Infocapitalistes et pronétaires : collaboration possible... et fructueuse !

Dans leur nouveau livre, La révolte du pronétariat et dans le blog associé, Joël de Rosnay et Carlo Revelli évoquent la nouvelle lutte de classes entre infocapitalistes (= médias traditionnels) et pronétaires (= membres de la blogosphère et acteurs du Web 2.0 - " bichonnés" stratégiquement par Yahoo).
Ainsi, J. de Rosnay dit, dans cet interview :
- ...
Ces nouvelles pratiques mettent désormais en cause les modèles
traditionnels industriels et commerciaux de production et de
distribution
- ..... La création collaborative et la distribution d’informations de personne à personne confèrent de nouveaux pouvoirs aux utilisateurs, jadis relégués au rang de simples consommateurs...
- ....Je voudrais donc témoigner aujourd’hui de cette nouvelle lutte des classes, entre ceux que j’appelle les « infocapitalistes » détenteurs des contenus et des réseaux de distribution, et les « proNétaires », nouveaux producteurs et acheteurs de biens et services produits par eux-mêmes en ligne sur les réseaux..."
- ...il existe pour moi une autre vision : celle de la cohabitation, voire de la collaboration, plutôt que celle de l’opposition...
- ...les
journaux vont trouver enfin, avec le Web2.0 qui émerge, la bonne
réponse à leur quête incessante depuis leur genèse des moyens les plus
efficaces pour dialoguer avec leurs lecteurs !
Et, puis, la Neue Zürcher Zeitung vient d’illuster, par des exemples concrets que la collaboration entre infocapitalistes et pronétaires peut exister :
- La rédaction du journal de Saarbrück permet depuis janvier à ses lecteurs de lui faire parvenir des emails, sms, mms, fax d’alertes sur des informations locales. Ils sont ensuite directement intégrés dans les systèmes rédactionnels pour être - pour les meilleurs d’entre eux - publiés sur Internet ou dans le titre papier.
- le journal VG (Verdens Gang) d’Oslo, qui fait partie du groupe Schibsted (qui publie aussi 20Min dans plusieurs villes de France) est clairement le pionnier. Cela fait deux ans qu’il utilise les forces de ses pronétaires locaux pour fabriquer un meilleur journal : ceux-ci lui envoient plus de 5000 informations, sous forme multimédia, par mois, dont 20% sont réutilisables pour publication dans le titre papier, tiré à 380 000 ex., ou sur le site Web. L’exemple (tristement) fameux de VG est qu’il a été le tout premier en Norvège à pouvoir publier des photos du tsunami de Noël 2004 : ses lecteurs en vacances sur place l’ont instantanément alimenté en contenu exclusif !
De 20 euros pour une alerte de base, on peut aller jusqu’à 2400 euros pour le scoop de grande envergure ! VG paie au total environ 150 000 euros par an pour obtenir ce contenu exclusif via ses lecteurs. C’est finalement une toute petite somme, quand on considère l’esprit de communauté et la fidélité qu’une telle approche génère parmi les lecteurs.
Pour conclure, je reprendrai la vision de Dan Gilmor, l’ex-chroniqueur du San Jose Mercury News, devenu évangéliste du journalisme citoyen :
"Cette nouvelle forme de journalisme fait son chemin, un journalisme participatif dans lequel des non-journalistes ajoutent ce qu’ils savent à propos d’un sujet pour qu’ensuite les journalistes et les autres y creusent de quoi reconstruire la réalité. C’est un changement majeur, c’est ce qui m’intéresse, la complémentarité entre journalisme professionnel et journalisme citoyen : il vaut mieux plusieurs voix qu’une seule, et la technologie permet cela."
Laissons
juste un peu de temps au temps pour que les pièces du puzzle actuel
finissent par trouver comment s’assembler entre elles. Il y aura, bien
sûr, à limer les quelques contours encore trop anguleux !
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