Les mystères entourant l’Assomption
La célébration de l’Assomption au mois d’Août est l’occasion pour nous d’apporter un peu de lumière sur une fête populaire de par la beauté des processions mais encore mal connue du grand public.
Avec la célébration de l’Assomption, de nombreuses villes de France, Lourdes, Paris, Lisieux, Saint-Nicolas-de-Port ont vécu cette semaine l’effervescence des grandes fêtes religieuses, cultu(r)elles et populaires.
Cette fête attire chaque année aussi bien les curieux que les croyants. Elle est souvent considérée, comme en Italie par exemple, comme la fête la plus importante après Noël. Mais en dépit d’une véritable fascination pour ses processions, elle reste mal connue du grand public. C’est l’occasion pour nous de faire la lumière sur cette fête des beaux jours.
Le 15 août : Fête nationale et saint Napoléon
L’Assomption est l’élévation miraculeuse de la Vierge au ciel après sa mort. Absent des livres de la Bible, ce dogme a été défini en 1950 par la constitution apostolique Munificentissimus Deus du pape Pie XII. Aussi, la fête de l’Assomption est d’abord une fête catholique et ce ne sont pas tous les chrétiens qui y souscrivent.
La date retenue pour l’Assomption est le 15 août, jour de notre ancienne fête nationale avant que soit adopté le 14 juillet... en 1880. C’est Louis XIII qui, consacrant la France à la « très sainte et glorieuse Sainte Vierge pour protectrice de son royaume », institue officiellement cette date en demandant qu’il soit organisé une procession en l’honneur de Marie dans toutes les paroisses de France.
La Révolution la supprime, mais le concordat signé en 1802 entre le premier consul Bonaparte et le pape Pie VII la rétablit en jour chômé. L’initiative du futur empereur ne s’arrête d’ailleurs pas là puisque, né le 15 août 1769, il souhaite que ce jour soit sien et demande à l’Eglise d’adopter la Saint-Napoléon. La première Saint-Napoléon est ainsi fêtée le 15 août 1806. Louis XVIII, ramené sur le trône de France en 1814, s’empresse de mettre un terme à cette « plaisanterie », et la Vierge Marie est déliée de cette indivision contre nature.
Paradoxalement, la loi de 1905 concernant la séparation des Eglises et de l’Etat ne remet pas en cause la fête de l’Assomption. Avec les autres fêtes dites « d’obligation » pour les catholiques, Noël, l’Ascension et la Toussaint, elle reste chômée, comme c’est également le cas en Italie, en Espagne, au Portugal, au Luxembourg et en Belgique où les catholiques sont nombreux.
Le culte marial existait déjà avant l’ère chrétienne.
Mais si cette tradition religieuse basée sur le modèle de l’Ascension du Christ n’a pas plus d’un demi-millénaire en apparence en France, il ne faut pas ignorer non plus que ses origines précèdent l’ère chrétienne.
C’est l’empereur byzantin Maurice, bien avant Louis XIII, qui fut le tout premier à faire de l’Assomption un jour de fête officiel, en 582 (jour de la Dormition plus exactement). Par la suite, l’église romaine adopta ce jour. Mais le choix du 15 août remonterait cependant à encore avant, au IVe siècle car on retrouve trace de cette date dans le Calendarium Romanae Ecclesiae et, en 431, il y est fait à nouveau référence au Concile d’Ephèse.
Quant à l’origine et la raison de cette date, plusieurs avis diffèrent selon qu’ils émanent d’ecclésiastiques, d’historiens ou de scientifiques...
Comme le suggère Mgr Michel Dubost, évêque de France, dans son livre Marie (ed. Mame, Paris 2002), “La fête de l’Assomption est née à Jérusalem, mais il est difficile de savoir à quelle époque. L’origine de la fête vient peut-être de la consécration par l’évêque Juvénal (422-458) d’une église dédiée à Marie, à Kathisma (étape supposée de la Vierge entre Nazareth et Bethléem). Elle a plus probablement pour origine la consécration d’une autre église à Gethsémani, à côté de Jérusalem, au VIe siècle”.
En revanche, selon Jeremias, l’origine est à chercher plutôt du côté des étoiles : la célébration catholique de l’Assomption le 15 août et de la Nativité le 8 septembre correspondrait au coucher et au lever héliaques de l’étoile Spica, dans la constellation de la Vierge. En fait, sous l’Antiquité, la constellation de la Vierge correspondait au solstice d’été et se situait au zénith dans la voie lactée. Donc, bien avant l’ère chrétienne, les cultes primitifs accordaient une grande importance à cette constellation qu’ils considéraient comme la “Reine du ciel ou la Mère divine”. C’est notamment pour cette raison que, fait trop exceptionnel pour être une simple coïncidence, l’on retrouve la Reine céleste dans toutes les grandes civilisations du monde de cette époque, Indiens d’Amérique, Babyloniens, Sumériens, Grecs, Egyptiens, représentée sous les traits d’une déesse à l’épi (fertilité). C’est d’ailleurs de là que vient le nom de son étoile la plus brillante Spica (l’épi en latin).
Les astronomes du XXe siècle réussirent à démontrer que comme Jeremias le supposait, le 15 août était à cette époque le jour du coucher héliaque de l’étoile Spica. Située à la gauche du Soleil, son éclat l’éclipsait entièrement, sauf au moment de son coucher où elle apparaissait un bref instant. D’où le choix de cette date pour commémorer l’Assomption, la mort de Marie dans le Soleil... et le 8 septembre pour la Nativité, qui correspondait à la date de réapparition de l’étoile, de renaissance (le lever héliaque). Le culte marial chrétien est donc fondé, du moins en partie, sur des données astronomiques.
Mais tous les mystères ne sont pas levés pour autant. Savez-vous par exemple, que neuf mois exactement après la Nativité et le passage du soleil dans la constellation de la Vierge (du 20 août au 23 septembre), c’est la constellation des Gémeaux ?! Y trouvera une symbolique qui veut, mais une chose est certaine cependant : la concordance entre les phénomènes astronomiques et le calendrier ecclésiastique est si grande, que des inspirations païennes à la religion chrétienne ne peuvent être exclues.
Quoi qu’il en soit, les célébrations n’ont cessé de se multiplier à travers le monde depuis ces temps. A Saint-Nicolas-de-Port la veillée mariale consistait à se recueillir devant six statues mises en lumière au son de l’orgue. Lourdes attendait plus de 35 000 pèlerins rien que pour la journée de mercredi ; à Paris, une procession fluviale était organisée autour des îles Saint-Louis et de la Cité, tandis qu’à Sassari en Sardaigne, c’est la célèbre et séculaire procession des “Candilieri” qui attirait des milliers de fidèles et de touristes.
Rappelons enfin que l’on recense 1,1 milliard de catholiques dans le monde, et que selon un sondage IFOP-La Croix réalisé en 2006, 65 % des Français se déclarent catholiques (6 % musulmans, 2 % protestants et 25 % sans religion).
En cette période de fête et de tradition, ces chiffres sont là pour nous montrer que religion et laïcité peuvent faire bon ménage, sans qu’il soit nécessaire de faire mourir l’une pour faire vivre l’autre.
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