Taxe carbone, opinion, bidouillage...
Où allons-nous avec cette taxe apparemment rejetée assez massivement par les français ?
La « Contribution Climat Energie » devenue taxe n’a pas bonne presse, il est depuis quelques temps question de la compenser : reverser son produit aux contributeurs.
Diverses formules ont été envisagées, diverses modalités, du « chèque vert » au crédit d’impôt ou à la diminution de l’impôt sur le revenu, dernière invention de François Fillon, premier ministre.
Ceci afin que la taxe soit indolore aux personnes et ménages disposant d’un faible pouvoir d’achat.
On tâtonne, on « bidouille » sur les modalités de remboursement afin d’amadouer l’opinion : ce n’est pas du travail sérieux !
En d’autres termes cette solution laissera de côté les moins aisés, et elle peut à ce titre être vue comme une véritable traîtrise sociale.
De la même façon on peut qualifier cette taxe de traîtrise environnementale car, nous le savons, il est maintenant urgent de changer fortement nos comportements.
Le réchauffement de certaines zones du globe, l’Arctique en particulier, est d’une rapidité imprévue et a des conséquences aujourd’hui dont on prévoyait il y a quelques années qu’elles pourraient se manifester vers 2030 / 2050.
C’est le cas de l’irruption massive de méthane, puissant gaz à effet de serre, dans l’atmosphère, en provenance des fonds marins ou du permafrost en fusion dans bien des zones.
L’exemple suédois de taxe énergétique, en vigueur depuis une vingtaine d’années avec à ce jour une valeur d’une centaine d’euros par tonne de CO2, nous donne le rythme de travail d’une telle taxe : une réduction d’environ 12% des émissions imputables au chauffage collectif et aucun effet mesurable dans le secteur automobile.
Une efficacité avérée dans le secteur du chauffage, mais d’une ampleur relativement réduite, et une inefficacité totale ailleurs.
C’est peu, très peu face au double défi climatique et de l’épuisement en cours des ressources fossiles (pétrole, gaz : les gisements de la mer du Nord ont pour la plupart dépassé leur pic depuis plusieurs années, et même la Grande Bretagne doit compléter ses approvisionnements avec du gaz russe, qui ne sera pas non plus éternel).
Que faut-il faire pour atteindre un rythme de changement de nos comportements qui nous offrirait de bonnes chances de ne pas endurer de trop graves dommages issus de ces deux défis ?
C’est simple : il nous faut nous donner les moyens de vivre correctement tout en consommant beaucoup moins d’énergie, et ce n’est pas cette taxe qui nous mènera à ce résultat en temps opportun.
Elle ne nous fournira aucune alternative, elle sera juste un dispositif assez complexe au rendement faible tout juste capable de donner bonne conscience à ceux qui n’auront pas mesuré sa disproportion vis-à-vis des défis à relever.
Ce qui s’avère en fait indispensable et n’est aucunement prévu dans le cadre de cette taxe est de mettre en place les alternatives qui permettront à chacun ce choix entre deux produits, deux solutions au contenu énergétique différent.
Qu’il s’agisse de faciliter aux plus démunis une meilleur isolation de leur habitat, de développer des réseaux efficaces et denses de transports en commun, de généraliser la voiture électrique en libre service... il n’est pas prévu que le produit de cette taxe soit consacré à des investissements massifs dans l’une ou l’autre de ces direction.
C’est la raison pour laquelle j’écrivais il y a quelques jours « Carbone : la taxe illégitime » et proposais un fiscalité spéciale, basée sur le revenu, dont le produit serait consacré aux investissement qui nous permettraient de prendre un réel virage énergétique.
Songeons simplement que la rénovation thermique de l’habitat ancien demanderait une quarantaine d’années de travail à raison de 400 000 logements traités par an : le chantier est tout aussi immense qu’incontournable si nous voulons réellement parvenir à une meilleure efficacité énergétique.
Et ce chantier peut encore être envisagé et mis en route dans les conditions actuelles : serait-il imaginable de l’entreprendre si le baril de pétrole devenait beaucoup plus coûteux ?
De nombreuses considérations peuvent nous laisser supposer qu’il pourrait devenir extrêmement coûteux dans un avenir plus ou moins proche.
C’est une façon d’exprimer que l’époque dans laquelle nous nous trouvons nous laisse encore des chances d’agir qui pourraient ne pas se reproduire.
Il est encore temps de remplacer, dans son principe, cette "taxe carbone« par une »Contribution Environnementale Généralisée" (qui pourrait devenir une "Contribution Environnementale Européenne Généralisée" à plus ou moins brève échéance) dont le produit serait intégralement consacré à de grands chantiers qui permettraient à chacun de réels choix dans ses modes de consommation.
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