Les strings interdits à Paris-Plages... mais pas les voiles islamiques...
« Le Parisien » révèle dans son édition de samedi, que les strings, le monokini et le naturisme sont désormais interdits par un arrêté municipal à Paris-Plages, sous peine d’une amende de 38 euros. « Nous étions obligés de faire un règlement intérieur pour Paris-Plages et, par mesure de sécurité, nous avons décidé d’y interdire les tenues indécentes », explique Pascal Cherki, l’adjoint chargé des sports, dont les propos sont rapportés par le quotidien, relate de son côté une dépêche de l’Associated Press.
Un bloggeur, Pierre Bouskila, réagit à cette restriction vestimentaire en ces termes : « Au nom de la »décence« les strings sont interdits sur Paris Plage, mais les voiles islamiques sont, eux, tout à fait autorisés (et pullulent d’ailleurs largement). Ainsi donc va la mise en place discrète mais efficace d’un mode de pensée, d’un conditionnement social qui préfigure l’intrusion de la shariah dans nos vies quotidiennes... une forme de continuité »extérieure« aux piscines musulmanes en quelque sorte... »
Une militante féministe, Brigitte Bré Bayle, qui est plus proche de Charlie Hebdo que de France Echo, écrit, elle, ceci dans l’organe de la Gauche Républicaine, ReSpublica (n°483 - Mardi 20 Juin 2006 : [email protected]) :
" Moi je dis bravo à ceux qui ont le courage d’intervenir par le pouvoir de leur fonction, qu’ils soient élus, directeurs d’écoles ou simples enseignants, pour empêcher la prolifération du voile dans l’espace public. L’absence de directive précise au sujet de l’accompagnement scolaire, renforcée par la position de la FCPE et des syndicats d’enseignants comme le SNUipp qui se sont opposés à la loi contre les signes religieux, laissent les enseignants démunis et en proie aux pressions des islamistes qui cherchent à investir l’espace de l’école publique dans certains quartiers en faisant admettre que le voile n’est rien d’autre qu’un élément de la diversité culturelle française.
Il est question de bien autre chose que du droit au respect des différences ou de l’aide à l’intégration que les enseignantes pensent apporter aux mères voilées en les faisant sortir de chez elles. Les femmes musulmanes qui ont acquis leur liberté par un combat quotidien contre les traditions et les croyances d’un islam radical qui opprime et asservit ne peuvent comprendre ces discours véhiculés par une gauche communautariste qui fait le jeu des intégristes de tout poil. Et que dire de l’Education Nationale impuissante à faire face aux demandes de soutien formulées par les profs et chefs d’établissements qui subissent intimidations, chantage et lettre d’accusation pour discrimination raciste ? Que de lâcheté ! En tant que femme, en tant que mère et en tant qu’enseignante, je dis qu’il est inadmissible que les choses continuent ainsi. L’école n’est qu’un aspect de la réalité. Je ne supporte plus de voir des femmes, dans la rue, transformées en Belphégor. Je ne supporte plus ces images qui, à l’époque de l’Afghanistan des talibans, avaient ému la France entière.
Aujourd’hui, dans trop de quartiers, elles sont devenues une réalité. Je ne supporte plus de voir des gamines de plus en plus jeunes voilées, et je ne supporte plus l’absence de réactions de la société toute entière, devant ce que je considère une agression contre mon histoire, mes combats, mes valeurs. Est-ce être sévère et injuste d’affirmer que l’islam radical avance en même temps que diminue la surface visible du corps des femmes musulmanes ? Des hommes et des femmes ont lutté depuis des siècles pour que l’égalité entre les sexes soit admise comme un progrès universel. Nous n’avons pas le droit, aujourd’hui en France, de laisser, au nom de ces luttes historiques, au nom de toutes celles qui souffrent et luttent en Iran et ailleurs, l’intégrisme religieux prendre le pouvoir sur les femmes. Il faut protéger les femmes musulmanes du port de cet uniforme réactionnaire, et celles qui veulent le porter le font chez elles ou à la mosquée.
Il ne me convient pas que cela soit le seul Myard, député de la droite catholique, qui pose cette question. Je n’ai pas d’illusion sur le maire de Maisons-Laffitte, je connais ses pratiques et sa complaisance avec les écoles privées dans sa ville, et sa conception de la laïcité est celle de Villiers, qui combat l’islam au nom de la guerre des civilisations. Mais qui osera, à gauche, proposer une loi pour limiter le port du voile, l’interdire aux mineurs et prohiber la burka partout en France ? Au nom de la défense et de la dignité de la moitié de l’humanité ? Certains amis me disent que cela serait une laïcité à la turque, et qu’il ne faut pas aller sur ce terrain. Moi, j’amalgame le voile à l’iranienne et les burkas à des tenues militantes et prosélytes, j’en ai marre d’en voir de plus en plus, je ne veux plus être agressée par cela, et j’en ai assez qu’il ne se passe rien autour de ces tenues insultantes pour les femmes. "
Que penser de ces deux réactions et quel lien y a-t-il avec l’interdiction du string et des tenues "indécentes" à Paris Plage ? Le débat avait été pourtant semble-t-il tranché par l’arrivée du bikini en 1946 et sa démocratisation par B.B : loin d’être indécent le mini maillot de bain, et ses dérivées mono ou string, renvoie, différemment du slip, à l’image onirique du corps bien dans sa peau, semblable aux statues grecques qui articulent grâce et harmonie. Lorsque les magazines féminins attaquent dès la fin de l’hiver avec nombre de régimes miracles, il ne s’agit pas pour eux de faire appel à la libido de leurs lectrices, mais plutôt à leur narcissisme quant au fait de posséder une silhouette agréable dont la perception est bien loin d’être salace puisque le jeu social sur la plage consiste bien plutôt à mesurer précisément cette harmonie entre sveltesse et estime de soi : les obèses, le savent bien quand ils hésitent à se montrer tels quels, non pas parce qu’ils auraient peur d’attirer vers eux des regards libidineux, ou des regards qui les jugeraient comme hors "norme", mais bien plus parce qu’ils savent s’être mis hors jeu quant à la nécessité de montrer un corps harmonieux.
Le cas des obèses est cependant complexe parce qu’il peut autant s’agir de compensations diverses dues à divers manques qu’à un choix délibéré voire civilisationnel (par exemple les sumos), mais du moins, ils participent tout de même à cette valeur devenue universelle, celle de montrer son corps dans son intimité avec l’élément naturel, qu’il s’agisse de l’eau ou de la lutte, celle-ci étant par exemple incarnée par le terrain de sport.
Qu’en est-il maintenant du lien avec le voile islamique ? Notons tout d’abord qu’il diffère du voile porté par une religieuse en ce que celle-ci est dite mariée avec le Christ, une religieuse reste en effet célibataire dans le monde terrestre, notons ensuite que ce voile ne concerne pas les chrétiennes en général, même si l’on peut faire état d’une lettre de St Paul sur la coiffure des femmes, sauf que cette parole de St Paul est datée, l’Église actuelle ne la défend pas, et qu’elle diffère du comportement de Jésus lorsque celui-ci accepte qu’une femme lui essuie ses pieds avec ses longs cheveux (sans voile donc) après les lui avoir oint (Jean, XII, 3). Observons par ailleurs que Jésus n’a, au vu des Ecritures, pas prononcé une parole sur le code vestimentaire, or, l’on pourrait également avancer que seule la Parole de Christ (le vrai...) compte... Mais c’est là une discussion théologique de grande ampleur qu’il s’agirait d’entamer avec les représentants actuels de l’Eglise fondée sur... Pierre, rappelons-le, -or Pierre, disait le Grand Arnauld, ne fut-il pas ce Juste auquel la Grâce manqua trois fois ?... ce qui impliquait implicitement que l’Eglise reste humaine et donc faillible...Arnauld fut excommunié pour cette (trop)juste parole.
Le voile islamique diffère en réalité d’un vêtement issu d’une différence culturelle en ce qu’il est à la fois obligation et discrimination. Obligation, et non pas choix comme le prétendent certaines, du moins dans la vie courante contemporaine, (puisque les textes islamiques sont en effet bien moins clairs et parlent plutôt de recommandation ; Notons par ailleurs qu’il est plutôt fait état dans le Coran de « poitrine » et que seules les femmes de Mahomet avaient le droit de se couvrir afin que les autres hommes ne les courtisent pas...), obligation durcie en tout cas de telle sorte qu’il en devient de moins en moins un choix, du moins si l’on en croit certains témoignages actuels puisque le voile y serait en définitive conçu à la façon d’un organe dont le non-port aurait l’équivalent d’une amputation, ou alors d’un vêtement sacral dont l’absence indiquerait immédiatement la nudité et l’impureté. Une telle conception implique dans ce cas une discrimination puisque la femme étant déclarée impure, doit non seulement se voiler mais aussi être placée à part, dans l’espace public (trottoir, transport, lieu de culte, hôpital, école...), et dans l’espace privé (les femmes ne mangent pas avec les hommes, ce qui n’a rien à voir avec une quelconque « pudeur » ). Par ailleurs le port de ce voile, et, surtout la façon islamiste de le porter, exclu tout non musulman, voire toute autre autorité que celle de la loi islamique considérée de ce fait comme supérieure juridiquement à toute autre loi, fut-elle républicaine.
