Contre le libre-échange à l’américaine
"The Euro-Russia row as a result of an overlap between two economic unions : lessons for a multipolar world in the wake". Sub-themes : . the right of a region to organise its free-trade area . the question of borders and limits of such free-tarde areas . questioning free-trade as a sound principle for the articulation among regional economic unions . global multipolarity and the reinvention of globalisation "
Ces questions ont été posées, à fin de discussion, par nos amis de LEAP/E2020 . Nous y répondrons en les résumant sous le titre suivant (texte provisoire) :
Les peuples du monde peuvent ils accepter de se faire imposer un libre échange à la mode américaine ?
- « US FTA Negotiations as of May 2008 » par Taifarious1 sur en.wikipedia - Public domain via Wikimedia Commons
- http://en.wikipedia.org/wiki/United_States_free_trade_agreements#mediaviewer/File:US_FTA_Negotiations_as_of_May_2008.png
Quelques définitions :
* On nomme généralement libre-échange le processus supprimant toutes les barrières aux commerces et aux activités productives entre espaces géopolitiques se voulant indépendants les uns des autres. Ces barrières peuvent être douanières, fiscales, mais aussi et de plus en plus réglementaires.
* On considère généralement que ces barrières visent à protéger les activités nationales de la concurrence extérieure. Elles sont généralement dites protectionnistes, le terme étant entendu de façon péjorative : protéger des activités qui refusent la confrontation sur un marché plus large, par un souci égoïste de conservation d'intérêts locaux non fondés. Elles ont souvent aussi un objectif plus élevé. Un pays peut se doter de règlements interdisant par exemple l'importation de produits agricoles jugés dangereux pour la consommation.
* Le libre échange a été historiquement présenté comme une valeur absolue, par les écoles d'économistes se voulant précisément libérales. Mais dès le 19e siècle, les théoriciens ont admis la légitimité de protéger, au moins temporairement, des industries naissantes incapables d'affronter des concurrentes étrangères plus développées.
* On constate généralement que la généralisation du libre-change provoque une amélioration des conditions de production et des niveaux de vie au profit de chacun des partenaires ainsi associés. Encore faut-il pour cela que chacun d'eux puisse disposer d'atouts, fussent-ils différents mais le mettant à égalité avec les autres. Ainsi un pays à forte compétence agricole pourra-t-il commercer sans barrière protectionniste avec un autre à forte compétence industrielle, d'une façon bénéficiaire pour les deux, dans la mesure où les termes de l'échange sont globalement équilibrés.
* L'histoire économique et politique du monde montre cependant que ces conditions se rencontrent rarement. En fait, des pays plus « avancés » à des titres divers, ont généralement imposé aux pays moins avancés, non seulement d'accepter les produits du pays avancé, mais de renoncer aux leurs propres. Ce fut de cette façon que dès l'Antiquité les sociétés disposant d'atouts supérieurs aux autres ont pu coloniser (c'est-à-dire réduire en servitude) voire faire disparaître des sociétés en étant restées à des modes plus anciens de production et d'échange.
On considère généralement que les pays disposant de diverses supériorités économiques ou techniques les doivent à leur courage et à leurs sacrifices. C'est parfois vrai, mais le mérite, aussi grand qu'il soit, ne peut compenser des situations géographiquement ou démographiquement défavorables. Les Américains, qui ont prospéré sur des territoires plusieurs fois plus étendus que ceux de concurrents asiatiques, en terme de superficie rapportée aux effectifs de la population, n'ont pas eu grand mérite à construire leur domination. De même, des pays ravagés par les guerres perdent nécessairement beaucoup de puissance compétitive, surtout si ces guerres leur sont imposées par des affrontements qui les dépassent.
Quelques considérations géopolitiques
Appelons géopolitiques les questions où la situation géographique (au sens très large) d'un pays détermine en grande partie les choix de politique économique de ce pays, et plus particulièrement son désir de s'inscrire dans un espace de libre-échange partagé.
* Historiquement, il est indéniable que le libre échange s'est étendu à de larges portions de territoires, à partir de régions, au Moyen-Age et sous l'ancien régime (en Europe) se caractérisant par de multiples féodalités et régionalismes fermés les uns par rapport aux autres. Lorsque se sont constitués de grands Etats nationaux unitaires sur le modèle de la France, les particularismes des cités et des provinces ont reculé face à un pouvoir central imposant à tous les mêmes règles. Il s'en est suivi qu'au sein de cet espace commun, les régions riches se sont encore enrichies du fait des migrations venant des régions pauvres. Cependant, l'Etat a souvent compensé ces déséquilibres par des politiques volontaristes de redistribution, et la mise en place de services publics égaux pour tous.
