La violence n’est-elle pas en nous tous, à divers degrés ? Certains savent parfaitement la maîtriser, d’autres en sont incapables. Ce n’est à mon avis pas le privilège des hommes que de faire preuve de violence, seulement en règle générale, la violence d’un homme a des conséquences bien plus graves, surtout lorsqu’elle est exercée à l’égard d’une femme. Je ne parle que des conséquences physiques...
Pour ma part il m’est arrivé, une seule fois, lors d’une dispute particulièrement violente avec ma compagne, de sentir cette force me submerger et tenter de prendre le contrôle de mes paroles, puis de mes gestes, de mon cerveau même. C’est au prix d’un effort de volonté extrême que mon poing s’est abattu sur le mur et non sur elle. Cette violence m’est apparue progressivement, au fil de ses injures et coups de poings, ce qui indique bien qu’elle était dans le même état que moi. Ce n’est que lorsqu’elle m’a mordu violemment que ma colère s’est transformée en fureur presque incontrôlable. Je ne cherche pas à me disculper, je tente simplement de restituer l’escalade qui a mené à cet instant effroyable où j’ai failli me transformer en monstre de violence.
Après avoir frappé le mur, je me suis immédiatement calmé, à la fois effaré et honteux de ce qui venait de se passer. J’ai instantanément réalisé que j’étais passé à deux doigts d’une catastrophe que j’aurais passé le reste de ma vie à regretter.
Nous en avons discuté ensuite, à froid, ma compagne et moi. Nous avons mis en place des barrières pour éviter d’en arriver là à nouveau. Mais ce que j’ai vu ce jour là m’a beaucoup fait réfléchir car j’étais persuadé que jamais je ne serais capable d’envisager de frapper une autre personne, à plus forte raison la femme que j’aime.
Tou cela pour dire qu’il ne suffit pas de condamner, sans compréhension et sans pardon. L’enfer vécu par cet homme est peut-être pire que celui vécu par Cath, si l’on prend en compte la honte, la culpabilité, la peur de recommencer, ou plutôt la certitude que cela recommencera. On dit souvent qu’un chien qui a goûté à la viande ne pourra plus s’empêcher de tuer. Je pense qu’il en va de même pour l’homme violent. Car il faut bien aussi reconnaître que sur l’instant, il y a un certain plaisir bestial, une certaine jubilation à être en situation de totale domination. c’est diffus mais ça ressemble à cela.
Bien sûr, cette expérience est différente de celle de Cath. Son récit est poignant et ce que C. a fait est révoltant et intolérable. Il fallait le quitter, c’est évident, mais n’est-il pas lui-même une victime qui mérite aussi qu’on cherche à comprendre ? Ce n’est en rien une excuse, surtout dans ce contexte où il n’avait rien de concret à lui reprocher. Simplement il me semble qu’un homme dans cette situation est au bord d’un précipice et qu’il est inutile de l’y pousser.
Je trouve d’ailleurs que Cath est admirable, car malgré ce qu’elle a vécu (ou parce c’est elle qui l’a vécu), elle ne condamne pas vraiment C. Donc merci à toi Cath pour cette leçon, et pardon à ceux que mon discours fera bondir.