C’est Hippocrate qu’on assassine... Et l’humain, dans tout ça ?
C’est Hippocrate qu’on assassine…
Et l’humain, dans tout ça ?
Depuis le début de cette histoire, il y a les « pour » et il y a les « contre » le professeur Raoult. Je fais partie des « pour », comme une partie de mes proches, et comme tout le monde en France, cela me vaut régulièrement de me chamailler avec mes autres amis qui font partie des « contre »… Sudistes contre Yankees, catholiques contre protestants de cette satanée chloroquine.
Mes amis « contre » ne manquent pas de m’envoyer toutes les études qui sont censées prouver l’inefficacité du traitement raoultien, et pourtant je continue d’être pour. Même s’il finit par apparaître — ce qui n’est pas le cas à ce jour — que ledit professeur se serait trompé, que son traitement ne serait pas efficace.
En revanche, s’il y a bien quelque chose « contre » lequel je me sens, c’est le décret gouvernemental français du 26 mars 2020, qui interdit aux médecins de prescrire la chloroquine à leurs patients.
Pourquoi suis-je « pour » un médecin qui s’est peut-être trompé, et surtout « contre » le décret d’un ministre auquel la science donnera peut-être raison (ou pas) ?
Parce que ce décret me paraît tout simplement inhumain. L’espoir fait vivre, et priver les hommes d’un espoir, quand il n’y en a pas d’autre, me semble criminel. Non seulement parce que l’on sait les miracles que peut produire l’espoir de guérison sur la guérison elle-même — le fameux « effet placebo » —, mais parce que priver un homme d’espoir, c’est criminel en soi, c’est un crime du point de vue de l’humain.
L’effet placebo, selon certaines études et selon les pathologies, serait capable de guérir de 30 à 70% des patients, du simple fait qu’ils pensent avoir pris un médicament efficace, par un effet mystérieux qui fait que véritablement, l’espoir fait vivre, l’espoir soigne. Qui ne s’est pas senti soulagé, voire presque guéri, du simple fait d’être allé voir son médecin et d’être soigné, pris en charge, par celui qui sait et cherche à l’aider ? Qui n’a pas ressenti cette force que le médecin nous transmet et qui nous aide à guérir ? Inversément, la peur mène à la résignation, à l’autodestruction. Quand j’étais gosse, passait à la télévision un gros monsieur barbu, médecin, qui s’appelait Alain Bombard… Il racontait des tas d’histoires passionnantes sur ses expériences de survie en pleine mer et avait surtout montré, dans son livre Naufragé volontaire, que lors d’un naufrage, les gens meurent davantage de terreur et de désespoir, que de faim ou de soif. Je ne suis pas médecin mais l’expression « mourir de peur » me semble une réalité possible ; le désespoir fait abandonner la lutte. Le professeur Raoult a donné de l’espoir à des millions de gens, c’est un médecin qui lutte contre les peurs délétères de ses contemporains, et je l’admire déjà pour cela.
La deuxième raison qui me fait penser que ce décret est inhumain, est qu’il prive le médecin de la possibilité d’être humain. La conscience du médecin, ce serment d’Hippocrate qu’il prononce, l’enjoint à aider son patient : « je ferai tout pour soulager les souffrances ». Aider, faire quelque chose pour… juste de l’humanité, et la base de la médecine. Et là, un décret lui interdit de venir en aide, lui interdit d’essayer quoi que ce soit, lui interdit de prescrire un médicament qu’il pouvait prescrire deux mois auparavant, juste parce que son efficacité dans cette indication n’est pas prouvée par A+B. Mais qu’a donc fait la médecine pendant des millénaires, avant l’invention de l’étude randomisée en double-aveugle, si ce n’est tenter, essayer de soigner, et si possible de guérir, empiriquement, avec des drogues dont on n’était pas forcément sûr qu’elles fonctionneraient, mais en observant son patient et en réajustant le traitement selon ses observations ? Est-ce autre chose que l’art de la médecine ? L’intelligence des médecins, leur conscience, leurs longues études, leur expérience, leur intuition ne les rendent-elle pas dignes de notre confiance sur l’exercice de cet art ? Les médecins en seraient-ils réduits à appliquer bêtement ce que leur dictent les résultats des laboratoires ? Les médecins sont-ils en train de devenir des machines ?
Je ne suis pas médecin et l’on pourrait me dire que je ne sais pas de quoi je parle, mais il me semble que ce décret s’attaque à la racine de ce qu’est la médecine, de ce qu’elle devrait être, si le monde continue à être humain. Et je suis humaine, alors du point de vue de l’humain, je sais de quoi je parle.
Je ne suis pas médecin, mais je suis potentiellement patiente. Alors souffrir et mourir, oui, si l’on n’a pas le choix ; mais souffrir et mourir sans espoir et sans l’aide d’un humain, non, mille fois non. Si j’attrape ce virus, je veux être soignée, par un humain qui essaie de m’aider ; pas par un ordinateur, pas par un protocole, pas par une molécule qui a prouvé son efficacité après une étude randomisée en double-aveugle… Je veux être soignée.
Je ne veux pas me transformer en machine à être guérie, je ne veux pas voir mon médecin transformé en machine à devoir me guérir, je ne veux pas être une machine à vivre, à travailler, à payer des impôts, et à mourir quand je ne produirai plus assez. Je veux être une créature humaine, aimant, aimée, aidant, recevant, et donnant à d’autres créatures humaines.
Marie-Hortense Lacroix, être humain vivant en France
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