Dans les Etats de type fédéral, le mouvement unificateur a été plus limité, se heurtant à la volonté qu'ont eu les Etats fédérés de conserver des restes de frontières, enfermant des usages ou des avantages considérés comme inhérents à leur culture. Sur les grandes questions communes, l'Etat fédéral a imposé ses propres normes, mais des spécificités d'un Etat fédéré à l'autre ont été conservées. Ce fut le cas aux Etats-Unis ou même en Allemagne. En Chine ou en Inde, les compétences et spécificités régionales ou locales sont demeurées encore très importantes aujourd'hui.
* Dans les ensemble pluri-étatique dits aussi régionaux, dont l'Union Européenne offre l'exemple le plus achevé, l'harmonisation se traduisant par des législations communes et la disparition des frontières intérieures est considérée comme un objectif globalement souhaitable, mais sous de multiples exceptions et réserves. Le domaine de la monnaie commune, avec la création de l'euro, offre un exemple, d'ailleurs encore imparfait, d'abaissement des barrières entre Etats. Il en est de même des mouvements de personnes physiques et de marchandises, le libre échange s'étant imposé au sein d'une grande partie des Etats membres.
D'une façon générale, cette situation n'a pas été acceptée sans résistances. Les Etats pauvres se sont plaints d'être envahis par les production des Etats plus développés, ce qui a provoqué un certain nombre de migrations intérieures. A leur tour, les Etats plus riches se sont plaints de cette mobilité interne à l'Union, entrainant un alignement vers le bas des salaires et protections sociales (cf. le cas devenu emblématique du plombier polonais, aujourd'hui remplacé dans les imaginaires par un émigré roumain). Les rééquilibrages volontaristes, à base de transferts de ressources fiscales et d'extensions réglementaires, ont joué un rôle important lors de l'extension des frontières de l'Union depuis le noyau dur initial des 6 Etats fondateurs jusqu'à la constellation actuelle de 27 Etats dotés de situations économiques et de niveau de développement disparates. On considère cependant généralement qu'il s'agit du prix à payer pour faire de l'Europe une puissance globale aussi autonome que possible vis-à-vis du reste du monde.
* L'abaissement des frontières et la généralisation du libre échange se sont cependant arrêtés aux frontières de ces grands ensembles régionaux, Union européenne, fédération de Russie, Etats-Unis d'Amérique, Inde et Chine notamment. Chacun de ces ensembles a voulu protéger ses traditions et ses atouts propres en évitant de s'ouvrir, sauf cas marginaux, aux mouvements de biens, de personnes et de culture en provenance des autres. Les personnes qui prêchaient pour une ouverture et un libre échange étendus à l'ensemble du monde, se sont vite heurtées aux réalités. Il n'existe pas d'institutions internationales assez fortes pour imposer une harmonisation d'ensemble à des pays de taille, de puissance, de démographie et finalement de développements aussi différents, aussi inégaux qu'ils le sont actuellement. Les sociologues considèrent généralement que ce refus d'un libre-échange global relève du bon sens. Sauf dans des cas très particuliers, pouvant mettre en jeu l'avenir même de l'humanité (grandes pandémies notamment) l'harmonisation mondiale des pratiques et des idées a été repoussé à un lointain avenir.
* Il s'ensuit que chaque grand ensemble régional a conservé le droit d'organiser à son gré ses activités intérieures et la cartographie de ses frontières internes. De même, les frontières externes entre ces grands ensembles sont généralement reconnues comme, sinon intangibles, du moins très difficiles à faire évoluer. Ce fut seulement lors des deux dernières guerres mondiales que des modifications importantes de frontières ont été décidées, imposées d'ailleurs aux vaincus par les vainqueurs, autrement dit ne résultant pas de négociations entre puissances sur un pied d'égalité. Aujourd'hui, il est évident que ces frontières artificielles, tant en Europe qu'au Moyen Orient et en Afrique, se heurtent aux particularismes renouvelés des cultures et des intérêts. Nul esprit sensé n'envisage donc sérieusement la mise en place d'un monde a-polaire, selon l'expression dorénavant utilisée. Il s'ensuit qu'au niveau du monde global, le concept de libre-échange généralisé demeure utopique.
