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Accueil du site > Actualités > Politique > La première des priorités : réformer l’université

La première des priorités : réformer l’université

La réforme de l’université est dans toutes les bouches à l’occasion de cette pré-campagne électorale, reste à savoir quelles sont les mesures concrètes à adopter. Dans ce domaine, comme dans tant d’autres, les mots ne suffisent pas.

Dans son dernier livre, Daniel Cohen - abondamment cité sur ce blog - décrit le modèle français comme résultant de la contradiction entre deux systèmes de valeurs, cléricales et aristocratiques. D’un côté, la République prône l’égalité de tous (qui renvoie à l’égalité devant Dieu) mais en même temps, elle fait l’éloge de la noblesse des conduites. D’ailleurs, dès la Révolution française, le nouveau régime abolit les privilèges et institue en même temps l’Ecole polytechnique et l’Ecole normale supérieure, c’est-à-dire qu’il crée une nouvelle aristocratie fondée sur le mérite et les compétences.

Le système français de l’enseignement supérieur semble l’héritier direct de l’opposition entre ces deux systèmes de valeurs. Les valeurs cléricales sont pour l’université qui ne fait pas de sélection à l’entrée et qui ne demande pas de droits d’inscription très élevés, et les valeurs aristocratiques pour les grandes écoles qui font au contraire de la sélection leur pierre angulaire et qui cherchent à pousser les élèves au maximum de leurs capacités. On voit que cette répartition des tâches ne se fait pas du tout à l’avantage de l’université, qui devient un choix par défaut pour beaucoup d’étudiants.

Le problème, c’est que dans la société mondialisée fondée sur la connaissance qui est la nôtre aujourd’hui, l’université est devenue un élément central, c’est l’institution qui prépare l’avenir et la croissance d’un pays. Or les universités françaises vont mal, comme le montre par exemple le classement de Shangaï. Certes, cet instrument de mesure est très imparfait, il surestime le poids des prix Nobel et fait la part belle aux « grosses » universités, il n’empêche qu’il indique un décrochage indiscutable de la France dans ce domaine. Plus grave : des dizaines de milliers d’étudiants entrent chaque année dans des filières bouchées et sans perspective, ce qui constitue un immense gâchis humain.

En France, dès qu’il y a un problème, on réclame - souvent à tort - plus de moyens. L’enseignement supérieur est l’un des rares domaines où cette « réclamation » me paraisse juste : notre pays dépense moins par étudiant que la moyenne des pays de l’OCDE, il est même certainement le seul au monde où l’Etat dépense plus par an pour former un lycéen que pour un étudiant. Cela ouvre le problème du financement des universités et notamment la question des frais de scolarité. Il est normal, dans une société fondée sur la connaissance, de payer pour former son capital humain qui sera réinvesti tout au long de sa vie professionnelle. C’est ainsi que l’Angleterre développe un système de prêts garantis par l’Etat pour les étudiants qui s’endettent pendant leurs études et qu’ils remboursent une fois qu’ils ont un emploi. Pour éviter que la question des frais de scolarité n’augmente encore la ségrégation sociale que nous connaissons déjà, il faut mettre en place un véritable système de bourses, basées sur le mérite et qui ne se limitent pas aux frais de scolarité mais prennent également en compte l’hébergement et la nourriture.

Il faut surtout aller vers une plus grande autonomie financière des universités - comme le réclame Yannick Vallée - pour permettre à un président d’université de développer des filières avec l’aide d’entreprises. Il faut cesser d’ériger une barrière imperméable entre le monde de l’enseignement supérieur et celui de l’entreprise, il s’agit là de conceptions idéologiques éculés. Les lignes semblent bouger, puisque certains socialistes comme Dominique Strauss-Kahn semblent prêts à s’engager dans cette voie. Cette question rejoint celle, plus vaste, de la gouvernance et de l’autonomie des universités. Aujourd’hui celles-ci sont gérées par des sortes de comités d’entreprise très disparates, en place d’un véritable conseil d’administration. Les universités doivent être capables de se diversifer et de se spécialiser, sans que chaque ville ait sa propre université généraliste. Contrairement à l’enseignement général qui doit être le même pour tous (en tout cas dans chaque filière), l’enseignement supérieur doit être concurrentiel, et proposer des projets éducatifs originaux. Voilà un vrai débat, qui s’oppose au faux débat de la carte scolaire et de la compétition entre les collèges et les lycées.

Enfin, il reste un vieux serpent de mer : la sélection des étudiants. Certains y sont favorables, comme le président de la Sorbonne Jean-Robert Pitte, tandis que les syndicats étudiants y sont farouchement opposés, au nom de la liberté de choix. La solution retenue par l’actuel ministre de la Recherche, faire une présélection au mois de février précédent le bac, me paraît aller dans la bonne voie. Chaque élève aura droit à une réponse personnalisée qui pourra l’aider à faire ses choix. Il faut en effet lutter contre les asymétries d’informations dans le système éducatif français, qui sont souvent plus déterminantes que les inégalités sociales.

Il y a plusieurs raisons, malgré ce constat apocalyptique, d’être optimiste. Tout d’abord, la campagne éléctorale prochaine permet de traiter toutes les questions et donnera au pouvoir politique fraîchement élu une forte légitimité pour réformer et pour agir. Ensuite, il existe un assez grand consensus sur les modifications à apporter au système actuel chez les économistes, les profs et les présidents d’université et les politiques. Enfin, il y a un effet bénéfique paradoxal du classement de Shangaï, et surtout de sa publicité : réformer les universités devient possible car pour les Français, cela « ne peut pas être pire ». Ainsi, beaucoup de sujets en débat actuellement (autonomie, sélection, liens avec l’entreprise...) n’auraient même pas pu être évoqués il y a quelques années. Signe que les mentalités évoluent.