Autrement dit, pour certains militants islamistes, non seulement toute mixité, tout mariage avec un non musulman, est interdit (à moins de devenir musulman), mais toute information, tout enseignement même public, non validé « halal », est écarté, tout échange, culturel, est honni : d’où la nécessité dorénavant de manifester contre le sapin de Noël, contre les cadeaux de Noël, fustigeant même certains ressortissants d’Afrique du Nord de fêter le Nouvel An, de manifester contre les tirelires ayant la forme d’un cochon, etc...Bref, le voile apparaît de plus en plus comme un uniforme militaire agressif et expansionniste signifiant immédiatement que son port vous exclu instantanément.
Cette obligation et cette exclusion vont évidemment à l’encontre de la valeur universelle de la liberté, née en Occident, et aujourd’hui répandue dans le monde entier à la façon d’une découverte technique. Et c’est là l’essentiel : il est apparu au fil du temps que nul n’a le droit d’imposer au corps humain une limite qui en interdirait le libre développement en interne comme en externe, (ce qui implique évidemment d’en définir des limites ou normes). Aussi le fait d’avoir le droit de sentir sur sa peau la caresse d’une brise d’été et de sentir sur soi le regard admirateur d’autrui est non seulement un acquis civilisationnel fondamental, mais il dépasse sa relativité culturelle en se hissant au niveau de valeur universelle, c’est-à-dire nécessaire, pour tout être humain, puisque l’humanité est au-delà des races et des cultures. Un tel droit est en effet bien plus lié à la nature intrinsèque du développement humain que la seule résultante d’une normativité historique : les femmes veulent être propriétaires de leurs corps parce que telle est l’exigence intime de ce qui meut la nature humaine, celle de la liberté d’être et non pas de seulement exister à la façon d’une pierre ou d’un animal.
En ce sens, strict, le port du voile est bien plus indécent que le port du string ou du monokini, puisqu’il va à l’encontre de cette liberté, fondement, socle, soc, pierre angulaire sacrale de tout l’Occident, de toute l’Humanité en devenir aujourd’hui autour de cette valeur.
Ceci dit, que faire concrètement devant une telle indécence ?... Il va de soi que dans l’espace public institutionnel il doit être prohibé, y compris d’ailleurs à la faculté (nous sommes en retrait de la Turquie sur ce point...) puisqu’il n’exprime pas un choix ni une liberté mais une contrainte jugée discriminante pour des raisons non seulement relatives, juridiques, mais universelles, c’est-à-dire intrinsèques à la nature du développement humain.
Dans la rue, l’interdiction est plus malaisée, puisqu’il ne s’agit pas d’un espace institutionnel ou privé, mais d’un espace social, régulé certes, mais, aujourd’hui, pas au point d’obliger quiconque à se comporter selon des normes strictes, bref, la tolérance est grande, d’où l’attrait mondial de la rue libre, que l’on ne voit nulle part ailleurs que dans les États ayant réellement choisi la liberté comme socle fondamental ; néanmoins l’on peut considérer deux choses : d’une part, l’on a le droit de critiquer le port du voile en ce qu’il a d’inhumain, de discriminatoire et d’appel à l’exclusion de tout ce qui n’est pas musulman ; d’autre part, on peut exiger que le port intégral du voile comme la burka ou le voile cachant tout le visage et le corps soit interdit parce qu’il va à l’encontre des lois les plus sacrées fondatrices de la dignité humaine telle que celle-ci a progressé et s’est auto-révélée à elle-même dans les luttes pour l’émancipation du libre-arbitre.
C’est ce débat là qu’il s’agit de mener, dont l’occultation est de toute façon au cœur du malaise politique français puisque l’on sait maintenant que l’extrême droite a récupéré ce non dit et fait officiellement 20% grâce à lui dans les intentions de vote (30% si l’on ajoute la droite extrême...), sa montée en puissance venant justement du refus de débattre d’un tel état de fait, alimenté de plus en plus par des aberrations comme l’interdiction du string et du monokini à Paris Plages...
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