• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > Les Langues régionales, un enjeu pour le XXIe siècle

Les Langues régionales, un enjeu pour le XXIe siècle

Engagement n°56 : « Je ferai ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. » (Programme de François Hollande)

Les Français sont souvent réticents à l’idée d’encourager la pratique des langues régionales. Il leur arrive encore de l’amalgamer avec un repli sur soi mettant en péril l’unité nationale. Si la Nation était divisée, de ce point de vue, l’attachement au bien commun cèderait la place à la défense de plusieurs intérêts, qui pourraient entrer en conflit. La harangue de Barère devant la Convention, en 1794, est restée fameuse :

« Le fédéralisme et la superstition parlent bas-breton ; l’émigration et la haine de la République parlent allemand ; la contre-révolution parle italien, et le fanatisme parle basque.

Cassons ces instruments de dommage et d’erreur. »

Aussi l’engagement de François Hollande apparaît-il comme une rupture avec la tradition jacobine, dont Jean-Luc Mélenchon, après Jean-Pierre Chevènement, se veut au contraire le continuateur. Un progrès dans le discours de la gauche dont on peut se réjouir…

Une politique culturelle schizophrène

 En 1925, sous la Troisième République, le ministre de l’Instruction publique Anatole de Monzie déclarait pour sa part :

« Pour l’unité linguistique de la France, il faut que la langue bretonne disparaisse. »

Au XIXe siècle, et jusqu’au milieu du XXe, on sanctionnait à l’école les enfants qui s’exprimaient en breton ou en occitan. Le maître remettait au premier élève qu’il surprenait à « patoiser » une marque infamante, à charge pour lui de la passer à un nouveau « coupable » ; et, à la fin de la journée, il punissait son dernier détenteur. Ce n’est qu’en 1952 que la « loi Deixonne » consentait à un début de reconnaissance des langues régionales… le corse excepté !

Mais en 1999, la France refusait de ratifier l’intégralité de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Pourtant, comment les mêmes Français qui sont scandalisés d’entendre parler de l’enseignement de ces langues peuvent-ils approuver, en revanche, la « loi 101 » qui a permis la sauvegarde de l’idiome de Molière au Québec, situé dans un Canada à majorité anglophone ? L’équité commanderait de considérer le développement des cultures régionales, quelles qu’elles soient, comme une menace pour la stabilité des Etats-Nations, quels qu’ils soient... ou à admettre pour ces cultures le droit à une pleine reconnaissance dans toutes les parties du monde.

On ne peut pas à la fois stigmatiser le « repli sur soi » d’un côté et, de l’autre, promouvoir l’usage du français ; y compris dans des pays où il est cette fois en situation de langue minoritaire, au nom de la « francophonie » ou de l’« exception culturelle ».

Au-delà de l’incohérence que trahit le « deux poids, deux mesures », c’est le simplisme des arguments opposés qui s’avère souvent frappant. L’un des préjugés les plus tenaces envers les identités régionales se trouve formulé dans cette interrogation courante :

« Comment peut-on se soucier du local à l’heure de la mondialisation ? »

La diversité linguistique, une chance pour la mondialisation.

Croire que ce qui relève du local impliquerait nécessairement un manque d’ouverture sur le monde, voire une hostilité à l’égard des autres, c’est perdre de vue que ce qui fait la spécificité de l’humanité, c’est sa diversité. Et que ce qui menace une telle spécificité, ce n’est pas la multiplicité des identités. Mais une uniformisation qui ne pourrait que conduire à fondre les individus dans un moule unique. Sur le plan linguistique et culturel, cela équivaudrait à faire marcher l’ensemble des Terriens au pas de l’oie !

La préservation des langues régionales est une condition indispensable à une mondialisation qui ne soit pas une uniformisation. Car une langue n’est pas un simple moyen de communication : c’est surtout le vecteur d’une culture, en d’autres termes d’une manière de voir et de se représenter le monde.

Chaque langue, sans exception, est dès lors un élément du patrimoine universel de l’humanité, et doit être appréhendée comme une richesse. Pour le saisir, il ne faut pas hésiter à se référer aux travaux des linguistes. Claude Hagège n’a de cesse de rappeler combien la perte d’une seule d’entre elles, ou que ce soit, s’apparente à un drame irréparable. David Crystal, lui, affirme sans détours :

« La disparition des langues devrait nous préoccuper au même titre que celle des espèces animales ou végétales. Car cela réduit la diversité de notre planète.

[...] L’uniformisation présente des dangers pour la survie à long terme d’une espèce. Les écosystèmes les plus forts sont ceux qui sont le plus diversifiés. On dit souvent que, si nous avons réussi à coloniser la planète, c’est parce que nous avons su développer des cultures très diverses, adaptées à différents environnements. La nécessité de conserver une diversité linguistique repose sur ce type d’argument. Si la multiplicité des cultures est une condition nécessaire pour un développement humain réussi, alors la préservation de la diversité linguistique est essentielle, puisque les langues écrites et orales sont le principal mode de transmission des cultures. »[1]

On ne peut que regretter le retard pris par la France en matière de conservation de son patrimoine linguistique, et par la réticence des gouvernements successifs à signer la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Le bilinguisme dans les régions doit être regardé comme un atout. Un atout qui n’est pas exclusif du fait de se reconnaître dans la citoyenneté française et, au-delà, dans la citoyenneté européenne.

La promotion du corse participe de cette façon au dialogue des cultures, et favorise les échanges de l’île avec ses voisins méditerranéens. Il est essentiel d’encourager le développement du nombre de ses locuteurs et sa transmission de génération en génération.

Toutefois, il ne s’agit pas non plus d’ignorer les questions qui se posent alors en matière de préservation des droits fondamentaux des personnes et de lutte contre les discriminations.

Le risque de dérive ethniciste

Comme le montre fort bien Amin Maalouf dans son livre Les Identités meurtrières, aucune identité elle-même n’est dangereuse. Ce qui est dangereux en revanche, c’est l’affirmation exclusive d’une identité contre les autres.

A cet égard, et alors que l’Assemblée de Corse travaille sur la co-officialité de la langue insulaire, on ne peut ignorer que, dans l’esprit de quelques acteurs du débat, la revendication linguistique sert de cheval de Troie.

Elle reste un instrument au service d’une idéologie qui n’a rien d’humaniste, en effet, lorsqu’elle vise l’introduction de thématiques ethnicistes dans le projet de société : identification comme « allogènes », « étrangers », voire « colons de peuplement » d’habitants qui ne parlent pas corse ; exclusion de salariés dans l’univers professionnel qui ne le comprennent pas ; mise en place de fait d’une citoyenneté à plusieurs vitesses, qui reposerait sur la distinction entre les locuteurs dans l’idiome régional et ceux qui ne le maîtriseraient pas. Lorsqu’elle a pour but, en fin de compte, de signifier à certains des 300000 Corses de l’île qu’ils ne sont pas Corses à part entière ; qu’ils ne sont pas considérés comme des interlocuteurs à égalité de dignité ; et que leur présence n’est même pas désirée.

Pour un employeur qui entendrait procéder à une « épuration » de cet ordre, par exemple, avoir la possibilité de faire signer un contrat de travail uniquement en corse deviendrait un moyen commode de supprimer de son entreprise tout candidat qui ne satisferait pas à un critère d’embauche ethno-linguistique. Y compris quand ils auraient fréquenté les mêmes écoles à Bastia ou à Ajaccio.

Une « corsisation des emplois » contraire à l’esprit de la « communauté de destin » hérité de Pascal Paoli et des Lumières. D’un point de vue philosophique, une régression qui ne serait pas sans rappeler les prémisses des tragédies du XXe siècle ; quand il était question de restreindre les droits de certains individus au prétexte de leur appartenance vraie ou supposée à une communauté « parasite ».

Sous Le Désordre des identités, pour reprendre le titre d’un ouvrage de Sampiero Sanguinetti, une promesse : la reconnaissance par la modernité d’une diversité culturelle longtemps brimée par les centralismes. Et un danger : la tentation de la balkanisation, telle qu’a pu la subir l’ex-Yougoslavie dans les années 90. Cette séquence de l’histoire européenne récente rappelle[2] comment l’exacerbation identitaire peut conduire, sur un même territoire, de simples voisins à se déchirer alors que rien de sérieux ne les sépare.

Une inquiétude excessive, et sans relation avec le débat actuel ?

Mais il est déjà arrivé que de fervents « partisans de la Bretagne bretonnante », ou que d’authentiques « militants de la langue corse », se fourvoient. Gravement. Les Muvristes, dans les années 30, se sont ainsi compromis avec l’Italie fasciste et mussolinienne. Par naïveté, peut-être[3]. C’est bien le drame de l’angélisme, qui en vient quelquefois à paver l’enfer de bonnes intentions…

Quel que soit le statut envisagé pour les langues régionales, il doit aller de pair avec le respect du droit du citoyen d’avoir accès, dans les actes qui l’engagent, à une information dans la langue qu’il comprend, notamment en ce qui concerne le monde du travail. Sans distinction liée au patronyme, à l’ascendance, à la confession ou tout autre critère discriminatoire.

La réflexion quant à cette exigence démocratique peut elle aussi s’engager à partir de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, qui prévoit qu’« Aucune des dispositions de la présente Charte ne peut être interprétée comme limitant ou dérogeant aux droits garantis par la Convention européenne des Droits de l'Homme » (article 4).

Ce qui implique qu’aucun projet linguistique ne saurait entrer en contradiction avec l’article 14 de ladite Convention, qui stipule :

« La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. »

Daniel Arnaud

Auteur de La Corse et l’idée républicaine, L’Harmattan, 2006, ouvrage dont s’inspire le présent article, et qui peut toujours servir à prolonger la réflexion.

http://www.amazon.fr/Corse-lid%C3%A9e-r%C3%A9publicaine-D...


[1] Courrier international numéro 486 du 24 février au 1er mars 2000, article intitulé La Diversité linguistique : un atout pour l'humanité.

[2] Comme le fait Angelina Jolie dans son film Au pays du sang et du miel, présenté à Sarajevo le 14 février 2012.

[3] Voir sur ce point Jean-Pierre Poli, Autonomistes corses et irrédentisme fasciste, DCL, 2007.


Moyenne des avis sur cet article :  2.56/5   (18 votes)




Réagissez à l'article

19 réactions à cet article    


  • Bill Grodé 6 mars 2012 09:50

    Tiens, ça existe ça, une « charte européenne des patois » !
    Ils n’ont pas d’autres chats à fouetter à Bruxelles ?


    • pjf971 6 mars 2012 22:43

      A Bruxelles, on s’occupe bien de réglementer la longueur des queues de cerise !
      Les langues régionales (que vous méprisez) c’est infiniment plus important. C’est la lutte contre la pensée unique. La diversité c’est la vie. L’uniformité c’est la mort.


    • Krokodilo Krokodilo 6 mars 2012 11:44

      C’est bien d’avoir mis un chapitre sur les dangers, car ils sont nombreux : en Catalogne, les parents venant d’autres régions ont théoriquement le droit pour leurs enfants à une scolarité en espagnol (castillan) mais en pratique, ils se retrouvent souvent avec le catalan imposé, faute de choix organisé...
      L’autre risque, pour tous les métiers mobiles (mutations), c’est aussi de privilégier les locaux : un enseignant qui ne parle pas la langue régionale : refus. 
      Enfin, comme toujours, aucune vue d’ensemble qui détaillerait comment vous imaginez une éducation français+l. régionale, étendue à toute la France et toutes les régions : de la maternellle jusqu’à l’université, toutes les filières ? Une multiplication par x du nombre de profs (quel budget ?) ? Obligatoire, ou optionnel ?
      Comme on dit, le Diable se niche dans les détails, pas dans les généralités « il faut soutenir ». Par ailleurs, David Crystal a beau jeu de soutenir la diversité linguistique, du moment que le français recule et que l’anglais est imposé à tous les Européens comme langue commune... La diversité oui, mais pas à l’échelon européen !


      • Le Canard républicain Le Canard Républicain 6 mars 2012 12:31

        Effectivement, cet article est très incomplet sur certains points essentiels...
        Pour avoir davantage d’informations sur l’offensive de l’anglo-américain et les attaques contre la la langue française : ICI.
        Pour connaître les dessous fondamentaux de certains « défenseurs » des langues régionales,
        quelques articles parmi d’autres... :
        - Des renforts pour les langues régionales. Par Yvonne Bollmann
        - Eva Joly : « Vive l’Europe des Régions »

        Cordialement.
        J.G.


      • dan29000 6 mars 2012 11:49

        Excellent article, l’importance des langues dites minoritaires n’est pas à négliger...Une langue qui disparait est toujours un drame culturel, même si certains incultes ne peuvent le comprendre et parlent de patois avec le mépris habituel de certaines classes dites supérieures bien germano-pratines...


        • Krokodilo Krokodilo 6 mars 2012 16:58

          Il ne faut pas non plus dévoyer le qualificatif de drame, même culturel : le latin a lentement disparu, bien qu’il nous en reste de nombreuses traces étymologiques et des devises connues de tous (grâce entre autres à Goscinny !), en quoi est-ce un drame ?


        • pingveno 6 mars 2012 17:41

          Non le latin n’a pas « lentement disparu » il s’est diversifié par régions. Le français est un descendant des formes vulgaires tardives du latin.
          Ce qu’on apprend à l’école c’est le latin de l’époque de César. Cent ans plus tard c’était toujours du latin qu’on parlait mais ce n’était déjà plus tout à fait le même.
          En revanche les langues parlées à l’époque ont, elles, presque disparu : le celte dont les descendants ne sont plus que des langues régionales ; les langues italiques (osque et ombrien) dont on ne connait presque rien ; étrusque ; etc etc. toutes ces langues que même des experts ne savent pas déchiffrer aujourd’hui.

          En quoi moins de diversité est-ce un drame ?
          Si tu étais écologiste je te demanderais en quoi la disparition des espèces sauvages, qui pour la grande majorité ne sont pas utiles à l’homme au sens strict du terme, est un drame. Même les dirigeants des Verts comprennent mieux ce parallèle que je viens de faire que les arguments des espérantistes. Les arguments d’Eva Joly, citée plus haut, m’étonnent d’autant moins que son pays d’origine est plus indépendant que le nôtre (il a refusé l’adhésion de l’UE par référendum et même plusieurs fois) alors même qu’il a tellement de langues régionales qu’il n’a pas réussi à avoir une seule langue nationale. Et malgré ça le pays est soudé, comme l’ont montré les événements dramatiques qui l’ont touché récemment.
          Alors je te pose la question : pourquoi voudrais-tu que les dirigeants du monde aient vis à vis du français plus d’égards que tu n’acceptes d’en avoir pour des langues plus petites ?


        • Krokodilo Krokodilo 6 mars 2012 19:03

          Je ne demande pas aux dirigeants du monde d’avoir des égards pour le français, mais aux dirigeants français d’en avoir pour leur propre langue et pour leurs propres intérêts ! Défendre ses avantages acquis, même lorsqu’ils proviennent de la colonisation, est un réflexe naturel. Il n’y a aucune raison de culpabiliser sur les langues à cause de la colonisation, car c’est le cas de quasiment le monde entier puisque les frontières ne suivent pas les frontières linguistiques : l’histoire est faite d’un amoncellement de violences. Les Américains sont plus pragmatiques.
          L’analogie avec la diversité biologique n’est qu’une analogie, avec ses limites : la diversité des espèces contribue à un équilibre complexe et fragile dans la nature, et nous ne connaissons pas les conséquences de telle ou telle disparition. Alors que nous sommes une seule espèce partagée entre de très nombreuses ethnies qui ont toutes des langues différentes. Plus encore : les ethnies seront de moins en moins individualisées du fait de notre mode de vie, et cela va accélérer la disparition de langues. En quoi la disparition de locuteurs des hiéroglyphes égyptiens a-t-elle été un drame pour notre espèce ? D’autant que nous avons les moyens intellectuels et techniques de conserver la mémoire des langues mortes.
          Je ne souhaite la mort d’aucune langue, mais je ne crois pas à l’efficacité d’un acharnement thérapeutique.


        • LE CHAT LE CHAT 6 mars 2012 12:09

          grin diseux , ti faiseux ché sochialos ! brin pour eusses !


          • pjf971 6 mars 2012 22:46

            brin ? Dites donc, restez poli !


          • Nérée 6 mars 2012 12:12

            C’est bien bonnasse ces velléités grandiloquentes, mais quel rapport avec les urgences de français qui crèvent ?
            Moi aussi j’aime les langues...et je suis d’ailleurs bien attristé par exemple du breton unifié dénaturant ce qu’il restait de bon dans cette région. Cessons de stigmatiser les basques ! ils méritent notre estime...surtout ceux de Bayonne ! Et la république a fait aussi beaucoup de mal ! Ayons l’honneteté de le regarder en face : Il est toujours temps de la réparer. Je ne veux pas du règne de la terreur d’une UMP « décomplexée », mais franchement que François Hollande se mêle un peu de ce qui devrait le concerner : Répondre à la politique économique actuelle dont est en dépit de la crisee, responsable en premier chef Sarkosi depuis son premier ministère, bien avant les cinq ans écoulés !


            • Jean-paul 6 mars 2012 13:28

              @krokodilo
              Vous combattez l’anglais mais l’esperanto n’est pas vecteur de culture .


              • Krokodilo Krokodilo 6 mars 2012 16:59

                Tiens, la bande à Asp qui nous provoque une énième fois, la routine quoi.


              • docdory docdory 6 mars 2012 14:01
                @ DanielArnaud
                Le fait que la gauche dans son ensemble veuille ratifier l’intégralité de la « charte européenne des langues régionales et minoritaires » est l’une des principales raisons qui m’empêche depuis quelques années de voter pour la gauche.
                Cette unité linguistique de notre nation sera totalement anéantie par cette charte, si par malheur elle devait être votée.
                La charte européenne des langues régionales et minoritaires, est une invraisemblable usine à gaz telle que ne peut qu’en concocter le Conseil de l’Europe, organisme non élu ( qui n’a rien à voir avec l’UE ) dont la légitimité démocratique ne repose strictement sur rien, et qui semble s’être spécialisé dans les combats absurdes et liberticides ( par exemple l’interdiction de la fessée en Europe ).
                La lecture de cette charte, en particulier de ses ahurissants chapitres sur l’éducation et la justice, laisse le lecteur pantois.
                On ose a peine imaginer les sommes faramineuses, qui doivent se chiffrer en dizaines de milliards d’euros, que l’application de ces mesures, qui s’imposeraient à ceux qui auraient l’idée idiote de ratifier cette charte, coûteraient à la République !
                En réalité, le but de cette charte est de se débarrasser des états-nations, pour les remplacer par une fédération européenne des régions, l’essentiel des pouvoirs, tenus par une oligarchie, revenant aux entités européennes, tandis qu’apparaîtraient des potentats régionaux qui consolideraient leur pouvoir local par la création de mini-nationalités régionales au sein desquelles les non locuteurs de la langue régionale seraient rapidement relégués au rang de citoyens de seconde zone.
                Tout cela pue considérablement, et contient les germes de la discorde civile voire des guerres civiles.

                • Krokodilo Krokodilo 6 mars 2012 17:05

                  Bien qu’un poil moins virulent que toi, je plussoie qu’on voit nettement sous la plume de certains régionalistes ce rêve de super-régions (aux frontières linguistiques), chapeautées par une Europe utilisant l’anglais comme langue commune : l’Etat français et la langue française étant alors considérablement affaiblis. Déjà que la création de l’UE est en elle-même un transfert de compétences, qui a succédé à celui de la régionalisation...


                • pingveno 6 mars 2012 14:34

                  Merci pour cet article. Petits détails :

                  Mais en 1999, la France refusait de ratifier l’intégralité de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

                  En fait en 1999 le gouvernement Jospin signe la charte... et quelques mois plus tard le Conseil Constitutionnel, non élu, majoritairement jacobin, rend la signature invalide, au nom de l’article 1 de la Constitution.

                  Pour mémoire cet article avait été rajouté peu avant "pour contrer l’implantation de l’anglais en France", ce qu’il n’a jamais vraiment pu empêcher, même la loi Toubon pouvant tomber au nom de la "libre concurrence" prônée par l’Europe. Par contre on l’emploie régulièrement pour taper sur les langues régionales. Cherchez l’erreur.

                  C’est beau la démocratie quand on y pense.

                  Pourtant, comment les mêmes Français qui sont scandalisés d’entendre parler de l’enseignement de ces langues peuvent-ils approuver, en revanche, la « loi 101 » qui a permis la sauvegarde de l’idiome de Molière au Québec, situé dans un Canada à majorité anglophone ? L’équité commanderait de considérer le développement des cultures régionales, quelles qu’elles soient, comme une menace pour la stabilité des Etats-Nations, quels qu’ils soient... ou à admettre pour ces cultures le droit à une pleine reconnaissance dans toutes les parties du monde.

                  En fait en allant plus loin, l’équité commanderait de considérer le développement des cultures quelles qu’elles soient, comme une menace pour la stabilité du nouvel ordre mondial où l’existence même des nations, des frontières (enfin, surtout les protectionnismes économiques en réalité) sont parait-il un problème majeur.
                  Sauf qu’on sait très bien qu’en réalité le nouvel ordre mondial, c’est un pays qui reste fermé et impose aux autres de s’ouvrir sans contrepartie.
                  Ce à quoi beaucoup de français nostalgiques ne trouvent rien de mieux à répondre que de copier le modèle ricain en remplaçant domination de l’anglais par domination du français. D’où les réactions que vous citez concernant le Québec.

