Comment améliorer les services de la SNCF ? Des idées qui tiennent... le rail !
La SNCF est une entreprise innovante. Le TGV en est le principal emblème à l’étranger. Combien de gens rêvent un jour de pouvoir monter dans le French TGV ?... Rires. Nous, les Français, nous savons à quel point c’est galère de prendre le train - TGV inclus. Nous sommes à cent mille lieues de comprendre ces touristes étrangers si enjoués à l’idée de monter ces quelques marches ou faire le petit saut qui sépare le quai de la voiture TGV aux fauteuils design French touch. Sommes-nous des éternels insatisfaits ? Sommes-nous râleurs ? Il y a peut-être du vrai là-dedans. Il faut toutefois reconnaître que la SNCF, loin de nous faire préférer le train, manque de... « simplicité »....
Simplicité. Le terme doit être expliqué par l'exemple : il m'arrive d'avoir un tarif 2nde classe loisir week-end heure de pointe ou un tarif 1ère 100% Prems heure creuse. Quel génie des tarifs ! Sûr que tous les tarifs inventés par la SNCF viennent d'un esprit malin sorti de l'X ou d'une autre grande école. Faut-il pour autant livrer aux "clients" une grille tarifaire inextricable variant parfois d'un euro sur un même trajet à une heure d'écart ? Procédons par paragraphes. Voici ce qu'il manque, ce qu'il faut changer, ce qu'il faut créer à la SNCF, parce que... oui, pourquoi ? Parce que ce n'est pas sexy, ce n'est pas moderne, ça ennuie tout le monde, ça fait sourire, etc.
Commençons par le plus hilarant : le langage
A maintes reprises, les annonces de la SNCF m'ont fait sourire. Rire bête ou moquerie ? Sans doute un peu des deux.
Entendu dans un TGV de Lyon à Paris, lors de l'annonce de bienvenue : "des agents de propreté passeront parmi vous durant tout le voyage", dit naturellement avec tout le sérieux du contrôleur. Esclaffement général dans la voiture. Chacun imagine ce qu'il veut : il me vient en tête l'image d'un agent de propreté demandant aux voyageurs de lever les bras pour y appliquer un déodorant.
Entendu à la gare de l’Est : « Mesdames et Messieurs, le TGV (…) va être mis à quai dans quelques instants. Nous vous communiquerons sa voie dès que possible ». Coluche disait des journalistes qui colportaient ce genre d’info : « quand on n’en sait pas plus que ça, on n’a qu’à fermer sa gueule ! »…
On nous bassine de mots inutiles : « l’équipe TGV, au nom de la SNCF, membre de l’alliance Railteam » Tu prends du jambon avec les épinards ? Tout le monde se contrefiche de ces infos, non ? « Les TGVs numéros quatre cinq cent soixante-sept et huit mille six cent trente six à destination de… » Aussi inutile, non ? « Le départ est imminent, attention à la fermeture automatique des portes, attention au départ ». Ne peut-on remplacer cela par un bref message du style « le train va partir » ? « Mesdames et messieurs, vous avez pris place à bord du TGV six mille deux cents soixante-dix-sept à dest…. ». Stop !...
Les contrôleurs ne peuvent-il donc s’empêcher de parler pour dire des choses inutiles ? Premier point à changer au plus vite : arrêter les discours conventionnels obligatoires. Laisser aux contrôleurs de l’autonomie et qu’ils soient quelque part libre arbitre de leurs interventions orales. Cela ne pourra qu’améliorer leur image auprès des clients.
Venons-en à ce qui énerve : la désorganisation chronique
Combien de fois ai-je entendu quelqu’un dire « j’ai payé plus de xx euros pour ce train et j’ai dû prendre au final celui d’une heure après car l’autre a eu un problème technique. J’ai voyagé debout » etc, etc. Tant de misères dans ce monde franco-français ! J’ai entendu ces plaintes à tous mes voyages récemment, conditions climatiques aidant.
Le marketing de la SNCF fonctionne un peu comme une cheminée dont la sortie est dans la pièce même : il étouffe et contribue à l’inefficacité de toute la compagnie. Comment dire ? Avez-vous déjà essayé de prendre un billet sur voyages-sncf.com ? Dans bien des cas, c’est super rapide, ok. Mais c’est là même toute l’illusion de regarder les résultats, la performance, avant la fin de la chaîne. On croit que ça marche bien. Si on gratte le vernis, on se rend compte que le système est totalement inefficace.
