@Onecinikiou
Je vois très bien ce que vous voulez dire. Néanmoins je pense que votre définition générale du religieux relativise de fait une particularité du monothéisme hébraïque. Cela peut paraître paradoxal mais dans le Deutéronome, les Nombres, Esther, Judith, Dieu ne donne pas la primauté à la croyance mais bien au combat contre l’idolâtrie, càd à la négation des cultes des peuples païens. Les textes vétérotestamentaires ne condamnent pas l’athéisme mais les cultes polythéistes. Raison pour laquelle les romains ont reproché aux premiers chrétiens (qui sont dans la continuité de l’hébraïsme de ce point de vue) d’être des athées : ceux-ci tentaient de détruire les cultes antiques.
« Celui qui refuse l’idolâtrie, fait comme s’il accomplissait la Torah toute entière » (Hullin, 5a)
« Pour son salut, l’humanité n’a pas besoin d’adorer Dieu. Tout ce dont elle a besoin, c’est de ne pas blasphémer et de ne pas adorer les idoles » (Eric Fromm, Vous serez comme des Dieux).
Ce ne sont pas de faux concepts qui légitiment l’idée pernicieuse de peuple élu comme vous dites. Cela permet de comprendre l’évolution et la sécularisation des conceptions hébraïques au sein d’un grand nombre d’institutions (je pense au droit international notamment) et le sens du combat de certains intellectuels juifs, qui ont leurs racines dans la théologie négative qu’est l’Ancien Testament. Le judaïsme dépasse bien alors le cadre théologique, car c’est aussi tout simplement une conception du monde. Cette compréhension mène plutôt à une critique qu’à une apologie de l’exceptionnalité selon moi. Il faut bien voir le caractère tout à fait inouïe du monothéisme judéo-chrétien pour en comprendre les formes sécularisées, même si ces formes sont parfois tout à fait caricaturales et éloignées de l’orthodoxie je vous l’accorde (je pense à notre ami BHL ici).