La présomption de culpabilité
LA MISE EN SCENE DE GHOUTA
Les mensonges sont répandus à flots par les grands médias sur la guerre civile en Syrie. Le processus de création d’un “ennemi de la démocratie” à abattre, a repris de plus belle. Avec ses invraisemblables fantasmagories. Comme en Yougoslavie, en Amérique du Sud, en Irak, en Côte d’Ivoire, en Libye, et aujourd’hui en Syrie. On détruit les gêneurs un à un. Pour Milosevic, on a inventé l’étrange concept de gouvernement par une “association de malfaiteurs”. Pour Saddam Hussein, on a fabriqué l’existence d’“armes de destruction massive”. Pour Kadhafi, on a prétendu qu’il voulait massacrer son peuple alors qu’il l’avait choyé au-delà de toute comparaison avec les autres pays d’Afrique. Pour Bashar al Assad, on l’accuse de gazer ses concitoyens pour assurer sa dictature.
Tout cela au nom d’une morale concoctée par les dirigeants du pays le plus impérialiste et le plus agressif de la planète, et d’une imaginaire “communauté internationale” qui justifie tous les crimes. Communauté internationale qui s’est réduite à un tandem USA-France remorquant les dix géants qui ont approuvé le bombardement de la Syrie : le Monténégro, Malte, l’Albanie, le Panama, la Croatie, le Guatemala, l’Etat-bidon du Kosovo et les trois micro-Etats baltes. Une impressionnante coalition de mini-Zorros....
Mais même le tandem de base s’est désagrégé. Le rusé Poutine et le prudent Obama, craignant un embrasement d’envergure, ont abandonné l’exalté Hollande en rase campagne, ridiculisant son délire militaire. La France s’est retrouvée seule, grotesque, méprisée par Washington et Moscou, tenue à l’écart des discussions décisives entre Kerry et Lavrov, détestée par tous les pays du Moyen Orient – par les adversaires de Damas pour son incapacité à armer les rebelles, par les partisans de Damas pour sa trahison d’une vieille amitié. Hollande a été lâché par son maître de la Maison Blanche, Fabius s’est révélé être un incendiaire dangereux. Les deux sont vus dans les souks comme “deux rats s’efforçant de rugir comme des lions”. Un évident fiasco, mais présenté comme un triomphe de la “fermeté” élyséenne par les larbins de notre information.
Un des seuls grumeaux solides dans cette bouillie diplomatico-guerrière est une femme à la rigidité inébranlable : la Suissesse Carla del Ponte. Elle s’est fait connaître il y a quelques années comme l’inflexible procureur en chef de la parodie juridique du Tribunal pénal international (TPIY) de La Haye, où elle s’est acharnée à ne poursuivre pratiquement que les Serbes pour crimes de guerre. Après cette période de partialité haineuse au cours de laquelle elle a docilement obtenu les condamnations voulues par les sponsors du tribunal pour justifier leur destruction de la Yougoslavie, elle a fait preuve d’une indépendance inattendue en dénonçant l’abominable trafic albanais d’organes humains prélevés sur des prisonniers serbes vivants. Cela lui a valu l’exil doré d’une ambassade en Argentine, dont elle n’est revenue que depuis peu. Rétablie à un haut niveau de l’actualité, elle est membre d’une commission d’enquête de l’ONU sur les événements en Syrie, et n’a pas renoncé à sa liberté de ton. Aussi obstinée dans son témoignage de vérité qu’elle était jadis entêtée dans ses erreurs de jugement, elle vient d’avoir le courage d’affirmer dans son rapport que le gaz sarin et les armes chimiques, dont l’emploi a été prouvé le 21 août et qui ont fait plus de 1.200 victimes, ont été utilisés par les rebelles et non par les forces gouvernementales.
Sa certitude a été confortée par une lettre adressée à Obama par une douzaines de hauts fonctionnaires du Renseignement américain, qui mettent le président en garde contre la duperie des fausses informations comme les “armes de destruction massive de Saddam Hussein”. Eux aussi réfutent catégoriquement les accusations portées contre Assad et dénoncent la provocation montée par les rebelles. Ils ont même l’appui de hautes autorités militaires en activité, qui redoutent les aléas d’une nouvelle aventure.
Enfin, dernier élément particulièrement probant, l'accablant dossier qu’a constitué une religieuse chrétienne, mère Agnès-Mariam de la Croix, qui vit en Syrie à la tête d'un couvent depuis une vingtaine d'années. Le dossier peut être consulté aux adresses suivantes :
http://tarpley.net/docs/20130915-ISTeams-Ghouta-Report.pdf
De multiples photos, des documents, des témoignages prouvent que des dizaines d’enfants ont été d’abord kidnappés lors d’un massacre d’Alaouites perpétré par les rebelles à Latakia, à 200 km de Ghouta. Après les avoir exécutés, les assassins ont transporté leurs cadavres sur le lieu de “l’atrocité du 21 août” pour figurer dans une mise en scène digne des victimes de Temisoara et faire croire à la barbarie des forces d’Assad.
Aucun de nos grands médias n‘a bien sûr évoqué ces spectaculaires démentis. Ni même souligné, au minimum, que le dernier compte rendu des enquêteurs envoyés par l’ONU en Syrie n’a à aucun moment désigné les auteurs de l’atrocité. Les signataires du rapport considèrent comme certain l’emploi de gaz toxiques, mais n’en situent pas l'origine. Peu importe, un BHL ou un Fabius ne s'arrête pas à ce genre de détail. Pour nos foudroyants experts, c’est la version acquise qui prime. Le bourreau de la Syrie reste le bourreau de la Syrie, en dépit de toute vraisemblance. Avec un confondant à-propos, acharné à sa propre perte, Assad aurait choisi le moment précis où des contrôleurs (demandés par lui) arrivaient sur place, pour accomplir le geste fatal qu'il n'a cessé de nier. Cela ne gêne personne qu'en faisant cela, il verrouillait sa prétendue monstruosité en se montrant particulièrement idiot.
Non, le doute n'existe pas chez les lyncheurs vertueux. Le principe de la condamnation préalable est la règle. D'autant plus indiscutable qu'il s'agit d'obéir aux ordres de Washington et d'éliminer un résistant. Ce que font avec zèle nos dirigeants. Pour les “justiciers” tricolores, qui osent parler de “punir” Assad en bombardant sa population comme on gifle un sale gosse, le récalcitrant visé est une fois de plus présumé coupable avant que la moindre preuve ait validé le jugement.
Louis DALMAS.
Directeur de B. I.
18 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON