Télécharger, c’est voler. Enfin... parfois
Si si, je vous le démontre.
Enfin, ce que je vous démontre, c’est que parfois, télécharger, c’est voler et parfois non. Simple, non ?
Je fais suite à un très long commentaire posté chez Alexandre de chez Éconoclaste sur la problématique du téléchargement.
Dans son analyse, Alexandre (on ne se connaît pas du tout, c’est pour ça que je l’appelle par son prénom) essaie de montrer que télécharger, ce ne peut être du vol :
puisqu’aucun coût de production et de distribution n’est supporté par le détenteur du droit d’auteur dont le morceau est téléchargé.
Ce à quoi je réponds c’est faux, parce que c’est aussi vrai que faux. Et donc ce n’est pas vrai. Donc faux. Vous suivez ? ;-)
Cher Alexandre,
je suis dans l’ensemble relativement d’accord avec toi, ie j’adhère à la plupart des arguments, parfois moins avec leur justification.
Prenons l’exemple de :
On a déjà dit que le téléchargement ne dépossède pas un individu d’un bien coûteux, puisque aucun coût de production et de distribution n’est supporté par le détenteur du droit d’auteur dont le morceau est téléchargé.
Je ne suis pas tout à fait d’accord. Imaginons que je trouve le coupé Pigeot 5006 CC HDI FAP ETC très sympa. Je me mets à en produire, la réplique exacte, je mets mon logo : elle devient la ETC 6005. Ai-je le droit de la vendre ? Vole-je Pigeot ? A priori, selon ton argument, non, puisque toute la production et la fabrication n’est pas supporté par les ayants droit...
Pourtant, quand Pigeot fabrique une tuture, il est réfléchi en amont aux volumes des ventes, etc. (réflexion qui parfois foire, ex de la renault arrêtée au bout de 6 mois, ex de la 206 cc dont il fallait, malgré des préstocks, attendre 13 mois et quelques déjà après sa sortie). Ces volumes prévisionnels de vente conditionnent tout un tas de variables derrière (embauche supplémentaire pour produire, construction éventuelle de nouvelles usine, etc).
De fait, si je vends à l’identique une Pigeot sous la marque RéplicaTutur, j’ai bien volé. Mais j’ai volé quoi ? L’argent de Pigeot qu’il a mis de côté à une époque pour la dépenser ensuite en R&D qui a abouti au développement du projet coupé Pigeot 5006 CC HDI FAP ETC. En ce sens, même si tu ne considères pas le vol de voiture, il y a là comme un procédé tout à fait déloyal pour le moins.
Que dit le dictionnaire au fait ? Voler :
- S’emparer frauduleusement et quel que soit le procédé utilisé, de ce qui appartient à autrui, avec l’intention de le faire sien. Mais aussi
- S’emparer, le plus souvent sans droit, de ce qui peut être considéré comme appartenant à autrui, à une autre réalité, à une autre activité d’ordre moral, social ou culturel. Ou encore
- Léser sciemment une personne dans ses intérêts pécuniaires, en prenant sur elle un bénéfice excessif ou en ne lui donnant pas tout ce qui lui est dû
- il y en a d’autres encore... (plagier, etc.)
Voilà : parle-t-on du même vol ? Pour certains (je ne les cite pas, ils se reconnaîtront eux-mêmes...), voler, c’est la définition 3, pour d’autres (qui se reconnaîtront aussi), voler, c’est la définition 1 ou 2. Et effectivement, si elles ne sont pas du même ordre (juridique, moral, philosophique, économique...), peut-on dire que nous parlons de la même chose ?
Revenons à notre chanteur Jean-Louis Dumur.
J’ai téléchargé son dernier album J’ai rien vu venir. Pour certains, j’ai volé (juridiquement par exemple pour l’Etat, économiquement pour le producteur et pour l’artiste), pour d’autres non.
In fine, la vraie question est quel sens je donne à mon téléchargement : y a-t-il une volonté délibérer de bénéficier gratuitement d’un plaisir sans rémunérer l’auteur ? Ou bien ?
Pour ma part, j’ai beaucoup téléchargé à une époque. Résultats ? Des tonnes de titres et d’albums, certains toujours en .rar, d’autres dans itunes, mais dont le compteur du titre affiche toujours zéro. Ou « un » !
