Accidentologie : « j’ai bousillé une famille »
Pierre Palmade est appelé à comparaître mercredi 20 novembre devant le tribunal correctionnel de Melun pour blessures involontaires. Le vendredi 10 février 2023, la Peugeot 3008 conduite par l'humoriste accompagné de deux passagers se déporte et percute frontalement une Renault circulant en sens inverse sur la RD 372 à Villiers-en-Bière (Seine-et-Marne) vers 18 h 30. À son bord : un homme, une femme enceinte et un enfant ; leur véhicule est percuté par un troisième véhicule dont le conducteur n'a pu freiner à temps. Les secours arrivés sur place, les deux passagers accompagnant Palmade, Mohcine 33 ans et Sambou prennent la poudre d'escampette. « Ils sont en fait aller chez Pierre Palmade récupérer leurs affaires, et ils sont ensuite rentrés, en taxi, à Paris ». Les trois passagers du véhicule percuté sont transportés aux urgences. Le conducteur et son fils placés en réanimation sont dans un état grave. La femme enceinte de 27 semaines a perdu son enfant qui n’a pas survécu aux 32 minutes de réanimation. Les experts établiront : « un lien de causalité direct et certain entre l’accident et son décès dû au traumatisme abdominal ayant entraîné une hémorragie fœto-maternelle aiguë ». Le conducteur du troisième véhicule plus légèrement blessé, a pu regagner son domicile.
Le jour du drame, l’humoriste blessé (8 jours d’ITT) est sous l’emprise de la drogue. Il a commandé « 4 g de 3MMC par jour, un gramme correspondant à dix injections » et s'est piqué huit fois avec une dernière prise 30 minutes avant de prendre le volant. L’un des deux passagers lui a proposé de prendre le volant, en vain... Pierre Palmade est présenté le vendredi 17 février 2023 à l’issue de sa garde à vue à un juge d’instruction de Melun (Seine-et-Marne). Une information judiciaire est ouverte « pour homicide involontaire et blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à 3 mois, par conducteur ayant fait usage de produits stupéfiants, en récidive légale ». Le parquet melunais requiert de la détention provisoire pour Palmade et le placement sous contrôle judiciaire des deux passagers interpellés. Lors du choc, Mohcine, assoupi à l’arrière de la Peugeot 3008 a été blessé « Il a un bleu au à l’œil, une raideur au niveau de la jambe et souffre d’acouphènes ».
Le lundi 20 novembre 2023, Karim, Moussa et Junyang âgés respectivement de 21, 22 et 31 ans, soupçonnés d’avoir vendu de la drogue à Pierre Palmade sont devant le tribunal correctionnel de Melun pour « transport, détention et cession non autorisés de stupéfiants ». Junyang est condamné à un an de prison ferme pour avoir vendu de la 3-MMC, de la cocaïne, de la kétamine et du GHB. Karim condamné à un an avec sursis et à 2 000 euros d’amende pour trafic de cocaïne, de 3-MMC et de MDMA (ecstacy). Moussa écope de trois mois de prison avec sursis pour usage de cocaïne, de 3-MMC et de MDMA.
Chaque année 600 accidents mortels impliquent la consommation de stupéfiants. La 3-MMC (3-methylmethcathinone) se présente principalement sous forme de poudre dont les propriétés sont l’euphorie et stimulation et la libido. Les Nouveaux Produits de Synthèse sont consommés lors de relations homosexuelles de groupe (chemsex), de soirées récréatives, de festivals, free parties, concerts et en boîte de nuit. Les consommateurs qui : « apprécient les effets de la 3-MMC les décrivent comme étant une combinaison entre ceux de la cocaïne, de la MDMA et des amphétamines. Sous 3-MMC On observe des états psychotiques comme la paranoïa et les hallucinations, de l’anxiété ou des insomnies importantes, de la pression artérielle ou de la fréquence cardiaque ». Le coût de la 3-MMC, entre 30 et 40€, est bien inférieur à celui de la cocaïne 50-70 € le gramme.
