Apologie de la drogue sur le Net !
C’est paru hier, chez Fluctuat.net. Un texte, signé du nom « d’Edouard », et intitulé « Y aura-t-il de la méphédrone à votre réveillon ? » et qui, sous couvert d’annoncer l’arrivée d’une drogue non anodine, en fait véritablement l’apologie au lieu d’en dénoncer les effets comme Rue89 l’avait clairement fait le 14 avril dernier déjà. Un texte qui tombe clairement sous le coup de la loi pour avoir glorifié cette arrivée comme le sommet actuel de la branchitude qu’il ne fallait surtout pas rater en cette fin d’année. En plein débat sur les lois restrictives, le dénommé « Edouard » tend la perche sans même se rendre compte que son texte est susceptible de poursuites judiciaires. Comment-at-on pu laisser passer tel texte, c’est bien là tout le problème ! Peut-on tout dire sur le net, la réponse, avec cette dérive grave, est donc clairement... non.

La loi en effet existe et son texte très clair : "la provocation à l’usage ou au trafic de stupéfiants, par la publicité ou l’incitation ou la présentation sous un jour favorable des produits classés stupéfiants, (quel que soit le support choisi : vêtements, bijoux, livres, etc.) est punie de cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende, même si l’incitation est restée sans effet (article L3421-4 du Code de la santé publique)". Or ce texte incroyable balancé en ligne tombe bien dans ce cadre de "présenter sous un jour favorable" uniquement. Nul part de phrases condamnant l'usage, nulle exergue pour prévenir des dangers : c'est bien une apologie et une apologie seule. Cet Edouard-là va certainement connaître bientôt les ciseaux d'argent de la censure et va s'en plaindre, peut-être bien : pour autant, peut-on raisonnablement laisser un tel texte en ligne, personnellement je dis non. Si l'auteur a comme admiration la carrière d'un Delarue, il devrait au moins se rendre compte des conséquences de ce qu'il a pu écrire. D'abord, en laissant entendre pour débuter son texte que "dans plusieurs pays la méphédrone est légale", ce qui est clairement une remise en cause de la législation française sur le type de drogue dont il parle. Il se serait un tant soit peu renseigné qu'il n'aurait pas écrit cela sûrement pas, même.
Car il aurait pu se renseigner davantage en effet. C'est toute l'Europe qui a décidé de la bannir en octobre dernier, après la France qui avait su réagir très vite face au danger potentiel : "la Commission européenne a préconisé le 20 octobre 2010 l'interdiction d'une drogue dangereuse, similaire à l'ecstasy, qui est toujours licite dans 12 États membres de l'Union européenne. Elle a invité les États membres de l'UE à mettre un terme à la diffusion en toute liberté de la méphédrone en Europe, par sa mise sous contrôle. La méphédrone est déjà illicite dans 15 États membres de l'Union. Cette drogue a été impliquée dans au moins 37 cas de décès au Royaume Uni et en Irlande." Une drogue justement bannie car elle peut tuer, donc : "deux décès dont la consommation de méphédrone apparaît comme la seule cause ont été signalés dans l'Union. Dans au moins 37 autres cas de décès au Royaume-Uni et en Irlande, de la méphédrone a été découverte dans les échantillons post mortem. La proposition que la Commission présente aujourd’hui interdirait la production et la commercialisation de la méphédrone, en la soumettant à des sanctions pénales dans toute l'Europe". Et voilà ce qu'on nous présente ce jour sur le net sur un ton badin comme plaisir supplémentaire pour le réveillon 2010 ? Mais quel scandale !
