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Accueil du site > Tribune Libre > Les Syndicats pensent toujours qu’ils vont gagner

Les Syndicats pensent toujours qu’ils vont gagner

La crise « sanitaire » comme instrument de la lutte des classes ? Vraiment ?

Premier fait : le syndicalisme français est présent majoritairement dans l’État. Il représente d’abord des salariés de grandes administrations d’État et des fonctionnaires. L’État peut-il se dénoncer lui-même ? Bien entendu, non.

Deuxième fait : les syndicats reprennent les termes de la « crise » en cours dans le langage officiel - les « clusters », la « deuxième vague », la « pandémie » - rien ne manque au catalogue (nous ne chantons pas ensemble l’air du catalogue).

Troisième fait : le rôle du syndicat est de défendre la personne humaine dans le contexte unique de sa vie professionnelle. Ce qui se passe en dehors du temps consacré à l’entreprise ou à l’État n’est pas de son domaine.

Question : pourquoi donc les syndicats continuent à négocier le poids des chaînes comme le suggère la fameuse phrase satirique mille fois citée ?

Réponse : parce que, corollaire du fait numéro un, ils ne représentent pas le secteur privé. L’État est vécue comme une entité éternelle d'un poids imposant que seules les évolutions de la technologie peuvent alléger. La haine du fonctionnaire, pourvu de son poste éternel et de son salaire constamment revalorisé, est entretenue par le discours médiatique car le discours médiatique s’adresse à la majorité, et la majorité travaille dans le très précaire secteur privé laissé à l’arbitraire du marché et de l’intelligence ou de l’imbécillité humaines (adapte-toi ou meurs). Cela rassure le quidam sur le fait que certaines choses peuvent changer, cela entretient cette illusion d'une nature de la supériorité du "mérite" qui peut revenir faire valoir ses droits n'importe où et n'importe quand.

Si nous reprenons le troisième fait, il est donc hautement probable que le syndicat va chercher à obtenir des moyens pour ses adhérents d’exercer optimalement la dite activité professionnelle. Optimalement, c’est-à-dire en effectuant le moins d’efforts possibles pour le coût le plus élevé possible.

Il y a une pensée mécaniste à l’œuvre. C’est la même qui fonde le concept de l’État redistributeur. C’est la même que celle de la théorie du ruissellement. C’est la même qui découle de l’argent comme outil humain de transaction. A partir du moment où je te donne un billet de 10 euros pour (ou contre) une baguette de pain et que tu me rends 9 euros en monnaie, tu crées la condition pour le réinvestissement de cette somme restante ailleurs. La course en avant de l’accumulation matérielle jusqu’à ce que le billet soit consommé part de là. Ce billet est désormais dans d’autres mains, et il passe, et il passe, et il passe… Et il fait des enfants. Et pour avoir des enfants puis pour les nourrir, on produit donc plus de baguettes de pain. Et c’est épuisant. Et c’est excitant. Le monde s’est agrandi. On a de plus en plus de billets dans les mains.

Vient la « pandémie ». Apparition de la mort, symptôme de l’épuisement qui prend le pas sur l’excitation. Pour survivre à ça, l’État fait enfin une chose que les syndicats demandent sans cesse. Il s’endette. Il impulse au milieu des êtres la force « vitale » de l’argent, qui permettra au travail de continuer à se multiplier, au monde de s’agrandir. Selon Bruno Le Maire, ces dépenses « nous permettront de rebondir très vite et d’accélérer la transformation de l’économie française pour la rendre plus compétitive ».

Le syndicalisme français peut donc être rassuré. Pour permettre à cette compétition de s’accroître (l’économie n’est pas une science ni un art ; c’est un sport), il va être renforcé. L’appareil d’État devra être densifié pour affronter la conséquence inévitable de la compétition : l’attitude très peu sportive des perdants. Comment vont-ils nourrir leurs familles si jamais l’État ne leur reverse pas ce que les employeurs du privé englués dans la compétition ne peuvent plus leur donner ? Comment l’État, privé d’impôts, peut-il continuer à soutenir le privé en le déchargeant pour qu’il puisse mener sa compétition et et à soutenir le public pour qu’il laisse la compétition avoir lieu ? Peut-on vraiment remettre tous les compteurs à zéro pour permettre à la partie de se poursuivre ? C’est une possibilité technique. C’est, aujourd’hui, une impossibilité morale. Demain, peut-être, plus personne n’aura de famille et pourra récuser l’héritage de ses parents en ayant trouvé d’autres richesses que celles qui ont été transmises de générations en générations. Mais demain reste une hypothèse. Demain, je peux me mettre à croire à l’éternité d’un lien, tout autant que je puisse briser celui que je croyais éternel. Sur une impulsion, tout peut se construire ou être anéanti. C’est à moi que revient la charge de décider si le temps sera long ou court. Je ne dois pas laisser la possibilité de la maladie et de la mort prendre l’ascendant. Pour pouvoir penser tout ça, je postule un invariant : l’État est éternel. Les structures de pouvoir et de négociation ne sauraient être défaites, car elles sont l’institution des relations ordinaires aggravées par les vertiges du nombre. L’État sera à jamais le chaperon dans toutes ces grandes fêtes privées où la production de l’homme honnête est bradée par le passage d’un billet d’une poche à l’autre.

La reprise des éléments de langage officiels n’est peut-être pas effectuée en conscience par les titulaires de ces organisations, mais elle sert évidemment leurs intérêts. Plus d’État dans les faits pour moins d’État dans le discours, ça les arrange. Ce qui se passe dans le secteur privé, et a fortiori dans la vie privée, de la majorité des gens qu’ils ne défendent pas, ne les concerne pas. Par définition, il est acquis que le secteur privé est toujours en recomposition. Le rythme qu’impulse l’État à l’économie générale doit être pour tous ces gens qui se croient libres le fait d’une main invisible.

Le syndicalisme en est l’annulaire. Sur ce doigt est posée l’alliance du peuple et de la bourgeoisie à travers l’État, structure qui remplaça le Royaume de la même façon dont l’Église Catholique remplaça l’Empire Romain. Il n’y a pas de changement à espérer. Il n’y a même pas de changement à faire. Le travail doit être fait, les billets doivent circuler. Et la pandémie doit exister, pour le bien de tous. Avec ou sans lutte des classes, le concept d’Éternité doit vaincre. Au prix de la famille et du sang, si nécessaire.

Les syndicats pensent toujours qu’ils vont gagner. Et heureusement ils gagneront, au prix de leur intégration explicite dans l’État, de l’abolition entre le professionnel et le privé. Cela laissera enfin le champ libre aux amateurs de la vie de tous les jours pour reprendre ce que l’État leur a volé. Je rêve d’une union sans symbole de ralliement, sans but de ralliement, de l’abstraction absolue d’une chaîne humaine de cœurs et de volontés. D’un État concret, constitué de gens du quotidien, qui ne s’occuperait pas de l’argent et se contenterait de coordonner des solidarités pour la réalisation de projets communs sur un temps court ou long, sur un rythme libre. D’un État médiateur qui ne déciderait pas de l’intérêt général, de ce que les jeunes et les vieux veulent ou ne veulent pas faire de leur vie et de leur mort, qui n’imposerait pas un Bien souverain à coups de smartphones TousAntiCovid et de vol de métaux rares. Mais qui payerait pour ça ?


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37 réactions à cet article    


  • chantecler chantecler 1er novembre 2020 10:02

    @tonimarus45
    Au moins Pétain n’a pas fait les choses à moitié .
    Arrêe de la république , suppreiions des syndicats , misa au pas des fonctionnaires relégation ou emprisonnement des partis de gauche .Interdiction de la franc maçonnerie , retour de la religion , travail famille patrie ....
    C’était le bon temps avec nos amis allemands un peu nazis certes .


  • tonimarus45 2 novembre 2020 09:28

    @chantecler le mot collabo ne faisait pas reference a petain


  • Francis, agnotologue Francis 2 novembre 2020 10:09

    @tonimarus45
     
     Mélenchon ferait bien de se positionner sur la politique du gouvernement en matière de lutte contre la supposée pandémie.
     
     Et pour commencer, je suggère à tous les dirigeants politiques de lire cet article :

     
    «  Dans l’esprit du public, le concept de « confinement » se confond avec celui « d’isolement ». Ces deux notions n’ont pourtant rien à voir. Le principe de l’isolement repose sur la mise à l’écart, pendant la période de contagiosité, de patients dont le diagnostic de pathologie transmissible a été formellement confirmé. Or le confinement de la population consiste à enfermer les familles à domicile, sans savoir qui est sain, asymptomatique ou malade. De ce fait, un membre de la famille contaminé contaminera inexorablement les autres membres du foyer avec qui il est confiné. Preuve en est : les épidémies survenues à bord du paquebot de croisière Diamond Princess et du porte-avion Charles-de-Gaulle. L’événement ayant frappé ce dernier constitue la meilleure démonstration expérimentale de l’absurdité du principe du confinement d’une population pour lutter contre une épidémie. Sur 1 766 marins confinés de fait à bord du navire, 1081 ont été contaminés à partir d’une poignée de militaires asymptomatiques rentrés de permission, dont 1 046 malades, soit 61% de la population totale du navire. »
     
    « Sans justifications scientifiques et médicales, deux raisons persistent pouvant expliquer le choix coercitif du pouvoir exécutif de confiner l’ensemble de la population
    La minimisation de la responsabilité du décideur : une victime identifiée du Covid, mise en scène par des images terrifiantes de soins intensifs, a plus de valeur pour les autorités qu’une victime collatérale des conséquences du confinement non encore identifiées. La puissance publique favorise ainsi systématiquement les actions et investissements qui réduisent sa responsabilité, quitte à détruire le tissu économique et social.
    La jouissance du pouvoir : l’amour du pouvoir, le plaisir de régner, le désir de dominer, procurent une légitimité illusoire à des comportements aberrants qui se nourrissent de mensonges hygiénistes. Le chef de l’État tend à imaginer le monde comme un théâtre scolaire sur la scène duquel le premier rôle lui est attribué. La représentation d’une réalité binaire associée à une caution technique de son « Comité scientifique » conforte son désir en lui procurant une légitimité. »
     

  • tonimarus45 2 novembre 2020 10:26

    @Francis----«  »«  »Mélenchon ferait bien de se positionner sur la politique du gouvernement en matière de lutte contre la supposée pandémie. «  »«  »« vous ne trouvez pas que quelque chose cloche dans votre phrase ??,EN effet que melenchon s’allie a macron suite a ce que vous dites etre une »« SUPPOSEE PANDEMIE » ????????


  • Francis, agnotologue Francis 2 novembre 2020 12:02

    @tonimarus45
     
     oui, c’est maladroit.
     
     Je voulais dire qu’il est suiviste.


  • Et hop ! Et hop ! 5 novembre 2020 14:33

    @chantecler :

    J’ai l’impression que vous ne vous êtes pas rendu compte que quand Pétain a été appelé au pouvoir par le Président Lebrun, puis investi très majoritairement par le Parlement de gauche, la déroute de l’armée française de la IIIe République était complète, avec 3 millions de civils belges, hollandais et français errants sur les routes, et 1 million de soldats prisonniers.

    Vous êtes hostile au travail, à la famille, à la patrie, ou aux trois ?

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Massilia_(paquebot)#Passagers_du_Massilia


  • zygzornifle zygzornifle 31 octobre 2020 18:22

    Oui mais gagner quoi ?


    • Nicolas Cavaliere Luigi Cavaliere 31 octobre 2020 19:37

      @zygzornifle

      Le championnat de la lutte des classes.


    • Aristide Aristide 1er novembre 2020 13:08

      @Luigi Cavaliere

      Et après, le champion il gagne quoi ?


    • Nicolas Cavaliere Luigi Cavaliere 1er novembre 2020 13:22

      @Aristide

      Une visite à l’Elysée suivie d’un repas avec Emmanuel et Brigitte.


    • Aristide Aristide 1er novembre 2020 13:28

      @Luigi Cavaliere

      Vous parlez d’un gain ? Les ors de la République vous attirent tant que cela ?


    • Nicolas Cavaliere Luigi Cavaliere 1er novembre 2020 13:37

      @Aristide

      A quoi bon gagner le championnat de la lutte des classes si c’est pour rester parmi les pauvres ?


    • Aristide Aristide 2 novembre 2020 08:24

      @Luigi Cavaliere

      Ouais, c’est sûr. En gros une vrai révolution au sens astronomique. Les représentants autoproclamés des dominés à la place des dominants actuels. C’est une vieille histoire qui se répète !


    • tonimarus45 2 novembre 2020 10:20

      @Luigi Cavaliere sauf que malheureusement la lutte des classes c’est la droite, bien aidee par les differents gouvernement de droite et des « dits de gauche » qui l’a gagnee ??????????,,


    • Nicolas Cavaliere Luigi Cavaliere 2 novembre 2020 17:09

      @tonimarus45

      Le but de la lutte des classes c’est pas autre chose que la lutte pour le confort matériel et financier. Une fois parvenue sur un certain plateau, convaincue d’avoir un ascenseur social fonctionnel et des chances d’accession raisonnables à la propriété foncière, une des classes a relâché sa vigilance. Et ce n’est pas celle des gens fortunés.


    • zygzornifle zygzornifle 1er novembre 2020 06:49

      Les syndicats ?

      Hahaha laissez moi rire, ils ont appelés au sursaut républicain et ont participés a l’élection de Macron et ils viennent chouiner.

      Certains disent a raison que l’on a la droite la plus bête du monde, on peut mettre également les syndicats dans le même panier ..... 


      • tonimarus45 2 novembre 2020 10:22

        @zygzornifle vous dites n’importe quoi


      • TSS 1er novembre 2020 10:07

        Les syndicats seront representatifs quand ils arreteront de toucher

        de l’argent de l’etat et qu’ils ne feront pas parti des syndicats,JAUNES,

        européens presidés par Berger (plus jaune que lui tu meurs)

         A l’heure actuelle il n’y a que SUD qui ne reçoit pas d’argent mais il

        n’est pas considéré comme representatif par l’etat.. !!


        • tonimarus45 2 novembre 2020 09:26

          @TSS oui « sud » dont la creation a affaibli le principal syndicat revendicatif ?????????????


        • jef88 jef88 1er novembre 2020 12:48

          JE ME SOUVIENS !

          Il y a bien longtemps .... Dans une usine, TOUS les travailleurs ou presque) étaient syndiqués !

          Puis avec d’abord Giscard et surtout Mitterrand, les syndicats se sont politisés à fond ! Bien sur, il y avait déjà des tendances politiques avant, mais c’était le quotidien des travailleurs de la boite qui primait ! !

          Seulement cette politisation a fait baisser le % des syndiqués, en gros, au fil du temps de 90% à 10% .....

          Les syndicats sont alors devenus ce que rêvaient les politiques : des accessoires pour la propagation de leurs opinions .....


          • gouzier gouzier 1er novembre 2020 14:54

            @jef88

            « Les syndicats sont alors devenus ce que rêvaient les politiques : des accessoires... »
             
            « Des collaborateurs » serait plus approprié. « Des traîtres aux travailleurs syndiqués » aussi.

            Les Martinez, Veyrier et consorts (ne parlons pas de Berger qui est une véritable pute) ont tout fait pour ruiner le mouvement des Gilets jaunes.

             
            Il aurait suffi que ces « secrétaires généraux » de pacotille disent à leurs troupes : « Dès le 24 novembre 2018, tout le monde dans la rue chaque samedi avec les Gilets jaunes jusqu’à ce que le pouvoir capitule  ! » ou qu’ils appellent à la grève générale ou encore qu’ils incitent les routiers à bloquer les axes de communication, les dépôts de carburants... au lieu de leur ordonner de ne pas bouger, pour que le mouvement de contestation soit victorieux en quelques jours. Macron aurait alors sombré depuis longtemps dans les poubelles de l’Histoire et nous n’en serions pas là...


          • tonimarus45 2 novembre 2020 09:23

            @jef88 non ce qui a fait baisser la syndicalisation dans le prive c’est qu’a l’heure ou on licencie pour un oui pour un non, quand la maitrise vous fait comprendre que si vous adherez a un syndicat vous serez le premier dans la charrette, pire si vous faites greve, le choix est vite fait.Et c’est cela qui se passe 


          • tonimarus45 2 novembre 2020 10:05

            @gouzier

             arretez votre « syndicats tous pourris » le prive ne suit pas et vous le savez tres bien et la cfdt est la pour faire capoter tout mouvement revendicatif.croyez vous qu’il faut decreter « tous dans la rue » pour que tous suivent ??????,Et moi qui au fait toutes les greves depuis l’age de 18 ans et j’en ai a present 81, j’en sais quelque chose.La seule greve qui pourrait faire reculer le gouvernement « c’est la greve generale » or certains syndicats dont en premier lieu la cfdt qui par miracle est devenu le premier syndicat de france s’y oppose.Comment voulez vous mobiliser les travailleurs quand ce syndicat et meme d’autres vous tirent dans les pattes

          • zygzornifle zygzornifle 2 novembre 2020 08:59

            Comme le disait si bien Coluche :

            Le patronnât c’est l’exploitation de l’homme par l’homme , le syndicalisme c’est le contraire ....


            • tonimarus45 2 novembre 2020 10:14

              @zygzornifle ce n’est pas la meilleure « saillie » de coluche car si on voit l’exploitation des travailleurs par le patronat , j’aurais aime qu’il m’explique l’exploitation des travailleurs par les syndicats ??????,surtout quand on voit la faible syndicalisation


            • zygzornifle zygzornifle 2 novembre 2020 09:04

              Quand je travaillais a l’Alstom dans les année 75

              La CGT c’était les communistes, la CFDT les socialistes qui faisaient tout pour casser les grèves et qui fricotaient avec la direction et ensuite FO ou s’inscrivaient les renégats qui se fraisent éjecter des autres syndicats ou qui étaient déçus par eux .....


              • tonimarus45 2 novembre 2020 10:16

                @zygzornifle vous avez la memoire selective « ,fo » a une epoque faisait la meme chose que la cfdt actuellement ; elle a ete doublee par la droite par cette derniere


              • chantecler chantecler 2 novembre 2020 09:21

                C’est bien ce que je pense .

                On dénigre les syndicats avant de les interdire comme sous Vichy et les salariés ne seront alors défendus que par les ou un parti politique unique ?


                • tonimarus45 2 novembre 2020 09:24

                  @chantecler bien vu 


                • eddofr eddofr 2 novembre 2020 13:22

                  Vous écrivez « les syndicats pensent toujours qu’ils vont gagner ».

                  Comme si les « syndicats » étaient une entité pensante, « ex-nihilo ».

                  Les syndicats ce sont des syndiqués.

                  Et les syndiqués, ceux qui cotisent et agissent, sur leur temps de délégation, au sein de leur entreprise pour défendre tant bien que mal les intérêts de leurs collègues, ceux-là sont certains de perdre, de tout perdre, à plus ou moins brève échéance.

                  Les syndiqués n’ont aucune illusion, ni sur leurs « représentants », ni sur leur capacité à négocier, ni sur leur capacité à mobiliser, ni sur leur capacité à syndiquer.

                  Vous croyez vraiment qu’on ne se rend pas compte, qu’on est que 4 000 sur ce « putain de boulevard » quand il faudrait être 400 000, simplement pour être entendu, autrement que comme un épiphénomène folklorique ?

                  Vous croyez vraiment qu’on ne se rend pas compte, en CSE ou en négociation que notre direction nous propose un accords qu’elle appliquera, de toute façon, au besoin unilatéralement si on ne le signe pas.

                  Les syndiqués se rendent bien compte que le concept même de revendication collective n’est plus à la mode.

                  Les syndiqués se rendent bien compte que les nouvelles génération ont été formatées à l’individualisme et au « moi d’abord et quoi qu’il en coûte » (aux autres).

                  Les syndiqués mènent un combat d’arrière garde, essayant de retarder autant que faire se peut l’inévitable disparition du droit du travail, l’inévitable disparition d’un droit opposable aux pouvoirs (tous les pouvoirs quels qu’ils soient).

                  Le droit est une limite imposée par la collectivité aux pouvoirs individuels.

                  Sans collectif, il n’existe pas de droit. Et le collectif est mourant, s’il n’est pas déjà mort.


                  • Nicolas Cavaliere Luigi Cavaliere 2 novembre 2020 17:05

                    @eddofr

                    Qui décrivez-vous par « nouvelles générations » ? A partir de quelle période l’individualisme a pris selon vous l’ascendant ?

                    Un livre titrait récemment que la plupart des gens passent leur temps à revendiquer « j’ai le droit ». C’est une expression constante, souvent entendue depuis le début du siècle. Je suppose que beaucoup pensent que le droit à l’allocation chômage, au remboursement des médicaments et des visites chez le médecin sont des acquis qui ne seront jamais remis en cause. Ça contribue à expliquer le faible engagement.

                    Personnellement, je n’ai jamais considéré que les systèmes qui ont été mis en place seraient maintenus par l’Etat sans être vidés peu à peu pour ne plus représenter qu’un filet de sécurité. J’ai successivement adhéré à 4 syndicats différents. Tous les responsables locaux que j’ai rencontrés n’avaient pas ces préoccupations. Ce qui comptait, c’était de rassembler les gens autour d’un barbecue et/ou de répéter ad nauseam les « avantages » de la convention collective comme si informer chaque semaine sur le même sujet n’était pas autre chose que de prêcher les convaincus. Je n’ai connu, à une seule exception, que des représentants consensuels qui étaient des sortes de cadre officieux de mon entreprise et qui n’attendaient qu’une chose, le renouvellement de leur mandat local ou leur promotion vers un mandat national. Quand les frais et les avantages qui leur étaient accordés leur ont été retirés, les temps de délégation raccourcis, aucun n’a protesté. Par ricochet, d’autres droits des salariés ont ensuite été revus à la baisse (alors que l’entreprise grandit, et qu’il y a plus de cotisants au comité d’entreprise, son déficit s’épaissit chaque année et les prestations sont rabotées). Il y a comme l’amère impression que tout le monde pense que la soupe est déjà assez bonne, et que c’est pas parce qu’on en lâche une louche qu’on finira par nous enlever l’assiette. C’est un raisonnement faux. C’est manger ou être mangés. En face, ils sont communistes à mort, et ils ne lâcheront rien.


                  • Adèle Coupechoux 3 novembre 2020 09:24

                    Aujourd’hui, nos avancées sociales sont remises en cause par les media avec des phrases assassines diffusées dans l’opinion publique : trop de jours fériés, trop de vacances pour les enseignants, les français vivent aux dessus de leurs moyens, etc...

                    Comme pour les 35h qui ont été parfois mal accueillies et détournées pour exploiter encore plus les employés. Les accords d’entreprise mal négociés dans les privé, parce que sans syndicats pour les porter, ont donné des conditions de travail complètement délirantes : 10 mn de pause plusieurs fois par jour, dans la restauration des pauses de 4 heures dans une même journée...pour éviter les RTT.

                    Dans ce contexte de dictature sanitaire, les syndicats continuent de contrer les directions mais surtout pour renchérir. Les mesures sont gouvernementales et le seul pouvoir accordé aux syndicats est de faire pire. Tous les jours, dans les universités, nous recevons des mails de syndicats visant à renforcer les mesures sanitaires que les directions n’auraient pas mises en place assez efficacement. 

                    Du coup, le télétravail est obligatoire, sauf pour ceux dont la présence est incontournable. Pour ces derniers, plus possibles de déjeuner dans l’espace commun de restauration mais obligation de rester à son bureau pour sa pause. Des masques, des masques et des masques...partout, dedans, dehors, etc.

                    Le télétravail va détruire beaucoup d’emplois, « non essentiels à la vie économique », avec progressivement des temps partiels mis en place, puis un poste sera mutualisé pour regrouper les temps partiels.


                    • Nicolas Cavaliere Luigi Cavaliere 3 novembre 2020 21:46

                      @Adèle Coupechoux

                      Il faudrait se pencher sérieusement sur cette distinction entre « essentiel » et « non essentiel ». Comme le disait la propriétaire d’une boutique de vêtements, personne n’est nu dans la rue et on l’oblige à fermer. Et puis, il y a la question de la distinction difficile entre la personne et son activité. Dire à un photographe de mode que son activité n’est pas essentielle revient aussi à nier son talent, et c’est souvent le talent qui rend les gens utiles là où d’autres sans talent n’élèvent pas l’art à son caractère indispensable. D’autant plus, si on pense à tous ces enfants qui barbouillent des dessins primaires pour leurs parents, que souvent l’affection ne naît pas de la complexité ou de l’élaboration ou d’un autre but que de plaire. Et une chose qui n’est pas faite pour plaire est rarement essentielle... De l’autre côté, pensons à tous ces médicaments au goût désagréable qu’on avale pour notre bien. Heureusement, on peut les sucrer quelque peu pour les aider à passer (© Mary Poppins).

                      Tout, y compris le mal, reste agréable si c’est partagé. Bouffer tout seul dans son bureau, porter son masque en allant aux toilettes, etc... j’ai parfois l’impression que toutes ces préconisations sont une farce d’une poignée de copains qui se seraient installés frauduleusement au pouvoir pour se moquer de ceux qui ne les ont pas élus...


                    • Adèle Coupechoux 4 novembre 2020 07:43

                      @Luigi Cavaliere

                      Le Bauhaus proposait entre autres de réunir le beau et l’utile.
                      Un concept à adopter le plus souvent possible dans sa vie quotidienne, avec forcément sa propre vision du beau et de l’utile. 

                      Ce qui est paradoxale, c’est que dans nos sociétés prônant la « liberté d’entreprendre » coûte que coûte, il y ait désormais cette distinction entre « essentiel » et « non essentiel ».

                      S’il devait y avoir des parasites (même ces derniers sont utiles et beaux, comme parfois les virus), ce ne serait pas ceux auxquels nous pensons spontanément. 

                      Avec le désintérêt croissant de la population pour les élections, son dégoût des politiques, ne serait-ce pas les métiers des politiques qui ne seraient pas essentiels et eux les parasites ?
                      Ne serait-ce pas eux qui occupent des bullshit jobs ? Et non pas ceux qui travaillent en grande majorité dans les bureaux et qui ont été tout naturellement désignés comme inutiles ? Pourtant, ces derniers participent activement au tissu économique et social. Même s’ils n’ont pas toujours l’impression d’y contribuer pleinement.

                      Alors que nos politiques ?


                    • Nicolas Cavaliere Luigi Cavaliere 4 novembre 2020 21:34

                      @Adèle Coupechoux

                      Considérons d’abord que ce qui distingue le job à la con du job pas à la con, c’est la règle du bon médecin : « d’abord ne pas nuire ». Puis pointons que l’activité politique n’est pas un job, et que l’objectif d’un bon politique est de satisfaire ses clients. Le « ne pas nuire » dans cette optique n’existe pas. Le « ne pas se nuire » quand on se place volontairement dans le rôle du client, par contre est hautement hasardeux... c’est comme jouer à la roulette russe en plaçant son propre revolver dans la main de quelqu’un d’autre. Les politiques participent activement au tissu économique et social. Ils savent très bien de quelle étoffe il est fait, et c’est malheureusement la même que celle des rêves.


                    • Adèle Coupechoux 3 novembre 2020 09:37

                      voici un communiqué de SUD SU et qui concerne la liberté d’expression

                      Les libertés académiques : pour quoi faire ?


                      LPR, des croquettes contre une muselière

                        En septembre-octobre, le gouvernement a tenté de faire accepter par les syndicats son projet de loi LPR en proposant un « protocole d’accord » avec, à la clé, des primes pour les personnels titulaires : plusieurs syndicats, dont Sud Education, ont refusé ce protocole indécent.(*)

                        Dans la nuit de mercredi à jeudi dernier, alors que chaque foyer focalisait son attention sur ses stocks de coquillettes, de farine et de papier hygiénique, et tandis que la communauté universitaire tentait de concrétiser de manière réaliste les directives issues des élucubrations stratosphériques de politiques communicants court-termistes, le Sénat débattait du projet de loi LPR. Non seulement les mesures renforçant les financements à court terme et la précarité des personnels ont été approuvées, mais plusieurs amendements proposés s’attaquent frontalement aux libertés académiques des enseignants du supérieur, et au contrôle interne des recrutements par les élus du CNU.

                      Libres, mais pas trop

                        La loi Savary de 1984 avait institué clairement les libertés académiques en introduisant l’article L952-2 du Code de l’Education : « Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d’une pleine indépendance et d’une entière liberté d’expression dans l’exercice de leurs fonctions d’enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions du présent code, les principes de tolérance et d’objectivité. ».

                        L’amendement 234, proposé par la sénatrice LR de l’Essonne Mme Laure Darcos(**), ajoute la mention « Les libertés académiques s’exercent dans le respect des valeurs de la République »Par ces termes en apparence inoffensifs, la loi donnerait toute latitude à l’administration ou au pouvoir politique pour sanctionner un.e universitaire dont les propos leur déplairaient. En effet, l’expression « le respect des valeurs de la République » est suffisamment vague et indéfinie pour que la loi puisse inquiéter non seulement un.e universitaire tenant des propos argumentés mais peu orthodoxes sur la laïcité (ce qui est déjà inquiétant en soi), mais aussi tout.e universitaire critiquant publiquement des choix politiques « régaliens ». Ce coup de canif dans la liberté de parole des universitaires s’élargira à coup sûr pour contrôler aussi leurs prises de position sur des sujets scientifiques sensibles pour le pouvoir, comme les questions sanitaires, la gestion des risques industriels, etc. Dans le domaine des sciences politiques et économiques, un tel contrôle du pouvoir sur les travaux universitaires signifierait la disparition à moyen terme des politologues et économistes hétérodoxes, et la fin de la pluralité dans ces enseignements. A plus long terme, potentiellement, l’enjeu est donc la fin de la pluralité des expressions politiques et économiques dans le débat public, au seul profit de la pensée dominante.


                      • Adèle Coupechoux 3 novembre 2020 09:38

                        Comme il est trop long pour passer, je vous l’envoie en deux fois :

                        Jean-Michel, sors de ce corps !

                          Le rapprochement s’impose avec les atteintes sans précédent contre l’autonomie des enseignant.es, de la part du ministre de l’Éducation Nationale Jean-Michel Blanquer. En particulier, l’article 1 de la loi « pour l’école de la confiance » de 2019, a instauré un devoir d’ « exemplarité » pour les enseignant.es. La généralisation des évaluations standardisées, le contrôle des méthodes pédagogiques dans les classes de CP-CE1 « dédoublées » des dispositifs d’éducation prioritaire (REP), la répression acharnée contre les syndicalistes opposé.es à la réforme du lycée, sont également des attaques profondes.


                          C’est ce même Blanquer qui a sonné la charge contre la liberté des universitaires le mois dernier, par ses propos abjects sur les prétendus « ravages de l’islamo-gauchisme » dans les universités.(***)

                        Vous avez le droit de garder le silence… ou pas !

                          Puisque ceci est un billet syndical, profitons-en pour faire un rappel de notre droit d’expression, en tant que personnels, titulaires ou contractuels, de la Fonction Publique : BIATSS ou ITA, chercheur-es, enseignant-es ou enseignant-es-chercheur-es.

                          Le « devoir de réserve des fonctionnaires », évoqué souvent à tort, n’existe pas dans les textes de loi, mais seulement dans la jurisprudence (décisions de justice précédentes, considérées comme référence pour juger de nouveaux cas). Il ne concerne en pratique que les fonctionnaires responsables d’une administration : par exemple, les préfet.es, recteurs/rectrices d’académie, directeurs/directrices de cabinet au Ministère sont tenus au devoir de réserve. En revanche, les enseignant.es, chercheurs/chercheuses, bibliothécaires, membres du personnel administratif, etc., peuvent, comme tout citoyen, s’exprimer librement, y compris à propos de leur propre administration, par voie de presse, pétition, réunion, etc. Ces droits sont garantis par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, article 10 : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi. ».


                          Pour les personnels titulaires de la Fonction Publique, il existe des restrictions spécifiques (voir ci-dessous), mais avant tout, la liberté d’opinion des fonctionnaires est explicitement protégée par la Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires (dite loi Le Pors), article 6 : « La liberté d’opinion est garantie aux fonctionnaires. Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur origine, de leur orientation sexuelle ou identité de genre, de leur âge, de leur patronyme, de leur situation de famille ou de grossesse, de leur état de santé, de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race. [...] »

                          Il existe évidemment des obligations en matière d’expression :

                        • Pour les personnels titulaires, l’obligation de neutralité des fonctionnaires (article 25 de la loi le Pors) : « Le fonctionnaire exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité. Dans l’exercice de ses fonctions, il est tenu à l’obligation de neutralité. Le fonctionnaire exerce ses fonctions dans le respect du principe de laïcité. A ce titre, il s’abstient notamment de manifester, dans l’exercice de ses fonctions, ses opinions religieuses. Le fonctionnaire traite de façon égale toutes les personnes et respecte leur liberté de conscience et leur dignité. ».

                        • Pour tous les personnels, comme pour tout particulier, le respect de la Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et du Code pénal en matière de diffamation et d’injures publiques et non-publiques. Voir : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F32079.

                        Quelles libertés académiques, pour quelle société ?

                          Instrumentalisant l’émotion suscitée par le drame de Conflans-Saint-Honorine et agitant avec opportunisme l’épouvantail de « l’islamo-gauchisme », le gouvernement et ses soutiens parlementaires se proposent d’instaurer un contrôle des libertés académiques. Si nous l’acceptons, nous aurons bientôt à renoncer plus largement à la pluralité des expressions dans le débat public et au principe de la liberté de parole dans le débat universitaire. Celle-ci est pourtant une condition impérative pour qu’existe l’idée même d’Université, c’est-à-dire un lieu de construction et de mise en question des connaissances, appartenant à ceux qui y travaillent et qui y étudient, et obéissant uniquement aux règles du débat rationnel et argumenté.

                        Par Sud Education 75, section Sorbonne Université
                        [email protected]
                        https://sud-su.fr/

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