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Accueil du site > Actualités > Economie > Le travail est-il un coût ?

Le travail est-il un coût ?

Soit, d’un côté, le nombre d’offres d’emploi. Il est actuellement au plus bas : Pôle emploi ne recensait que 135 000 offres pour tout le territoire en novembre dernier, selon Actuchomage (et encore s’agissait-il aux trois quarts d’emplois précaires). Soit, de l’autre côté, le nombre de chômeurs. Il croît lui de manière constante et rapide : les chiffres livrés par l’Insee pour le mois d’octobre mentionnent 2 627 300 inscrits en catégorie A, c’est-à-dire sans aucune activité. Ils sont même 3 788 200 si l’on y ajoute les inscrits en catégories B et C (qui exercent une activité à temps partiel). Ces chiffres ne doivent cependant être perçus que comme des indicateurs, et certainement pas comme le reflet exact de la réalité : le sous-emploi en France déborde largement des statistiques officielles de l’Insee et, à l’inverse, de nombreuses offres d’embauche ne sont pas référencées par Pôle emploi.
 
Mais même imparfaits, ces indicateurs témoignent d’un fossé de plus en plus large entre offre et demande d’emplois, qui rend les recettes habituelles de lutte contre le chômage inopérantes : à quoi bon créer des structures d’insertion, faire de l’accompagnement ou du coaching, s’il n’y a pas de places pour tout le monde ?

Pour rétablir un solde plus équilibré, c’est sans doute du côté de la création nette d’emplois que les efforts seraient le plus profitables. Une politique publique peut-elle se fixer pour objectif de créer des emplois pérennes, par exemple dans le domaine associatif et, plus globalement, celui de l’économie sociale et solidaire ? Dans l’histoire récente, cet effort n’a été consenti dans notre pays que pour répondre à certaines situations très spécifiques, par exemple l’emploi de personnes en situation de handicap lourd. C’est dans ce cadre, par exemple, que sont financés les Etablissements et services d’aide par le travail (appelés auparavant "centres d’aide par le travail").

Outre des questions d’ordre idéologique, ce sont notamment des questions de coût qui sont avancées pour justifier la frilosité de la puissance publique en matière de création d’emploi. En témoigne, a contrario, l’objectif purement économique de ne remplacer en moyenne qu’un fonctionnaire sur deux dans le cadre des départs en retraite.

Mais la création d’emploi est-elle si coûteuse que ça ? Il serait intéressant, pour répondre à cette question, de s’inspirer des travaux conduits dans le domaine de la santé par Philippe Aghion, professeur d’économie à Harvard, et Fabrice Murtin, économiste à l’OCDE.

Ces deux chercheurs ont réalisé une étude qui tord le cou à l’idée selon laquelle les dépenses de santé, et notamment le fameux "trou de la Sécu", représentent pour les finances publiques un fardeau insupportable, qu’il faut alléger à tout prix. En effet, estiment Aghion et Murtin dans une tribune parue dans "Les Echos", "nous avons démontré empiriquement qu’un niveau élevé d’espérance de vie génère un surcroît de PIB par habitant". Ainsi, une population qui vit longtemps et en bonne santé est plus intéressante économiquement qu’une population malade qui meurt tôt. A priori cela semble évident, mais encore fallait-il l’établir. "La santé n’est pas un coût", martèlent ainsi les deux économistes.

"Et la création d’emploi ?", serait-on tenté de demander. Prélèvements sociaux (charges patronales et salariales), impôts directs et indirects, représentent évidemment des recettes d’autant plus importantes que le taux de chômage est faible. A l’inverse, le non-emploi génère lui d’importantes dépenses. On pense bien sûr aux allocations et minima sociaux, mais il faudrait aussi prendre en compte les coûts cachés du chômage, liés aux effets négatifs de la privation d’emploi en termes de stabilité sociale, de sécurité, de santé publique, etc. Sans compter que dans le même temps, des sommes énormes sont dépensées dans des dispositifs à l’efficacité très contestée : en 2008, les réductions de charges sur les bas salaires ont à elles seules représenté 30 milliards d’euros.

Le travail est-il un coût, et ce coût est-il supérieur à celui du non-emploi et des "rustines" créées pour y faire face ? On attend qu’une étude réponde à cette question dans toute sa globalité.
 

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13 réactions à cet article    


  • M.Junior Junior M 2 décembre 2009 12:30

    4 019 700 le nombre de chômeurs toutes catégories confondues.

    N’oublions pas la vision « courtermiste » de certains financiers pour qui un consommateur malade est aussi rentable.


    • iris 2 décembre 2009 12:40

      relire polyani QUI EXPLIQUE QUE le travail n’est pas une marchandise !!


