Le calvaire des chrétiens d’Orient : un nouveau Golgotha sur fond de barbarie djihadiste
Génocide : c'est ce mot lourd de sens tragique, tant sur le plan historique qu'humain, qui est aujourd'hui prononcé - à juste titre, hélas ! - pour qualifier le massacre que l'État Islamique, creuset idéologique de la barbarie la plus sanguinaire, est en train de perpétrer, en terre d'Irak, contre les chrétiens et autres minorités religieuses, tels les Yézidis et les Araméens, après les avoir persécutés de la manière la plus impitoyable qui soit.
Car tel est bien l'indicible martyre que ces pauvres gens, désormais réfugiés en leur propre pays, sont en train de vivre sous l'abominable férule de ces djihadistes sans foi ni loi, paradoxalement, sinon ceux d'un monstrueux Allah et de cette fausse loi coranique qu'est la charia. Ces fous de Dieu, aussi sauvages qu'ignares, ne savent que tuer et égorger, semer la terreur sur leurs vulnérables proies et saccager tout sur leur passage, piller et incendier les maisons de leurs prétendus ennemis, violer les femmes par milliers et enterrer vivants des centaines d'hommes. La rumeur publique avance même, comble de l'ignominie, que d'aucuns, parmi eux, y auraient été crucifiés. Un nouveau Golgotha sur fond d'islamisme ! Un sommet inégalé, dans l'histoire de l'(in)humanité, de barbarie, sinon, de sinistre mémoire, par le nazisme, ancêtre de ce fascisme vert !
L'ENFER D'IRAK
De ces scènes ahurissantes de violence, nos médias occidentaux rendent certes quotidiennement compte, à raison, dans leurs divers reportages. Ils nous montrent ces villes du nord de l'Irak (Qaraqosh, Mossoul, Erbil, Sinjar...), jadis berceau culturel du christianisme, vidées aujourd'hui de leurs habitants. Mais ce qu'ils omettent toutefois d'y préciser, sciemment ou non, c'est que ce génocide, puisqu'il faut bien l'appeler ainsi, à, en amont, un premier responsable, fût-il indirect, sur le plan moral, géopolitique et militaire : l'Amérique de George Bush.
C'est lui, ce président qui ne brilla certes pas pour son intelligence diplomatique, qui, pyromane sans le vouloir ni le savoir, a finalement permis, en chassant feu Saddam Hussein du pouvoir (en 2003) et au prétexte d'un mensonge éhonté (la soi-disant existence d'armes de destruction massive), la libération tous azimuts, dix ans après, de cet immense brasier de haine religieuse que représente, pour le pire, ce nouvel État Islamique. La boîte de Pandore y a été stupidement ouverte !
Entendons-nous : jamais je n'ai nourri la moindre sympathie pour ce dictateur qu'était effectivement Saddam Hussein ; je l'ai même souvent critiqué très sévèrement ; mais, enfin, à tout prendre, je le préférais encore - lui qui se définissait comme laïc, qui autorisait la liberté de culte, veillait au respect d'un honorable statut de la femme et avait réussi à hisser son pays à un appréciable niveau de richesse économique et d'aisance sociale - à ces barbares d'un autre âge, peut-être plus obscurantiste encore, avec ce pseudo et autoproclamé califat (en la personne d'un certain Abou Bakr al-Baghdadi) qui est en train d'y être mis en place ces jours-ci, qu'aux temps les plus reculés du Moyen-Âge.
Car c'est une terrifiante régression idéologique, bien plus qu'une évolution démocratique, qui caractérise l'Irak d'aujourd'hui. Son Premier Ministre, le chiite Nouri al-Maliki, fraîchement destitué, ne valait du reste guère mieux, sur le plan des libertés individuelles, que le sunnite Saddam Hussein : ils n'ont tous deux favorisé que leur propre communauté, lui octroyant tous les leviers de pouvoir, au détriment de l'autre !
BUSH LE PYROMANE ET OBAMA LE POMPIER
Ainsi, au regard de cette catastrophe pourtant annoncée qu'est le calvaire des chrétiens d'Irak, l'actuelle opération humanitaire de Barack Obama ne s'avère-t-elle, en fin de compte, que le minimum à réaliser afin de soulager leur terribles souffrances : Barack Obama, dont on n'a toujours pas compris comment il a pu être le lauréat du prix Nobel de la paix, ne sera jamais, quels que soient ses mérites ou bonnes intentions en cette effroyable circonstance, que le pompier du pyromane Bush !
Car si c'était la tyrannie qui présidait au destin de l'Irak sous Saddam, c'est l'enfer, au sens quasi littéral du terme, qui le caractérise aujourd'hui : la terreur religieuse s'y est ajoutée à présent, comble d'un double malheur, à la dictature politique... ce qui est pire encore !
Cruelle ironie du sort : c'est d'un porte-avions mal nommé « George Bush », celui-là même qui précipita l'Irak en pareil gouffre, que partent à présent les chasseurs américains pour aller bombarder les positions stratégiques de l’État Islamique et, par la même occasion, porter secours à leurs millions de victimes. Une manière comme une autre de se faire, après coup, bonne conscience, fût-elle, en ce cas, aussi médiocre qu'hypocrite !