Tu parles d’un vol...
Pourquoi je téléchargeais ?
Parce qu’aujourd’hui, l’offre est telle (comment ça une crise du disque ?) que je ne peux pas me permettre de dépenser entre 13 et 18 euros par album, multiplié par « n » albums, pour éventuellement me dire au bout de 3 titres : "Mon dieu quelle merde !"
J’ai découvert des artistes avec le téléchargement. Je ne vais pas faire la liste ici, mais je n’ai jamais acheté autant d’albums, de live, de DVD de concert depuis que je télécharge. Je n’ai jamais fait autant de concerts (entre 8 et 15 par an, en couple (1 500 euros/an + essence + la bouffe au resto après...) que depuis que je télécharge.
Et puis, en p2p, il y a du libre ? Comment je fais moi pour écouter le libre mis à ma disposition sur la mule si j’ai plus le droit de l’utiliser ?
Alors ?
Alors ne nous trompons pas. Je ne dis pas que télécharger est bien. Mais avec la diversité et le prix des albums, existe-t-il un autre choix ?
J’ai longtemps pensé comme beaucoup que télécharger un album ne pouvait pas être du vol : je ne lésais personne.
Mais aujourd’hui, j’ai changé d’avis : si, c’est du vol. Mais pas n’importe lequel : c’est un vol pécuniaire effectif à partir du moment où je profite indûment du plaisir ou du profit que l’écoute du disque m’apporte sur le long terme. Ce que je ne fais pas.
En ce sens, la morale et l’économie sont sauves parce que si cet album est vraiment bon, je l’achèterai et/ou j’irai voir l’artiste en concert. Et tout le monde y gagnera. L’artiste, le producteur et mon plaisir.
L’album Machin chose que j’ai téléchargé, que j’ai écouté 5 minutes et que je n’ai pas supprimé de mon disque dur (mais mis dans un répertoire qui n’est pas accessible en upload lorsque intégré à ma bibliothèque) par fainéantise, ce n’est pas du vol, c’est même un progrès : c’est le droit de savoir devenu gratuit. Après tout, les essais chez Pigeot, c’est gratuit aussi, non ?
Si un jour, tel ou tel procédé ne me permets plus de télécharger, c’est l’industrie du disque et elle seule qui y perdra. Pourquoi ? Tout simplement parce que de mon côté, je ne pourrai pas regretter d’avoir rater tel album, ne sachant pas qu’il existe. Par contre, ce qui est clair, c’est que d’une part, j’achèterai beaucoup moins d’albums et, en concert, je n’irai plus voir que des valeurs sûres. Jean-Louis Aubert ne m’a encore jamais fait défaut... Et tant pis pour les petits nouveaux.
Pour que le téléchargement ne soit plus un vol, c’est relativement simple :
- les artistes n’ont plus qu’à être bons ;
- les disques et les concerts moins chers (Céline Fion : de 100 à 200 euros pour 10 concerts à Bercy, sachant que non seulement, elle est en configuration 15 000 personnes, mais aussi que vu la disposition de la scène, elle vous tournera le dos pendant en moyenne... la moitié du spectacle !! 200 euros : mais ça fait pratiquement du 1 400 francs la place !! Et c’est la moitié des places qui sont à ce prix là !! M’enfin, économiquement parlant, je la comprends : si, à ce prix-là, elle remplit dix fois Bercy, elle serait bien bête de baisser les prix... Prix et configuration chez Ticketnet) ;
- plus de pouvoir d’achat ;
- des personnes mieux éduquées.
Les deux dernières conditions étant nécessaires, on comprend bien que cela va couter cher à l’État...
Sinon, il y a l’autre solution. Faire une loi pour interdire le téléchargement. Comme disent certains, plus de corps, plus de cadavre ; plus de cadavre plus de meurtre. Ainsi, plus de téléchargement, plus de vol. Aux deux sens du terme. En plus, faire une loi : c’est pas cher. Et je ne suis pas loin de penser que le monde de la musique, en agissant ainsi, ne fait rien d’autre que de se tirer une balle dans le pied. Ils doivent être comptables, et pas économistes...
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