Toutes les époques ont recyclé leurs rebelles. Les légitimistes sous la Monarchie de Juillet (car, assurément, être légitimiste en 1830 était aussi rebelle que d’être républicain) sont devenus les vieilles barbes de la IIIème République - voyez Victor Hugo. Des communards qui ont survécu à 1871 sont devenus des antisémites fervents vingt ans plus tard (Cluseret), et les anarchistes qui peuplaient les garnis et les mansardes de Montmartre an 1900, quand ils ont survécu à la Guerre de 14, la pauvreté, la maladie, sont devenus des notables dans le monde des arts et des lettres. Lisez ce que Dorgelès a écrit à leur propos.
Mais ’rebelle’, comme tant d’autres appellations, est devenu une ’attitude’ - c’est le mot qui tue, qui réduit toutes les manifestations extérieures d’une pensée ou d’une passion à un ’look’ sans consistence, c’est le détournement systématique du signe de son contenu.
Quant aux maos et autres totalitaires rouges des années ’60 et ’70 je leur reprocherai, dans bien des cas, le refus de reconnaître le soutien qu’ils ont apporté aux pires massacreurs et tortionnaires de l’époque, voire même leur complaisance vis-àvis de leurs errements de jeunesse (mention spéciale pour Gérard Miller). On a suffisamment reproché l’engagement des Longuet ou Madelin dans des mouvements d’extrême-droite de ces années-là (composés, le plus souvent, d’étudiants qui refusaient tout simplement la chape de plomb marxiste), alors qu’il y avait largement ’autant de bêtises à faire à gauche’,pour reprendre les termes d’Ernst Jünger.