LE CHAOS LIBYEN
Allons toutefois plus loin encore, nanti de ce même effort de lucidité, dans l'analyse. Là, c'est le très surestimé « printemps arabe », que, même s'il était nécessaire par certains aspects, j'ai très tôt qualifié de prélude à l' « hiver islamiste » (http://www.lepoint.fr/invites-du-point/daniel-salvatore-schiffer/le-printemps-arabe-prelude-a-l-hiver-islamiste-20-09-2012-1508302_1446.php) puis de « saison en enfer » (http://www.lepoint.fr/invites-du-point/daniel-salvatore-schiffer/le-printemps-arabe-une-saison-en-enfer-18-12-2012-1603158_1446.php), qui se révèle, depuis un certain temps déjà, un véritable et non moins terrifiant chaos, en Libye notamment, pour les populations indigènes. Les diverses milices lourdement armées, hors de tout contrôle et rivales entre elles, y sévissent là impunément, de la localité de Zenten à la région de Misrata, contre des milliers d'innocents, femmes et enfants confondus, à la merci de hordes de bandits surexcités.
PENSER, C'EST ANTICIPER (DIXIT ARISTOTE)
De cet autre pan d'enfer sur terre, ce n'est pas le cow-boy texan George Bush, propriétaire de nombreux et très rentables sites pétroliers, qui se trouve être, en l'occurrence, le principal artisan, mais bien un autre nain politique, Nicolas Sarkozy, lui-même alors flanqué, pour le porter à ce pinacle d'irresponsabilité et d'imprévoyance tout à la fois, d'un intellectuel nommé Bernard-Henri Lévy, assoiffé de piètre gloire médiatique plus que de réel savoir philosophique. Sarkozy sous le puissant quoique illusoire règne de Lévy : la coupe est pleine, bien que toute honte bue !
Merci monsieur Lévy, pour ce cadeau empoisonné, doivent se plaindre a posteriori, malheureusement pour eux, les pauvres libyens : le narcissisme guerrier de ce « Fouquier-Tinville de café littéraire », comme le surnomma naguère Raymond Aron en ses « Mémoires », n'a pas d'équivalent, en ce triste cas, sur la scène germanopratine !
Et dire que cet apprenti sorcier-philosophe vient d'écrire, dans une toute récente tribune (http://laregledujeu.org/bhl/2014/08/05/libye-non-bien-sur-je-ne-regrette-rien/), que « non, bien sûr, (il) ne regrette rien », incapable du moindre mea culpa et ignorant tout de l'humble mais indispensable sens de l'auto-critique, quant à cet indigne rôle qu'il a joué, en contribuant à la chute de Kadhafi (en 2011) sans toutefois en prévoir les désastreuses conséquences deux ans après, dans le malheur libyen. Autant dire qu'il n'a rien retenu, tant son arrogance intellectuelle comme son ego hypertrophié le dépassent, de la leçon, pourtant essentielle, du grand Aristote, selon lequel savoir « penser » consistait, avant tout, à pouvoir « anticiper » le cours des choses, surtout lorsqu'il risquait de se révéler funeste !
Et, là aussi, je ne crains pas de l'avancer, conscient, à nouveau, que ce que je dis ici tout haut n'est, en fait, que ce que beaucoup pensent tous bas : à tout prendre, cet autre tyran sanguinaire qu'était Kadhafi valait encore mieux, toutes proportions gardées (ce qui n'est pas peu dire !) et pour les mêmes raisons que Saddam, que ces fous furieux d'Allah !
SAUVER LES CHRETIENS D'ORIENT DES FOUS D'ALLAH
Davantage, et j'ose le dire encore : en ce qui concerne la Syrie et la tourmente dans laquelle elle se débat elle aussi aujourd'hui, il ne faudrait surtout pas que l'Occident, répétant là ses colossales erreurs du passé, joue à nouveau avec le feu en poussant à l'éviction de ses fonctions présidentielles Bachar el-Assad, cet autre dictateur que je ne porte pourtant pas dans mon cœur, si l'on ne veut pas que le Moyen-Orient sombre définitivement dans le pire des cataclysmes religieux et que, en ce cauchemardesque scénario, les chrétiens y soient totalement exterminés, brutalement rayés, comme s'ils n'avaient jamais existé, de cette millénaire et très spirituelle carte du monde.
Ce serait là, avec leur tragique et honteuse disparition, une grande partie - la plus noble et ancienne, peut-être - de notre propre civilisation qui se verrait ainsi anéantie : un incommensurable drame pour l'humanité !
DANIEL SALVATORE SCHIFFER*
*Philosophe, auteur de « La Philosophie d'Emmanuel Levinas – Métaphysique, esthétique, éthique (Presses Universitaires de France) et « Critique de la déraison pure – La faillite intellectuelle des 'nouveaux philosophes' et de leurs épigones » (François Bourin Éditeur).
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