Mange ta soupe

Finis ta soupe sinon tu n'auras pas de dessert !
Une menace prise au sérieux, un rituel, une incitation à l'obéissance, des paroles en l'air, un chantage ; le petit vaurien, déjà, s'en fout qui ne peut se forcer à avaler ce brouet qui sent le poireau, si le dessert est un fruit, il ne perd rien ! Le petit gourmand, lui, se conforme à la loi, pour avoir du plaisir il faut se forcer, il se dépêche d'avaler cette mixture sans goût ; le petit cynique, déjà, se dit que si le dessert est à l'image de la soupe, lui non plus ne perd rien : tout le monde n'a pas une mère cordon bleu ! Et puis il y a celui qui mange sa soupe parce que c'est comme ça, et l'exception qui la mange parce qu'il aime ça.
On ne sait plus ce que souper veut dire...
Jadis et naguère, le soir on avait une soupe, du pain perdu, un flan, ou un yaourt en dessert.
Depuis que tout le monde peut s'exprimer, on voit bien qu'on réinvente l'eau tiède. D'où vient cette rupture avec le bon sens alimentaire ? Les spécialistes, les experts nous le serinent : repas léger le soir et plutôt des légumes.
Mine de rien, cette histoire de soupe tire un fil qui entraîne toute l'insanité de nos corps, tout le consommateurisme, ( j'ai une tête de lard comme disait mon père... puisque le mot français existe !!!!), l'imitation, et, surtout, l'éloignement mortifère de notre savoir ancestral et instinctif. La soupe est devenu bisque, consommé, bouillon, le brouet de farine de maïs torréfié, appelé « gaude » en Bresse ne rentrant pas en ligne de compte ni la garbure des béarnais ni tous les noms régionaux que j'ignore et oublie pour l'heure !
Je prends deux minutes pour dire que la soupe peut être le met le plus exquis qui soit, les soupes froides, de concombres, de tomates ( gaspacho), de courgettes yaourt, les soupes mijotées, les soupes inventées avec ce que l'on a ! Mixées ou non, épaisses ou liquides, épaissie de farine comme la soupe à l'oignon ou de pommes-de-terre comme les soupes de légumes, de pâtes de riz comme les soupes chinoises ; bref, on a le choix et toute liberté d'inventer ! Tant qu'on en reste à la gastronomie du quotidien, il vous est loisible d'en tirer les conclusions en ce qui concerne notre agriculture très moderne ! Mais aussi à ses lieux de production : tous les légumes sont bons s'ils sont consommés frais et pour ce faire, bien sûr, nous exigerons la production locale. Voyez, ça nous emmène loin !
Ma mère aimait beaucoup la soupe aux tomates déshydratées de Knorr ; incroyable !
Beaucoup ont un penchant pour apprécier les saloperies...
Mais faîtes fondre dans du beurre ou un peu d'huile, des poireaux d'un jardin, même si ce n'est pas le vôtre, pendant des heures au feu doux de votre cuisinière à bois, ajoutez-y plus tard des carottes, des navets, des patates, une pointe d'ail, couvrez d'eau, de la bonne eau, denrée introuvable sauf si on tolère le plastique, et laissez cuire encore longtemps : vous voyez bien, c'est impossible, le temps, c'est de l'argent et cette soupe vaut de l'or !
Mais à vue de nez, il y a eu plus d'enfants qui n'aimaient pas la soupe de leur mère, pour que ce délice soit irrémédiablement auréolé de tous les termes les plus méprisants, les plus négatifs de la terre !
Mais dans ce monde où la clarté, la clairvoyance, la transparence sont de rigueur, il n'est pire insulte que de traiter un texte, une pensée, un essai, une musique, de soupe : nous aimons l'ordre et abhorrons le goût subtile des mélanges ; pour s'y retrouver, il faut y voir clair et nous déplorons d'avoir à deviner les composants d'une réalité mélangée : quelle entourloupe, quel amalgame, quelle arnaque s'y cache ?
Les sachants nous induisent en erreur de nous prendre pour des ignorants ; nous sommes ignorants de nous-mêmes disent-ils. Il nous faut donc les écouter, trouver son mentor. Pour que ceux-ci aient un pignon sur rue rentable, il nous faut absolument déserter notre ressenti, notre intuition, la connaissance de nous-mêmes qui jamais ne nous trahit. Sauf à ce qu'elle irrigue notre mental d'eau souillée par la mode, les conseils, les régimes...
D'avoir préféré les hamburgers ou les pizzas congelées à cette soupe honnie, nous sommes arrivés sans surprise à l'obésité, au diabète, aux problèmes circulatoires, aux accidents cardiaques et vasculaires cérébraux, mais fort heureusement la science y pourvoit !
Le médiator déjà, qui faisait maigrir les addicts aux graisses insaturées et soulageait les diabétiques de tout poil. Beaucoup en sont morts mais cela n'induit pas que le chemin est vicié : les chercheurs font ce qu'ils peuvent et les labos sont bien contraints de rentabiliser leurs investissements. Cela serait tellement paradisiaque de pouvoir ingurgiter n'importe quoi et rester beau et se porter comme un charme !
De toutes façons, on ne sait plus : les cinq légumes par jour préconisés ne nous épargnent pas des pesticides et de toutes les chimies qui, chacun l'a bien compris, ne sont là que pour notre bien.
S'être laissé déposséder de soi-même au point de ne plus savoir manger, et trouver ça normal...
Un médecin auquel j'exposais mon genou blessé me demandait quel traitement j'avais ; devant mon air hébété il dit, tout aussi éberlué : vous n'avez pas de traitement ?
Voilà, c'est la norme, chacun a son traitement qui l'identifie, le personnalise et le moindre péquin connaît tous les noms des médicaments ! Le docte savoir a rompu ses digues et chacun s'en trouve fort aise.
Les vieux sont une manne, mais pas assez, il faut donc que chacun s'y mette, l'enjeu est énorme et Big Pharma n'a rien à envier à la chimie, qui le nourrit.
La crise sanitaire est la quatrième crise écologique
C'est le titre du numéro 36 de la revue Écorev', paru en mars 2011 !
On y voit ça et là des choses intéressantes ; des études, des constats mais aussi, je l'ai noté, cette déplorable habitude de dédouaner tout en chacun de ses propres responsabilités, par exemple :
« L'OMS peut continuer, comme elle le fait encore dans son plan de lutte contre les maladies non transmissibles, à limiter les cause des maladies chroniques, à quatre facteur : tabac, alcool, alimentation et sédentarité, en passant sous silence la responsabilité de la pollution physico-chimique ».
Je m'interroge ; bien sûr le problème politique ( car seule la politique peut y faire quelque chose, hormis peut-être le boycott de millions d'êtres avisés), le cas Monsanto, comme symbole illustre grâce à tous les documentaires divulgués par la télé publique, est le responsable primordial et plus qu'inquiétant ; néanmoins, la déliquescence d'une société abrutie par les modèles incessants, divulgués eux-aussi par les mêmes chaînes, propagande qui ne dit pas son nom ou qui le dit dans les pubs qui se revendiquent le dernier né et premier art lucratif, me paraît tout aussi déterminante. Quand l'obésité était une lointaine déchéance populaire en Amérique, personne ne semblait s'en émouvoir ; celle-ci nous rattrape, nous entoure, nous envahit et nous fait peine. À ce mal on oppose les régimes, draconiens si possible : la santé, la beauté des lignes d'un corps de rêve, ce n'est pas donné par la nature ; une volonté et un mental de sportif de haut niveau doivent nous être acquis pour mériter d'apparaître, paraître sous une belle image ! Quand on n'a plus la moindre considération de soi, on s'en fout !
Il y a environ 700 millions d'obèses et 2,3 milliards de personnes en surpoids ! Ceci entraînant ce que l'on appelle : l'épidémie des maladies non transmissibles.
Le corps ne serait-il plus l'hôte de notre joie de vivre, de se mouvoir, de danser de faire les fous ? Des roues sur la plage, des roulades dans l'herbe, des grimpettes dans les arbres, des courses effrénées ?
On n'a jamais vu un obèse végétarien !
Puisque je parle de soupe, je passe sous silence toutes les maladies dues aux produits qui font la fortune et le pouvoir de Monsanto-Bayer and Co ; mais j'y pense, soyez-en sûrs !
Pour en revenir aux agréments afférents aux hamburgers, pizzas et tartes congelées, , toute nourriture préparée avec amour par des petites mains fort mal récompensées, en utilisant des graisses et des farines de la pire qualité, sans parler de la charcutaille, la cochonnaille, et toutes ces victuailles hyper salées et néanmoins pleines de sucres, bref les bonbons, les sodas les cocas les sirops les glaces, le tout industriel bien sûr, je propose que le tout soit taxé à hauteur du tabac, ou de l'alcool, les deux boucs émissaires ! Il n'y pas de raison ; bien entendu, comme pour le tabac tout l'argent ainsi récolté dans le grand sac de la solidarité ira à la sécurité sociale ; car ils sont nombreux ceux qui enrichissent Big Pharma via la sécu et les mutuelles pour prendre des médocs dont on sait que pour la plupart ils ne servent à rien s'ils ne sont pas nocifs ; c'est une maladie grave de s'en remttre à la chimie et de ne rien changer de ses habitudes alimentaires, une maladie qui semble incurable ! Car comme le dit André Gorz : " la civilisation capitaliste fait consommer d'une part ce qui détruit, d'autre part ce qui répare. La croissance...y trouve son principal ressort. Mais les destructions sont de plus en plus importantes ( graves) et les réparations... de plus en plus chères et inefficaces. Cela vaut notamment en matière de santé".
À stigmatiser le drogué, le fumeur ou l'alcoolique, à dédouaner les consommateurs de saloperies en accusant exclusivement les chimistes nuisibles, on n'aide pas à l'évolution des moeurs ; et quand je dis évolution, je suis bonne, car ce but, jamais énoncé, n'est que l'état que les moins jeunes d'entre nous ont connu dans leur jeunesse comme un état normal !
Il est notable que tout un chacun a bien intégré le discours officiel qui consiste à considérer qu'une partie de la population est inapte au libre-arbitre, mais, ce n'est pas de leur faute, aussi faut-il les protéger et les secourir...
Ce discours de la gauche molle qui nous bassine depuis plusieurs décennies m'est odieux.
Certes, nous sommes tous à nos heures influençables, mais il y a des influences nobles – le bio, les voyages intelligents, les voitures basse consommation, l'absence de clinquant, le bon goût en matière de culture, ... j'arrête là puisque je m'égare-, et les influences connes – le fast food, Disney Truc, la variété- bref, le luxe de la pauvreté. Pourtant j'ai connu des bobos qui commandaient des hamburgers, comme on s'encanaille, qui visitent chaque semaine Carrouf, qui voyagent par Ryandanslesairs, mais qui ne sont pas dupes et c'est pas pareil !
Le tout c'est qu'on est dupe sans le savoir ou bien qu'on est dupe sans le savoir ! De ma chambrette, c'est pitoyable. Les uns sont sûrs d'accéder à un plus, ils se facilitent la vie et font fête de tout emballage, les autres sont sûrs d'être adaptés par en haut, parce qu'ils ont mieux à faire que s'occuper de ces trivialités .
En tous cas, les seconds mangent mieux, ils aiment les marchés paysans, les producteurs locaux et fréquentent les coops bio.
Mon petit doigt me dit que les premiers le feraient aussi avec un zéro de plus à leur paye ! Mais nous vivons un temps où le quotidien est un luxe, le savoir-vivre une rareté : un plaisir à deux euros, c'est une bouteille de coca ; pour le riche qui aussi a du coca au frigo, c'est le bas de gamme, l'évidence, l'ordinaire, une concession aux temps modernes.
L'obésité épargne les classes moyennes mais le cholestérol non, dont on dit qu'il est une foutaise, pas non plus les pontages ni les ressorts ; pas Alzheimer ni Parkinson, pas les rhumatismes ni l'arthrose, pas l'hypertension ni la déprime, pas les insomnies ni les cancers !!
Alors, comprenez-moi bien si je dis : une bonne soupe et au lit !
Mais comment le leur dire, qu'ils sont pris pour des cons, que leur petit luxe les tue, que la vie est ailleurs, sans qu'ils m'envoient péter ?
Les plus affutés me rétorqueront que les pauvres ont toujours mal mangé, qu'ils ont toujours été malades de leur travail, de leurs conditions de vie, de l'atmosphère de l'industrie ou des mines, etc. Certes.
Mais où sont donc passés le savoir-faire, l'expérience, et toute cette richesse ? Le progrès a rendu tout le monde malade : la sédentarité, l'absence totale de besoin de bouger au quotidien- même pour les agriculteurs- les addictions de tous ordres auront raison de nous ; alors, le jour où chacun prendra conscience de cette catastrophe programmée, prioritaire, peut-être aurons-nous fait un pas en direction de ce fameux changement.
Pour l'instant, au niveau politique, personne n'en parle ! Aucun projet, bien au contraire...
Lien vers cette excellente revue :
http://www.google.fr/#fp=108f6689478e2bb2&q=http:%2Fecorev.org
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