* Concernant le libre-échange lui-même, on constate que les conditions le rendant désirable pour les diverses parties concernées sont rarement réunies. Ceci parce qu'une égalité de situation entre ces parties ne se rencontre que rarement. Il faut se persuader en effet que le libre-échange, quand il est mis en oeuvre, résulte toujours de la domination d'un fort sur un faible. C'est le fort qui veut ouvrir les frontières du faible à ses produits et à son influence, c'est le faible qui veut se protéger contre ce qu'il ressent comme une agression économique ou culturelle. Le faible a-t-il tort de vouloir se protéger, manquant ainsi l'occasion d'évoluer et progresser sous l'influence du faible ? Peut-être, mais ce n'est pas au fort d'en décider. C'est au faible.
La domination américaine
Les considérations qui précèdent peuvent servir à comprendre pourquoi les pays européens, dans leur ensemble, ne s'engagent qu'avec beaucoup de résistance dans les négociations visant à établir un « libre-échange » transatlantique entre eux et la puissance américaine. Ceci que ce soit en termes d'économie générale (TTIP, pour Transatlantic Trade and Investment Partnership ) ou en ce qui concerne le commerce des services (TISA pour Trade in Services Agreement ). A la suite d'une longue histoire de rapports de force entre l'Amérique et l'Europe, ayant commencé à la fin de la 2e guerre mondiale, les Etats-Unis ont acquis une domination presque absolue sur les Européens dans tous les secteurs importants concernant ces deux domaines. De plus, contrairement à ce que l'on dit souvent, cette domination, loin de régresser, ne cesse de s'étendre. Au point que les experts sérieux se demandent aujourd'hui si les Européens seront un jour capables d'y échapper. D'où la nécessité qu'il y aurait eu à refuser de s'engager dans de telles négociations et, puisqu'il est désormais trop tard, de refuser d'adopter leurs conclusions. Ce sera en tous cas aux parlements et gouvernements d'en décider, non à la Commission
Les chroniqueurs politiques font valoir les nombreux reculs qui auraient affecté ces dernières années la puissance américaine, à la suite d'ailleurs en partie de décisions catastrophiques prises par Washington dans le domaine diplomatique et militaire. Il s'ensuit, au plan budgétaire, que d'importantes restrictions de crédit frappent dorénavant les secteurs dépensiers américains. On fait valoir parallèlement que dans le même temps, des puissances rivales, celles du BRICS, essentiellement la Chine d'ailleurs, se sont dotées de capacités nouvelles. Mais les observateurs un peu avertis constatent qu'il n'en est rien. La puissance américaine est aujourd'hui plus marquée encore qu'elle ne l'était hier.
* Ceci se manifeste d'abord dans le domaine des technologies numériques, qui sont aujourd'hui les clefs pour une domination du monde 1) . Depuis les années soixante, l'Amérique s'y est affirmée, pratiquement sans résistance des Européens, excepté le trop éphémère Plan Calcul français de 1966. Ceci en ce qui concerne les matériels, les composants électroniques, les logiciels, l'intelligence artificielle, la robotique autonome. Aujourd'hui, il s'agit de maîtriser les données (big data) et surtout espionner la totalité des échanges, aussi bien au plan civil que militaire. Parmi les « géants du web », tous américains, le plus représentatif est Google. Il travaille directement avec les agences de renseignement américaines CIA et NSA, à qui il fournit les données personnelles naïvement confiées par les usagers. Il nourrit des ambitions quasi millénaristes, visant à devenir le cerveau artificiel du monde et proposer à ceux qui pourront les acquérir les moyens de prolonger presque indéfiniment leur vie. Cela peut paraître comique. Ce ne l'est pas du tout, aux yeux de ceux qui se tiennent informés. D'autres nations-Etats, en premier lieu la Chine, essayent de réagir. Mais il leur faudrait investir des trillions de dollars pour revenir – à supposer que cela soit possible - au niveau des Etats-Unis.
* La puissance américaine s'affirme également dans tous les domaines du militaire et de la défense : possession d'une flotte et d'une aviation sans rivales, détention de nombreuses bases dans le monde, investissements de recherche sous l'égide de la Darpa, peu connus parce que couverts par le secret, mais présents dans tous les secteurs de la science fondamentale et des recherches appliquées, maîtrise presqu'absolue enfin du domaine spatial (full spatial dominance). La encore, les efforts de la Russie et de la Chine, notamment, pour disputer cette domination, seront longtemps loin du compte.
On fait valoir que tous les équipements évoqués ci-dessus sont aujourd'hui de peu d'utilité face à ce qui est nommé la guerre de 4e génération, celle du faible au fort. C'est évidemment faux. Quelques attentats ici et là, quelques IED, n'inquiètent pas plus la superpuissance qu'une piqure de moustique n'inquiète un éléphant. Ils lui donnent au contraire, sous prétexte de lutter contre le terrorisme, les moyens de contrôler ou détruire les moindres contestations.
* En ce qui concerne la compétitivité des entreprises, agricoles, industrielles et commerciales, les Etats-Unis ne se distinguent pas du commun. Ce n'est pas le cas en ce qui concerne la banque, les assurances et autres services financiers. Ce secteur omniprésent, bien organisé et soutenu activement par la banque fédérale de réserve (FED), ainsi que les moyens dont elle dispose pour manipuler le dollar, constitue une force de frappe mondiale sans rivales. Le secteur des médias, presse, cinéma, télévision est par ailleurs largement dominé par les entreprises américaines.
* Un autre point important de la puissance américaine réside dans les relais et complicités qu'au fil des années elle s'est acquise au sein de ce que peut appeler les élites dirigeantes du reste du monde. Ceci bien entendu en Europe, par l'intermédiaire des institutions européennes proprement dites ou des Etats membres, mais aussi dans les pays du BRICS, notamment en Russie. Par élites, on désigne désormais les 5% d'ultrariches et ultrapuissants qui exercent de fait le pouvoir, quel que soit le régime politique, démocratique ou autoritaire, caractérisant un pays. On les retrouve dans l'économie et la finance, mais aussi dans la sphère politique et dans les médias. Ces élites sont sous influence, on pourrait dire plus brutalement corrompues de fait, par leurs homologues américaines.
Le libre-échange au service de la domination américaine
Si nous revenons ici aux propos précédents relatif aux mécanismes et motivations du libre-échange, il est clair que celui-ci constitue pour la domination américaine, mieux encore que la puissance militaire, le moyen de s'imposer aux entités politiques et Etats qui en acceptent le principe, au lieu de se protéger par des mesures restrictives.
* Dans le domaine industriel et plus généralement économique, l'abandon de mesures protectionnistes par les Etats acceptant la règle du libre-échange se traduit généralement par des pertes de compétitivité, sinon par des disparitions d'entreprises à grande échelle. Dans la meilleure des hypothèses, les entreprises autochtones, comme c'est encore le cas en Inde et en Chine, peuvent devenir sous-traitantes des firmes américaines, mais ce sont évidemment celles-ci qui conservent l'essentiel des bénéfices et des acquisitions de compétence. Cela leur permet de partir à l'assaut de nouveaux secteurs, notamment en ce qui concerne les produits et services émergents. Les mesures protectionnistes dont l'Amérique impose l'abandon ne concernent pas seulement les droits et taxes divers, mais les réglementations dont se sont dotés les Etats, à la suite de longs combats menés en particuliers par les syndicats et les organisations dites citoyennes, pour obtenir des protections en matière de droits sociaux, de santé publique ou, plus largement d'activités dites stratégiques.
* Deux points importants sont à souligner, qui suscitent évidemment beaucoup d'inquiétudes chez les pays dominés. Dans les secteurs soumis à des accords de libre-échange, s'imposent la liberté d'investissement et le recours, en cas de contestation, à des tribunaux spéciaux échappant au droit commun de chacun des pays. Pour prendre un exemple souvent évoqué, un peu caricatural, mais qui se retrouvera très fréquemment sous des formes moins visibles, dans un pays dont le droit antérieur aux accords interdisait l'usage d'OGM dans l'alimentation, toute entreprise souhaitant fabriquer des OGM pourra désormais investir en ce sens. De même, en cas de conflits entre utilisateurs d'OGM et réglementations antérieures les interdisant, l'entreprise ou la personne s'estimant lésée par l'interdiction pourra saisir des tribunaux spéciaux chargés de faire appliquer le nouveau droit. Il s'agira le plus souvent de tribunaux composés d'arbitres non soumis aux contraintes déontologiques et au droit des juridictions des pays concernés. On a vu en France, dans l'affaire Tapie, ce que peut valoir l'indépendance d'un tribunal d'arbitrage ad hoc, fut-il composé de hauts fonctionnaires.