Je m’explique : vous avez acheté un billet échangeable : vous aurez la possibilité par le site (jamais essayé) ou en agence / au guichet de le faire. Vous partez plus tôt et vous vous dites : j’irai une heure avant à la gare pour changer le billet : grosse erreur ! La queue en gare est de trois heures. Votre billet n’est pas échangeable ? Deux possibilités. Vous avez du temps devant vous. Un ami vous a parlé du site troc des trains. Vous mettez le billet en vente via le site. Selon la théorie économique, ce site crée un marché virtuel (confrontation offre et demande) remédiant à la rigidité du premier marché (la vente directe de billets par la SNCF). L’existence de ce site est la démonstration même du malaise de la vente de billets en France. Deuxième solution : vous montez dans un train avec le mauvais billet. Dans certains cas, on vous dressera un procès verbal – à faire envoyer de préférence dans sa datcha au bord de la Mer Noire. Dans bien des cas, le contrôleur ne remarquera rien. Le billet comporte tellement de chiffres et d’éléments à regarder qu’il sera lui-même perdu (ou désabusé ?)
Il existe un nombre hallucinant de tarifs liés à l’heure et au jour du voyage, parfois à l’heure et au jour du retour, à la classe, au type de réduction et au type de train emprunté. J’oublie sûrement d’autres critères ! Le produit marketing s’est démultiplié par 20 ou 30. Dans chacun des cas, il ne s’agit « que » d’une place dans un train. N’est-ce pas bluffant ? Résultat : les guichets et les agences sont totalement inefficaces. Les voyageurs prévoient des voyages plus de trois semaines à l’avance quand l’avantage du train était justement la flexibilité. Les mêmes voyageurs passent plus de temps à revendre ou échanger les billets. Revendre : le temps perdu est celui du voyageur, passons. Echanger : c’est du temps perdu au guichet. Perdu, car cela ne rapporte pas d’argent à la SNCF. Au contraire, cela vient accroître la longueur des files dans les gares et exploser les salles d’attente des agences.
Il faut arrêter cette mascarade ! La SNCF doit revenir à une tarification plus simple.
Finissons par un peu de folie : mon projet pilote sur la ligne Paris – Lyon
Si j’étais embauché par la SNCF, voici ce que je réaliserais : un projet pilote sur la liaison Paris-Lyon en TGV. Tarif unique (sauf réductions sociales). Pas de réservation. Un train au départ tous les quarts d’heure ou toutes les vingt minutes. Un ticket en vente dans toutes les stations de métro, guichets et bornes. Un agent « gilet rouge » à la porte de chaque voiture en liaison directe avec ses collègues par talkie-walkie. Les voyageurs arrivent et se font orienter par les agents. Voiture 8 pleine ! OK, les agents le savent et réorientent les voyageurs en fonction. Le TGV approche le chargement max, on réoriente les voyageurs sur le TGV suivant – 15 minutes plus tard. Le train peut partir.
Un fonctionnement de navette : c’est là l’idée. Certaines liaisons ont tout le temps tellement de trafic qu’un service rapide et simple est approprié. La gestion est facile : pas de réservation, la borne d’échange devient inutile. Pas d’horaire à respecter pour le voyageur. Un imprévu ? Pas de souci, on prend le train suivant, sans qu’aucune démarche ne soit nécessaire. Les agents « gilet rouge » ont enfin un rôle et leur travail est reconnu. Les contrôleurs sont fiers de travailler pour une entreprise innovante sur le plan technologique ET commercial. Ils ne sont plus soumis à une direction directive les obligeant à débiter des âneries à tout bout de champ.
Vision idéaliste de la SNCF, certes. C’est là toute le bonheur des mots : pouvoir imaginer, concrétiser des idées.
Amis étrangers, nous sommes admiratifs du culte que vous vouez à la grande vitesse française. Comme le dit si bien la SNCF : « prenez le temps d’aller vite ». Pour vous, cela veut dire : ne vous précipitez pas, gardez-en une image naïve le plus longtemps possible. Pour nous, cela veut dire autre chose : luttez des heures pour obtenir un billet, et vous goûterez à la grande vitesse !
Prendre le train en France demande organisation puis débrouillardise. D’abord, la manie française de l’organisation à outrance : date, heure, numéro, tarif. Tout est défini, le client devient un numéro entré dans une case du système. Puis l’imprévu ou l’organisation « latine » : l’heure ne correspond pas ou plus, tel train est supprimé, tel place est doublement réservée, tel train est en retard, la correspondance n’est plus assurée, etc. Tout est dit. Alors, ça y est, on la modernise, cette bonne vieille SNCF ?
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