On l’appelle le rêve américain car il faut être endormi pour y croire
La crise des subprimes, que certains avaient vu venir, a déclenché la crise financière la plus grave que le monde ait connu depuis 1929. Cette crise, qui avait pour base rappelons-le, des défauts de paiement en série sur des crédits immobiliers (2006) ayant entrainé par une suite d’événements et une crise de confiance dans le système bancaire, la chute de la banque Lehman Brothers (2008). Ce point de départ a été le premier domino d’une formidable et destructrice réaction en chaîne qui allait bientôt faire apparaître la fragilité extrême du système financier. Les banques occidentales cherchent désespérément à se débarrasser de leurs créances douteuses, la défiance des clients se sentant floués (certains titres dangereux avaient été introduits au sein de portefeuilles de titre à court-terme sans la moindre information au client) est un multiplicateur à la crise de liquidité du système bancaire et la panique gagne toute la sphère. Certains fonds souverains (venant particulièrement du Moyen-Orient et d’Asie) prennent d’importantes parts au capital de grandes banques occidentales et bientôt les plans de sauvetages et de renflouement des états viendront éteindre l’incendie. Par le désendettement du secteur privé, le ralentissement de l’activité, la montée du chômage, la baisse de la consommation, les plans de relances et d’autres facteurs, on voit maintenant une crise de l’endettement publique faire son apparition. Le pays qui a vu s’allumer la première étincelle est celui de l’Oncle Sam et 4 ans après la chute de Lehman Brothers, la situation économique américaine a tout pour inquiéter.
Avec une dette avoisinant les 16 000 milliards de dollars à l’heure actuelle (si l’on tient compte de la dette totale, cela représente environ 300% du PIB !) , la situation des Etats-Unis est plus que périlleuse. Entre 2007 et 2010, la richesse moyenne des ménages américains a chuté de 40% et le phénomène est exponentiel. Le chômage, à l’instar des pays européens augmente sans cesse mais moins que celui des travailleurs précaires, un enfant sur quatre a connu ou connaitra un épisode de vie dans la rue, 23.1 % des enfants américains vivent sous le seuil de pauvreté (classé entre la Lettonie et la Roumanie) et 46 000 000 d’américains dépendent de la distribution de bons alimentaires par l’état afin de se nourrir (+74% depuis 2007). Un constat de misère social assez terrifiant au sein de la plus grande puissance financière mondiale.
Peut-être preuve que si le système ultra-libéral américain permet des réussites fulgurantes qui ne sont possibles qu’au pays de l’oncle Sam, ce dernier laisse également énormément de gens sur le carreau. Le mythe de la reprise US de l’année 2012 va être balayé lorsque la question de la dette abyssale du pays sera contrainte de revenir sur la table. Il est nécessaire de rappeler, qu’au jour d’aujourd’hui, pour générer 1 dollar de croissance, l’état américain et la banque centrale américaine (FED) doivent s’endetter de 2.5 dollars. Une situation totalement intenable, qui a fait illusion le temps d’un mirage de reprise économique mais que la réalité va irrémédiablement rattraper.
Afin d’illustrer l’illusionnisme dont font preuve les USA concernant leur reprise économique, les prêts aux étudiants sont un parfait exemples. Il s’avère que cette affaire revêt des aspects assez similaires à la crise des subprimes. Des prêts garantis par l’état américain ont été accordé par les banques dans le but d’aider les jeunes américains à assumer des frais de scolarité exorbitants si bien qu’une bulle s’est formé et qu’elle atteindrait aujourd’hui plus de 1000 milliards de dollars ! Le taux de défaut de paiement sur ces prêts avoisinent aujourd’hui les 20% et l’état va bien devoir assumer ces derniers en tant que garant (à titre de comparaison la crise des subprimes a éclaté lorsque le taux de défaut à dépasser les 10% !). De plus les 15 000 milliards d’actifs fantômes restant au sein du système financier mondial et résultant de la crise financière de 2008 vont s’envoler avant le début de l’année 2013 et ceci va avoir pour effet de nouvelles faillites d’établissements bancaires occidentaux et notamment américains. Seulement, cette fois, les états n’auront plus les moyens de leur porter secours par des plans de renflouement abyssaux. Les actionnaires seront les plus touchés, aux USA également.
Un point intéressant est le mode de financement actuel de la dette américaine. Afin de subventionner l’abysse, les Etats-Unis font, là encore, preuve d’un mécanisme assez particulier qui vise à repousser l’échéance vers l’inévitable. Les USA sont insolvables. La dette du pays qui se creuse à la vitesse de l’éclair (voir le compteur en temps réel de la dette américaine pour se faire une idée) a poussé, ces dernières années, de plus en plus de pays à se désolidariser du financement de celle-ci par l’achat de bons du trésor US (chinois en tête). Afin de palier à cette perte de confiance, Ben Bernanke, le patron de la FED (banque fédérale américaine) a décidé de faire marcher à plein régime la planche à billet par le biais de ses deux QE (quantitative easing) dans le but, parmi d’autres, d’acheter les bons au trésor US émis par l’état. En gros, la banque centrale américaine imprime des billets afin d’acheter les bons au trésor de son propre état ce qui sert à financer la dette ! Prenez le billet de 20 dollars qui se trouve dans la poche droite de votre jean et transférez la dans poche gauche ; êtes-vous plus riche ? Cet exemple est assez symptomatique de l’hallucinant système financier dans lequel nous vivons. Les USA gagnent donc du temps mais la fuite en avant ne va pas durer infiniment et un beau jour, qui pourrait être plus proche que ce que l’on croit, il va falloir payer l’addition ou déposer le bilan.
Un autre motif d’inquiétude pour le pays à la bannière étoilée et pas des moindres se situe dans la guerre au terrorisme qu’a lancé G.W Bush à la suite des attentats du 11 septembre. En plus des deux guerres déclenchées en Afghanistan (2001) et en Irak (2003) et tous les coûts qu’elles impliquent (munitions, carburant, salaires des troupes, soins aux blessés, pensions d’invalidité etc…), il faut compter l’aide aux pays étrangers et les coûts des programmes de luttes anti-terroristes etc... Sans compter que tout ceci a été financé par l’emprunt ce qui oblige les USA a remboursé des intérêts astronomiques.
Une étude publiée en 2011 par l’université Brown (Rhode Island) et réalisé par un consortium d’économistes, anthropologues, politologues, humanitaires, juristes et experts militaires a chiffré le coût de cette guerre contre le terrorisme entre septembre 2001 et juin 2011 à 4 000 milliards de dollars dont 1 185 milliards pour les seuls intérêts (l’étude ne prend pas en compte les 1 000 milliards de dollars d’intérêts dont les USA devront s’acquitter d’ici 2020). Cette somme astronomique aurait coûté 1 point de déficit annuel aux Etats-Unis durant les conflits. Afin d’illustrer l’importance fondamentale de la lutte contre le terrorisme (que GW Bush présentait comme la lutte entre le Bien et le Mal dans des proportions quasi-bibliques) il est nécessaire d’en rapporter le coût par rapport à la dette publique, on s’aperçoit alors que ce dernier représente environ 49% de l’augmentation de la dette publique entre septembre 2001 et septembre 2011 !
En voyant l’effet dévastateur des bourbiers afghan et irakien sur l’économie américaine on comprend pourquoi Barack Obama tente désespérément de freiner les ardeurs du premier ministre israélien Benyamin Netanyahou et de son compère à la défense, Ehud Barak sur l’Iran. L’ayatollah Ali Khamenei et Mahmoud Ahmadinejad ont beau clamé haut et fort que le programme nucléaire iranien n’a que de vertueuses visées civiles, personne ne les croit. L’agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) commence à s’agacer sérieusement des entraves de la République Islamique à la visite de certains sites qu’elle considère comme suspect et les canaux diplomatiques montrent depuis un certain temps leurs limites. Les informations qu’auraient fournies les services secrets israéliens (MOSSAD) faisant état d’une possible capacité de fabrication d’une arme atomique par l’Iran à octobre 2012 n’ont en rien arrangé la situation et l’état hébreu se fait de plus en plus menaçant. Israël, seule puissance nucléaire de la région, craint pour sa survie si sa force de dissuasion devait être en partie annihilée par un Iran possédant l’arme nucléaire. En effet, les cartes seraient totalement redistribuées dans le rapport de force que se livre les deux ennemis au proche orient. Dans ce contexte, Netanyahou et Barak exercent une pression de plus en plus importante sur les Etats-Unis concernant le problème Iranien et agitent le spectre d’une attaque aérienne par les chasseurs à l’étoile de David des installations nucléaires iraniennes et ce, avant les élections américaines de Novembre. Obama, qui entretient des relations exécrables avec son homologue israéliens, compte surtout sur les voix qui s’élèvent au sein même de l’état hébreu contre une attaque de l’Iran, notamment à l’intérieur même de l’état major de Tsahal. La situation est néanmoins plus qu’explosive et un conflit semble inévitable à terme. Et si d’aventure, Netanyahou parvenait, envers et contre tous, à se lancer dans une offensive, on voit mal comment Obama (ou Romney) pourrait éviter de se joindre à son allié et de rentrer de fait dans le conflit.
Quand on sait que depuis plusieurs semaines, l’armée israélienne teste une toute nouvelle application d’envoi massif de SMS à la population en cas de bombardement, que des hangars entiers sont remplis de stocks de munitions, de vivres et d’eau par Tsahal, on peut légitimement penser que l’état major américain tremble. Le conflit israélo-américano-iranien pourrait être un véritable coup de grâce à une économie américaine déjà très fragile.
Le dernier point majeur d’inquiétude pour l’économie US prend sa forme dans un néologisme que l’on entend de plus en plus ces derniers temps ; le Taxmaggedon. Formé à partir des mots « taxe » et « Armageddon », ce mot est utilisé pour décrire la situation extrêmement difficile à laquelle vont devoir faire face les ménages américains à partir du 1er janvier 2013.
En effet la fin des allégements fiscaux décidés en 2001, 2003 et 2010 ainsi que la mise en place des réductions de dépenses et coupes budgétaires automatiques décidées en 2010 et pour finir les difficultés qu’éprouvent le trésor américain à emprunter de l’argent (évoquées auparavant) forment un cocktail explosif. Concrètement, le Taxmaggedon, c’est 1 750 dollars d’alourdissement de la facture fiscale pour un foyer américain de la middleclass dont un grand nombre sont déjà étranglés par le surendettement. Sans compter que tout ceci n’est que le départ d’une politique de rigueur budgétaire drastique visant à résorber le déficit américain par la réduction des dépenses publics (école, police, fonctionnaire, administration, transports, recherche scientifique, NASA etc…). Les familles les plus pauvres, déjà victimes de conditions de vies dignes des pays du tiers-monde, vont, elles aussi, devoir faire face à des hausses d’impôts ce qui aura pour effet de les précipiter un peu plus vers l’abime et parfois la rue. Il est néanmoins nécessaire de mettre un bémol à ce qui a été dit précédemment dans le sens où l’élection présidentielle de novembre va jouer un rôle crucial dans la manière de gérer le problème. En effet, Barack Obama en tant que démocrate et Mitt Romney en tant que républicain ont des conceptions radicalement différentes. Il faut ajouter à cela qu’à l’instar de ce qui s’est passé en France, Barack Obama subit les pressions sur sa gauche du mouvement des Occupy Wall Street de la même manière que Mitt Romney subit sur sa droite les pressions du Tea Party (de la même manière que Nicolas Sarkozy a subit les pressions du Front National pour se droitiser à l’instar de François Hollande qui est la cible des invectives de Jean-Luc Mélanchon qui l’incite à mettre la barre à gauche toute) . Il en résulte que si Barack Obama revenait à être réélu à la tête des USA en novembre, ce dernier pourrait tout à fait prolonger les réductions d’impôts et inciter le congrès à retarder un peu plus les coupes budgétaires à la hache dans les dépenses en faisant miroiter une réforme fiscale courant 2013. Cependant, la condition sinequanone de tout ceci est le relèvement du plafond légal d’endettement des Etats-Unis qu’Obama doit obtenir du congrès. Mais les experts estiment que même si le président actuel parvenait à faire accepter ses conditions, l’échéance serait retardée au plus tard au mois de mars 2013. En d’autres termes, 3 petits mois ! Dans le cas où Mitt Romney serait élu, la situation est très différente. Cet ultra-libéral prône une réduction drastique des dépenses, notamment des allocations versées au plus démunis, des allégements d’impôts pour les plus riches et une dérégulation financière. Ceci revient à faire porter le coût des réductions de dépenses sur la classe moyenne. De plus, il est impensable qu’un candidat élu pour ses positions fermes sur la réduction du déficit puisse demander, quelques temps après son élection, un relèvement du plafond de la dette légale. On peut donc penser qu’il emploiera tous les moyens dont il dispose pour l’éviter et commencera donc bel et bien à tailler à la hache de guerre dans les dépenses. Les classes moyennes et les plus démunis sont prévenus, le réveil du rêve américain pourrait s’avérer cauchemardesque.
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