* Plus spécifiquement, les cibles des promoteurs du libre-échange au service de la domination américaine ont toujours été les services publics, présentés comme de dangereuses survivances d'un totalitarisme marxiste. Il s'agit en fait de tout ce qui constitue le patrimoine et la spécificité d'une nation, disons même d'une civilisation : administrations publiques étatiques ou locales, universités et établissements d'enseignement publics, entreprises publiques de santé (secteur hospitalier, maternités, établissements de retraite...), services publics industriels et commerciaux (transports, énergie et eau...), services publics culturels et de création, puis aujourd'hui de plus en plus le secteur de la défense au sens le plus général. La France s'était félicitée récemment d'avoir obtenu la mise hors des négociations du TTIP des industries du cinéma. Il ne s'agissait que d'une petite pierre dans l'ensemble riche et diversifié de l'univers des services publics évoqué ci-dessus.
* Les avocats du libre-échange et de la dérégulation, au service de la domination américaine, font valoir que des entreprises industrielles et commerciales privées pourront reprendre en charge toutes les missions des services publics. C'est inexact. Les nouveaux services privatisés, nécessairement payants, ne seront accessibles qu'aux plus fortunés. D'autres, bien plus nombreux, seront abandonnés ou confiés à des fondations charitables très sélectives. De plus, les services privatisés reviendront finalement plus chers à la collectivité que ceux du secteur public. C'est ce que démontrent tous les jours en France les PPP (partenariats publics-privés). C'est aussi ce que démontre la privatisation des activités militaires ou de police. Non seulement les entreprises privées qui bénéficient à cette fin des contrats de l'Etat sont plus coûteuses que l'armée et la police traditionnelles, mais elles abandonnent vite toute déontologie professionnelle. Il faut bien vivre, n'est-ce pas ?
Les pays sous-développés ou en développement ont toujours été les victimes du démantèlement et de la privatisation de leurs institutions traditionnelles, dont certaines pourtant venaient du fond des âges. Mais dorénavant ce sont les Etats plus développés qui sont visés, en premier lieu les Etats européens, dans la cadre des projets de TTIP et de TISA. Les pays asiatiques n'y échapperont pas, puisque les Etats-Unis leur ont imposé de s'engager dans des négociations analogues, dites transpacifiques. On remarque significativement par ailleurs qu'aux Etats-Unis même, les administrations des états fédérés sont elles-aussi les premières cibles des promoteurs de la dérégulation. Elles s'y opposent de plus en plus, avec l'appui de la population pauvre, ce dont profitent des partis anti-fédéralistes ou ceux qualifiés de « populistes ».
Conclusion. Est-il possible de résister aux offensives du libre échange à l'américaine ?
Nous en sommes persuadés. Mais comment s'y prendre ? L'Europe deviendra-t-elle suffisamment majeure pour s'y efforcer, notamment à l'occasion des négociations menées en son nom dans le cadre du TTIP et du TISA par une Commission européenne pénétrée par les lobbies atlantistes ? Ce ne seront en tous cas pas les élites européennes ni les gouvernements qui s'engageront en ce sens. Ce ne pourraient être que des militants de la base dans le cadre d'initiatives politiques citoyennes. Mais les citoyens ont-ils les informations nécessaires pour se rendre compte des risques et se battre pour imposer des solutions ?
A plus long terme, pourrait-on envisager que des négociations entre les Européens et les pays du BRICS, voire la constitution d'accords stratégiques dits euroBRICS, puissent être une voie pour échapper à la domination américaine décrite dans cet article ? Comment alors s'organiserait un nouveau multilatéralisme ? Il ne faudrait évidemment pas que la domination américaine soit remplacée dans un lointain futur par une domination chinoise ou indienne. Le risque cependant serait infime car les Européens disposeraient alors de suffisamment d'atouts pour jouer le jeu de l'ouverture sur le plan de la réciprocité, à l'avantage de l'ensemble des parties.
Nous examinerons peut-être ces questions difficiles, mais qui sont loin d'être sans solutions, dans un article ultérieur.
Note
1) voir entre autres articles sur notre site Europe solidaire : Internet est contrôlé par les Américains. Est-il encore temps de réagir ?http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=1410&r_id=
Ainsi que Le prochain goulag, celui de l'Internet des objets http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=1399
Ainsi que sur notre site automates intelligents La suprématie américaine sur les réseaux toujours plus affirmée http://www.automatesintelligents.com/echanges/2013/nov/reseaux_usa.html
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