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Accueil du site > Tribune Libre > Non au vice-premier ministre chargé du développement durable

Non au vice-premier ministre chargé du développement durable

Nicolas Hulot vient de se prononcer pour la création d’un poste de vice-premier ministre chargé du développement durable. Malgré tout le respect que je lui dois, pour son action et ses compétences en matière d’environnemment, je crains qu’il ne confonde développement durable et écologie. C’est plus grave qu’on pourrait le penser.

Autant je salue avec un profond respect les compétences et les actions de Nicolas Hulot en faveur de l’environnement et de l’écologie, autant j’ai apprécié pendant des années ses émissions de télévision, autant je me permets de critiquer sa proposition, qui, à mon sens, entretient la confusion sur ce qu’est véritablement le développement durable. Voici pourquoi.

Le développement durable a été défini en 1987 par la Commission mondiale pour l’environnement de la façon suivante : « C’est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. »

Cette définition exprime le fait que le développement durable consiste à faire progresser ensemble l’économie, le progrès social, et l’amélioration de l’environnement.

Les engagements pris par les chefs d’Etat, lors du Sommet de la terre, à Johannesburg, en septembre 2002, sont extrêmement clairs sur cette question du développement durable. Le point 5 de la déclaration de Johannesburg stipule : "A ce titre, nous assumons notre responsabilité collective, qui est de faire progresser, aux niveaux local, national, régional et mondial, le développement économique, le développement social et la protection de l’environnement, piliers interdépendants et complémentaires du développement durable."

La charte de l’environnement, incluse en 2005 dans la Constitution française, précise dans son article 6  : " Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social. »

C’est un énorme progrès. Rappelons que pendant les Trente Glorieuses, on considérait que lorsque l’économie se portait bien, le social suivait. Quant à l’environnement, ce n’était pas un sujet. La seule question vraiment importante était le taux de croissance.

Le développement durable ouvre la voie à un monde meilleur, car il pour objet de faire progresser simultanément l’économie, le social et l’environnement. Encore faut-il en tirer toutes les conséquences. Le ministre du développement durable doit avoir autorité sur les ministres de l’Economie, de l’Ecologie et des Affaires sociales. Il doit en fait avoir autorité sur tous les autres ministres, qui concourent, chacun dans son domaine, à la réalisation d’une politique de développement durable. Conclusion : il n’y a qu’un seul ministre possible pour le développement durable : c’est le Premier ministre.

Nous ferions donc un grand pas en avant si le prochain Premier Ministre était nommé : « Premier ministre, ministre du Développement durable ». Ce ne serait pas purement symbolique.

A l’inverse, créer un poste de vice-Premier ministre chargé du développement durable est profondément réducteur. Cela sous-entendrait qu’il y ait un Premier ministre, chargé de la politique au sens large, et un autre ministre, chargé du développement durable ; or, c’est l’ensemble de la politique, au sens le plus large, qui est le développement durable, aux termes mêmes de la constitution française.

C’est d’ailleurs pourquoi la manière dont la France traduit aujourd’hui le développement durable dans la composition de son gouvernement est très critiquable. Elle montre que le message n’est pas vraiment passé, et que l’on confond encore développement durable et écologie.

Depuis plusieurs années, il existe un ministre (ou secrétaire d’Etat selon les cas) du développement durable, dépendant du ministre de l’Ecologie. Quel est son budget ? Quels sont ses pouvoirs ? Quelle action a-t-il sur l’économie et sur le domaine social, les deux faisant partie intégrante du développement durable ?

Répétons-le, il n’y a qu’un seul ministre possible pour le développement durable : le Premier ministre. C’est la seule façon d’afficher la volonté de renoncer à l’ultra libéralisme, pour adopter une politique où l’économie est remise à sa juste place, c’est-à-dire au service de l’homme.

Bertrand de Kermel

Président du Comité pauvreté et politique.

www.pauvrete-politique.com


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14 réactions à cet article    


  • nathapa (---.---.26.106) 13 décembre 2006 12:48

    nicolas hulot confond peut etre rechauffement de la planete et pollution peut etre


    • Romain Baudry 13 décembre 2006 13:25

      Votre point de vue est intéressant. Cependant, la proposition de Hulot aurait le mérite de créer un ministère doté de moyens importants et dédié exclusivement au fait d’assurer un développement durable. Dire que le premier ministre est « chargé du développement durable » serait logique mais risquerait fort de n’être qu’un ajout purement cosmétique, dénué de conséquences réelles (autres que médiatiques).

      Un peu comme la Charte de l’Environnement, en fait.


      • Fred (---.---.64.1) 13 décembre 2006 13:49

        Une politique de devellopement durable se doit d’être global. Un ministre spécialisé permettrait peut être d’alerter sure certains sujets, mais il est évident qui’il n’y a pas d’un coté des politiques économiques, d’agricultures ou étrangère et d’un autre cóté des politiques de devellopement durable. Cette politique doit guider les autres et donc le garant de son application se doit d’être au dessus des autres ministres. Au dessus des ministres, c’est le premier ministre.


        • florette des bois (---.---.177.189) 13 décembre 2006 14:47

          En fait c’est plus simple que ça : Soit le gouvernement est traditionnel, c’est-à-dire traditionnellement inefficient en terme de développement durable et alors il est utopique d’envisager que le premier ministre soit chargé du développement durable, auquel cas il est juste, d’exiger en force comme tente de le faire Hulot, un tout spécial vice-premier ministre chargé du développement durable... Soit le gouvernement est neuf, voire appartenant au futur, c’est-à-dire éthique, comme celui que pourrait proposer Governatori par exemple (auquel vous piquez l’idée sans le citer cher écriteur de cet article là-haut...) et alors oui il est plus que logique que dans un tel cadre ce soit le premier ministre qui ait la charge de la politique durable...

          Bien à vous,

          fLORETTE ;


          • le sudiste (---.---.58.219) 13 décembre 2006 15:38

            Il me semble plus juste de voir dans les propositions de Nicolas Hulot le simple fait d’amener sur la table des sujets incontournables pour notre avenir à tous. Sujets peu plaisants pour un candidat qui va devoir du coup aborder cette nécessité de faire des « sacrifices ». Vice premier ministre, super ministre ou je ne sais quoi, c’est un détail. C’est une façon de choisir des termes pour faire passer une idée et l’importance de l’enjeu. Il a raison. On peut lui reprocher plein de chose à Nicolas Hulot mais une chose est claire : sa notoriété, son côté sympathique font qu’il a été entendu. La forme importe peu. Sans lui, on ne parlerait pas autant de ces problèmes.

            Pour ceux qui ont un peu de mémoire, souvenez-vous aussi de la présence dans les médias en 2002 du combat des alter mondialistes. Aujourd’hui, ce n’est plus un sujet. Pourquoi ? ATTAC n’existe plus ? Ils étaient fous ?

            Nicolas Hulot se bat et amène la réflexion, explique, parle de choses peu reluisantes. Je ne peux avoir que du respect pour cet homme qui pourrait, avec le pognon qu’il a, vivre peinard dans son coin. On ne peut souhaiter que le développement durable reste aussi une préoccupation durable.


            • rjolly (---.---.227.38) 13 décembre 2006 16:31

              Il faut noter que le concept de développement durable lui-même est sujet à caution, voir son historique fait par Claude Guillon : Insoutenable capitalisme - Sur le « développement durable ».


              • erickk (---.---.3.71) 13 décembre 2006 18:27

                Pour ma part je pense qu un geste meme leger est louable. Ceci dit, je rejoins cet analyse en allant plus loin. Le Commandant Cousteau lui même dans une émission télévisée des années 80 avait déclaré (cela m’avait marqué durablement) que l’écologie était trop important pour qu’elle soit confinée à un parti politique, que c’est quelque chose qui doit commander toutes les actions politiques.

                Avec le recul du temps qui s’est écoulé, je pense que c’est de plus en plus vrai. Les décisions qu’elles soient géopolitiques, économiques, sociales, politiques devrait toujours obéir ou du moins s’interroger sur l’avancement sur le plan du « développement durable ».

                En ce sens, c est pas un Hulot vicepremier ministre, mais un Hulot derrière chaque ministre. Ambitieux, progressiste, coûteux, peu populaire je le conçois mais je crois fondamentalement qu’il est temps que ca bouge. Enfin, ca, ca avait été dit aussi dans la même émission et rien n’a bougé à part peut-être Cousteau qui nous a quitté et Peter Blake qui avait tenté de reprendre son oeuvre abattu en Amazonie.

                E.A.


                • Cmoi (---.---.137.51) 13 décembre 2006 21:06

                  Vous vous trompez en avançant que Nicolas Hulot confond écologie et développement durable, il fait très bien la part de choses.

                  En revanche votre analyse est pertinente car elle pose la question de la différenciation des rôles entre le Premier Ministre et le Ministre du développement durable.


                  • Bertrand de Kermel (---.---.51.17) 13 décembre 2006 22:06

                    Bonjour à tous.

                    Tout d’abord, merci d’avoir lu mon article, et d’avoir pris la peine de réagir. Si vous me le permettez, je vais faire une réponse globale.

                    1 - il est clair que Nicolas Hulot est un homme de conviction. Il est compétent, convaincant, sympathique, et médiatique. J’ai d’ailleurs pris soin de souligner le respect que j’ai pour lui au début de mon article. Avec son pacte, il vient de rendre l’écologie incontournable dans la campagne électorale, et c’est très bien. Cela n’empêche nullement d’émettre une réserve sur un point (et un seul) de son pacte ! Et je persiste ! C’est tout l’intérêt d’un débat d’idée.

                    2 - En effet, ma crainte est que sa proposition de Vice-Premier Ministre chargé du développement durable aboutisse en pratique à réduire le développement à son seul volet « environnement ». Et là, il y a contresens. Le développement durable est la conjugaison de trois piliers interdépendants : l’économie, le social, et l’environnement.

                    Contrairement à ce que certains pourraient penser, ma critique n’est pas un enfilage de perles. Si l’on veut replacer l’économie au service de l’homme, il faut cesser de traiter séparément l’économie, le social, et l’environnement, comme c’est aujourd’hui le cas dans tous les médias, et dans tous les discours. La conséquence est que l’économie prend toujours le dessus, parce que les réussites boursières intéressent plus les gens que la pauvreté. Au final, l’économie et la finance occupent une place considérable dans les médias, l’environnement et le social étant réduits à la portion congrue.

                    3 - Pour prendre un exemple, la financiarisation de l’économie, largement développée aujourd’hui, tourne résolument le dos au développement durable. Lorsqu’un fonds de pension lance une OPA hostile sur une entreprise saine, et s’empresse de la dépecer, pour se rembourser de l’achat, et conserver les seuls partis les plus rentables de cette entreprise, il se conduit comme un prédateur. Et la « casse sociale » qui en découle est payée par la collectivité des citoyens.

                    4 - Pour aller jusqu’au bout du raisonnement, il faudrait mettre en place, dans les comptabilité publiques et privées, des indicateurs de performance globaux, c’est à dire imposer une comptabilité humaine et environnementale. Cette idée est connue, elle a été soutenue notamment par le Centre des Jeunes Dirigeants d’Entreprises, et par le groupe prospective de la Commission Européenne. mais nul ne s’y intéresse vraiment. Pourtant, c’est la clé du développement durable.

                    5 - Enfin, je suis honoré d’apprendre que mon idée est partagée par d’autres. Néanmoins, je vous promets que je l’ai trouvée tout seul. Dès l’année 2002, sur le site Internet du comité Pauvreté et Politique, on trouvait la définition du développement durable, telle qu’elle résulte notamment de la norme AFNOR, et des sommets de Rio et de Johannesburg.

                    Bien cordialement

                    Bertrand de Kermel Président du Comité Pauvreté et Politique www.pauvrete-politique.com


                    • Aldoo (---.---.118.122) 13 décembre 2006 23:48

                      Moi je vous crois, pour la paternité de l’idée : en effet, je m’étais fait la même réflexion ou presque : sachant que le développement durable doit tout piloter, le vice-premier ministre empiéterait forcément sur le rôle du premier ministre.

                      Maintenant,la réflexion de Romain Baudry (2e commentaire de l’article) me semble aussi pertinente. Peut-être est-il nécessaire que ce poste existe en attendant que le développement durable entre dans le mode opératoire naturel du premier ministre.


                    • florette des bois (---.---.177.189) 14 décembre 2006 09:57

                      d’accord aors je reformule :

                      Le seul parti à ma connaissance capable de faire de son premier ministre le garant d’une politique de « développement durable » est un parti dont personne n’a encore médiatiquement entendu parler, c’est « La France en action » de Governatori. Lire à ce sujet l’expression de ses idées quant au pacte de Nicolas Hulot.

                      http://www.pacte-ecologique-2007.org/nicolas-hulot/pages/02_candidats/details/details_governatori.php

                      Je pense que tous les autres partis quels qu’ils soient récupéreront le marketing « durable » sans changer un iota de leur politique et c’est dans la gueule de ce loup là qu’est en train de jouer Hulot.

                      Alors grand respect pour Hulot, grand respect pour ceux qui se lèvent pour faire.

                      Respect et soutien.


                      • moos (---.---.37.225) 14 décembre 2006 16:31

                        Votre article est interressant, vous reprenez, en faits, les idées dévelloppées dans le pacte écologique... Peut être aurait-il fallut le lire avant de pouvoir le commenter ! La définition du developpement durable y est répétée et expliquée à maintes reprises dans sa globalité.


                        • Bertrand de Kermel (---.---.240.4) 14 décembre 2006 21:31

                          Réponse à Moos.

                          Décidément, je m’exprime bien mal !

                          Le développement durable est un concept qui repose sur trois piliers indissolublement liés. A Johannesburg en 2002, 160 chefs d’Etat se sont engagés à le promouvoir dans ses trois dimensions. Grâce à cela, on peut affirmer que le développement durable transcende nos clivages droite/gauche. Le DD est la SEULE façon d’humaniser la mondialisation, en replaçant l’économie au service de l’Homme.

                          Conséquence le DD est un problème de chef et pas d’adjoint. Ce que j’ai voulu dire, c’est que l’idée de créer un poste de Vice Premier Ministre chargé du développement durable laissait sous-entendre qu’il y avait d’une part LA politique, arbitrée par le Premier Ministre, et, à côté, la politique de développement durable, confiée à un adjoint.

                          Pour moi, c’est la meilleure solution pour que le développement durable soit cantonné à un rôle de faire valoir au profit de l’ultralibéralisme.

                          Bien sur, je ne prétends pas détenir la vérité absolue. Mais au cas particulier, j’ai franchement l’intuition de ne pas commettre d’erreur de raisonnement.

                          Bien cordialement à vous, et bonne soirée

                          Bertrand de Kermel


                          • math (---.---.130.65) 5 avril 2007 17:01

                            Bonjour,

                            Je partage totalement votre point de vue. Le DD continue d’être cantonné au seul pilier environnemental et c’est bien dommage car ce qui fait la force du concept c’est justement le fait d’être parvenu à réunir des préoccupations qui jusqu’alors n’étaient défendues que par des minorités caricaturales et indépendantes les unes des autres. Chacun faisait sa manif dans son coin en brandissant sa propre banderolle. Or, le Développement Durable réussit à fédérer (et du même coup, à nuancer car quand on est plusieurs, les compromis deviennent une nécessité) autour d’un même constat : il faut replacer l’homme au coeur du système et défendre l’intérêt d’un plus grand nombre d’individus. Et l’intérêt du plus grand nombre, c’est la performance environnementale, sociale et économique de la société dans laquelle on évolue. Nommer un Vice-Premier Ministre du Développement Durable risque effectivement de brouiller les pistes car même si, comme le disaient certains, c’est mieux que rien, quand on est que numéro 2, on subit les choix du numéro 1. En même temps, est ce que l’appellation « Ministère de l’écologie et du Développement durable » n’est pas déjà un problème en soi ? Pourquoi pas Ministère du Développement Durable puisque le concept inclut déjà le pilier environnemental sans chercher à mettre l’écologie au dessus des deux autres volets......

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