Voulons-nous toujours des enfants idiots ?
En 1984 (il y a 32 ans donc) Maurice Tarik Maschino fit paraître chez Hachette un livre sans doute oublié aujourd'hui : "voulez vous vraiment des enfants idiots ?"
Extraits
"ces pauvres enfants ne sont que les produits d’une société en voie de crétinisation galopante. Et l’école n’est elle-même, et ne peut être, que le produit de cette société "
..Depuis cent ans, malgré les discours et les apparences, rien n’a changé dans l’enseignement. La machine fabriquait tout de même de bons produits, alors qu’aujourd’hui elle ne fabrique, ou presque, que des déchets "
Qu'en disait la critique alors ?
Une critique féroce et lucide qui n'épargne pas plus les élèves « joyeusement incultes », les représentants de l'administration, complices, que les professeurs eux-mêmes, lâches, passifs ou délirants.
Depuis de nombreuses années (après 68) tous les ministres de l'éducation nationale se heurtent à la même problématique : la prétendue lutte contre les inégalités d'éducation (appelées un peu sommairement inégalités scolaires) et les moyens de résoudre ce problème de plus en plus crucial (entraînant désespérance sociale mais aussi pertes de compétitivité pour les entreprises et la société toute entière).
Les réponses aux inégalités auront évidemment été toujours les mêmes (le socialisme est un dogme imperméable à la réalité) : donner plus de moyens (financiers) à l'école, augmenter l'encadrement des classes, scolariser plus tôt ou monter des structures de rattrapage (RASED...)
Les réponses étatiques ne marchent pas car l'école (publique notamment) est devenue toxique pour une majorité d'élèves : l'école tue l'envie d'apprendre
Prenons le simple cas d'un jeune enfant de 2 ou 3 ans issu d'une famille de la classe moyenne dans une banlieue moyenne (avec des parents moyennement qualifiés).
Cet enfant, jusqu'à qu'il soit scolarisé (pour peu que ses parents s'en occupent bien et ne le gavent pas de TV) va apprendre tous les jours et à tout moment. Un petit d'homme (expression fameuse du grand psychologue Jean Piaget) est évidemment une incroyable machine à apprendre, à imiter, à retenir à comprendre et à s'adapter (au meilleur comme au pire).
L'immense majorité des petits d'hommes en France (quel que soit leur milieu social) a potentiellement toutes les habilités et capacités pour réussir, étudier et apprendre. Pourtant il n'en sera rien pour une majorité d'entre eux. L'école va s'employer à tuer (méthodiquement et avec constance) l'envie et le bonheur d'apprendre
En fait (et dans la lignée de Ivan Illitch) il faudrait aujourd'hui se demander si ce n'est pas dans cette école publique négligente et paresseuse (où l'on compte ses jours de vacances bien plus qu'on ne s'investit au travail) que l'amour de l'apprentissage se perd au fils des trimestres d'ennuis, de violence ou de bêtise scolaire.
Les problèmes d'apprentissage naissent aujourd'hui au creux de notre République, à l'école (publique notamment) parce que cette école
- a été conçue comme un centre de tri (sélectif) où l'on doit rapidement distinguer les plus rapides à apprendre, les plus vifs ou simplement les plus conformes au système
- travaille avec les outils et les méthodes de la fin du XIX ème siècle (hiérarchie, centralisation, gestion des flux)
- est animée par des adultes démotivés (au bout de 10 ans de classes la plupart des profs n'y croient plus)
- est organisée comme une armée soviétique sans gestion des personnes ou des capacités
- ne réalise aucune formation professionnelle continue (1 milliard dépensés chaque année en pure perte pour préparer des concours inutiles mais syndicalement profitables)
- s'est coupée de la société (des familles qui ne sont jamais bienvenues mais simplement tolérées à la marge, des entreprises qui sont encore stipendiées ou caricaturées)
Pour restaurer une éducation de qualité il faudrait un traitement de choc que personne n'osera sans doute adopter en France
- mettre en concurrence frontale les écoles privées et les écoles publiques. Ne pas restreindre l'ouverture de classe dans le privé (si les parents veulent une éducation privée) et fermer si nécessaire les établissements publics en déshérence (ils sont des centaines aujourd'hui, dans la plupart des quartiers déshérités)
- doter les familles d'un chèque éducation qui leur permette de choisir librement leur école (publique ou privée, dans le secteur de leur choix)
- impliquer totalement les familles dans l'éducation en les rémunérant au besoin pour ce qu'ils transmettent à leur progéniture
- en les soutenant pédagogiquement et financièrement (mieux vaut payer un parent d'élèves qualifié pour faire la classe à 5 ou 10 enfants qu'un prof fonctionnaire peu impliqué dans la réussite des enfants)
- en permettant aux familles et aux autorités locales de recruter (et de licencier si nécessaire) les enseignants dont ils ont besoin
- en n'autorisant qu'exceptionnellement un adulte à enseigner plus de 10 années (temps moyen pour une complète perte de sens pour un travail devenu d'abord social aujourd'hui)
En 1984 quand Maurice Maschino décrivait l'entreprise de crétinisation des esprits, l'école fonctionnait encore correctement dans certains coins de France, aujourd'hui c'est bel et bien fini et la seule façon de tirer profit du système scolaire actuel relève du bon sens :
- naître dans une famille cultivée, ouverte sur le monde, polyglotte et intellectuellement stimulante
- habiter dans une ville ou une banlieue favorisée avec d'autres familles bien éduquées (mais pas forcément bourgeoises ou friquées)
- Avoir des proches (les oncles, les tantes, les amis) qui ont du temps et de l'amour à consacrer aux autres
- Avoir quelque chose à transmettre à ses enfants (des valeurs par exemple) qui ne soit pas uniquement des bisous le soir, un abonnement au portable et une chambre individuelle
Pour restaurer l'éducation en France il faudra donc beaucoup de courage et de constances politiques mais aussi et surtout faire comprendre à tous les Français que si les poissons pourrissent par la tête, les civilisations peuvent elles aussi mourir d'un manque d'éducation et d'intelligence.
désormais car l'éducation nationale est devenue une petite URSS (à la fois méchange, aveugle, sourde et prétentieuse) qu'il sera très difficile de reconstruire.
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