Droit à l’image et droit à l’information
Le droit à l’image des personnes - généralement protégé sur le fondement de la protection de la vie privée (article 9 du Code civil) - s’est largement patrimonialisé.
En effet, l’atteinte à l’image d’une personne n’est plus nécessairement liée à une atteinte de sa vie privée. Chaque personne a sur son image, quelle que soit sa notoriété, un droit exclusif et absolu.
Après un bref rappel du principe et des exceptions au droit à l’image, nous aborderons le cas particulier des personnes publiques.
Le principe : aucune photographie ne peut être diffusée sans le consentement exprès de l’intéressé ou de son représentant légal (lorsqu’il s’agit d’un mineur).
Les exceptions : dans un lieu public, l’autorisation de la personne photographiée n’est pas nécessaire lorsqu’elle n’est pas le sujet principal de la prise de vue, ou n’est pas reconnaissable ; le droit à l’image doit aussi se concilier avec le droit à l’information.
Sont licites et exemptes d’autorisation, les images qui répondent aux besoins de l’information du public (fait d’actualité, phénomène de société, fait divers tragique, actualité judiciaire, catastrophe nationale ou internationale).
Mais, encore faut-il que les photos aient un rapport direct avec l’information véhiculée.
Ainsi, dans le cadre d’un reportage télévisé sur le dopage des cyclistes professionnels, la Cour de cassation a estimé que la diffusion d’une photographie prise à l’arrivée d’une course hippique, et représentant deux coureurs cyclistes mis en examen aux côtés d’un couple entraînant leurs chevaux, ne suffisait pas établir un lien entre la présence des entraîneurs et l’événement d’actualité présenté à l’antenne.
Dès lors, la diffusion de cette photo nécessitait l’accord préalable des entraîneurs. A défaut, celle-ci a porté atteinte à leur droit au respect de leur image, « sans qu’il y ait lieu de s’expliquer davantage sur la nature du préjudice qui en est résulté » (1) .
Sauf accord préalable des personnes photographiées, le droit à l’information suppose donc la diffusion de photos ayant un rapport direct avec l’actualité traitée.
De plus, si le droit à l’information prime sur le droit à l’image et l’atteinte à la vie privée, il ne doit pas porter atteinte à la dignité humaine. Telle fut la position de la Cour de cassation faisant droit à la demande d’interdiction de diffuser la photographie représentant distinctement le corps et le visage du préfet Erignac gisant sur la chaussée (2), ainsi que celle de François Mitterrand sur son lit de mort (3).
Le droit à l’image des personnes publiques
Les personnes publiques, vedettes du monde du spectacle, journalistes ou présentateurs télé, hommes et femmes politiques, ne peuvent s’opposer à la diffusion de leur image prise dans le cadre de l’exercice de leur vie professionnelle.
Néanmoins, les personnages publics ont également droit au respect de leur vie privée, même si cette dernière se trouve considérablement réduite. En l’absence de règle générale définissant la limite entre la sphère publique et privée, c’est la notion de droit à l’information qui détermine le droit de diffuser l’image d’une personnalité sans son autorisation.
L’information relatée par l’image doit alors présenter un caractère particulièrement utile et être justifiée par des faits d’actualité.
La jurisprudence est particulièrement attentive au respect de ce critère d’appréciation. Ainsi, même en cas de médiatisation de la vie personnelle et familiale d’une personnalité politique, les tribunaux considèrent qu’il n’y a pas de renonciation au droit à la vie privée. C’est sur ce principe que le Tribunal de grande instance de Paris a considéré qu’une photographie d’un (ancien) couple politique pris au cours de leurs vacances, sans leur autorisation, ne pouvait légitimement illustrer leurs activités politiques et publiques et portait donc atteinte à leur vie privée (4).
C’est également en toute logique que la compagnie low-cost Ryanair a été condamnée pour avoir diffusé une photographie représentant M. Sarkozy et Mme Carla Bruni, accompagnée de la mention : « Avec Ryanair, toute ma famille peut venir assister à mon mariage » (5).
En revanche, le public est en droit de connaître tout ce qui dans la vie privée d’un homme ou d’une femme politique « peut apparaître comme la confirmation ou le démenti de ladite vie publique » (6) .
Nicolas Samarcq Juriste TIC www.lexagone.fr
(1) Cour de cassation, 30 juin 2004.
(2) Cour de cassation, 20 décembre 2000.
(3) Cour de cassation 20 octobre 1998.
(4) TGI Paris, 22 octobre 2007.
(5) TGI de Paris, 5 février 2008.
(6) R. Lindon, Dalloz, 1974, p. 697.
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