Vers un monde durable : Croissance économique et écologie, une équation épineuse
Nous vivons dans une société de consommation. Qui dit consommation dit production. Qui dit production dit pollution (déchets et CO2 qui provoque le réchauffement climatique) et épuisement des ressources limitées (matières premières et énergie). Nous avons consommé en un siècle la moitié des énergies fossiles accumulées en 100 millions d’années.
Quelles sont les solutions ? Changement de mode de vie ? Bof, on a loupé le coche : avec le pétrole et la grande croissance économique pendant les 30 glorieuses, on a eu l’impression de vivre dans un monde sans limites, en progression permanente, où tout serait possible. On ne peut plus revenir en arrière, les habitudes sont trop difficiles à changer. Nouvelles sources d’énergie qui ne produisent pas de gaz à effet de serre, recyclage total et modes de production et de consommation qui ne produisent pas de déchets ? Facile à dire… Il y a des gens qui pensent que les avancées technologiques résoudront tous nos problèmes. On aime bien remettre à plus tard, mais dans le cas de la santé de notre planète, c’est quand même dangereux…
Le dilemme consommation/écologie
Le problème du libéralisme économique est qu’il laisse libre-cours à des prédateurs qui vont profiter tant que possible sans se soucier de l’avenir. Ce sont les bases de notre société de consommation qui sont à revoir. Pourquoi ? Il n’y a qu’à regarder ce qui se passe en ce moment : la récession économique entraîne une chute du prix de l’énergie (à cause d’une baisse de la demande) pour garder un niveau de consommation élevé (conservation du chiffre d’affaires)… On entend souvent les gens se plaindre de l’augmentation du prix de l’énergie, du pétrole… mais en fait ça ne coûte rien ! On fait venir des fraises depuis des milliers de kilomètres, et on ne s’en rend même pas compte ! La pression de la société de consommation est énorme, l’incitation à acheter se fait par tous les moyens : publicité, phénomènes de masse, ridiculisation du vieux…
Dans ses films adressés aux Français, Yann Arthus Bertrand met le doigt sur les excès de la société de consommation, avec de nombreux chiffres ahurissants commes ceux-ci (je n’ai pas vérifié s’ils sont exacts, mais ça parle) :
- 1 milliard de portables sont fabriqués tous les ans, 426 000 portables sont jetés chaque jour.
- 11 000 avions : le nombre de vols commerciaux qui ont lieu aux Etats-Unis toutes les 8 heures.
- 170 000 piles sont produites toutes les 15 minutes.
- 1 000 000 de tasses en plastique vont dans la corbeille toutes les 6 heures dans les vols commerciaux.
- 1 sac en plastique est jeté toutes les 5 secondes.
- 2 000 000 de bouteilles en plastique sont jetées toutes les 5 minutes.
- 106 000 canettes en alu sont mises à la poubelle toutes les 30 secondes.
Al Gore aussi, y va de son message écologiste avec son film “Une vérité qui dérange”. Il est plutôt orienté vers les américains, en misant sur l’émotionnel, des arguments parfois douteux (comme le glaçon qui fait déborder le verre en fondant) mais convaincants pour des non-scientifiques (pour la bonne cause…).
Gaspiller et polluer, c’est mal
A la base, le problème de l’homme est qu’il est extrêmement paresseux : s’il existe un moyen de faire quelque chose en se fatigant moins, il sera utilisé (logique non ?). La tendance est à tout automatiser afin de produire un minimum d’efforts dans notre quotidien. Exemples : les transports, les ascenceurs, les volets/stores électriques… Conséquence : la nourriture n’est plus qu’apport énergétique superflu qui entraîne de plus en plus souvent l’obésité (cf. le stéréotype des hommes dans Wall-e : ils sont tellement gros qu’ils ne peuvent même plus bouger, et passent leur journée dans des véhicules munis d’écran TV).
Or on ne devrait pas pouvoir faire ce que la technologie nous permet, mais ce que les ressources de la Terre autorisent… Il faut un équilibre entre la monnaie et la planète. Si notre argent permet d’acheter plus que toutes les réserves renouvelables (voire réserves tout court) de la Terre, ça ne peut pas bien aller… En plus le phénomène s’accélère : en 100 ans à peine, la population mondiale a été multipliée par 4 et la puissance industrielle par 20. C’est un vrai changement d’ordre de grandeur, et par conséquent, la pression sur l’environnement est aujourd’hui devenue énorme, la nature est fragilisée.
Il faut faire des économies d’énergie et ne pas polluer ! Mmmh, je veux bien, mais que faut-il économiser au juste ? Ce ne sont pas les voitures qui polluent le plus, ce sont les entreprises qui créent le plus de déchets ! Oui, mais elles produisent pour qui les entreprises, directement ou indirectement ?
Mmmh, ok mais si les autres n’économisent pas je ne vois pas à quoi ça sert que moi j’économise. Je ne veux pas prendre en main ma consommation tout seul : je passerai pour un hurluberlu écolo et je profiterai moins que les autres ! Ca doit venir d’en haut ! Oui, mais alors faut élire les bons dirigeants politiques et faire pression sur eux… Les Américains l’ont bien fait en élisant Barack Obama (face à McCain/Palin y a pas photo !).
Mmmh, mouais. Mais en fait qu’est-ce que ça m’apporte d’économiser ? Rien dans l’immédiat… Si des sous, mais pour ce que ça rapporte… Oui, là on met le doigt sur un problème : l’énergie ne coûte pas assez cher ! Jean-Marc Jancovici pousse le bouchon encore plus loin en disant que l’énergie ne vaut rien !
Les conférences de Jean-Marc Jancovici, ça décoiffe !
Jancovici, c’est qui ? C’est un polytechnicien spécialiste du changement climatique et des questions énergétiques. Il a un site très intéressant : www.manicore.com.
Il y a environ un an, les conférences de la journée inaugurale de la 82ème édition des Semaines Sociales de France étaient consacrées au changement climatique et ses conséquences. Devant une salle comble, Michel Camdessus, président d’honneur des Semaines Sociales, après un discours inaugural, laissait la place à Jean-Marc Jancovici, pour un exposé dans un style décontracté, et avec un ton direct.
« Nous sommes tous des nababs », lance Jean-Marc Jancovici. Il attire là l’attention de l’auditoire sur la quantité astronomique d’énergie que consomme chaque individu dans les pays riches (nous avons tous à notre disposition en permanence une centaine d’”esclaves” énergétiques). Avec un certain sens de la formule, il cite sans détour les bouleversements aux conséquences désastreuses pour le climat : une forte hausse de la population mondiale, l’augmentation de l’énergie consommée par personne, surtout pendant les Trente glorieuses… Pour Jean-Marc Jancovici, l’heure est grave, et il n’hésite pas à dire les choses : « Le Club de Rome s’était essayé à une mise en équation de la vie humaine. La prolongation du système dans lequel nous vivons, ce ne peut être que son effondrement. Car le système se nourrit de la dégradation du capital naturel.”
Au fond, ce que dit Jean-Marc Jancovici est aussi simple qu’effrayant : l’environnement est menacé, et les efforts que nous pourrons faire pour le protéger ne suffiront pas si on n’opère pas un changement fondamental du mode de fonctionnement de nos sociétés. Le message est clair : le fonctionnement de nos sociétés est par nature dangereux pour l’environnement. « Dès qu’il y a croissance, il y a augmentation des émissions de CO2 ». Jean-Marc Jancovici a livré une analyse d’une brutale vérité qui pourrait laisser croire au pessimisme. Mais il reste au contraire persuadé d’une possible amélioration de la situation, et a été très heureusement surpris du Grenelle de l’Environnement, dont Jancovici s’est félicité qu’il ait abordé la question de la taxe carbone.
Le mieux c’est de le découvrir en vidéo, car son discours est génial : même si chacun des éléments de son discours est bien connu et largement documenté (quoique), il a une capacité de synthèse et une pédagogie excellentes. Il faut quand même s’accrocher un petit peu pour suivre, car il va vite… On peut trouver les vidéos de conférences entières ici et là, ou en plusieurs parties sur Youtube en commençant par là.
Pour plus d’informations sur les problèmes climatiques :
Le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC, IPCC en international) est une organisation qui a été mise en place en 1988, à la demande du G7. Depuis 1990, il a publié 4 rapports d’évaluation très détaillés (publications officielles), et le premier rapport donnait déjà des conclusions fortes concernant le changement climatique futur. Pour le dernier rapport, qui date de 2007, il existe une version simplifiée plus accessible (même si c’est en anglais).
On peut aussi trouver plus de détails à propos du GIEC sur cette page, où il est très bien expliqué pourquoi il faut croire ce que dit le GIEC… Le WWF a aussi sorti son rapport planète vivante 2008. Et il y a encore d’autres rapports…
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