En France, c'est la vigilante Afssaps qui avait remis un rapport alarmant à la Commission nationale des stupéfiants et des psychotropes (CNSP) qui s’est prononcée, dès le 29 avril 2010, en faveur de l’inscription de la méphédrone sur la liste des stupéfiants à prohiber. Notre ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, ne tardant pas cette fois à réagir sur le sujet et à obtenir en juin son interdiction par voie d'un par arrêté ministériel publié au Journal Officiel dès le 11 juin 2010. La rapidité de parution est à mettre à son honneur, et ce doit être signalé. "C'est une victoire de la vigilance", se réjouit le docteur Laurent Karila, psychiatre au centre de traitement des addictions de l'hôpital Paul-Brousse de Villejuif." relevait Rue89 qui avait bien suivi le sujet avec plusieurs articles consacrés. Visiblement, l'intelligence fait donc défaut à notre "Edouard".
Notre "Edouard", lui, ne s'intéresse visiblement pas au journal officiel mais en effet à la branchitude, sur laquelle il présente sa thèse "élaborée" : "selon une loi bien connue, la courbe de branchitude est l'exact inverse de celle de la popularité. Tout ça pour dire que la coke, c'est ringard, toute la France en prend, de la crèche à la maison de retraite, et qu'à part à Thionville, il n’y a plus personne pour croire que "taper" c’est être dans le coup". Que vient faire la "crèche" de nourissons dans son délire pro-drogue, seule la justice tranchera je pense : on peut frimer, on peut jouer au prétentieux, mais notre rédacteur a déjà là franchi des bornes, c'est évident, qui ne sont même plus celles de la bienséance. "Le nouveau truc à la mode et que presque personne ne connaît (cf la loi ci-dessus) a un nom d’antidépresseur : la méphédrone" clame-t-il, histoire d'en faire un simple... médicament. Il n'y a pas que l'apologie, il y a aussi l'inconscience sur les dangers d'une drogue que toute une communauté médicale a mise au ban. Présenter l'usage de la cocaïne comme étant la norme dans une crèche... avouez que ce n'est pas que de la provocation !
Mais notre bloggueur n'en a pas encore fini avec les images douteuses. "Depuis quelques années, la France semble être sous une tempête de neige permanente : Au lycée, la première ligne se serait additionnée au premier pétard. Un ami me racontait récemment qu'à Guéthary, le village où Beigbeider a passé une partie de son enfance, même les vieux se floconnent le museau avant la traditionnelle partie de pétanque". On en est au stade journalistique du "on m'a raconté" : c'est comme ça aussi que naissent les légendes urbaines, et comme ça aussi que notre rédacteur du jour entraîne son lecteur vers son but : à savoir l'inocuité de la chose, puisque devenue "une habitude". C'est pervers et c'est ignoble, comme procédé. Ou d'une totale inconscience, ce qui revient au même.
Cet "Edouard" qui se prend visiblement pour un sous Alain Pacadis est capable de pire encore pour faire branché auprès de ses quelques lecteurs : "Alors tu tires (sur le spliff) ou tu (micro) pointes ? La coke est partout, même en couv' de L'Express qui lui a consacré récemment un large dossier. Bientôt, ce sera Okapi, Valeurs Actuelles ou Seniors Magazines qui titreront dessus"... Citer un magazine destiné à la jeunesse, après l'appel aux crèches, pour servir ses desseins de banalisation de la drogue, avouez qu'il y a de quoi bondir et surtout d'en ajouter à sa brouette de thuriféraire de l'usage des drogues, pourtant bien remplie, visiblement. "La coke est partout" en 2010, pour remplacer "Je suis partout" ? Il y a bien de sa part banalisation décrite et non dénoncée !
Et notre pseudo journaliste de continuer sa croisade délirante sans aucun souci du contenu de ses dires : "un collègue journaleux branchaga m'en avait déjà vaguement parlé il y a quelques mois. Depuis, une amie m'a dit qu'elle avait aussi testé récemment. En bon pro, je me dit que 2 personnes ça fait une tendance. Je décide donc d'écumer pour Flu les soirées en interrogeant ce phénomène à la manière d’un journaliste d’Envoyé Spécial". A noter le sommet de la branchitude de parler de "Flu" à la place de Fluctuat, qui va s'en souvenir de l'article avec les 75 000 euros d’amende qui lui pendent au Web pour incitation à la consommation cette fois...
