Les OGM, la dépendance alimentaire, la dépendance politique, la bio-uniformisation
Les OGM reviennent par intermittences sur le devant de la scène médiatique. En France, la question sur la législation autour des OGM implique notamment le ministre de l’Agriculture, le ministre de l’Ecologie, la FNSEA et d’autres interlocuteurs que l’on peut assimiler à des lobbies [1] (voir les notes en fin de l’article), ainsi que les instances de l’Union européenne. Les groupes de travail mis en place en juillet dernier, voulus par le gouvernement français et préparant les travaux précisant les orientations françaises sur la politique de l’environnement, que les médias appellent abusivement le « Grenelle de l’environnement », ont finalisé fin septembre leurs propositions sur les OGM. Ces propositions vont en apparence dans le sens de la prudence face aux OGM. Les réunions préparatoires ont, concernant les OGM, permis d’arrêter des positions telles que « le libre choix de produire et de consommer avec ou sans OGM », « le principe du pollueur-payeur », « la non-brevetabilité du génome ».
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On constate que ces groupes de travail sur l’environnement n’ont pas choisi de proposer l’isolement obligatoire des OGM. Au contact de la nature, la dissémination non contrôlée des plants d’OGM pourra donc se produire. La majorité des citoyens ne sont peut-être pas d’accord avec ce feu vert donné à la propagation incontrôlable des OGM. La propagation sera en effet incontrôlable car une fois lâchés dans la nature, dans des conditions favorables de reproduction et de croisement avec les plants traditionnels, les plants d’OGM se propageront de façon aléatoire.
Quoi qu’il en soit, il faut insister sur le fait que malgré le battage médiatique, les lois qui découleront des propositions que formuleront les groupes de travail sur l’environnement auront une portée limitée puisque, comme on vient d’en faire la remarque, le point le plus important à retenir est que les lois sur les OGM n’empêcheront pas la prolifération des plants d’OGM à travers le continent européen.
Il convient d’ailleurs de constater que la position que pourra éventuellement prendre l’État français, à travers les lois qui restent à mettre en place, risque par ailleurs d’être en conflit avec les orientations stratégiques qui sont suivies par l’Union européenne. La problématique des OGM se situe en effet dans un cadre plus large qu’impose l’Union européenne, le cadre défini par le rôle que l’Union européenne planifie pour l’Europe dans le scénario de la distribution des activités agroalimentaires au niveau mondial. Le présent article situe donc au niveau de l’Union européenne la réflexion sur les OGM, sur la dépendance alimentaire, sur la dépendance politique et sur la bio-uniformisation.
- Tout citoyen est concerné et peut comprendre quels sont les enjeux autour des OGM.
Il n’est pas du tout nécessaire d’être un scientifique hautement qualifié pour comprendre la problématique posée par les organismes génétiquement modifiés (OGM). Le présent article s’adresse à tous les citoyens doués de simple bon sens.
Dans le débat sur les OGM, les arguments fréquemment évoqués concernent le danger potentiel pour la santé. Mais répandre les OGM dans la nature présente encore autres dangers.
Le présent article évoque deux sujets d’inquiétude sur les dangers liés aux OGM. Le premier danger est que les OGM peuvent provoquer une réduction si importante de la biodiversité qu’elle risque de conduire vers la bio-uniformisation. Le deuxième danger mis en avant dans cet article est que les OGM risquent d’instaurer la dépendance alimentaire de l’humanité envers les entreprises détentrices des brevets sur les OGM. La dépendance alimentaire a pour conséquence nécessaire et évidente la dépendance politique. L’article évoque les décisions politiques qui poussent les Européens dans les bras du mondialisme. Le manque du respect des règles fondamentales de la démocratie dans les processus de prise de décision politique est également évoqué.
Il apparaît que les OGM sont un parmi les moyens de soumettre les nations à la globalisation des économies, en instaurant la dépendance agroalimentaire et en imposant l’uniformisation des organismes vivants, notamment ceux produits à des fins agroalimentaires.
- La maîtrise de l’agroalimentaire conditionne l’indépendance politique de l’UE.
En démocratie véritable les citoyens décident de leur avenir. Au moyen de la majorité des voix ils sont entièrement libres de décider. Ils décident les questions sur lesquelles ils décident, ils décident des critères selon lesquels ils décident. Ils décident de l’organisation de leur communauté, des valeurs auxquelles ils croient, de leur présent et de leur avenir.
Pour assurer à ses citoyens l’accès à la démocratie, une communauté structurée en État ou en Union d’États, doit être capable de refuser les ordres venant de l’extérieur et pour cela doit être organisée de manière à garantir son indépendance.
Pour être indépendante et démocratique, une communauté doit notamment avoir la maîtrise de sa production alimentaire et l’assurance de l’approvisionnement en matières premières et en énergie.
Lorsque l’approvisionnement en nourriture est de fait sous contrôle d’un État étranger, cet État a des moyens de pression et peut imposer ses décisions à ceux qui dépendent de lui pour leur nourriture.
Deux aspects sont à considérer pour la maîtrise européenne de l’agroalimentaire :
- la localisation de la production alimentaire,
- la libre disposition et la libre reproduction des organismes produits pour l’alimentation.
- La localisation de la production alimentaire.
L’Europe produit actuellement plus de nourriture qu’elle n’en consomme. Mais dans le cadre de la globalisation mondiale des économies, les dirigeants politiques ont attribué au Brésil le rôle de futur producteur d’alimentation destinée à l’Europe. La population européenne n’a pas eu le droit d’exprimer sa volonté sur cette question. À terme, le consommateur européen n’aura pas le choix : il devra majoritairement acheter des produits alimentaires fournis par les firmes agricoles situées au Brésil.
Pourquoi des pans entiers de la forêt amazonienne - 350 000 hectares - ont-ils disparu pour y cultiver du soja qui nourrit le cheptel européen, alors qu’un quart de la population du Brésil souffre de malnutrition chronique ? Pendant ce temps les surfaces agricoles européennes sont transformées en friches. Pourquoi les dirigeants politiques, fidèles à leurs objectifs de globalisation planétaire, délocalisent-ils la production agricole européenne ? Avons-nous besoin de manger des fraises à Noël ou de faire parcourir des milliers de kilomètres aux fruits et légumes que nous achetons dans nos supermarchés ?
Premièrement, cette délocalisation de la production alimentaire ne contribuera pas à l’indépendance de l’Union européenne et donc nuira à la démocratie dans l’Union européenne.
Deuxièmement, dans l’optique de développement durable, un autre aspect doit être maîtrisé. Parmi les procédés agroalimentaires possibles, il faut favoriser les types de production et de distribution d’aliments qui ont le meilleur bilan écologique : le moins de consommation d’énergie ou de ressources non renouvelables, le moins d’émissions de polluants. Par conséquent une organisation des circuits de distribution de produits agroalimentaires, sciemment basée sur des transports sur de longues distances, par exemple entre le Brésil et l’Europe, serait contraire au principe de la gestion saine du potentiel écologique de la planète. Les points de production des aliments doivent être répartis de manière à être proches des points de consommation. La stratégie des orientations économiques de l’Union européenne devrait en tenir compte.
- La libre disposition et la libre reproduction : le problème des OGM.
Quant au rôle de propriétaire de brevets sur les OGM, il est actuellement occupé de fait par les États-Unis d’Amérique. Les États-Unis d’Amérique ont intérêt à ce que leurs OGM s’imposent à la planète entière.
Il n’est pas certain que la proposition des groupes de travail sur l’environnement concernant « la non-brevetabilité du génome » sera retenue dans la loi française et d’autre part cette loi locale française serait-elle applicable s’il s’avère qu’elle n ’est pas conforme au droit de l’Union européenne ?
Un problème majeur introduit par les OGM est que ces organismes se propagent en éliminant les organismes traditionnels non génétiquement modifiés.
Prenons l’exemple d’un champ de culture traditionnelle situé à proximité d’un champ de plants de même espèce mais à culture d’OGM dont les semences sont produites par une firme multinationale américaine. Le champ de culture traditionnelle est à terme contaminé par le croisement avec les plants d’OGM. À partir de ce moment-là le propriétaire du champ traditionnel contaminé par des OGM n’est plus propriétaire des semences produites sur son champ. La compagnie multinationale américaine est propriétaire des semences OGM puisque elle dispose de brevets sur ces OGM [2]. L’Union européenne accepte ces modalités juridiques, les dirigeants politiques de l’Union européenne, au lieu de démocratiquement appliquer la volonté de la majorité des citoyens européens, ont préféré céder à la pression américaine [1]. Progressivement et sans le vouloir, sans pouvoir légalement s’opposer à l’envahissement des champs, sans avoir jamais semé des plants d’OGM, les agriculteurs de l’Union européenne deviennent entièrement dépendants des firmes américaines disposant de brevets sur les OGM. Cela ne contribue pas à l’indépendance de l’Union européenne et donc nuira à la démocratie dans l’Union européenne.
Les OGM au contact de la nature sont une agression contre la biodiversité. Mais les citoyens européens sont souvent seuls, abandonnées des cercles politiques, face à cette menace des OGM d’uniformisation génétique et de disparition des types vivants. Les initiatives des citoyens pour sauvegarder la variété du patrimoine génétique disponible sur la planète sont même combattues par la législation faite sur mesure pour favoriser les OGM. Par exemple une association dénommée Kokopelli [3] a pour but la sauvegarde des plantes cultivées en Europe parfois depuis des siècles. Le lobby agroalimentaire a fait appel à la justice pour empêcher cette association d’agir : début 2007, le tribunal français de Nîmes a condamné l’association au paiement d’amende et lui a de fait interdit de distribuer les semences. Les avocats du lobby ont parmi d’autres griefs trouvé le suivant : « les semences sont non conformes ». C’est-à-dire que ces variétés n’ont pas obtenu le permis de mise sur le marché comme doivent par exemple l’obtenir les produits de l’industrie pharmaceutique. Ces semences ont pourtant été utilisées pendant de nombreuses générations par les paysans européens et le fait que les humains consomment ces plantes depuis des siècles est la preuve qu’elles ne présentent pas de dangers pour l’alimentation humaine. Pour le lobby agroalimentaire la vraie gêne est dans le fait que ces semences anciennes, préservées par Kokopelli, sont fertiles sans limites, elles produisent à leur tour des semences fertiles et permettent à leur possesseur d’être en autosuffisance alimentaire - lui et ses descendants - sans limite dans le temps. Alors qu’avec les semences OGM, l’agriculteur est contraint de racheter au lobby agroalimentaire chaque année des semences qui ne se reproduisent pas.
Le lobby agroalimentaire pousse à la généralisation des OGM car il vise à instaurer un marché captif où il aurait le monopole du patrimoine génétique agricole.
- Les dirigeants politiques européens opposés à l’indépendance politique de l’UE.
À long terme les dirigeants politiques européens semblent viser la création d’une Union mondiale. Cela expliquerait leur volonté de globalisation au détriment de l’existence des peuples européens indépendants des pressions mondiales. Comme c’est le cas trop souvent, les dirigeants politiques européens n’ont pas demandé aux citoyens quelle est leur volonté sur cette orientation politique fondamentale - le mondialisme - qui œuvre pour la création d’une Union mondiale. En tout cas, les politiques au pouvoir raisonnent dans une vision de répartition de l’activité économique sur l’ensemble de la planète et d’interdépendance des régions de la planète. Mais en cas de catastrophe - naturelle ou causée par l’activité humaine - les voies de transport risquent de devenir impraticables. La décision prudente serait de répartir sur l’ensemble de la planète des zones de production alimentaire près des centres de consommation.
Une autre voie existe hors de l’ultralibéralisme qui pousse à la globalisation et hors de l’altermondialisme.
- Quelles décisions prendre sur la politique agroalimentaire européenne ?
Les opinions exposées dans la présente contribution ne traduisent pas obligatoirement l’opinion majoritaire des citoyens. Certains citoyens européens sont favorables à la création d’une Union mondiale et donc favorables à la globalisation des économies et à la perte d’indépendance politique en général et en particulier à la perte d’indépendance alimentaire. D’autres Européens aimeraient que l’Union européenne soit véritablement européenne, c’est-à-dire qu’elle justifie son existence par la défense qu’elle apporte aux Européens et à leurs intérêts. Certains citoyens sont pour la généralisation des OGM, d’autres sont contre.
La première condition pour respecter une démocratie véritable c’est de garantir aux citoyens la liberté complète d’expression. Toute entrave à cette liberté complète d’avoir des opinions et de les propager est signe de dictature [4].
La deuxième condition pour respecter une démocratie véritable est que chaque décision politique à prendre doit être le reflet fidèle de ce que veut la majorité de la population. Cela concerne également les décisions concernant les questions soulevées dans le présent article :
- la généralisation des OGM ;
- l’abandon de la diversité biologique des organismes utilisés dans l’agriculture ;
- la création d’une Union mondiale avec la répartition de l’activité économique sur l’ensemble de la planète, avec l’interdépendance des régions de la planète, avec la disparition de la souveraineté politique européenne.
Les groupes invités à apporter des propositions pour les lois sur l’environnement ne sont pas une garantie suffisante de décisions démocratiques concernant les OGM. Ces groupes sont composés de femmes et d’hommes. Chaque femme et chaque homme peuvent être soumis à des pressions et, surtout lorsque les intérêts financiers sont en jeu, à des chantages. Il n’est pas garanti que ce processus impliquant les groupes représentatifs aboutisse à des orientations qui préservent l’intérêt général. Il n’est pas garanti que les lois qui seront votées répondent aux souhaits de la majorité de la population. Et au niveau de l’Union européenne, il est certain que les textes de droit sont écrits sous la dictée des lobbies [1]. Par conséquent, pour garantir la démocratie véritable, il faudrait procéder autrement.
Pour éviter la situation où les politiques au pouvoir ignorent la volonté de la majorité des citoyens, la solution pour la démocratie sont les référendums, notamment les référendums sur l’initiative du peuple [5] qui devraient être garantis par la Constitution.
Les référendums sont un outil souple, ils peuvent avoir aussi la forme de questionnaires à choix multiples - par exemple sur « le libre choix de produire et de consommer avec ou sans OGM », « le principe du pollueur-payeur », « la non-brevetabilité du génome », etc. - et la majorité des voix exprimées par les citoyens européens sur chaque question devrait emporter la décision. La démocratie véritable implique la liberté au sujet de la question posée dans le cadre de référendum d’initiative populaire et au sujet des critères de décision proposés dans le référendum d’initiative populaire. En démocratie véritable, les citoyens doivent avoir le droit à tout moment, sur toute question, selon les critères de leur choix, de décider par référendum.
Concernant les OGM, comme concernant les autres questions qui relèvent des décisions politiques, les articles que l’on peut écrire, sur AgoraVox ou ailleurs, peuvent-ils amener les politiques qui sont au pouvoir à respecter les règles fondamentales de la démocratie véritable ? Quelles actions faut-il entreprendre pour obliger enfin les politiques au pouvoir à mettre en application la démocratie véritable, la démocratie dans laquelle chaque décision politique répond aux souhaits de la majorité des citoyens qui se sentent concernés par la décision ?
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- Notes :
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[1] Lisez mon article publié sur AgoraVox « Comment contrer les lobbies de toute sorte et comment aller vers la démocratie ». Lien :
http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=28735
[2] Risques de contamination dans les campagnes :
[3] L’association Kokopelli a pour but de préserver la biodiversité semencière et potagère :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Kokopelli_(association)
Lisez l’interview du président de l’association Kokopelli :
http://www.univers-nature.com/interviews/kokopelli.html
[4] Vous pouvez lire d’avantage dans mon article publié sur AgoraVox « La liberté d’expression est une condition de la démocratie ». Lien :
http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=28714
[5] Vous pouvez lire d’avantage dans mon article publié sur AgoraVox et qui explique quelle est la différence entre les soi-disant « démocraties » que nous imposent les politiques au pouvoir depuis des décennies et la démocratie véritable : « Démocratie participative et poids des lobbies ». La démocratie directe - avec la possibilité donnée aux citoyens de déclencher les référendums - n’élimine pas les éléments de « démocratie représentative » ni les éléments de « démocratie participative ». La démocratie directe laisse aux uns et aux autres la possibilité de faire des propositions et laisse aux politiques la responsabilité de gérer les affaires de la communauté au quotidien. Mais elle exerce sur les politiques et sur les lobbies le contrôle permanent du respect de la règle démocratique : « pour toutes les questions qui touchent la communauté, c’est la volonté de la majorité des citoyens qui décide ». Lien sur l’article :
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