Si un accident n'a causé que des dégâts matériels, les automobilistes doivent établir un constat amiable (prendre des photographies, vidéo, dash cam). Si l'un des mis en cause refuse de le signer, on peut demander à un témoin présent de le signer et appeler la police ou un huissier (commissaire de la République). Si l'accident a entrainé des blessures, il faut alerter les secours (Samu, pompiers) et les policiers ou gendarmes qui procéderont aux constatations d'usage. Lorsqu’un conducteur tue une personne, c’est généralement un « homicide involontaire », s'il a pris des stupéfiants, qu'il a franchi une ligne continue ou commis un excès de vitesse, les sanctions encourues sont aggravées.
Chacun est responsable du dommage qu'il cause à autrui en raison d'une faute, d'une simple négligence, d'une imprudence ou chose placée sous sa garde. C'est à la victime d'apporter la preuve de la faute. La preuve du lien entre la faute et le dommage peut être apportée par des témoignages - vidéo - procès-verbaux de police - constats d'huissiers. En absence de faute, la victime peut se valoir de l'article du Code Civil qui établit une présomption de responsabilité. Toute personne transportée gratuitement (passager) victime d'un accident est indemnisée qu'il y ait ou non faute du conducteur et peut obtenir réparation par l'assurance du véhicule en faute.
Le conducteur peut invoquer l'exonération de sa responsabilité en cas de force majeure : fait de guerre, cause extérieure au conducteur, événement irrésistible et imprévisible - fait d’un tiers, négligence, erreur, faute d’un tiers (véhicule mal réparé) - faute de la victime ou d'un tiers qui a contribué à l’événement (imprudence ou maladresse). En cas du vol du véhicule à son gardien légal suivi d'un accident, le gardien ou propriétaire n'est pas tenu pour responsable. Cependant « les maîtres et commettants répondent du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés ». S'il n'y a pas de faute du préposé, la victime doit rechercher la responsabilité du commettant. S'il s'agit d'un mineur, la responsabilité des parents peut être mise en cause (obligation d'éducation et de surveillance) à condition que le mineur : habite chez ses parents - d'établir l'action personnelle du mineur - et un lien entre le fait et le dommage subi.
Les dommages matériels sont fixés par les experts des compagnies d'assurance, il arrive que des victimes demandent une indemnité de dépréciation, voire une évaluation de la privation de son véhicule (perte de gain). Lorsque le montant des réparations dépasse la valeur vénale du véhicule, l'assurance ne rembourse que la côte à l'Argus. Les dommages corporels sont évalués par un médecin qui fixe une Incapacité de Travail Temporaire (ITT) fonction de la gravité des blessures. La victime privée d'exercer son activité rémunératrice a le droit à indemnisation et au remboursement de ses frais de soins et traitement. Lorsque l'état de la victime n'est plus susceptible d'amélioration, l'expert établit l'incapacité permanente. L'évaluation de l'incapacité s'exprime en pourcentage (perte d'un œil 30 %, d'un pied 50 %, troubles psychiques de 1 à 100 %). La victime peut avancer le pretium doloris lié à la souffrance physique, le préjudice esthétique, le préjudice d'agrément (privation d'un loisir ou l’accomplissement d'un geste professionnel).
La consolidation intervenue, la compagnie d’assurance fait une proposition d’indemnisation, « Si la victime l’accepte, la loi lui accorde un délai de réflexion de quinze jours pour y renoncer. Si elle accepte définitivement, l’assurance doit dans les 45 jours qui suivent lui adresser le montant de l’indemnisation. En cas de retard dans le paiement, l’assureur est obligé de verser des intérêts au taux légal, majoré. Si la victime estime la proposition insuffisante ou la consolidation n’est pas intervenue, elle peut solliciter dans les huit mois qui suivent l’accident, une offre provisionnelle ». Les deux parties étant rarement d'accord, le Président du Tribunal ou référé peut désigner un médecin expert.