Retrouvez cet article et bien d’autres sur mon blog : ViveVive la République !


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44 réactions à cet article    


  • Bill Bill 5 décembre 2006 11:38

    Bravo ! Oui, ce problème est essentiel ! A mon sens il faut créer des concours à tous les stades scolaires, dès la primaire avec des bourses pour les élèves les plus méritants, ce n’est qu’ainsi que nous aurons à nouveau, comme par le passé, les meilleures écoles.

    Bill


    • (---.---.27.211) 5 décembre 2006 13:11

      Moi je veux bien donner plus de l’argent à l’université si elle sélectionne plus. C’est donnant-donnant : Je te donne de l’argent mais tu me vires tes branleurs. smiley


    • Marie Pierre (---.---.163.211) 5 décembre 2006 15:45

      Bill, vous plaisantez ?

      Concours dès le primaire ! Lorsque j’étais en primaire, il y avait l’examen d’entrée en 6°. Seuls quelques élèves accédaient au lycée. Les autres passaient le certificat d’études ou allaient dans les CET (collèges techniques). Pour eux, il est très difficile aujourd’hui de se reconvertir. Il leur manque les bases essentielles. Le problème existe aujourd’hui en Allemagne, qui constate que les jeunes envoyés très tôt en apprentissage ont des manques énormes.

      Donc, au final, effectivement il pouvait y avoir des classes d’élites. Et ce que vous nommez meilleures écoles sont plus nombreuses aujourd’hui que par le passé.

      Les bourses pour les plus méritants existaient déjà (lisez l’autobiographie de Camus, c’est ainsi qu’il a pu accéder au supérieur)


    • Bill Bill 5 décembre 2006 15:54

      @ Marie-Pierre

      Oui, un concours pour aller en sixième. Mais je suis parfaitement d’accord avec vous sur le fait qu’on ne change pas assez facilement de mêtier et de formation ! Ceci dit j’ai un ami d’enfance qui est mécanicien et qui adore son travail, tandis qu’avant de rentrer dans son CAP il s’ennuyait à mourir à l’école classique ! Ensuite il a passé un brevet de maitrise dans sa branche, mais n’a pas voulu aller plus loin... Et je trouve que dans les CAP et autre BEP, les bourses devraient aussi exister !

      Mais oui, il serait souhaitable de pouvoir évoluer sans être en permanence enfermé dans un diplome ou dans une profession, entièrement d’accord !

      Bill


    • (---.---.30.7) 5 décembre 2006 19:21

      l’université selectionne beaucoup plus que vous croyez, elle le fait sur l’échec (1 étudiant sur 2 passe en 2ème année et ainsi de suite....)


    • vincponcet (---.---.133.64) 5 décembre 2006 12:05

      La question du financement des universités est un pb, il est vrai. Elles sont très peu dotée, mais en même temps, elles sont enfermées dans un statut qui les brident dans la possibilité de trouver des sources de financement alternatif. Les grandes écoles et universités du monde ont des partenariats de recherche très fort avec de nombreuses entreprises, cela contribue énormément à la viabilité financière de l’établissement, à la richesse de l’enseignement et aussi, l’assurance que les choses enseignées ont un quelconque rapport avec le monde du travail, parce que le but ultime est quand même de faire en sorte que les élèves deviennent des citoyens qui apportent leur pierre à l’édifice de la société humaine, et donc qu’ils soient aussi utiles aux autres.

      Sur ce point, il est donc urgent de faire en sorte que les universités puissent devenir des organismes autonomes avec une responsabilité réelle du chef d’établissement, tout en ne touchant pas au financement public. Et pour celà, il n’y a qu’une seule solution : la subvention non plus à l’établissement, mais la subvention à l’élève, qui choisira dans quel établissement il voudra suivre ses études. De cette façon, nous aurons concurrence entre les écoles, amélioration générale de l’adéquation des écoles avec les besoins des étudiants et des entreprises, rupture de la bureaucratie qui bride les initiatives, et donc au final des formations qui conduisent à un emploi, une carrière et non plus au chômage comme aujourd’hui.

      On appelle cela le chèque éducation, la subvention de l’élève et non plus de l’établissement.

      pour plus d’informations : http://www.liberte-cherie.com/a2453-Education.html


      • toto (---.---.17.117) 5 décembre 2006 13:04

        une petite précision sur le fonctionnement de polytechnique et de normale sup :

        les concours d’entrée dans ces 2 écoles sont gratuits. Ils comportent une phase écrite et une phase orale. La partie écrite est anonyme, et dans la partie orale le jury ne se préoccupe pas du tout de l’origine des gens.

        Faire une classe prépa ne coûte pas cher : par exemple les frais de scolarité à Louis le Grand sont de l’ordre de 1000 euros, plus l’internat. Pour entrer dans une bonne classe prépa, il suffit d’avoir des bonnes notes au lycée.

        Quand on est entré à polytechnique ou à normale sup, on ne paye pas de frais de scolarité parce qu’au contraire on est payé.

        Conclusion : tout le monde peut entrer à polytechnique ou normale sup, puisque le concours est parfaitement équitable et que les études dans l’école sont gratuites (on est payé), le coût financier de la classe prépa étant faible.


        • (---.---.30.7) 5 décembre 2006 19:23

          1000 euros de frais de scolarité pas cher !!! mais dans quel monde vivez vous ? je rappelle que 1000 euros c’est l’équivalent d’un mois de salaire pour un smicard !!


        • toto (---.---.148.128) 5 décembre 2006 19:42

          pas cher par rapport aux frais de scolarité des écoles de commerce par exemple. je parle de 1000 euros par an.


        • deltarho (---.---.197.6) 6 décembre 2006 07:51

          Humm ! Humm ! Il me semble que vous occulter beaucoup de choses dont la « cote d’amour » et son coefficient !


        • deltarho (---.---.197.6) 6 décembre 2006 08:06

          lire : vous occultez !


        • (---.---.121.76) 6 décembre 2006 09:39

          quand j’était etudiant , je donnais des cours particuliers au lycéens : 2 heures de cours par semaine ( a 15 euros de l’heure ) et les 1000 euros sont la en une année.


        • Vive la République Vive la République 5 décembre 2006 13:07

          Etant moi même issu de milieu modeste et élève à l’Ecole Polytechnique, je confirme ce qui vient d’être dit. Cela étant, il reste beaucoup à faire pour rendre ce concours vraiment « équitable », il y a des asymétries d’informations et un avantage comparatif pour les prépas parisiennes, surtout en ce qui concerne l’oral.


          • Bernard Dugué Bernard Dugué 5 décembre 2006 14:47

            Autant que je me souvienne, en prépa, on effectuait 40 heures de présence au bahut, sur une année qui commençait avec les scolaires et finissait avec les scolaire (excepté en 3/2, pour cause d’écrits)

            Je me suis amusé à un petit calcul pour un étudiant de Deug, avec 15 à 18 heures de cours, une année qui commence en octobre et se finit fin mai. On arrive à ce résultat, deux ans de prépa équivaut, en moyens éducatifs, à cinq ans de fac. Si la situation était présentée avec ce chiffrage, et bien relayée, cela ferait scandale dans l’opinion

            Pour ma part, je plaide pour ne pas mégoter, la jeunesse et l’instruction supérieure mérite qu’on laisse de côté l’efficacité à tout prix. Augmentation du budget du supérieur, de la recherche, et réduction de celui de l’armée. Et surtout, augmentation du nombre de professeurs, pour plus de temps consacré aux étudiants


            • meta-babar (---.---.70.249) 5 décembre 2006 15:30

              Vous etes mal renseigné, quand j’étais en deug (il y a 6-7 ans), on avait 30 heures de cours par semaine, on commençait en septembre (les facs de science ne commencent pas en octobre, on l’oublie trop souvent) et on finissait en juin. Ca fait déjà moins de différence.


            • Marie Pierre (---.---.163.211) 5 décembre 2006 15:48

              Réduction du budget de l’armée : réduction drastique ! Les pays qui ne consacrent qu’une très faible part à ce poste sont ceux qui offrent le plus à leurs élèves et étudiants.


            • Bernard Dugué Bernard Dugué 5 décembre 2006 15:53

              @ Babar,

              Effectivement, en science c’est plus que ce que j’ai chiffré, me basant sur la socio et ses 18 - 20 heures. Cela dit, la disparité est bien réelle, ne serait-ce que par le coût d’un étudiants, moins qu’un lycéen et ça, c’est plus parlant. Pour le reste, je suis pessimiste sur une attitude bienveillante des politiques vis-à-vis de la fac.


            • gem gem 5 décembre 2006 16:17

              Et tu peux rajouter que les prépas perdent très peu de gens en route, comparativement aux premières années de fac.

              Bref : la prépa ça coute beaucoup plus cher à la collectivité sur un an, mais comme l’élève apprend aussi beaucoup plus, que les frais annexes sont comprimés (seulement 2-3 ans de logement etc.) et que le temps c’est aussi de l’argent, finalement, c’est un système bien le plus économique pour la collectivité que la fac.

              Revers de la médaille, dont il faut quand même parler : en prépa on reste essentiellement lycéen, pas encore dans la « vraie vie », ce qui peut donner a priori un avantage en terme de formation (sur le plan humain) aux étudiants de fac.


            • francparler (---.---.95.123) 12 décembre 2006 10:36

              réduire le budget des armées ! souvenons nous de ce qu’ont fait nos socialistes en 1936 avec le résultat qui s’en est suivi.


            • (---.---.192.187) 5 décembre 2006 15:25

              Je sui personnellement assez pour la sélection, cependant il faut avoir un outil de sélection fiable... or on en est très très loin.

              J’ai connu des gars qui s’étaient fait boulé des grandes écoles et qui maintenant sont des scientifiques reconnus et respectés. Je connais également beaucoup de Normalien qui n’ont pas vraiment un très haut niveau de réflexion scientifique (par contre ce sont de bons ingénieurs). Bref sélectionné c’est bien, mais sur quelles bases ?

              La réussite au bac ? smiley Un concours à la con qui se basera sur du par coeur sans réflexion comme c’est souvent le cas ?

              Enfin il faut quand même se souvenir qu’un certain Albert Einstein a fait des études pas loin d’être mauvaises à l’Université... pas simple tout ça


              • gem gem 5 décembre 2006 16:47

                Je ne crois pas utile de compliquer le problème avec des exceptions qui existeront toujours : le système ne sera jamais parfait, il y aura toujours des gens qui ne seront pas à leur place et d’autres qui seront rejetés à tord. De ce point de vue la diversité prépa/fac (+ Arts et métiers, CNED, apprentissage, etc.) est plutôt positive


              • Hume Hume 5 décembre 2006 20:04

                Je ne suis pas sur que l’on parle d’execptions mais d’un vrai probleme provenant du fait que le systeme educatif au lycee et dans le superieur est totalement different.

                J’entends encore mes profs de lycee dire il y a une dizaine d’annee : « si vous avez actuellement 14 de moyenne, vous passerez a 10 a la fac »... veridique !! les vrais rois de la soustraction.

                Or le systeme est tellement different que de nombreuses personnes, ne serait-ce que dans mon entourage, qui ont eu le bac de justesse, on explosait a la fac et on fait des cursus brillants. Et j’ai egalement vu l’inverse chez certains qui manquaient de maturite et avaient besoins d’un « cadre »

                Non je pense egalement que la selection est necessaire mais tache ardue de la mettre en place de facon pertinente.

                Egalement, je pense que si rien n’a etait fait, c’est que les gouvernements successifs s’arrangent bien de cette situation. PLus d’etudiants, c’est moins de chomeurs... on a la un magnifique systeme tampon et qui ne coute pas trop cher en plus... Les Facultes elles font avec puisque, plus il y a d’inscrits, plus l’argent allouee par l’Etat augmente...


              • Gnole (---.---.192.187) 5 décembre 2006 21:44

                Oui hume, je voulais bien parler de ce problème d’adaptation (sans doute maladroitement). J’ai comme principale exemple les fac de science (pour en avoir arrpenter pas mal) et les élèves brillant en fac ne sont pas (ou alors rarement) les élèves brillant au Lycée.

                L’histoire du 14 —> 10 est entièrement vrai (personnellement j’ai eut la chance d’avoir l’inverse :).

                C’est très difficile de savoir à la sortie du Lycée qui sera bon en Fac et qui ne le sera pas... en tous cas ça ne peux pas se faire uniquement sur les résultats scolaires car les modalités d’apprentissage et d’interrogation sont complètement différents dans les deux systèmes.

                C’est aussi vrai pour les prépa... certains ne supportent pas le système de prépa (qui touche plus à du lavage de cerveau dans certaines disciplines qu’à de l’éducation).

                Bref même si ça peux paraitre trivial, la question des modalités de sélection à l’entrée de la Fac sont très loin de l’être !


              • Hume Hume 5 décembre 2006 22:22

                A gnole,

                Non c’est moi qui me suis mal exprime !! Je suis tout a fait d’accord avec toi !


              • Hume Hume 5 décembre 2006 22:26

                En fait c’etait juste pour appuyer ton commentaire par rapport a celui de Gem.


              • JeretourneMaVesteToujoursDuBonCôté (---.---.153.98) 5 décembre 2006 17:55

                « Il faut travailler pour avoir un emploi, puis bien bosser pour le garder ou en trouver un autre. Cela ne s’appelle pas la sélection naturelle, mais l’exclusion compétitive. La Nature nous a appris que seuls ceux qui savent s’adapter réussissent et perdurent. »

                Eh oui, il y va de la survie de l’espèce. Au temps des cavernes, il fallait chasser le mammouth pour passer l’hiver. À l’âge de la mondialisation, il faut ramer au jour le jour pour ne pas crever de faim. « Relever le défi », c’est admettre que la voracité économique est un phénomène aussi naturel que la météo des plages.

                La faute à qui si le soleil ne brille que pour les gros et s’il appartient aux pauvres de leur éponger le front ? Au demeurant, l’injonction faite à ceux-ci de s’adapter à ceux-là ne date pas d’hier. 20 ans déjà que médias et politiques martèlent à l’unisson les vertus du darwinisme social.

                Réussir ou mourir, être précaire ou ne pas être. Il y a tout juste un an, la sénatrice PS de la Seine-et-Marne, Nicole Bricq, plaidait pour « l’adaptation des travailleurs » aux « mutations de l’économie ». C’était à l’occasion non pas du CPE mais du référendum sur la Constitution européenne.

                ...Indémodable, le vieux tube du marche-ou-crève se remixe à chaque saison.


                • Voltaire Voltaire 5 décembre 2006 21:22

                  La réforme de l’Université est en France un vieux serpent de mer, auquel il faudra pourtant un jour bien s’attaquer. Mais les problèmes sont multiples.

                  Pour commencer, il faut se rappeller que l’université a dû absorber en une quinzaine d’années un doublement des effectifs (voire plus dans certaines matières), et ce sans augmentation proportionnelle de son budget. Le bilan n’est donc pas si mauvais...

                  Il faut ensuite reconnaitre que la professionalisation des études a progressé (notamment avec le système LMD), même s’il reste des efforts à faire.

                  Enfin, il faut se rappeler que l’université a une double mission : formation et recherche, et que la reconnaissance du travail d’enseignement n’existe pas (et je ne parle pas des salaires).

                  Quels sont donc les principaux défis et solutions possibles :

                  - donner une visiblilité et une atractivité suffisante aux universités française. Elles sont actuellement éclatées sur le territoire, chaque région, voire département, voulant avoir la sienne. S’il faut reconnaitre la nécessité d’aménagement du terrtoire et d’égalité entre ceux-ci, il faut admettre qu’avoir 50 universités de bon niveau est impossible. La solution passe donc par un regroupement, même si l’on peut parfaitement admettre l’existence d’annexes spécialisées dans des villes moyennes. Regroupement donc, et spécialisation pour les centres les plus petits. Mais cela implique aussi la construction de logements étudiants, si l’on veut que ceux-ci soient plus mobiles.

                  - donner une véritable autonomie de gestion aux universités. Actuellement, bien que prévue dans la loi, celle-ci est quasi nulle, en raison de divers blocages. Il faut redonner aux conseils d’administration la liberté de disposer de leur foncier, de recrutement des enseignants etc..., tout en garantissant l’égalité des cursus et des diplômes (une licence obtenue à Bordeaux doit être équivalente en niveau à celle de Paris VI).

                  - le problème de la sélection est un faux problème. Comme certains l’ont indiqué, elle existe, mais est répartie au cours du cursus. Le problème principal est le manque d’information et d’orientation des étudiants. Le travail à l’université exige une autonomie que tous n’ont pas à 18 ans, mais il est aussi ridicule de penser que l’on doit être le meilleurs à 18 ans et que l’on ne puisse pas se révéler plus tard (pour information, je ne serais sans doute jamais entré dans la filière de mon choix après le bac s’il y avait eu séléction, d’autant que j’étais resté 1 mois à l’hosto l’année du bac, et pourtant j’ai ensuite réussi la fac jusqu’au doctorat, puis en recherche, dans le domaine que j’aimais...). Par contre l’information manque. Bayrou avait institué un semestre d’orientation, qui malheureusement est ensuite passé à la trappe. C’était une excellente idée, et plusieurs exemples étrangers montrent l’intérêt de ce type de première année d’orientation, de même que de permettre à certains de se réorienter plus tard (on ne fait pas toujours le bon choix à 18 ans...). Mais effectivement, la nouvelle formule d’orientation pendant l’année du bac est bonne.

                  - Enfin, il faut revoir l’équipement des université (qui est souvent insuffisant) et les salaires de départ des enseignants-chercheurs.

                  Tout cela demande des moyens supplémentaires. Une partie doit venir de la dotation de l’Etat, mais il ne serait pas anormal, une fois que les réformes ont été entreprises, et donc la qualité de l’enseignement améliorée, de faire payer plus les étudiants (car il s’agit bien là d’un investissement pour l’avenir de leur part). Mais cela implique ici aussi diverses mesures : plus de bourses, mieux dotées, des prêts à taux zéro, et encore une fois, des logements en plus grand nombre.

                  Vaste chantier, mais indispensable car de là dépend la compétitivité de notre pays.

                  J’ajoute un mot du rapprochement avec les grandes écoles. Celui-ci est nécessaire, et se fait progressivement, car ces dernières ont aussi compris qu’elles étaient trop éclatées et donc peu visibles. C’est un peu l’objectif des pôle de compétitivités et autres réseaux thématique de recherche que de fédérer les différents établissements. Il est important que l’Etat ne force pas la chose, mais plutôt offre des incitations financières aux meilleurs dossiers de rapprochement en fonction de critères de qualité clairement définis.


                  • Sylvain Poirier Sylvain Poirier 5 décembre 2006 22:51

                    « il existe un assez grand consensus sur les modifications à apporter au système actuel chez les économistes, les profs et les présidents d’université et les politiques. »

                    Pourrait-on avoir un lien vers un exposé du contenu de ce consensus ?

                    Pour alimenter le débat sur les problèmes de l’enseignement supérieur, voici quelques avis qui se trouvent sur mon site :

                    Celui d’un étudiant en physique à Paris 6

                    Le mien, sur le problème des classes prépa comme voie d’accès à Normale Sup

                    - La solution que je propose dans mon programme politique (eh oui je vous rappelle ma candidature) : filmer tous les cours et diffuser sur le web toutes les vidéos ainsi que les documents associés, afin que chacun soit libre de s’instruire de chez lui en sélectionnant les meilleurs cours sur les sujets qui l’intéressent, pour combiner liberté d’innovation et recherche de l’excellence par les professeurs enfin pleinement libres d’initier des approches originales, égalité des chances dans l’accès aux cours les plus excellents (même ceux qui sont le fait d’un seul professeur dans tout le pays), gratuité (ou quasi-gratuité) de l’accès au savoir pour les étudiants (du moins pour la partie cours), diminution de l’usage des transports et des émissions de CO2 qui en résultent, réduction des coûts pour les contribuables, et aide au développement du tiers-monde francophone qui pourra user de chez eux de ces mêmes cours sans coût supplémentaire.


                    • Asp Explorer Asp Explorer 5 décembre 2006 22:52

                      Oui, c’est la priorité des priorités ! Le chômage de masse, le système de santé qui se déglingue, l’effondrement du pouvoir d’achat des classes moyennes, les difficultés à se loger qui commencent à toucher jusqu’aux classes aisées, la précarisation du travail, la jeunesse des banlieues au bord de l’insurrection armée, la défiance envers la démocratie, la corruption, tout ça c’est un peu grave. Mais ce qui est vraiment prioritaire, c’est LA REFORME DE L’UNIVERSITE !

                      Ah, mais voilà une noble cause. Et si on organisait une quête dans nos pays amis d’Afrique francophone, pour qu’ils envoient quelques subsides à nos universités ?

                      Et au passage, si certains rédacteurs d’Agoravox se mettaient dans le crâne qu’il existe des vrais gens avec une vraie vie et de vrais boulots en dehors du petit cercle de leur cocon universitaire ? Est-ce que ça ne serait pas une grande et salutaire réforme, qui ne coûterait rien et aurait des effets immédiatement visibles ?


                      • Hume Hume 6 décembre 2006 00:46

                        bravo pour l’irreflexion !!

                        Ca vous dit quelque chose l’importance de l’education pour la force d’un pays, l’innovation. etc... ?

                        « un vraie vie, de vrais boulots »... Pov’ naze ! Tu crois qu’on ne connait rien a la « vraie » vie ?

                        Mon pere est ouvrier (et quand on parle d’augmenter l’age de la retraite « globelement », ca me fait hurler pour lui). J’ai bosse pendant mes etudes, manutention surtout et meme quand je sortais le WE je me leve tot le dimanche pour bosser mes cours. J’ai investi 8 ans post-bac et j’ai un vrai boulot ou je fais bien plus de 35h, mais je ne m’em plaint pas parce que c’est ce que j’aime. Mais ca a demande des sacrifices.

                        Alors reviens jouer quand tu seras de quoi tu parles !


                      • Asp Explorer Asp Explorer 6 décembre 2006 07:29

                        Oui oui, bien sûr... Eh bien mon sentiment, c’est que l’université n’a pas besoin d’être réformée car globalement elle ne sert pas à grand chose d’autre qu’à payer le salaire des profs (j’ai assez fréquenté pour m’en apercevoir), et qu’en outre, toute réforme est politiquement impossible. Il existe dans ce pays des vrais problèmes, qui ont de vraies solutions, et il me semble autrement plus urgent de s’y atteler.


                      • Hume Hume 6 décembre 2006 16:44

                        Ce n’est pas LE probleme mais un probleme parmi d’autre.

                        Si vous pensez que l’Universite « ne sert qu’a payer les profs » c’est que vous n’avez pas du la frequenter correctement ! Et peut-etre que justement il faut plus d’argent pour investir plus pour les etudiants (pas evident d’organiser des TPs de Physiologie quand tu n’as pas de moyens, on s’organisait avec mon labo et on faisait tout au systeme D).

                        A votre avis il reste quoi a la France pour exister sur la scene internationale ?

                        a) L’Armee ? b) L’innovation (= brevet) ? c) Connaissance de la politique internationale (par exemple, contrairement a Bush, Chirac savait qu’il y avait des Chiites et des Sunnites en Irak...) ?

                        Vous pouvez cocher plusieurs choix.


                      • Asp Explorer Asp Explorer 6 décembre 2006 20:39

                        Effectivement, j’y ai passé des années à poursuivre un diplôme de chômeur qui m’a brillamment permis de rester un an à l’ANPE avant de trouver un boulot (un bon boulot d’ailleurs) dans un secteur d’activité qui n’avait STRICTEMENT RIEN A VOIR avec le sujet de mes études.

                        Et là vous allez me dire « oui mais t’avais qu’à te renseigner avant, ducon ». Eh oui, mais avec un CDI ouvert tous premiers jeudis pairs du mois entre 15h35 et 15h50, et quand on n’a pas des parents profs, c’est pas facile de savoir que la filière que vous suivez est une voie de garage (c’était avant internet tout ça). Et vous pouvez autant compter sur les conseils des profs eux-mêmes que sur les conseils d’un banquier quand vous voulez placer de l’argent. Ah oui, mais grace à mon dévouement, j’ai permis à de doctes professeurs d’université de justifier leur salaire, de faire tourner leurs labos improductifs, de flatter leur ego.


                      • Hume Hume 6 décembre 2006 21:40

                        D’ou la necessite d’une reforme... Non ?


                      • Hume Hume 6 décembre 2006 23:06

                        Au fait,

                        Quant aux problemes d’orientation, je suis tout a fait d’accord. Et il faut egalement redefinir les missions de l’Universite (savoir ? insertion professionnelle ? etc...)

                        Mais sur les profs et les labos improductifs... je comprends votre ressentissement mais je ne suis absolument pas d’accord !

                        L’enseignement ne permet pas de faire tourner les labos puisque la masse de cours + correction (en Science du moins) absorbe une bonne partie du temps des maitres de conf et des profs (moins pour eux c’est vrai mais ils ont d’autres responsabilites).

                        Ce qui rend... les labos moins productifs... mais pas « improductif ». A part l"angleterre (mais le systeme est vraiment different a pas tout a fait comparable), je ne vois pas de pays avec cette place dans la recherche (on est encore pas trop mal place) et une aussi grande dispersion des moyens.


                      • Asp Explorer Asp Explorer 6 décembre 2006 23:18

                        Vu, quand je travaillais dans un labo :

                        - Une thésarde qui perdait son temps à poursuivre des recherches sur un process bien connu pour être parfaitement impossible.

                        - Un chef de labo qui sortait une excellente présentation à chaque colloque. Malheureusement, c’était toujours la même.

                        - Un maître-assitant très passionné par ce qu’il faisait... en dehors du labo (il passait son temps à gérer son club de rugby et à pistonner ses poulains). Par contre, en un an, je ne l’ai vu qu’une seule fois mettre une blouse pour manipuler.

                        - Je passe sur le bal des lèche-culteries pour gagner tel ou tel petit avantage, c’est tellement commun que c’en est trivial.

                        - Une technicienne de labo traitée comme une sous-merde, mais bon, elle a signé, c’est pour en chier.

                        - Ah, et il y avait un gars qui faisait du bon boulot. Bon, c’était un peu le professeur Tournesol, mais il avançait, il fouinait, il était curieux, il explorait de vrais champs de recherche. Devinez qui était le plus mal noté du labo ?


                      • Hume Hume 7 décembre 2006 00:19

                        Je n’y peux rien si vous avez eu une sale experience !

                        Moi aussi j’ai (et je croise encore, meme aux USs) des glandus. Mais je croise egalement des gars qui bossent comme des malades, passionnes par leur(s) sujet(s) de recherche et par l’enseignement.

                        Je vous trouve un peu vache de denigrer cette profession (oui oui c’est un vrai job ou il faut se lever et/ou se coucher tard...).


                      • Hume Hume 7 décembre 2006 00:20

                        J’ai « croise » des glandus bien entendus. Desole pour l’oubli...


                      • armand (---.---.189.187) 7 décembre 2006 00:51

                        Alors faudrait-il donner quelques exemples concrets ? Prof de fac (donc enseignement puis recherche, et notamment suivi de mémoires de Master, de thèses de doctorat, de participation aux jurys de thèse ou de concours-où le sort professionnel de trente ans à venir des candidats est entre tes mains)j’ai calculé depuis cette rentrée que je consacrais en moyenne dix à douze heures par jour à mon métier, avec, de temps en temps, un jour où je souffle. Mais j’aime ce que je fais, et je ne l’échangerais contre aucun autre(ayant taté de boulots divers et variés depuis instructeur d’arts martiaux jusqu’à traducteur free-lance).Même si les salaires sont approximativement la moitié, voire le tiers, de ce qu’ils sont aux USA ou en GB. Dans bien des cas l’implication des étudiants est galvanisante, surtout quand on travaille dans une province qui est loin d’être riche et boboisée (Pas de Calais).Sans parler des réelles affinités qu’on peut découvrir avec des collègues.

                        Mais je constate aussi que beaucoup d’étudiants inscrits sont constamment absents (l’assiduité aux cours n’est pas obligatoire), qu’on boude les cours de remplacement (j’ai voulu remplacer trois heures de cours qui étaient tombés le 1er novembre - et bien pas un étudiant ne s’est pointé ; ils avaient, paraît-il, autre chose à faire). Et certaines mesures, comme la compensation des notes (un 15 en tennis compense un 5 en anglais, par ex.)fait qu’on peut trouver en Master des étudiants qui n’ont jamais maîtrisé l’essentiel.

                        Pour résumer, l’université a été créé pour des gentlemen-escholiers, autonomes, sachant organiser leur temps, et plus intéressés par le contenu des cours que par la dernière mode chez Pimkie, les lauréates de la Star’Ac, ou le dernier CD de Joey Starr. Il faudrait nettement plus de contraintes - présence obligatoire, sauf motif professionnel ou médical - abandon du recours systématique à des examens de rattrapage (une spécificité bien française). Notes qui cessent d’être des abstractions compensables mais qui indiquent si oui ou non on a assimilé le minimum requis d’un cours. En procédant ainsi on peut faire l’économie d’une sélection draconienne à l’entrée.

                        L’université n’est que le reflet d’une crise générale de la culture et de sa transmission.


                        • ZEN zen 7 décembre 2006 07:58

                          @Armand

                          Merci pour cet éclairage lucide et assez consternant

                          Le Pas-de-calais n’est pas une « province » (j’y habite) smiley


                        • Leonor 7 décembre 2006 13:07

                          Je suis étudiante à Paris, à l’université. Je fais du droit. Et pendant ces « premières » années, j’ai vu « défiler » beaucoup d’étudiants.

                          En première année, nous étions trois groupes d’environ 600 étudiants, si ce n’est plus.

                          En deuxième année, nous n’étions plus que deux groupes d’environ 550 étudiants, si ce n’est moins.

                          Cette année, nous ne sommes plus que 4 groupes. Le nombre d’étudiants par groupe varie de 50 à 200 et quelques en fonction du choix que nous avons fait, c’est-à-dire de l’orientation que nous avons choisie.

                          Je vous laisse faire le calcul et voir combien d’étudiants se sont « perdus » en route pour différentes raisons :
                          - manque de motivation
                          - redoublement
                          - arrêt pur et simple Et j’en passe...

                          Alors, tout d’abord, premier constat :

                          Il y a bien une sélection à l’université. Surtout dans les « meilleures » filières. Je vois déjà les têtes de certains qui liront le mot « meilleures ». Mais c’est là la vérité. A l’université il y a des « bonnes filières » et des mauvaises. Est-ce que cela devrait être ainsi ? Sans doute pas, tout le monde devrait pouvoir aller à l’université, y suivre les cours de son choix, et ne pas avoir la sensation d’être dans une bonne ou une mauvaise filière. Cependant, nous savons aussi dans quel monde nous vivons et ce qui nous attend à la sortie de notre formation : la question essentielle aujourd’hui est : trouverons-nous un travail demain ? Il y a donc, comme je disais, une sélection. Sauf qu’elle est « cachée », taboue. Surtout il ne faut pas parler de sélection car tout de suite les syndicats et autres montent sur leurs grands chevaux... Mais elle existe bel et bien : et elle est plus difficile que dans les pays qui la pratiquent réellement.

                          En France, elle prend la forme sournoise de pièges tendus aux étudiants. Pour reprendre le fameux jeu « Koh Lanta », c’est à peu près la même chose.

                          Nous sommes beaucoup en amphithéâtre,beaucoup trop. Il faut arriver très tôt pour trouver une place ayant une prise à proximité pour ceux d’entre nous qui prennent leurs cours à l’ordinateur. Puis, il faut pouvoir tenir trois, quatre ou cinq heures d’affilée dans un amphithéâtre plein à craquer qui ne dispose pas de tables sur lesquelles nous appuyer.

                          Enfin, nous avons des examens blancs de 20h à 22h après une journée de cours dans des amphithéâtres situés sous les toits, sans fenêtres. Nous avons deux heures pour effectuer notre devoir (alors que c’est trois heures d’habitude)...

                          Dans nos travaux dirigés, nous sommes 60 par classe en début d’année universitaire, puis nous « chutons » à 30 voir 20...parce que nous avons une pression psychologique appuyée par une masse de travail extrêmement importante.

                          Et rien, non rien ne nous est facilité. Nous devons nous battre continuellement : contre l’Administration et sa lenteur, contre les changements inoppinés de salle, de cours, d’horaires, contre les chargés de travaux dirigés qui, parfois, oublient qu’ils sont eux aussi passés par là.

                          Nous nous rendons compte tous les jours du manque de moyens de notre université et des autres universités en France. Nous découvrons tous les jours que nous sommes forts mentalement parce que nous sommes encore là et nous sentons sur nos épaules, tous les jous, le poids de la pression parce que nous savons que nous ne pouvons pas lâcher. Celui qui lâche, on ne le revoit plus. Celui qui abandonne, personne n’ira le chercher.

                          Alors bien sûr, nous ne voulons pas d’une vie facile, nous ne voulons pas que l’on nous « donne » nos diplômes. Mais nous aimerions pouvoir nous épanouir dans nos études, pouvoir en profiter un peu plus et nous intéresser réellement au droit sans avoir à lutter tous les jours pour pouvoir étudier et continuer à occuper notre place sur le banc de notre amphithéâtre.

                          Alors oui, je suis pour une sélection à l’entrée, mais une sélection qui soit « juste » : c’est-à-dire qu’elle prenne en compte les spécificités de chacun, qu’elle permette à ceux qui sont réellement motivés et qui ont envie de travailler de pouvoir le faire. Une sélection qui soit adaptée. Pas quelque chose de mal fait qui laisserait de bons futurs étudiants en dehors du « circuit » des études. Mais je suis pour une sélection qui valorise ceux qui ont toujours travaillé, comme en Espagne où les universités ont fixé une note minimum pour intégrer une université : cette note est l’addition des notes de la 3ème à la terminale et de la note à l’examen final. Ils font une moyenne et cela donne la note de l’élève. C’est un système qui récompense ceux qui travaillent depuis longtemps.

                          De plus, le système des prépas et des grandes écoles, propre à la France, n’est pas un système qui puisse marcher très longtemps encore. Comment continuer à accepter une telle différence alors que nous sommes entrés dans le système LMD ?

                          Est-ce que la France va continuer à former 5% des étudiants (qui sont dans des grandes écoles) de façon élitiste et oublier tous ceux qui se battent tous les jours pour sortir de l’université avec un diplôme ? Et est-ce que nous pourrons accepter encore longtemps le fait d’être la « risée » des autres systèmes qui voient dans le système français un système archaïque et qui a bien besoin d’être dépoussiéré...


                          • armand (---.---.154.233) 9 décembre 2006 11:07

                            Merci Leonor pour ce témoignage - nous ne parlons pas vraiment de la même université. Venez dans le Nord, vous aurez beacoup plus de place dans les amphis et les TD. Mais je reconnais l’extrême pauvreté de moyens et la concurrence injuste des grandes écoles (crées par Napoléon, n’est-ce pas, pour damer le pion à l’Université). Mais votre témoignage mélange un peu de tout : sincèrement,là où j’enseignais avant (une ville moyenne que je ne nommerai pas) mon (relatif) jeune âge faisait que j’étais suffisamment proche de mes étudiants pour voir comment ils travaillaient. Et la plupart était concernés avant tout par les sorties, les beuveries, les petits boulots. Le travail universitaire était bâclé la veille des épreuves. Il est vrai que c’était une ville où le coût de la vie était faible et les familles très proches. Donc, très différentes des métropoles. Pour finir, la remarque sur les prises électriques dans les amphis m’a fait sourire : réapprenez à prendre des notes au stylo : on assimile beaucoup mieux. Et un peu d’autonomie par rapport aux ordis, portables, MP3 etc. ne fait pas de mal.

                            Cordialement


                          • Leonor 11 décembre 2006 16:24

                            Armand,

                            Nous avons certes une vision différente de ce qu’est l’université aujourd’hui et cela montre sans doute l’évolution de celle-ci ainsi que celles des étudiants.

                            J’ai souri en lisant votre remarque sur les prises et sur les notes au stylo. En effet, cela semble tellement irréalisable de prendre des notes au stylo aujourd’hui.... Pour une question de commodité : en effet, dans un amphi où il n’y a pas de tables, j’aimerai voir comment vous tiendriez de 8h du matin à 13h sans pause et en enchaînant les cours sans pouvoir poser votre feuille quelque part et repose un peu vos bras...

                            Ensuite, les échanges de documents, de cours, de notes de doctrine et autres se font d’ordinateur à ordinateur et par e-mail donc qu’elle perte de temps celle de devoir recopier ce que nous voulons envoyer à telle ou telle personne !

                            Enfin, la préparation des TDs se fait de façon beaucoup plus rapide par ordinateur car voyez-vous, en ayant 7 matières par semestre dont 4 avec un TD...vous comprendrez que si nous voulons bien faire, nous devons savoir comment économiser du temps sur les choses inutiles pour nous concentrer sur les choses utiles...

                            Enfin, dans certaines filières, il est impensable de préparer ses examens ou ses travaux dirigés la veille sous peine de ne pas avoir son année...surtout dans les universités où la concurrence est rude...

                            Pour finir, je vous rassure tout de même !!! Les fiches sont encore faites à la main pour assimiler l’essentiel....même si certains commencent à les faire à l’ordinateur.

                            Mais vous comprendrez bien que l’époque du stylo est révolue...et celles des feuilles aussi..même Dalloz met les notes de doctrine et les arrêts sur internet et sur CD ROM maintenant...

                            Cordialement,


                            • zadig (---.---.98.243) 29 janvier 2007 16:19

                              C’est effectivement un problème majeur. Je vous conseille de lire un excellent article publié dans L’avisé sur le site www.lavise.fr

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