Petit RAPPEL...
Dans un livre d’entretiens paru en juin 2006, Media Control [1], 8 grands noms de la presse US révèlent l’ampleur du lavage de cerveaux dont leurs journaux se sont rendus complices dans les mois qui ont précédé l’invasion de l’Irak. Avec une crudité rare, ils délivrent de nouveaux détails sur la tyrannie du mensonge dans l’Axe du Bien.
[1] Media Control - 8 grands journalistes américains résistent aux pressions de l’administration Bush, par Kristina Borjesson (Éditions des Arènes, Paris).
Morceaux choisis :
LA TÉLÉVISION ET LA PRESSE ÉCRITE ont été aussi lamentables l’une que l’autre. Les quelques rares journalistes qui essayaient de faire correctement leur travail ramaient à contre-courant dans un milieu sclérosé qui avalait sans broncher les mensonges belliqueux de l’administration Bush. [...] Du temps où je travaillais pour la presse quotidienne, je me disais qu’un journaliste doit toujours prendre le contre-pied de ce qu’on lui dit. Si le gouvernement dit « blanc », on doit aller voir s’il n’y a pas un peu de noir là-dessous. Les journaux comme le New York Times s’en gardaient bien : ils essayaient de trouver encore plus de blanc pour faire plaisir à l’administration. On aurait dit que celle-ci jouait au chef d’orchestre, avec les hommes de presse dans le rôle des violonistes. L’administration a donné le coup d’envoi en prétendant que les Irakiens allaient nous attaquer et le Congrès a suivi. Les médias auraient dû freiner des quatre fers, au lieu de ça ils ont appuyé sur le champignon.
[...] Je vais vous donner un bon exemple des mensonges inventés en haut lieu pour la bonne cause. Le vice-président Cheney a souvent parlé d’une rencontre à Prague entre Mohammed Atta, le pirate de l’air du 11-Septembre, et un représentant de Saddam Hussein. Il voulait à toute force établir un lien entre l’Irak et les attentats contre les Twin Towers. La CIA et le FBI avaient pourtant tous deux conclu qu’il n’y avait pas la moindre preuve que cette rencontre ait jamais eu lieu. Imaginez un peu : les deux agences les plus pointues dans le domaine du renseignement enquêtent sur votre histoire et vous expliquent que c’est du roman, mais vous, vous continuez imperturbablement à servir le même bobard à vos administrés... La CIA et le FBI ne vont tout de même pas convoquer une conférence de presse pour dire que le vice-président est un fieffé menteur ! Au mieux, elles pourront tuyauter deux ou trois pisse-copies, mais c’est tout.
Bref, l’administration voulait faire croire que l’Irak représentait un grave danger, qu’Hussein avait des liens avec Al-Qaïda et qu’il était sur le point de nous attaquer. Or ce n’est pas ce que rapportait la CIA, bien au contraire ! [...]
James BAMFORD, journaliste free-lance, spécialiste du renseignement :
« Ils mentent comme des arracheurs de dents »