser, des ensembles intellectuels plus ou moins complexes mais toujours normatifs. Pour emprunter le titre de l’un de vos livres, nous vivons une véritable guerre des rhétoriques.

              Cette guerre de tous les instants se déroule sur tous les supports médiatiques connus et se prépare à étendre son théâtre d’opération aux médias de demain. Son objectif est celui de toutes les guerres, obtenir la suprématie. C’est ce que j’entends quand vous écrivez : « Le paradigme de la complexité révèle désormais l’approfondissement du fossé qui se creuse entre l’art politique traditionnel et la réalité du monde ; tandis que le politique demeure invisible, comme absent. Gouverner a toujours consisté à simplifier, à synthétiser les diversités dans une majorité, à tirer un fil de la pelote des multiples ». Le fossé ne se trouve pas entre la politique et le monde, mais plutôt entre le pouvoir politique détenu par une minorité et la puissance publique dépourvue de canaux d’expression directe non représentative. Mais vous avez raison, le pouvoir politique a toujours eu à cœur de gouverner en simplifiant et en réduisant la pluralité à un concept abstrait et idéaliste.

              Il est regrettable que les sociétés occidentales se soient construites sur les promesses mensongères de la certitude, du confort et de la permanence qu’offrait le capitalisme du 19e siècle. Le réveil à la réalité de l’impermanence des choses de la vie aurait été moins douloureux. Ces illusions truffent les discours des politiciens et de ceux qui font le commerce du pouvoir et de l’influence. Et aujourd’hui, l’escroquerie est à son comble. Alors plutôt que de faire la critique des hommes et de leurs dires, il est préférable de construire une rhétorique contre la politique qui minimise son utilité dans une hyper-société peuplée d’hyper-individus atomisés par une hyper-information.

              C’est ainsi qu’en lisant dans votre article le terme politique, je dois entendre : les professionnels de la politique. Mais comme ils constituent, pour une grande part, le fond de commerce des consultants en communication ou des instituts d’analyse stratégique, il serait mal venu de mordre la main du maître. Il faut donc continuer à vendre des packages rhétoriques comme l’on vend des missiles ou des mines antipersonnel... Les effets ne sont pas les mêmes, mais les résultats auront une singulière similitude sur des populations entières. Ce sont ces mêmes packages rhétoriques qui permettent à de grandes entreprises de poursuivre d’ignobles commerces bâtis sur de nouvelles formes d’esclavage, de vendre des produits impropres à des populations indigentes, de piller sans crainte des richesses inestimables. Ces entreprises sont le fruit des sociétés, des nations, des états et non le produit d’initiatives solitaires ou isolées.

              Cette situation que vous déplorez pour des raisons discutables est la conséquence de faits politiques, de la mise en œuvre d’actions politiques qui ont eu lieu dans notre histoire contemporaine. Et c’est ce qui est absent de votre élégant et stimulant discours. A l’image des chantres de l’aplatissement du monde, de la fin de l’histoire et du triomphe de l’Empire, vous négligez le poids énorme et invisible de l’Histoire. Pas seulement la chronologie et l’accumulation des faits, mais aussi le poids de l’histoire individuelle de tous ces gens que vous appelez à prendre en main et à imaginer une nouvelle « politique post-héroïque ». La pression conjuguée de phénomènes historiques aussi dramatiques que le colonialisme, les bains de sang planétaires du 20e siècle, le rouleau compresseur de l’industrialisation frénétique, l’invasion technologique, l’atomisation des croyances religieuses et des repères moraux traditionnels, ou encore les désastres du communisme, sont des facteurs aggravants qui excluent toute forme de réflexion sociale réelle sur une éventuelle révolution sociale.

              La politique ne s’arrête pas aujourd’hui... Pas plus qu’elle ne se métamorphose. Le pouvoir change de mains et ses modes d’exercice sont modérés par de nouveaux facteurs. La seule chose qui se métamorphose lentement, c’est la conscience politique de l’individu. Hier encore, il n’était rien, tantôt esclave, tantôt chair à canon. Aujourd’hui, il prend conscience de son poids sur l’échiquier et il veut sa part de tout... Alors il est comme les enfants. Il pique des colères. Il fait des caprices. La solution de le coller devant la télé fonctionne encore, mais bientôt il voudra choisir ses programmes, puis avoir sa télé... L’individu est le pivot de tout l’édifice et il commence à le comprendre. Il est probable qu’il comprenne assez vite qu’il n’a pas besoin des professionnels du pouvoir, ni de conseillers en communication pour pratiquer l’activité humaine et citoyenne par excellence, la politique.

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès