Rigueur : cachez, UMP, ce mot que je ne saurais voir...
On se souvient d’une campagne électorale qui ajoutait les dépenses aux dépenses. Parti de 45 milliards à financer selon un magnifique plan libéralo-actif, les promesses se sont accumulées pour « plusser » (mot agoravoxien) une petite quinzaine de milliards. Heureusement - et c’est la seule fois où nous pouvons être contents que le président Sarkozy n’ait pas tenu les promesses, toutes les promesses du candidat Sarkozy - les paroles attrape-voix se sont envolées. Le Monde dévoile que des coupes budgétaires seront prévues à hauteur de 6 à 7 milliards. Mais le gouvernement et l’UMP ne veulent pas entendre parler du mot rigueur. Cachez, UMP, ce mot que je ne saurais voir...
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L’année 2007 a été fertile en navigations économico-fiscales. D’abord, la simple victoire du dynamique et efficace patron de l’UMP allait apporter une telle confiance que la France allait battre la Chine sur le terrain de la croissance et, si l’étranger mondialisé se mêlait de briser notre élan, Super Souris allait la chercher avec les dents s’il le fallait. Je propose Correga taps super glue pour le dentier présidentiel, car, s’il a mordu, il n’a rien ramené avec lui, en fait si, il a arraché un bout de notre croissance qui l’a fait tomber à moins de 2 % pour 2008 contre une prévision budgétaire de 2,7 % Aïe Aïe Aïe ! Carramba ! Ca va saigner.
Euphorique et débordant d’énergie, notre Massimo fier-à-bras fait un cadeau en année pleine de 14 milliards d’euros aux plus aisés. En juillet dernier, il s’engage comme un matamore maté par les ministres des Finances de l’Eurogroupe, à ramener l’équilibre en 2010. Il faut se souvenir aussi qu’il a pour l’occasion ridiculisé Christine Lagarde car c’était la première fois qu’un chef d’Etat ou de gouvernement assistait à une réunion des ministres de l’Eurogroupe. Il est vrai qu’il veut tout faire notre four multifonctions, repassage en plus. Une de ses devises, en fana déconfit de Jeanne Mas, c’est d’être partout le premier à faire quelque chose. La toute première fois, c’est moi dit-il fier comme un bar-tabac, lui qui aime le cigare.
La politique économique nous a donné le tournis car après la réduction des heures supplémentaires qui devaient relancer la machine, une loi qui suit contredit complètement ce trampoline à l’emploi : c’est le rachat des RTT. Et les heures sup alors ? De toutes façons, cette loi sur les heures supplémentaires, comme les études l’ont prouvé, n’a servi à rien. Zéro pointé. Du reste lors de sa fameuse conférence pour les vœux à la presse, il annonce un peu véhément que ce n’est pas lui qui allait imposer aux entreprises d’embaucher. Tiens donc. Pourtant, lorsqu’on lui disait lors de la campagne que c’était l’activité économique qui créerait des emplois et non des effets d’aubaines, il traitait ses contradicteurs avec un petit dédain teinté d’orgueil ajoutant que les autres étaient des pantins immobiles et que lui allait impulser ce qu’il fallait d’énergie pour que tout roule. En fait de rouler, ce sont les électeurs qui l’ont été et dans la farine.
Maintenant, le gouvernement Fillon nous parle d’économie. On peut se poser une simple question : et pourquoi donc cela n’a-t-il pas été mis en route tout de suite, dès le 16 mai ? L’Etat devait être modeste et il y avait déjà une réforme structurelle de l’Etat. Il est vrai aussi qu’en juillet le gouvernement a contredit les affirmations fermes et définitives de Zébulon qui annonçait que, dès 2008, il n’y aurait pas de remplacement pour un départ sur deux des fonctionnaires. Fin juillet, on en était loin. Voilà que maintenant on nous l’affirme pour 2009.
Ce n’est donc pas une rigueur que l’on nous propose, mais des économies. Il est vrai que dans le même temps Christine Albanel annonce une nouvelle niche pour les œuvres d’art et que Rachida Dati a eu une rallonge de 100 000 euros de frais de représentation avec en 2008 plus de la moitié du budget de l’année déjà dépensé mi-mars. Il est vrai aussi que notre leader économe qui pourtant dispose à l’Elysée d’une équipe culinaire performante et payée au mois s’en va déjeuner en bonne compagnie de deux à cinq fois par semaine au Bristol (prix d’un menu à midi seulement 92 €). L’Etat doit être modeste, mais pas les goûts de son premier-en-tout. Du reste, notre parvenu ne parvient pas à grand-chose en matière économique. A ceux qui vont nous dire que la crise est mondiale, je leur dirais que nous sommes la lanterne rouge - oui France is not back - de toute l’Europe. La lanterne rouge, ni la magique ni celle où l’on loge et fait le repas de noces. Alors cette crise économique est l’inverse du nuage de Tchernobyl, elle ne s’arrête que sur la France. En plus, d’autres candidats (Bayrou pour le citer) avaient indiqué un budget avec des prévisions de croissance entre 2 et 2,5. Donc très prudent. Mais rien n’était trop beau pour le cavalier de l’Apocalypse.
Nous allons donc nous serrer la ceinture partout et notamment pour le seul de l’ouverture qui avait un rôle à jouer, le pauvre Martin Hirsch. Il avait besoin de 3 à 4 milliards pour 2 millions de pauvres et on se rend compte que le RSA va passer à la trappe : trop cher. Devedjian avait déjà tiré le premier coup, Woerth le second et Fillon en bon fils de tabellion finit le travail : le goupillon et le signe de croix. Refermons la tombe et jetons une poignée de terre bien chrétienne.
Il faut également noter, ce qui semble être passé à l’as de la sagacité journalistique, c’est que ce gouvernement annonce l’équilibre maintenant pour 2012. Oubliée la promesse 2010. Soulignons quand même que les spécialistes indiquent que ce n’est pas 6 ou 7 milliards qu’il faut mais 10 pour arriver à l’équilibre. Mais Accoyer répond que ce n’est pas 6 ou 7, mais 5 et que 5 finalement ce n’est qu’à peine 1 % du budget. Alors pourquoi donc le faire ? pourrait-on lui répondre.
Si nous doutions que Fillon n’est que le fantôme du gouvernement, Sarkozy serait bien là pour nous le rappeler. En effet, ce n’est ni le ministre du Budget le premier concerné ni le ministre de l’Economie (ah économie quand tu nous tiens) la seconde concernée ni le Premier ministre le troisième concerné, mais bien le grand chef en tout qui du haut de sa science infuse et diffuse va donner le montant, non de la rigueur - pas de gros mot s’il vous plaît -, mais des économies et là où ça va faire mal.
Dernier étonnement (qui n’en est pas un) : pourquoi cette annonce après les municipales ? Un bon médecin légiste nous aurait donné la réponse, car ce mot est un poison dans l’opinion, les sondages et les votes, à effet immédiat surtout si on a été le grand maître du pouvoir d’achat. Cet effet a pour nom sur les tables de dissection : Rigor Mortem.
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