Sarkomedium, transparence et télévision...
A quoi sert une commission Sarkozy ? Dans le désordre : à amuser la galerie, à gagner du temps (ou perdre selon l’angle de vue), faire plaisir à des pantins, noyer le poisson, dépenser des fonds, ceux des caisses vides... à compléter. En aucun cas, elle ne sert à être suivie d’effet. Nous avons devant nous deux beaux exemples : celle d’Attali dont les préconisations devaient être appliquées tout de suite et dans leur intégralité, sauf pour les taxis, sauf pour le principe de précaution, sauf... et la fameuse commission Copé qui avait vu ses membres se dissoudre au fur et à mesure que le temps passait
En janvier dernier, le phare de la France, et accessoirement de l’humanité et de l’audiovisuel, annonçait que les chaînes (chaîne est le bon mot dorénavant) publiques de télévision devraient se passer de publicité. Si on peut être d’accord pour qu’une télévision à mission publique puise ses ressources hors le couple diabolique audience/publicité, la méthode n’en est pas moins détestable et son application source de graves dégâts.
Hier dans une courte conférence d’une heure d’où la ministre Albanel n’avait rien à dire, la cravate c’est Sarko qui la porte - oui car si une expression veut que dans certaines situations on dise que c’est la femme qui porte la culotte, depuis peu on peut dire que, en toute circonstance et toute parité, c’est l’homme qui porte la cravate - nous avons appris que la commission Copé a usé temps et monnaie pour rien, car ce que le guide avait décidé en janvier 2008 serait appliqué en partie dès janvier 2009 et en totalité en 2011. Aucune proposition Copé n’a été retenue : la nomination du président de France télévision par un conseil d’administration et non plus par le CSA : à la trappe. 0,5 % de taxe : à la trappe. Quant à Albanel, elle fera la petite main, le scribe de service, elle recopiera dans un cahier à spirale en s’appliquant consciencieusement ce que lui dictera Sarko et ira le lire devant l’Assemblée nationale à l’automne, lorsque les feuilles tombent en tourbillonnant.
Que nous a donc dit, doudou dit donc, l’éclairant visionnaire audiovisuel ? Le Monde nous rassure car : "Partisan d’un système simple et démocratique", M. Sarkozy en a donc décidé autrement. Il faudra revenir un peu plus loin sur ce qu’est la démocratie pour notre grand Mamamouchi. En attendant : [...] le chef de l’Etat a souhaité que le futur président de France Télévisions soit "nommé par l’exécutif après avis conforme du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), et sous réserve qu’une majorité qualifiée de parlementaires n’y fasse pas obstacle". De bons esprits - ce qui prouve que la rouerie de l’Elysée a quelques effets quand même - osent dire qu’il y a une espèce de protection démocratique car il faudra qu’une majorité qualifiée (normalement les 2/3) de parlementaires n’y fasse pas obstacle. Est-ce que parlementaires veut dire députés et sénateurs ou seulement députés ? De toute façon dans un cas comme dans l’autre l’important est que ce n’est pas un accord positif : majorité qualifiée d’accord avec cette nomination, mais une possibilité de réfuter le choix de Matignon (en l’occurrence de l’Elysée). Autant dire qu’avec les 2/3 à obtenir pour réfuter ce sera une nomination sans risque. Le fait du prince. Et pourquoi donc serait-il juste que ce fût au pouvoir de nommer ce président ? Pris dans Libération : « Les choses doivent être claires, a-t-il martelé, il y a un actionnaire, cet actionnaire nomme le président. » Il serait bon de rappeler quelques vérités au capitaliste Sarkodollar :
- lorsqu’il y a un actionnaire c’est le conseil d’administration qui vote pour son président et non le ou les actionnaires ;
- dire que l’Etat est actionnaire de France Télévision est une vue biaisée car l’Etat est une entité globale et multiple et n’est que le commanditaire des Français qui eux, in fine, sont propriétaires dans leur ensemble au pro rata des impôts qu’ils ont payés (directement et indirectement) de cet Etat actionnaire ;
- on peut considérer quand une très grande part des ressources d’un établissement ne vient pas de la vente de sa production, mais d’un impôt (la redevance) que le pouvoir de décision de la direction puisse en partie revenir à ces bailleurs de fonds, donc les téléspectateurs payants ;
- une télévision ne peut en aucun cas être comparée à une structure industrielle telle qu’EDF, par exemple.
