Ex-officier de police, devenu professeur de Lettres Classiques, farouchement opposé à l'idéologie du totalitarisme mercantile.
En dépit de penchants iconoclastes, profondément attaché au principe républicain, et tout particulièrement à la laïcité.
Je suis d’accord avec vous sur tous les points que vous évoquez (perte des horaires, jeux n, hétérogénéïté, etc.) ... Mais pas d’accord sur le fait que Brighelli ne dénonce que le « pédagogisme » ( néologisme appelé à entrer dans la langue , pour les distinguer des pédagogues), comme l’auteur de l’article. Brighelli par exemple dénonce le libéralisme débridé qui creuse les fossés culturels, sociologiques, fait ainsi le jeu de ce mercantilisme, par le suivisme dont il fait preuve, et dont les chantres du système marchand font précisément l’apologie permanente : rejet de la culture classique parce qu’elle ne présente pas une application immédiate, dogme de la non-importance des horaires d’enseignement , survalorisation de l’individu dans un système avant tout républicain, et j’en passe... Il ne me semble pas que l"auteur, qui est certes limité par la taille du texte (déjà long) , dise autre chose en faisant cette synthèse.
C’est une excellente analyse, que je ne paraphraserai pas . J’insisterai seulement sur quelques points : le pédagogisme est aussi l’allié objectif du libéralisme marchand. Je m’explique :
- il affirme par exemple que la « méthode » (laquelle d’ailleurs ? à par le slogan jamais explicité « enseigner autrement ») est plus importante que le nombre d’heures de cours , argument dans lequel n’on tpas manqué de s’engouffrer les ultra-libéraux pour justifier les suppressions de postes.
- il place l’individu et son ego, ses goûts, au centre du système, avec la valeur toute marchande du « contrat » , tout en détricotant le caractère collectif et national de l’enseignement, clef de voûte d’une Nation et de ce civisme que la vulgate bien-pensante veut transformer en simple « vivre-ensemble ».
- il dénie le droit d’apprendre à toute une catégorie de population , en nivelant vers le bas les savoirs, d’où le fossé qui se creuse entre l’établissment « MJC » à « projets » et celui où l’on continue à bosser tête dans le guidon, et où s’échappent les parents de milieux informés, qui vers les centre-villes, qui vers le privé. Le pédagogisme , qui modèle l’école sur celui de la consommation et de la concurrence, accentue les clivages et inégalités. - il est dictatorial, et comme l’ultralibéralisme, veut casser les statuts des enseignants pour les accabler d’heures de présence, de réunions, de projets , les empêcher ainsi d’être des « disciplinaristes », et briser leur liberté pédagogique en dictant les « bonnes pratiques ».
Sans se rendre compte (ou en faisant semblant de l’ignorer) que la liberté pédagogique et l’indépendance statutaire sont des garanties ( dans le respect des lignes directrices des programmes bien entendu), de l’indépendance, de la résistance aux pressions diverses, et de l’assurance de la même qualité d’enseignement sur le territoire.
Bref, en dynamitant les programmes, les disciplines, les savoirs des professeurs, le cadre d’emploi, en éclatant les cadres selon les circonstances (régions, établissments, individus...) , le pédagogisme prépare l’avènement de l’individualisme, des inégalités, du lobbying local, des zones sinistrées, et fait encore plus le lit des boîtes privées , et du sport qu’est le contournement de la carte scolaire.
je l’écrirai peut-être, cet article, peut-être en plusieurs étapes, sans être trop technique, simplement clair pour fournir le débat d’idées. Il est difficile de garder un silence total, car la sécurité, si on la voit comme la protection des Libertés individuelles et publiques, et non comme un service opaque de gardes prétoriens soumis , silencieux, et même complices en haut lieu, demeure un enjeu important pour des institutions. Le fait d’être guéri n’empêche pas de souvenir de la maladie dont on a été victime...et dont les symptômes sont profonds. Il est peut-être bon d’analyser, et de dénoncer la machine mise en place plus que les individus, dans un contexte passionnel, épidermique même, où la moindre critique de fond est considérée comme une attaque personnelle, tandis que d’autres se cantonnent dans le factuel et font reposer les problèmes sur les « méchants » acteurs, gendarmes et policiers.
J’en ai d’ailleurs la trame, et de nombreuses notes, car l’implosion télécommandée de mon syndicat et les représailles qui s’en sont suivies ont fait leur petit bruit à l’époque dans leur petit Landerneau.
Du reste, je constate que ça remue quand même depuis : Matelly, officier de GN, toujours sur les chiffres, l’ADEFDROMIL, qui refuse le doigt sur la couture, Pichon dans la Police, sans compter tous ceux qui ne peuvent s’offrir une révocation ou même une carrière brisée et une reconversion.
Attention à l’écriture des articles : outre le temps nécessaire à sa rédaction, retrouver des éléments précis, reconstituer un historique, il faut être sûr d’être protégé. Dans la Police, il y a des services de surveillance du web, notamment à la préfecture de Police. J’y avais des amis, ce qui m’a valu de ne pas être inquiété pour une vidéo à l’origine à usage restreint, précisément sur la politique du chiffre, vidéo qui a circulé plus que prévu sur la toile et a plus que contribué à la diffusion de cette expression. Il se met aussi en place tout un travail de dénigrement, de présentation de celui qui divulgue comme un menteur, voire un insensé. Système bien rôdé : si celui qui parle s’expose, il est puni , s’il présente des éléments précis , on l’attaque pour atteinte à l’obligation de réserve ( voir l’affaire Pichon, entre autres) . S’il se protège, ne donne pas de détails identifiables, il est présenté comme un affabulateur. La vraie préoccupation de la hiérarchie en effet , quand il y a un problème, n’est pas « comment résoudre le problème ? » mais : « Qui a parlé ? ». Il y a alors des enquêtes internes interminables, comme je l’ai vu par exemple pour des cas de suicides et dépressions répétés qui étaient apparus dans la presse. Des suspensions parfois, des pressions dans l’entourage de celui qui est suspecté d’avoir parlé. Les syndicats sont souvent de mèche, malgré des déclarations fracassantes. En fait, ils cautionnent un semblant de démocratie interne. L’administration peut mettre un terme à toute réelle contestation en divisant le syndicat, en y créant un conflit interne, en provoquant le lâchage des militants purs et durs. Chose facile : pour éviter par exemple la création d’un syndicat solidaire entre grades et corps , on barre l’avancement et les mutations de toute une catégorie, par exemple les officiers , tout en privilégiant par exemple les gardiens, ou les administratifs. Ils ont eu ainsi la peau de la FASP, de la CGT police, de FO police, de L’UNSA , de SUD à peine né (qui existe mais disloquée) On donne des jours de détachement hors du quota légal , et on fait comprendre aux pontes installés qu’il faut se débarrasser du gêneur qui fait des recours, présente des idées, dénonce les errements. Si je suis parti au bout de 20 ans, d’un métier bien payé ( j’étais capitaine et aurais dû être commandant sans cette histoire de syndicalisme) , où j’avais une carrière jusque là très bonne dans divers services de la PJ, avant de m’indigner contre ce qui se passait (là, tout s’est arrêté brutalement pour moi ) , c’est qu’il y avait des raisons lourdes. A titre personnel, j’ai bien rebondi, pas dans la facilité certes, après la réussite à deux concours (externes et anonymes, eux..) mais je trouve que ce qui se passe constitue une manipulation très grave, a fait passer les services censés être au service de la légalité Républicaine au service privé d’intérêts individuels et politiciens, eux-mêmes au service d’intérêts privés très loin des préoccupations du bien être des citoyens, catégorie dont font partie les polixciers et gendarmes, et à laquelle il me paraît bon qu’ils se sentent intimement appartenir.
Très bon article documenté. J’étais officier de police jusqu’au « règne » de Sarkozy en tant que M.I. et j’ai constaté et dénoncé ces dérives (raison pour laquelle, malgré et à cause d’un mandat syndical, j’ai dû passer en catimini un concours pour m’échapper , suite à une chasse au sorcières me supprimant mon poste, mon avancement...). Il faut ajouter que la réforme des corps et des carrières, lancée par Guéant en 1995 , qui prévoyait un retour aux affaires, a créé par la réforme des corps les conditions « managériales » de mise au pas des policiers, en plaçant tout le secteur judiciaire de la police sous contrôle hiérarchique et administratif étroit (sur le modèle gendarmerie , d’ailleurs) en esquivant au maximum la Justice, contrôle qui permet l’évacuation des dossiers sérieux au profit de la « politique du chiffre » et de « visibilité » , réalisable à moindre coût financier et humain, et à grand renfort de publicité dite « communication ». Il va de soi que la contrôle est aussi passé par un népotisme de plus en plus grand : il suffit de regarder les noms des gens en poste, à commencer par le DGPN . Népotisme étendu à tous les échelons de la hiérarchie : depuis Sarkozy, la VAP (Voie d’accès professionnelle) permettant de contourner les concours et de nommer qui on veut pourvu qu’il plaise a verrouillé le système hiérarchique et étouffé la contestation interne. Je comptais d’ailleurs ( et peut-être le ferai-je, mais le temps me manque ) écrire ici -même un article sur la « politique du chiffre » et les stratégies utilisées pourla mettre en place et la maintenir.