Et si on écoutait un peu Nicolas Hulot
Dans le livre Pour un pacte écologique, le message principal était d’organiser une société de "l’être" plutôt que de "l’avoir".
Après les belles promesses électorales, que reste-t-il de ce message ?
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Je me souviens comme si c’était hier, du jour et de l’endroit où j’ai acheté le livre de Nicolas Hulot, Pour un pacte écologique. C’était quelques mois avant que les principaux candidats à l’élection présidentielle de 2007 ne se fassent connaître. Je ne savais pas précisément ce que j’allais y trouver, mais la lecture en a dépassé toutes mes espérances, car, au-delà de la simple critique du consumérisme et des mises en garde sur un avenir où l’énergie serait rapidement plus chère, j’y avais trouvé la solution ultime au brutal effondrement des sociétés occidentales. J’ai alors eu l’immense espoir qu’un individu puisse avoir suffisamment de charisme pour convaincre la majorité de la population qu’il fallait changer de vie avant que la vie ne nous change tous de force.
Des centaines de milliers de lecteurs ont à leur tour adhéré à ces conclusions et le phénomène a pris de l’ampleur les mois suivants, jusqu’à faire vaciller le fragile équilibre de notre République et entraîner début 2007 un « phénomène Coluche », lorsque d’énormes pressions ont eu lieu pour que Nicolas Hulot retire sa candidature. Ceci fut fait en échange de promesses de tous bords sans lendemain comme toujours, car nos politiciens ne savent fonctionner qu’en fonction des groupes de pression qui les manipulent et que, dans ces milieux non plus, l’opinion n’est pas encore prête.
Mais que dit le pacte écologique ?
La terre est « nous ». Nous sommes « la terre ». Un peu comme « Gaia » dans le cycle des fondations d’Isaac Asimov.
Si nous voulons la préserver pour les générations futures (pas si futures que ça), c’est maintenant qu’il faut changer de mode de vie. Le phénomène du rapide réchauffement climatique est très grave, mais ça n’est qu’un épiphénomène devant le reste des dégradations que notre consommation effrénée des différentes ressources de la planète fait courir à nos enfants. De toutes les façons, le réchauffement climatique ralentira seul (avec pas mal d’inertie) dès que les activités humaines diminueront proportionnellement à la population. On ne choisira pas la façon dont l’humanité perdra la plus grande partie de ses membres, famine, maladies, guerre, etc. (Cf. Les conclusions du club de Rome).
En conséquence et, s’il ne faut retenir qu’une conclusion du pacte écologique, c’est :
Diminuons la croissance, inventons une société de décroissance, qui soit le plus équitable possible, et n’attendons pas que la décroissance non programmée s’impose à nous de façon brutale et pas équitable du tout.
Ceci n’est pas une prévision, ce sont des faits que tout le monde peut constater, mais comme un grimpeur le nez contre la falaise qui ne peut en mesurer la hauteur nous sommes « aveugles » de ce qui nous attend, ou bien nous ne voulons pas le voir. Il est probablement déjà trop tard car différents mécanismes macro-économiques sont dans la zone rouge si on peut dire. Dans quelques siècles, si les historiens existent encore, ils associeront le début du XXIe siècle au début de la guerre mondiale des ressources sur la planète. La présence occidentale renforcée dans le golfe Persique et bientôt le Caucase en sont les témoins indiscutables. La pression que l’on fait régner sur l’Iran, plus que sur la Corée du Nord d’ailleurs, l’omniprésence des Russes et des Chinois dans les espaces délaissés par l’Occident le confirment jour après jour.
La crise financière naissante depuis un an et qui commence à prendre de l’ampleur jour après jour va fatalement entraîner des désordres sociaux majeurs dans les grandes démocraties occidentales au cours des années à venir. Elle va également augmenter la souffrance des peuples du Sud et leur marginalisation, quelles que soient les belles paroles du genre : on ne laissera pas tomber l’Afrique, nous sommes tous des Africains, etc.
Les émeutes de la faim au printemps dernier sont les prémices des mouvements qui vont accompagner la frustration des pays émergents lorsque les démocraties occidentales se replieront sur elles-mêmes.
On pourrait trouver chaque jour dans l’actualité internationale des faits qui confirment cette évolution, non pas à venir, mais en cours.
Que constate-t-on à présent de la part de nos élites qui disent avoir soutenu la démarche de Nicolas Hulot pour séduire son électorat :
Le Grenelle de l’environnement a permis une démarche positive, dans la bonne direction en mettant en phase tous les acteurs concernés. Un an plus tard, nous en sommes toujours à des mesurettes saupoudrées ci et là en essayant de ne pas froisser les différents lobbies, tandis que M. Attali donne ses conseils sur les mesures à prendre pour soutenir la croissance. Tout d’un coup, il annonce que la crise financière sera redoutable pour nos économies. Ça n’est pas un scoop et c’est quand même bien le signe que nos élites n’ont sinon rien compris aux propos de Nicolas Hulot, tout au moins jamais essayé de mettre en œuvre la moindre mesure de fond. On l’a vu cet été avec la hausse des prix du pétrole. Il s’agissait là d’une formidable opportunité de préparer la population à se « désintoxiquer » de cette dépendance, mais bien au contraire on nous a parlé d’aides à la cuve, de subventions pour les routiers, etc.
La seule issue correcte sur le long terme et pour ne plus vivre à crédit sur le dos de nos enfants aurait été d’accepter ces hausses et de les accompagner. Le courage politique n’est pas, hélas, pas une qualité de nos élites.
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