Les femmes et le pouvoir : le féminin est-il si singulier ?
Deux livres évoquent les relations des femmes avec le pouvoir. Celui de Marielle de Sarnez qui sacrifie à cet exercice d’écriture et de témoignage auquel doivent se soumettre les personnalités politiques médiatisées, et celui de la psychanalyste Sophie Cadalen.

Dans son dernier livre Les Femmes de pouvoir : des hommes comme les autres ?, paru jeudi aux éditions du Seuil, la psychanalyste Sophie Cadalen s’interroge sur la manière dont les femmes se positionnent face au pouvoir.
Tuer la mère
Interrogée par La Tribune de Genève (article ici), à l’occasion de la parution de son livre, Sophie Cadalen rappelle les postures de femmes candidates : "Ce qui compte, c’est que je suis une mère", déclarait Hillary Clinton en 2007. L’image de la maternité serait rassurante pour les électeurs. "Je veux réaliser pour chaque enfant né ici ce que j’ai voulu pour mes propres enfants", lançait Ségolène Royal durant sa campagne présidentielle...
"Cet argument politique séduit les électeurs. Tous se retrouvent dans ce lieu commun qui veut que la mère soit forcément altruiste, protectrice, bienveillante, généreuse, douce...", déclare la psychanalyste. De fait, elle enferme la candidate dans le rôle traditionnel de la femme. La femme mère élevée au rang d’icône intouchable est un moyen d’affirmer "Je connais mieux le monde, je connais mieux l’humanité, je suis plus sensible car j’ai la capacité d’engendrer, je fais, par nature, sacrifice de moi." La femme candidate qui a connu la maternité aurait quelque chose en plus que les femmes qui n’ont pas engendré et bien sûr quelque chose que les hommes ne peuvent avoir. Mais Sophie Cadalen estime que Ségolène Royal a beaucoup perdu à ce jeu-là lors de sa campagne. Elle n’a pas assez insisté sur ses compétences, son parcours. "Tuer la mère, c’est selon moi le véritable combat du nouveau féminisme, et celui des femmes qui veulent le pouvoir", conclut-elle.
Féminin singulier
Marielle de Sarnez, candidate du Mouvement démocrate (MoDem) à la mairie de Paris, publie le 7 février Féminin singulier (ed. Plon), son journal de campagne.
Elle fait des révélations sur les scrutins de 2007 et les événements autour de François Bayrou. Elle raconte comment ses proches désertèrent « le troisième homme » pour Nicolas Sarkozy, qui « possède tout » mais va encore « faire les poches des autres ».
La députée européenne dément la version de Ségolène Royal sur un rendez-vous nocturne manqué, où François Bayrou aurait fait attendre l’ex-candidate socialiste au bas de son immeuble. Selon elle, le leader centriste dînait ce soir-là dans un restaurant des Champs-Elysées avec Mme de Sarnez et un ami, lorsqu’il reçoit un appel de Ségolène Royal qui demande à le voir, et décline l’invitation.
La candidate à la mairie de Paris revient aussi sur son parcours personnel, fille de député UDR qui, après le bac, enchaîne les petits boulots, jusqu’à un poste de secrétaire chez les républicains indépendants, le mouvement de Valéry Giscard d’Estaing.
Elle se rappelle comment, après des débuts de campagne difficiles pour la présidentielle de 2002, François Bayrou faillit tout abandonner, après avoir regardé une compilation des Guignols de l’info qui le caricaturent "en benêt total". Depuis, la hargne des marionnettistes ne s’est pas calmée. La semaine dernière encore, on y voyait la marionnette de Bayrou s’adressant à celle de Sarkozy "Moi aussi je vais te dire un secret : je ne sais pas faire mes lacets tout seul." Il est inquiétant de voir comment l’écharnement partisan d’une poignée d’humoristes se déchaîne au nom de la liberté d’expression, mais avec des cibles favorites. On les vit favoriser l’arrivée d’un Chirac au pouvoir en le montrant sous le jour d’un homme populaire et sympathique alors que la réalité est celle d’un clan Chirac qui s’enrichit sous les ors de la République. On constate leur entêtement à faire passer pour l’idiot du village un homme très cultivé, par ailleurs doté d’une conscience particulièrement aiguisée sur la réalité et le rôle que doit tenir un président de la République.
Interrogée dans le journal Le Télégramme de Brest le 8 février 2008, Marielle de Sarnez admet qu’elle s’est longtemps trompée sur l’amitié en politique : "J’ai voulu croire que les liens d’amitié étaient au-dessus des contingences politiques. Je me suis trompée."
Elle n’a pas"liquidé Mai-68". Enfant de la génération de Mai-68, elle ajoute "je suis aussi issue d’une famille gaulliste". Elle considère que le mouvement de Mai-68 était nécessaire contre une société alors "trop rigide, trop hiérarchisée et enfermée sur elle-même". Elle prône une "gestion des ressources humaines plus horizontale, moins hiérarchisée". C’est cela la modernité.
Une autre femme du MoDem, Anne-Marie Comparini n’a pas non plus "liquidé Mai-68". Interrogée en février 2005 sur www.lyonpeople.com, elle déclare : "Sans être égérie ni contre, la partie révolution culturelle de 68 je l’ai bien aimée parce qu’en fin de compte on voyait bien qu’on changeait de société... On sortait de quelque chose de pesant et on se disait : « ça y est la liberté est là ! » Je suis un peu comme Raymond Aron, je fais bien le distinguo entre la révolution culturelle que j’ai trouvé vraiment sympa et puis la partie politique qui n’était pas pour les « fillettes »... Anne-Marie Comparini, qui fit aussi partie du MoDem est aussi une femme qui s’est frottée rudement au pouvoir. Elue présidente de la région en 1999 suite à l’invalidation de Charles Millon, elle prit sa retraite après l’insulte ignominieuse qu’elle a essuyée de la part de Patrick Devedjian. Sur la maternité, voici ce qu’elle répond : "Auriez-vous aimé être maman ? Bien sûr ! Le regret de votre vie ? Très certainement. Quand on est une femme c’est certainement ce qu’il y a de plus beau. Mais je crois que par mes filleuls, ça n’a pas la même qualité, mais j’ai fait ce qu’il fallait."
Comment, en effet, les femmes pourraient-elles renier l’héritage de Mai-68 qui fut un grand moment de libération de la Femme ?
Pour aller plus loin car ceci n’est qu’un article sur l’actualité :
un dossier sur les femmes et le pouvoir sur histoire-politique.fr
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