      • finael finael 2 décembre 2009 15:18


        « Ne dites pas »travailleur« qui désigne quelqu’un qui agit, qui fournit un effort. Dites plutôt »salarié« , ça désigne quelqu’un de passif qui touche un salaire ».


        Illustration de Charb dans le « Petit cours d’auto-défense intellectuelle » de Normand Ballargeon.


        • Frabri 2 décembre 2009 18:54

          Quelques citations sur le travail

          http://www.collectif-rto.org/spip.php?article257


          • jesuisunhommelibre jesuisunhommelibre 2 décembre 2009 20:02

            Frédéric Bastiat parlait de ce qui se voit et de ce qui ne se voit pas. Vous devriez (re)lire ses écrits, ils vous éclaireraient parfaitement.

            De façon peut-être un peu rapide, voici ou est la faille du raisonnement :

            Pour payer quelqu’un, il faut de l’argent. Si le service apporté par la personne qui travaille est utile pour la société (au moins pour quelques personnes) et que le prix de ce service est acceptable, il y a emploi, et donc pas de problème.

            En revanche, si le service n’est pas utile, mais seulement créer pour « faire » de l’emploi, il faut financer ce travail. Or, pour financer ce travail, il faut bien prendre l’argent quelque part. Donc, on prend l’argent à celui qui travaille utilement, en augmentant le coût de son service. Ce qui fait que la demande diminue, et que ce travail, qui jusque là était utile et d’un prix acceptable, devient prohibitif et est donc supprimé.

            En résumé, au plus on crée d’emplois non productifs, au plus on crée du chômage.

            A titre d’illustration, la Grande Bretagne, avec une population sensiblement égale à la France, le taux de chômage y est beaucoup plus bas.

            Financer des emplois ne devraient être que l’exception, dans le cas de lourds handicaps ou d’accidents de la vie.

            Depuis une dizaine d’année, le cout salarial à beaucoup augmenté alors que les salaires n’ont pas augmentés réellement (en pouvoir d’achat). Cela pénalise les produits à l’export, et rend les produits nationaux moins compétitifs sur le marché local.

            En résumé, votre solution de créer des emplois non marchand, créerait d’avantage encore de chômage ! Ce qui n’est bien évidement pas votre but.


            • Julien_R 3 décembre 2009 10:19

              Qui parle de créer de l’emploi pour le plaisir de créer de l’emploi ? Cet écueil serait réel s’il n’existait dans notre pays aucun besoin non satisfait ou insuffisamment satisfait. Or ce n’est pas le cas : dans l’éducation, dans les hôpitaux, dans l’accompagnement péri-scolaire, dans l’accueil de la petite enfance, dans les structures d’accueil pour personnes âgées... les besoins sont criants. Et ce ne sont que quelques exemples.

              Vous dites que cela représenterait une ponction nouvelle sur la richesse nationale, avec des effets négatifs sur l’emploi privé. Mais cette ponction existe déjà, par le biais des mécanismes mis en place pour lutter contre le chômage et pallier ses effets négatifs. Avec les résultats que l’on sait, c’est-à-dire notoirement insuffisants.

              Un emploi en entreprise d’insertion coûte à la collectivité environ 12 000 euros par an. Combien coûte un chômeur ?

              Pour finir, je livre à votre réflexion l’élément suivant : le 4 décembre 2008, à Douai, Nicolas Sarkozy dévoilait les grandes lignes d’un plan de relance chiffré à 26 milliards d’euros. Dans la foulée, Christine Lagarde estimait que ce plan permettrait de créer ou sauvegarder environ 100 000 emplois. Soit 260 000 euros par emploi créé ou sauvegardé... Mais politiquement, dépenser 26 milliards pour soutenir les entreprises (avec des effets marginaux sur l’emploi) est plus acceptable que de créer directement de l’emploi. Ce n’est pas moins coûteux pour autant. Evidemment, on peut estimer que le soutien aux entreprises est indispensable pour garantir le dynamisme économique du pays. Sans doute. Mais le « dynamisme économique » du pays n’est-il pas durement impacté lorsque plus de 3 700 000 personnes pointent au chômage ? (et encore ne s’agit-il que des statistiques officielles)


            • Eusèbe 3 décembre 2009 10:27

              Bastiat n’était qu’un littéraire qui avait le sens de la formule, mais ni un économiste, ni un scientifique. La vie ne se rsume pas à des allégories, fussent elles bien écrites (« Pétition des fabricants de bougies »). A vouloir faire de la science avec les mains comme vous le faites, on la fait vite comme un pied.

              Quant à la Grande Bretagne, même Tony Blair a avoué que les chiffres étaient truqués (avouant par ex. que les 2/3 des gens en incapacité et rayés des comptes du chômage, étaient en fait capables de travailler).