Si la victime cotise à la CPAM (caisse de la Sécurité sociale), elle bénéficie automatiquement de la couverture, à charge pour l'organisme de se tourner contre l'auteur de l'accident pour se faire rembourser les prestations réglées à la victime. L'accident qui survient entre le domicile et le lieu de travail de la victime est considéré comme un accident de travail. Si la décision de justice conclut à un partage de responsabilité entre l'auteur et la victime, la CPAM à le droit au remboursement intégral des prestations versées. Lorsqu'une personne décède dans un accident, ses ayants droits peuvent demander réparation du préjudice moral et matériel : sentiment d'affection, frais en rapport avec l'accident, perte de ressources, atteinte du patrimoine.
La souscription d'un contrat d'assurance est obligatoire et l'assuré reste soumis à plusieurs obligations : déclaration des caractéristiques du véhicule, l'usage (promenade, professionnel, sportif), etc. Le titulaire du contrat d'assurance dispose d'un délai de huit jours (LRAR) pour signaler toute modification du risque : changement de véhicule, d'adresse, d'usage, du conducteur habituel, conduite accompagnée, participation à des épreuves de sports mécaniques, transport à titre onéreux (covoiturage, Uber).
En cas d'inexactitude de bonne foi, l'assureur peut résilier le contrat, soit augmenter la prime. Si l'inexactitude est constatée le sinistre intervenu, l'assureur règle au prorata de la prime payée, le reste est à charge de l'ex assuré (déchéance du contrat). « le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté ». Le dol ne peut être présumé, il convient de le prouver pour celui qui l’invoque. Quant à savoir si le contrat est annulable dans son entier ou en partie, Il faut se demander si sans cette clause le contrat aurait quand même été conclu entre les parties. Il appartiendra à la justice de trancher. En cas de mauvaise foi prouvée par l'assureur, le contrat est annulé.
En cas de défaut d'assurance de l'auteur d'un accident, la victime est indemnisée par le Fonds de Garantie Automobile. Le Fonds, une fois les indemnités réglées à la victime, peut réclamer celle-ci majorées d'un pourcentage contre l'auteur des dommages (corporels et matériels). La victime ou l'auteur d'un accident grave a tout intérêt à se tourner vers un avocat spécialisé en droit routier qui saura le conseiller avant d'accepter toute proposition d’indemnisation ou procédure et définir une stratégie de défense.
L'homme grièvement blessé lors de la collision avec le véhicule de Palmade a déclaré lors de l'émission Sept à Huit « J’ai des douleurs tellement intenses que je suis épuisé, et que j’ai l’impression que mon cerveau va exploser. J’ai été opéré du ventre, des épaules, des jambes, des pieds. Je n’ai plus de sensations sur trois doigts. Quand je marche, les plaques que j’ai dans les jambes me font beaucoup souffrir. Même pour faire ma toilette et pour marcher, je dois demander de l’aide à mes proches ». Son fils « ne supporte plus ni le soleil, ni le froid. Il a des plaques dans la bouche, alors, quand il mange, ses mâchoires se fatiguent très vite. (...) Pierre Palmade a transformé notre vie en enfer. (…) Je ne veux qu’une seule chose : qu’il paye pour ce qu’il a fait ».
L’humoriste encourt jusqu’à 14 ans de prison et 200 000 euros d’amende pour « blessures involontaires avec incapacité supérieure à trois mois ». (...) Les préventions sont aggravées par la violation délibérée d’obligation de prudence au volant et l’usage de stupéfiants en récidive. L’humoriste a déjà été condamné en 2019 pour acquisition de drogue. La défense entend plaider l’absence de re-hausseur-auto pour enfant dans le véhicule, ce qui « a limité le rôle de la ceinture de sécurité qui bloque l’enfant au fond du siège. (...) Il a percuté avec plus de force le siège avant (…) La gravité des lésions est 21 % plus grave si l’enfant est ceinturé sans re-hausseur ». Une correction, une précision, une remarque, un retour d'expérience ?
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