Et notre pseudo reporter de continuer à vanter cette drogue pourtant interdite depuis le 11 juin en France. Apologie encore en effet, nette et sans bavures avec ce genre de texte : "avec du MDMA, je le tiendrais déjà dans mes bras en lui beuglant à l'oreille à quel point je le trouve cool. Avec de la coke, je ne lui aurais sans doute pas parlé d’autre chose que de moi. Avec la méph, je suis exactement entre les deux. Survolté mais cool. On m’avait parlé d’effet laxatif ("tu passes tout ton temps aux chiottes : la moitié pour sniffer sur la cuvette, l’autre assis sur le trône") que je ne ressens pas." Il y a bien ici une tentative de montrer l'absence totale de nocivité de cette drogue qui a tué et qui tuera encore : on a affaire à un total inconscient, ignorant des lois et du respect de la vie des personnes. Une attitude, c'est clair, qui tombe sous le coup de la loi.
Alors, devant une telle prose inconséquente et irresponsable, je me suis posé des questions ; notamment pourquoi-donc vouloir faire aussi branché, au point aujourd'hui de mettre en péril juridiquement l'existence du site ? Et la réponse je l'ai trouvée... sur le net. Au départ, à sa création, Fluctuat c'était ça : "Fluctuat.net diffuse sur le réseau un magazine de société original, dédié aux cultures numériques. Il est décliné en diverses rubriques relatives aux arts et à la culture d'aujourd'hui (Musique, cinéma, scènes, expositions, jeux vidéo...) et édite 9 blogs thématiques, des chroniques, des dossiers et des interviews. Le site propose également une newsletter, un forum, des radios thématiques musicales." Et puis en 2006, des hommes sont venus, attirés par le succès de l'entreprise. Le site a été racheté par Medcost, l'éditeur du site Doctissimo.fr, "qui compte ainsi élargir son positionnement auprès d'une cible urbaine, jeune et de catégories socio-professionnelles supérieures" nous apprend Wikipedia. Jeunes à hauts revenus ? Des clients évidents, me suis-je dis sur le sujet à scandale du jour !
Mais il y a mieux encore depuis deux ans : "depuis février 2008, le groupe Doctissimo qui édite Fluctuat appartient à Lagardère Active". Depuis quand les grands patrons de l'industrie française en sont-ils réduits à faire l'apologie de la drogue, pour faire marcher leur business, c'est la seule question que j'ai retenue au final. "La crise économique et publicitaire mondiale, sans précédent, qui a touché tous les continents et tous les médias en 2009, n'a pas épargné Lagardère Active qui tire une grande partie de ses revenus de la publicité. Face à cette crise, les efforts de rationalisation et d'amélioration de la performance conduits depuis deux ans ont été accentués dès l'automne 2008. Dans ce contexte, Lagardère Active a maintenu, voire renforcé, ses positions, avec des succès significatifs sur ses marques phares" pouvait-on lire sur le site de la maison mère. OK, très bien, félicitations, mais avec quelles méthodes, voilà bien toute la question... que l'on devra donc poser à Didier Quillot, responsable de Lagardère Active, pour sûr. Enfin, plutôt la brigade des stups' cette fois-ci, et pas moi. Au Palace Es-Saadi, tiens, qu'il fréquente, pourquoi pas (*).
(*) .... pour ceux qui l'ignoreraient, c'est à... Marrakech. Et ça a l'air assez couru. Même la Consule Générale de France connaît. Bigre. Que du people, visiblement.
le texte est là :
les textes de loi sont ici :
http://www.interieur.gouv.fr/sections/a_votre_service/drogue/loi-drogue/drogue-que-dit-loi/view
s'il est retiré, le voici sous forme de pdf sous l'article.
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