              Le problème des soit disant libéraux contemporains est qu’ils sont en fait néo-libéraux, et qu’ils tentent d’adapter leur seule et unique grille de lecture poujadiste (« moins ,d’impots, moins de lois, via le »moins d’Etat« ) à toute les sauces, s’engluant dans une litanie sans sens qui les rend ridicules. Encore plus en ces temps de crise historique du »privé".

              Imaginez 2s un physicien qui tenterait de faire coller l’expérience à son modèle unique, s’entêtant et accusant la Nature d’être mal faite. Vous avez le parfait parallèle !

              Hé bien non, en physique, quand un modèle échoue, on le change !

               


            • jkw 2 décembre 2009 20:21

              Comme on disait dans nos campagnes, quand on compare des choux et des navets, on arrive à faire n’importe quoi ?

              1/ comment décrète-t-on qu’un travail est rentable quand la référence est 14h par jour de travail , 6 jours sur 7 pour un bol de riz ?

              2/ comment nos EXCELLENTS experts regardent tout cela :

              Parisot est en congrès, elle est questionnée par ses adhérents-patrons sur la crise..
              « alors cette crise ? va-t-on en voir bientôt le bout ? » et Parisot de leur répondre : « pas encore messieurs, la crise sera très dure… » alors les patrons prévenants retournent dans leurs usines préparer des plans de licenciement (qui s’appellent pudiquement depuis quelques années et avec la complicité des syndicats « plans de sauvegarde de l’emploi » ! !)
              Réunion suivante :« alors cette crise ? on n’en voit toujours pas la fin ? »et Parisot de leur répondre : « pas encore messieurs, la crise sera très très dure… » alors les patrons prévenants retournent dans leurs usines préparer d’autres plans de licenciement ! (et se mettre de côté quelques stock-options !)
              Réunion suivante : « alors cette crise ? on n’en voit toujours pas la fin ? » et Parisot de leur répondre : « pas encore messieurs, la crise sera très très très dure… »alors les patrons prévenants retournent dans leurs usines préparer encore d’autres plans de licenciement ! (et se remettre d’autres stock-options de côté…ils sont très prévenants !)Réunion suivante : Un patron un peu plus indiscipliné que les autres (c’est à dire qui ose poser des questions !) en a assez de voir que rien n’évolue !
              « Enfin Mme Parisot , qu’est ce qui vous fait dire que la crise est très très dure ? » Et leur patronne de leur répondre : « il y a un dicton qui dit que lorsque les patrons licencient c’est que la crise sera très dure ! !

              c’est pas fini !!!! si on prend le point 1/ et la vision 2/ ......le plein emploi n’est pas pour demain !



              • Frabri 2 décembre 2009 20:38

                Le plein emploi était crédible a l’ère industrielle lorsqu’il y avait quelques milliers de chômeur. En 1960 il y avait 200 milles chômeurs et une seule catégorie de chômeurs.

                De nos jours il y a plusieurs catégories de chômeur-se-s et plusieurs millions de chômeur-se-s

                Voir le documentaire « le chômage a une histoire » de gilles Balbastre de 1967 a 2001

                http://www.google.fr/search?hl=fr&source=hp&q=%22le+ch%C3%B4mage+a+une+histoire%22&meta=&btnG=Recherche+Google


              • jesuisunhommelibre jesuisunhommelibre 2 décembre 2009 20:42

                @ jkw

                Un travail T1 est rentable lorsque que vous êtes prêt à échanger une partie du fruit de votre temps de travail T2 pour acquérir ce que produit T1. C’est la seule vrai référence.


                • ZEN ZEN 3 décembre 2009 10:34

                  Avant de parler du coût du travail (non sans arrière-pensées), il serait utile de se demander , comme Adam Smith, Marx...en quoi le travail est créateur de valeur, de richesses


                  • plancherDesVaches 3 décembre 2009 12:34

                    Zen, je vais plus en détail. (et surtout hors théoriciens et extrémistes)

                    Un travail PRODUCTIF INDUSTRIEL est créateur de richesse. Point. Le reste est baratin.
                    Non pas que je veuille mettre l’ouvrier sur un pied d’estalle. Non non. Mais.. regardons la Chine. (pseudo « communiste »)

                    Enfin, bon. Le système de maximisation des gains a montré ses limites, laissons-le mourrir dans les guerres et le sang. Comme d’hab.


                    • fwed fwed 10 décembre 2009 15:36

                      Le travail est il un coût ?

                      Quiconque possède un minimum de culture économique sait que le travail humain est la seule source de survaleur (donc de richesse) en ce bas monde. Relire Marx.

                      http://monnaie.wikispaces.com/

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