Plus de publicité pour la télévision publique, il faudra bien compenser. Pas de problème : pour financer le manque à gagner, M. Sarkozy a décidé de taxer les opérateurs de téléphonie et d’internet à 0,9 %, alors que la commission Copé proposait que cette taxe soit de 0,5 %. "Les recettes publicitaires de toutes les chaînes feront également l’objet d’un prélèvement nouveau de l’ordre de 3 % pour un rendement global de l’ordre de 80 millions d’euros", a-t-il ajouté. Ces deux taxes seront affectées "par décision politique et non par affectation juridique". En outre, il a été confirmé que le gouvernement ferait parvenir une dot de 150 millions d’euros à France Télévisions, preuve, selon M. Sarkozy, que son gouvernement "ne prépare pas la privatisation" des chaînes publiques. En revanche, il n’a pas abordé l’épineuse question de l’indexation de la redevance audiovisuelle sur l’inflation, demandée par la commission Copé. Cela nécessite quelques commentaires :
- est-ce économiquement, juridiquement et moralement juste que ceux qui téléphonent et ceux qui usent d’internet payent pour la télévision ? Et comme cela sera répercuté sur les factures, ceux qui téléphonent beaucoup, les entreprises par exemple qui par définition ne sont pas des utilisateurs de la télévision, payeront un max (voilà une menace...) :
- il semble que l’Europe n’en soit pas très fanatique ;
- les professionnels de ces deux secteurs ont réagi violemment. On peut se poser la question de savoir ce qu’il se passera si ces financements-là sont rejetés par voie d’appel soit au Conseil constitutionnel, soit à l’Europe et que la décision ferme et définitive du guide de commencer son plan en 2009 soit exécutée. Ce sera un vrai cauchemar. Ceci prouve l’impréparation, l’incompétence, la non-concertation définitive de Sarkozy, cela prouve une fois de plus que ce bonhomme-là est un parfait autocrate à montrer en exemple aux théoriciens politiques ;
- le grand courage de celui qui prend ses responsabilités s’arrête à la redevance : pas un mot. Or, si ce combat pour ne pas avoir de publicité est juste et que l’on y croit, la seule solution équitable est que les charges soient prises par la redevance et la vente des produits de France Télévision (ses reportages, ses films, les diffusions sur d’autres chaînes, les produits dérivés). Mais pour cela il faut du courage. Et si la charge est trop lourde pour des personnes à revenus modestes, c’est à la solidarité nationale de s’en préoccuper.
Pour terminer je vous laisse le soin de parcourir ce qu’est une réussite en matière de propaganda, et que le titre de Pravda revient sans conteste au Figosky dont la première phrase de cet article est : Bonne nouvelle pour le téléspectateur ! Non la deuxième ni troisième phrase, celle qui introduit le texte. Un texte lénifiant au possible, langue de bois de catégorie 1, qui n’apprend rien et flatte cette extraordinaire idée née dans un hexacerveau. Et ce titre, parce qu’il y aura 10 mn (pas plus) de publicité en moins à 20 h 40, Sarkozy bouleverse les soirées à la télévision ! Pas moins. Et comme si depuis janvier 2008 personne n’avait compris que si on supprimait la publicité, on la supprimait aussi celle qui suivait le JT de 20 heures. Le Figaro fait là une fameuse découverte.
Et pour terminer un petit souvenir. Voici ce qu’en pensait à l’époque de Mitterrand un SN (Secrétaire national ou Sarkozy Nicolas) du RPR :
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