                  Alors soyons cohérents à toutes les échelles.
                  Je vis dans une région dont le « platt » a été éradiqué depuis la guerre, jugé à l’époque trop proche de l’allemand. Je n’ai jamais pu l’apprendre et encore aujourd’hui il est quasiment impossible de trouver mieux que le « assimil de poche » pour savoir de quoi il retourne, pourtant ce n’est pas faute de chercher. Situation d’autant plus dramatique que je suis frontalier d’un petit pays qui lui, parle une langue très proche de notre parler régional mais où les français, faute d’avoir appris même l’allemand, n’ont d’autre choix que de s’exprimer en anglais (sic). Et malgré ça on continue de fermer les cours d’allemand (il y a aujourd’hui plus d’élèves d’allemand à Lyon qu’en Moselle...) et quand un enseignant souhaite initier les jeunes à la langue régionale, il se retrouve tout de suite mis à l’écart...
                  Alors oui je suis pour l’enseignement des langues régionales, voire partiellement en langue régionale. Ce qui ne veut pas dire aller jusqu’à l’exemple extrême des catalans (dont les politiques réclament l’enseignement en catalan... mais dont un collègue venu de là bas me rapportait que ces mêmes politiques envoient leurs propres enfants dans le privé hispanophone !). Autoriser, promouvoir, oui, plutôt deux fois qu’une. Mais penser aussi que les extrémistes corses font finalement plus de tort à leur langue que les modérés bretons.
                  A l’échelle du dessus, celle qu’on appelle généralement supra-nationale, vous avez raison aussi, comment peut-on décemment prôner en France l’écrasement des langues régionales tout en voulant contrer le tout-anglais au niveau mondial voire même seulement européen ? Je note d’ailleurs que les partisans du tout-anglais trouvent souvent un soutien de poids chez les régionalistes, soucieux de se venger de ce français tout-puissant. Sauf que prôner en contrepartie la domination du français est non seulement anachronique mais en plus guère plus valorisant que le tout anglais (n’oublions pas que si on parle français et anglais au Canada, c’est bien un vestige de la colonisation...). Alors si vous combattez le modèle de français dominant à petite échelle, vous ne pouvez décemment pas (je n’ai pas dit que vous le faisiez) promouvoir un modèle dominant à grande échelle, que ce soit le nôtre ou un autre. Du coup un seul modèle possible : langue régionale + langue nationale + espéranto (eh oui n’en déplaise au troll deux cases au dessus qui si jamais vous lui répondez vous parlera bientôt du cinéma américain histoire de bien dévier du sujet initial).

                  Donc, Daniel, je vous pose la question de la place des langues régionales : pour respecter toutes les identités à leur échelle (au fait il y a les langues régionales mais vous oubliez les minoritaires non territorialisées comme les tziganes) ou, comme le croit l’intervenant du dessus (qui n’est pas le premier, c’est un argument classique des jacobins) vous inscrivez-vous dans une politique du diviser pour mieux régner ?


                  • Krokodilo Krokodilo 6 mars 2012 17:09

                    Allez, un brin de provoc : croyez-vous qu’au 21e siècle, avec la mondialisation, les déplacements facilités, la concentration urbaine, la communication instantanée, l’interdépendance des économies, la disparition ou l’intégration des sociétés primitives, on va garder 6000 langues sur Terre ? Les langues vivent quand les gens les apprennent et les parlent, pas quand on fait une loi pour les faire survivre ; je conçois que des lois puissent y aider, mais en fin de compte, si les locuteurs ne sont pas motivés...


                    • pingveno 6 mars 2012 17:18

                      Entre une loi pour les forcer à survivre (Espagne) et un arsenal législatif pour les en empêcher (France : interdiction de parler breton même à la cour de récréation, interdiction des journaux bilingues français/langue régionale, etc) il y a une marge.


                    • Krokodilo Krokodilo 6 mars 2012 18:49

                      En Catalogne espagnole, le catalan n’avait et n’a nul besoin d’une loi pour survivre, car il est un des piliers de la résistance à Franco (un peu comme la religion en Pologne) et un facteur d’identité régionale très fort.

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès