• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


En réponse à :


sihem (---.---.166.50) 16 octobre 2006 13:07

Conseil amical d’un ancien directeur d’école algérien à ceux qui vont enseigner le rôle « positif » de la colonisation ...

xxxx

Alger - Enfin, grâce à l’article 4 de la loi du 23 février 2005 où il est écrit que les programmes scolaires reconnaissent le « rôle positif » de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, les enseignants de France pourront dire toute la vérité sur ce soi-disant rôle « positif » de la présence française durant la période noire de la colonisation en Algérie, en passant par le 8 mai1945 et la « pacification » de 1954 à 1962.

Ils expliqueront comment les grandes villes d’Algérie, berceaux de la civilisation turco-arabo-berbère furent dévastées ; des palais et des mosquées rasés ; des archives historiques transformées en feu de camp pour les troupes françaises ... Ils rappelleront que tous les Algériens étaient « lettrés ». L’historien Michel Harbart le proclame : « Les témoignages sont formels : en 1830 tous les Algériens savaient lire, écrire et compter », la seule ville d’Alger comprenant 3000 médersas. « La plupart des vainqueurs, note la commission d’enquête de 1833, avaient moins d’instruction que les vaincus. » Ils montreront la richesse de l’Algérie avant 1830.

Un ultra entre les ultras, Genty de Bussy, affirme, malgré lui certainement : « Mostaganem ? Pays couvert d’arbres fruitiers de toutes espèces, jardins cultivés jusqu’à la mer... grâce à un système d’irrigation si bien entretenu par les Maures », mais, ajoutera-t-il, « depuis l’occupation le pays n’offre plus que sécheresse et nudité. » Concernant la Mitidja, le général de Barillat reconnaissait qu’en 1830 « les plantations font de ce territoire un paradis terrestre ». Le colonel suisse Saladin affirmera qu’il n’a rien vu de comparable en Europe à la région de Blida et ce, après avoir été frappé par la richesse des environs de Tlemcen...

Les « colons » encore aujourd’hui dénient toute exploitation et mise en valeur de ces régions par les Algériens soutenant qu’elles n’ont été que marécages alors qu’ils les ont découvertes après ... plus d’une trentaine d’années de guerre d’une sauvagerie extrême... Bugeaud en personne regrette : « On n’arrive pas à couper tous les arbres, vingt mille hommes avec des haches ne couperaient pas en six mois les oliviers et les figuiers de ce beau pays ! » Ces enseignants feront-ils l’éloge de ce « Père Bugeaud ». qui proclama « la guerre continue jusqu’à extermination » ? « J’entrerai dans vos montagnes je brûlerai vos villages et vos moissons, je couperai vos arbres fruitiers... » et, (...) « il faut les empêcher de semer, de récolter, de pâturer. »

L.F. de Montagnac en mars 1843 : « Toutes les populations qui n’acceptent pas nos conditions doivent être rasées. Tout doit être pris, saccagé, ... l’herbe ne doit plus pousser où l’armée française a mis le pied. » Toutes ces menaces des nouveaux « Huns » français furent exécutées grâce à d’autres « valeureux » généraux comme St Arnaud, qui a fait preuve d’un zèle incroyable lors des enfumades de tribus entières, Cavaignac, Pélissier, Lamoricière... ces derniers ayant élevé la razzia et l’extermination en doctrine : sous leurs ordres des milliers d’Algériens furent « enfumés », massacrés déportés ; villages et villes brûlés, récoltes et vergers dévastés ; troupeaux abattus. Il fallait affamer la population indigène pour l’asservir. « ... Le colon pouvait fusiller l’indigène qu’il voulait. » expliquera le préfet Bouzet à la commission d’enquête de ... 1872 ! La relève fut assurée avec autant de zèle et de talent par leurs successeurs : les sous-préfet Achiary, Duval en 1945, les Bigeard, Massu, Aussaresses et consorts entre 54 et 62.

On a continué d’arrêter, d’assassiner, de violer, de torturer... au nom de « la civilisation » !!! Des milliers de pages ne suffiraient pas pour décrire ces crimes contre l’humanité, ces génocides inqualifiables, l’humiliation et les souffrances de tout le peuple algérien quelle que fût sa classe sociale, au nom du pays des droits de l’homme. Le meilleur des indigènes ne valait pas la semelle de la chaussure du plus misérable des Européens. Après plus de quarante ans de guerre d’occupation, les « colons » ont « trouvé » un pays, qui fut très prospère, complètement rasé, dévasté mais prêt à les accueillir !!! Mais qu’y avait-il de « positif » chez ces nouveaux « arrivants » ? Qui étaient-ils ? Les vingt premières années : aventuriers, frères de la côte, contrebandiers, trafiquants en tout genre, prostituées...comme le prouvent toutes les archives ... Bugeaud a fait venir des centaines de femmes que lui a « envoyées » son ami, le maire de Toulon et qu’il a « marié » aux soldats transformés en colons !

Tous, qu’ont-ils apporté avec eux si ce n’est leur force de travail ? Se souviennent-ils qu’ils ont aussi émigré et qu’ils se sont expatriés pour survivre, pour manger ? Se rappelle-t-on aujourd’hui d’où ils venaient : en 1845, vingt-cinq mille Espagnols, près de huit mille Italiens, autant de Maltais ... sans oublier les réfugiés, de l’est de la France après l’annexion de l’Alsace-Lorraine, et dans quel état étaient-ils ? Gens pauvres fuyant une terre de misère pour la plupart. L’Etat ayant décidé une colonisation de peuplement, la « bonne migration » faite de Français de souche, arrive au gré d’événements politiques, économiques... L’appel lancé par le Cardinal Lavigerie est significatif : « Chrétiennes populations d’Alsace et de Lorraine ... fuyant vos maisons incendiées, vos champs dévastés... l’Algérie vous ouvre ses portes... l’Etat peut se procurer des millions d’ha de terre ... » Ces émigrés avaient-ils les capacités à « civiliser » un peuple dont la civilisation millénaire était reconnue par les conquérants eux-mêmes ? Non, assurément ! Mais avec tous les moyens mis à leur disposition « ils » ont fini par « bâtir leur Algérie », « la leur » : leur Eldorado !! Et où était l’indigène ?...

Comment les enseignants français vont-ils expliquer qu’à la veille de la guerre de libération en 1954, 100 % des petits Européens d’Algérie étaient scolarisés et ...19 % de petits indigènes ! • Comment enseigner qu’après 130 ans de « rôle positif » le peuple algérien tombait peu à peu dans le néant car il avait perdu sa langue ( l’Arabe, langue étrangère dans son propre pays ), sa pensée, sa culture, sa personnalité et subissait ainsi la destruction de sa société ? Comment justifier et cautionner le « rôle positif » de la colonisation dans sa politique d’extermination et de razzia, de torture et de déportation ; dans l’expropriation des Algériens de leurs terres ancestrales et des ressources de leur pays ; dans l’idéologie colonialiste raciste qui considère les indigènes comme des êtres inférieurs, serviles, corvéables à merci, mais bons pour servir de chair à canon ?

Comment commenter et interpréter un « rôle positif » dans le fameux code de l’indigénat et l’aliénation politique qui criminalisaient l’existence entière de millions d’êtres humains considérés comme indignes d’avoir des droits et d’être des citoyens à part entière ?... . a titre d’exemple, certaines plages huppées du littoral portaient des écriteaux : « interdit aux arabes et aux chiens » Et je passe sur les nombreux bagnards exilés à Cayenne pour des raisons de résistance à l’occupation, et qui ont rendu l’âme loin des leurs sans revoir leur pays d’origine, comme ceux de Nouvelle Calédonie déportés à partir de 1871 et ou l’on compte une nombreuse colonie descendant de ces exilés, déplacés aux antipodes sans espoir de retour.

Comment expliquer la construction d’un pays exclusivement réservée au conquérant européen ? Pratiquement pas un civil européen n’a mis les pieds dans un « village indigène » où il n’y avait ni électricité ni eau courante ... il n’en connaissait même pas l’existence, les routes goudronnées ne desservaient que les villes, villages et fermes de la colonisation !! Comment expliquer le « rôle positif » de la France coloniale qui, en 54, a choisi la guerre à outrance faisant des dizaines de milliers de morts, de veuves et d’orphelins plutôt que de chercher une solution pacifique avec le peuple algérien ? Comment expliquer un « rôle positif » dans le fait d’avoir laissé faire l’OAS et sa politique de terre brûlée qui n’a laissé derrière elle que chaos et désolation et qui a provoqué ainsi, directement ou indirectement, le « départ » des Européens d’Algérie ?

« En 1962 sur une population de 10 millions d’habitants, 2,6 millions étaient au chômage. On comptait 4 millions de personnes regroupées par l’armée française pour couper l’ALN (Armée de libération nationale) de sa population, 400 000 détenus, 300 000 réfugiés, auxquels s’ajoutent près de 80 000 villages et hameaux détruits ou incendiés... », outre les milliers d’orphelins privés du strict nécessaire. La colonisation a fini comme elle a commencé : dans la violence !!! « L’œuvre civilisatrice » française ne fut qu’une succession horrible de crimes contre l’humanité. Et l’Algérie ne demande que la reconnaissance officielle de ces crimes commis sur son territoire contre son peuple et de ne pas oublier le fait qu’elle a été transformée en zone d’essais nucléaires, essais qui ont permis à la France d’avoir aujourd’hui une telle position stratégique dans le monde.

Selon même des maquisards, la première bombe a été expérimentée en pleine guerre d’Algérie à Reggane, dans le Sahara algérien avec attachés à coté des chiens et d’autres animaux, une centaine de combattants algériens, à proximité immédiate du lieu de l’explosion en vue de connaître les effets des radiations sur l’organisme de l’homme. Le traité d’amitié, qui se veut exceptionnel, entre nos deux pays, nos deux peuples et notre avenir commun, n’en déplaise à certains, mérite que l’on doive agir vite et efficacement et ce dans le respect mutuel de nos deux histoires, de nos deux passés aussi douloureux fussent-ils.

Le devoir de mémoire n’implique pas seulement de reconnaître le « rôle positif » de la colonisation mais, et surtout, de rétablir l’histoire dans ses faits réels principalement dans les manuels scolaires. Rappelons que dans les écoles indigènes, on enseignait que « Nos ancêtres étaient les Gaulois » !....Aucune loi ne peut être conçue pour falsifier l’histoire. Enseignants français, cette loi vous est imposée : en attendant son abrogation, cherchez dans les archives de la colonisation en Algérie et vous découvrirez, en plus de ces quelques données, ce que l’on ne vous a jamais enseigné : l’horreur... Et alors vous pourrez transmettre l’Histoire avec un grand H : ce sera tout en votre Honneur.

M.O. Y.


Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON


Palmarès