Sarko vs SuperDupont - Le combat continue
Il y a quelque chose de pathétique, si ce n’est de pathologique, dans la belle constance avec laquelle notre petit président s’ingénie (s’ingénue diraient les Farc) à remettre systématiquement en cause tout ce qui peut être associé de près ou de loin à l’héritage collectif français. Cet acharnement unique dans notre histoire politique risque d’offrir bien plus de place à Nicolas Sarkozy dans les traités de psychanalyse que dans les manuels d’histoire à destination de nos petites têtes « black-blanc-beur » - la blondeur généralement associée à cette expression n’ayant jamais été au nombre de nos caractéristiques nationales et relevant également d’un beau complexe d’infériorité.
![](http://www.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L300xH328/USSARKO-de00c.jpg)
Hormis le Tour de France, par ailleurs depuis longtemps livré en pâture à des robots testostéronés made in USA, notre président ne déteste rien autant que les références à tout ce qui a fait la particularité, la force et la richesse de l’Hexagone. Et il est d’autant plus amusant de voir celui qui a récupéré à son seul avantage le parti initié par la pensée du général de Gaulle détruire l’un après l’autre les piliers de la doctrine de l’homme du 18 juin 40.
Dernier exemple en date : la volonté affichée de voir la France réintégrer le commandement de l’Otan au mépris de la longue pratique instaurée par le général de Gaulle en 1966. Une telle tentation, déjà suggérée avant les présidentielles et confirmée par la nomination de l’atlantiste et accessoire Bernard Kouchner au ministère des Affaires étrangères, aurait officiellement et paradoxalement pour but de contribuer à la mise en place d’une véritable politique de Défense européenne, au prétexte que la majorité des pays de l’UE sont déjà membres de la noble institution et dans la considération qu’une telle concession aux Etats-Unis donnerait plus de latitude aux Européens pour peser en bloc sur les grandes décisions stratégiques. Ben voyons ! Nous avons pu mesurer combien l’Angleterre de Tony Blair et l’Espagne d’Aznar ont compté dans l’orientation de la guerre en Irak et n’osons imaginer quel aurait été le sort de la France si elle avait été inféodée à l’Otan au commencement du conflit. Au moment où, sans doute pour se démarquer de son prédécesseur, Gordon Brown himself fait de timides appels du pied en faveur d’une défense plus communautaire, l’initiative de Nicolas Sarkozy paraît tout aussi déplacée que l’était sa danse du ventre estivale devant un Georges Bush usé et désavoué par la majorité de son pays. Autre paradoxe notoire qui rappelle combien, outre la grâce qu’ils supposent, les entrechats peuvent parfois s’apparenter à l’immobilisme et à la soumission, ce même Nicolas Sarkozy a pesé de tout son poids pour retarder l’élargissement de l’Otan à l’Ukraine et à la Georgie, non pour affirmer son indépendance vis-à-vis de Washington, mais pour rappeler que la France fait également allégeance à Moscou sur certains sujets. Ainsi, d’une Europe censée s’unir pour offrir un contrepoids crédible aux grands blocs que figurent les Etats-Unis, la Russie et maintenant une Chine devant laquelle nos dirigeants tremblent de toute leur hauteur, notre président veut faire une sorte de valet dispendieux de son incohérence et de sa flatterie, pourvu que nul ne vienne lui chercher des poux dans la tête. On sait combien cette volonté d’imposer l’amour de soi, au travers d’une tortueuse docilité, n’a jamais eu d’autres résultats historiques que de provoquer le mépris et l’ironie de ceux que l’on veut charmer. Et tandis que François Bayrou rappelait justement hier que la vocation de la France est d’être indocile, la preuve est une nouvelle fois apportée que le principal contempteur des valeurs de notre pays est sans doute notre président lui-même. De ce point de vue, la prochaine présidence française de l’Europe risque d’être assez inquiétante. Quant à l’envoi de quelque 700 soldats supplémentaires en Afghanistan, on peut là aussi se demander, indépendamment de la question de son bien-fondé militaire, s’il ne va pas nous valoir l’ire de ceux, nombreux, qui s’interrogeaient sur le maintien de leur présence dans ce pays. Car, là encore, avant de se poser la question de la lutte contre des talibans florissant grâce au trafic de l’opium, il serait peut-être bon de s’interroger sur les liens directs qui subsistent entre le pouvoir de Kharzaï, soutenu par l’Otan, et ces mêmes trafiquants.
Mais, puisque les Américains le souhaitent, Sarko le veut aussi.
Et c’est infiniment logique, même si cela doit faire grincer bien des dents au sein de l’UMP, puisqu’il s’agit de la seule logique qui préside au mandat de Nicolas Sarkozy, à savoir : renier toutes les valeurs de la France sur l’autel de la dépendance aux puissants.
Qu’importe si celui qui voulait être le président des droits de l’homme s’assoit déjà en permanence sur ces mêmes droits pour fourguer quelques Airbus aux dictateurs, oubliant au passage que c’est essentiellement nos PME et nos échanges inter-communautaires qui expliquent notre déficit extérieur et méritent d’être soutenus et défendus. Qu’importe si celui qui martèle vouloir rattraper le fameux point supplémentaire de croissance américaine fait mine d’ignorer que cette croissance est due à l’endettement abyssal des ménages américains et à une immigration record. Qu’importe si celui qui tape en permanence sur le modèle social français fait peu de cas des près de 50 millions d’Américains totalement exclus d’un système de soins prohibitif. Qu’importe si celui qui, justement, défend dans une même phrase le codéveloppement et la politique d’immigration choisie, typique de la sphère anglo-saxonne, se refuse à expliquer le lien entre l’impossible croissance de certaines zones et le pillage des cerveaux de ces mêmes pays. Qu’importe puisque tout cela nous donne un air américain ! Et le mépris de la notion de culture affiché par notre président, à laquelle il substitue celle de réussite, procède du même phénomène. Et toujours sur le modèle américain, sans doute juge-t-il qu’un bon film est un film qui explose le box-office, et qu’une bonne chanson est celle qui, à coup d’indécente promotion, obtient un disque de platine. Mais puisqu’on parle de musique, pourquoi ne pas épouser le modèle américain jusqu’au bout et rappeler que tandis que nos Victoires de la musique viennent, à l’exception notoire d’Abdel Malick, de couronner sans recul tout ce que notre production nationale issue de la télé-réalité ou du népotisme franco-français compte de plus franchouillard et archaïque, cette même cérémonie aux Etats-Unis s’est inclinée devant le génie sans cesse renouvelé du jazzman Herbie Hancock !!!
Au final, sans aller jusqu’à prétendre que Nicolas Sarkozy jouerait le rôle de l’ignoble « Antifrance » dans la fameuse BD de Gottlieb et Lob SuperDupont*, il y a fort à parier qu’à l’instar des chanteurs yéyés des sixties il aurait, en ce temps-là, opté pour un pseudonyme assez proche de son ami belge Jean-Philippe Smet dit Johnny Halliday...
* Sans doute aujourd’hui incarné par le solitaire souverainiste gaulliste Nicolas SUPERDUPONT-Aignant, qui doit tout de même regretter de n’avoir pas compté le charisme, la modernité et la faconde au nombre de ses super (petits) pouvoirs.
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